Les Cahiers de l’AARS No. 19 2016-2017
Table des matières
Mohamed Benhamdoune & Jean-Louis Bernezat L’abri de l’ăġelmam de Wa-n-Telōkat, Immīdir (Parc National et Culturel de l’Ăhaggar)………………………… 7 Friedrich Berger Zur Lage von Jam………………………………………………………………………………………………………… 13 Jean-Louis Bernezat L’abri Khamdi Sidha, Ăhélakan occidental (Parc national culturel du Tassili) …………………………………… 21 Christian Dupuy Chars sahariens préhistoriques et araires africains actuels. I. L’alimentation des animaux de trait …………… 29 Mohssine El Graoui & Susan Searight-Martinet
Contribution à la connaissance de la céramique néolithique du sud-marocain : le site de l’Adrar n’Metgourine … 45
Yves & Christine Gauthier, Francis & Françoise Auvray Nouvel abri orné au Borkou (Tchad septentrional) …………………………………………………………………… 49 Yves & Christine Gauthier Éole, le mauvais élève de la classe ? Remarques sur les peintures dites « archaïques » en Ennedi …………… 69 Du nouveau en Ennedi (Tchad) : remarques sur la chronologie des personnages du type «Niola Doha » … 105 Yves Gauthier & Jérôme Gayet Une pipe gravée en Ennedi (Tchad) …………………………………………………………………………………… 119 Pascale Hégy
Le site à peintures rupestres de Kéléo I (Ennedi, Tchad) ……………………………………………………………… 121
Benoît Hoarau, Abdelhadi Ewague & Laurent Auclair Telouet: un jalon dans la chronologie des images rupestres du Haut-Atlas Marocain …………………………… 139 Nicole Honoré Un aspect de la vie pastorale au Sahara néolithique : les signes du corps ………………………………………… 151 Julien d’Huy Matriarchy and prehistory : a statistical method for testing an old theory………………………………………… 159 Gérard Lachaud Ethnographie du Sahara : les armes traditionnelles des peuples nomades …………………………………………… 171 Suzanne & Gérard Lachaud À propos de quelques représentations rupestres situées au Grande Riparo (région d’Archei, Ennedi, Tchad) … 193 Fabio Maestrucci & Gianna Giannelli Montagne e spiriti del Sahara. Dall’Idinen ai Kel Essuf ……………………………………………………………… 211 Mahmoud Marai & Hardy Böckly Rock-Art sites and dry monuments in the Erdi. A journey through Northeastern Chad. ……………………… 221
Alain Rodrigue Nouvelles gravures rupestres dans la région de Foum Zguit (Maroc) ……………………………………………… 237 Ursula Steiner & Friedrich Berger Rings of stone circles in the Western Desert of Egypt. Addendum ……………………………………………… 241 Ursula Steiner & András Zboray New rock art sites in the Wadi Wassa (Southern Gilf Kebīr) ………………………………………………………… 243 Claude-Noëlle Vaison Gravures rupestres du plateau des Eglab (Nord-Ouest du Sahara algérien) ………………………………………… 247 Robert Vernet, Boutar ould el-Arby, Wim Van Neer, Veerle Linseele, Jean-François Saliège & Annabelle Gallin Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale à l’Holocène moyen
(Nouadhfat, Aouker occidental) ……………………………………………………………………………………… 253
András Zboray Four elephant hunt scenes among the Iheren style paintings of Taġelahin,
Ăharhar Tasset and Tamrit (Tasīli-n-Ăjjer) . ………………………………………………………………………… 275
Notes de lecture ……………………………………………………………………………………………………………… 283 Carnets …………………………………………………………………………………………………………………… 299
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Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale à l’Holocène moyen (Nouadhfat, Aouker occidental) Robert Vernet *, Boutar ould el-Arby ◊, Wim Van Neer •, Veerle Linseele¥, Jean-François Saliège†, Annabelle Gallin ¤ Résumé : En Mauritanie occidentale, le site de Nouadhfat, au nord-est de Nouakchott, est essentiel, tant pour la connaissance des paléoenvironnements holocènes que pour celle du Néolithique. Le site se trouve à proximité d’un important paléoréseau hydrographique et sur le rivage d’un vaste paléolac marqué par des diatomites, des gastéropodes d’eau douce et des pistes animales imprimées dans la boue. L’habitat fut occupé par des chasseurs-cueilleurs, des pêcheurs (présence de harpons) et des éleveurs, qui profitèrent d’un milieu évoluant progressivement vers moins d’humidité : une première fois au Néolithique moyen (autour de 6400 cal. BP), puis plus récemment (3900 – 3300 cal. BP), après une crise aride très marquée. Nouadhfat, qui est le site le mieux daté de la région, s’inscrit dans un ensemble d’une grande richesse sur au moins quatre millénaires. La caractéristique principale de ce groupe est sans doute l’existence de nombreuses cultures, qui se sont succédé ou ont cohabité, avant que la limite septentrionale du Sahel ne se décale nettement vers le sud.
Abstract : The Nouadhfat site, north-east of Nouakchott, in western Mauritania, is essential, both for a knowledge of Holocene palaeoenvironments and for the Neolithic. The site is near an important hydrographic palaeonetwork and on the bank of a vast palaeolake marked by diatomites, freshwater gasteropods and animal tracks printed in the mud. Fishing was intensively practiced (presence of harpoons). The habitat was occupied by hunter-gatherers, fishermen and stock-breeders who took advantage of a milieu evolving progressively towards less humidity : first of all in the Middle Neolithic (around 6400 cal. BP), then more recently (3900 – 3300 cal. BP), after a very marked arid crisis. Nouadhfat, which is the region’s best dated site, fits into an extremely rich ensemble for over at least four millennia. The main characteristic of this ensemble is without doubt the existence of numerous cultures, which followed each other or which lived together, before the northern limit of the Sahel shifted distinctly southwards.
* Chercheur associé à l’Institut Mauritanien de Recherches Scientifiques. ◊ Département d’Histoire, Faculté des Lettres, Université de Nouakchott. • Royal Belgian Institute of Natural Sciences, Vautierstraat 29, B-1000 Brussels, Belgium. ¥ chercheuse postdoctorale au FWO-Flandre ¤ LabexMed, MMSH, Aix-en-Provence.
En Mauritanie occidentale, l’attention des préhistoriens s’est focalisée sur le littoral et ses amas coquilliers. Les plaines intérieures, constituées d’une succession de longs cordons dunaires et d’interdunaires au sol stable, orientés NE – SW, ont été négligées — sauf par les pilleurs de sites. Le seul site à avoir été publié est celui de Khatt Lemaïteg, un habitat essentiellement sédentaire de très grande taille, occupé entre 3700 et 3200 cal. BP (Bathily et al., 1998). Mais il existe, en réalité, bien d’autres sites, entre la deuxième moitié du VIIe millénaire cal. BP et le début du IIIe, tant au nord-ouest (Tasiast et Tijirit) que plus à l’est (Inchiri et Aouker occidental, au sud de l’Adrar) ou dans la région de Nouakchott. Celle-ci a déjà fait l’objet d’une cartographie détaillée de ses 1500 sites, approximativement dans une zone de cent kilomètres de côté (Vernet & Georis- Creuseveau, 2001). De nombreux habitats ont été inventoriés et certains datés (Vernet, en cours). Les paléomilieux ont pu être précisés. Deux sites, Tin-Yourgat et, surtout, Nouadhfat, datés entre le VIIe et le IVe millénaires, ont en particulier fourni une abondante céramique et de nombreux éléments de faune consommés (Fig. 1). Dans cet article la céramique et la faune de Nouadhfat seront présentés en détail, ce qui * Auteur correspondant. Courriel :
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Cahiers de l’AARS — n° 19 (2016-2017), p. 253-274.
Fig. 1. Localisation des sites étudiés.
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Robert Vernet et al. permettra de dresser un tableau général de l’économie et des modes de vie du Néolithique moyen et récent régional, et de caractériser le milieu naturel local. A. L’évolution climatique du sud-ouest du Sahara à l’Holocène (Maley et Vernet, 2013; Vernet, 2007: chap. 2) L’optimum climatique de l’Holocène ancien dure jusque vers 8800 cal. BP, avec un pic vers 9500 cal. BP. Le Sahara est largement plus arrosé, la pluie pénétrant à la fois par le nord en hiver et par le sud en été. L’isohyète 400 mm atteint la latitude 21° nord. La steppe saharienne est remplacée par un paysage végétal à affinité soudanosahélienne comprenant notamment dans sa flore le micocoulier (Celtis integrifolia). C’est à cette époque que les réseaux hydrographiques et les nombreux lacs sont le plus longtemps fonctionnels. L’optimum climatique se termine par une crise aride très marquée entre 8250 et 7700 cal. BP. Les conditions hydrologiques sont déficitaires et les lacs évoluent en sebkhas. À l’Holocène moyen se produit un basculement climatique général dans la zone nord-tropicale : à une double saison des pluies succède un système où alternent une longue saison sèche tropicale et une saison des pluies estivale due à la remontée de la mousson africaine. Une instabilité périodique apparaît, les plans d’eau montrant des oscillations nombreuses et complexes. Une végétation sahélienne et soudano-sahélienne se développe sur tout le Sahara méridional. En Mauritanie occidentale, outre les sites de Nouadhfat et de TinYourgat, plusieurs études de sites illustrent bien le nouveau milieu : — bien que comptant très peu de restes, la faune de Berouaga (8050-7200 cal. BP), à l’est de Nouadhibou (Jousse et al. 2003), est constituée d’une part d’éléments de milieux arides et semiarides, vivant actuellement dans ou en bordure du Sahara, comme notamment la gazelle dama (Nanger dama), ou encore dans le Sahel comme le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum) ; et d’autre part de témoins d’environnements végétaux et hydrologiques plus riches, le buffle (Syncerus caffer) et le cobe des roseaux (Redunca redunca) ; — la sebkha de Chemchane, dans l’Adrar, à la charnière géographique du nord et du sud de la Mauritanie à cette époque, montre une couverture continue herbacée et arborée, à espèces sahéliennes et soudaniennes, proche de celle que l’on trouve aujourd’hui vers 15° et 16° de latitude nord (Lézine 1993: 29-30. Cf. aussi Giresse et al. 2012) ; — la faune de l’Oum Arouaba, dans la même région, se compose de : bivalve (Aspatharia), perche du Nil (Lates niloticus — poisson qui peut atteindre plus d’un mètre de longueur et exige 254
des eaux profondes et bien oxygénées) accompagnée de trois fragments de harpons, crocodile (Crocodylus niloticus), hippopotame (Hippotamus amphibius), phacochère (Phacochoerus aethiopicus) et bovidés (Chamard et al. 1970). La crise aride de la fin de l’Holocène moyen (4700-4450 cal. BP) : après 5700 cal. BP, les cours d’eau du sud-ouest saharien n’atteignent plus l’Océan. À partir de 5150, une phase de réchauffement très marquée des températures de surface de l’Atlantique au large de l’Afrique de l’Ouest, et l’établissement d’une dérive littorale qui commence à fermer le golfe de Ndramcha et modifie l’embouchure du Sénégal à partir de 4900 (Monteillet 1986), signalent une augmentation de l’aridité et une modification du régime des vents. Vers 4750 cal. BP, une crise climatique très forte — on ne trouve plus de datations radiocarbone sur sédiments lacustres pendant deux siècles — est illustrée par des changements radicaux dans le peuplement humain. Un dernier optimum climatique régional (4450-3150 cal. BP) comporte deux épisodes humides importants, de type sahélien, pendant le millénaire suivant. C’est aussi l’optimum du peuplement humain, mais la grande faune ne semble plus guère présente. À 3500/3150 cal. BP, les éleveurs/chasseurs de Khatt Lemaïteg, à 19°10 de latitude nord, ont surtout consommé des espèces sahéliennes vivant dans un milieu aux caractéristiques subactuelles : chacal (Canis aureus), phacochère (Phacochoerus sp.), addax (Addax nasomaculatus) et gazelles (Bathily et al. 1998 : 183). Au terme de cette période, les pluies, bien qu’en forte diminution, sont cependant encore supérieures aux pluies actuelles, à latitude égale. On trouve à 18° nord des endocarpes de micocoulier, arbre qui nécessite au moins 500 mm de précipitations, ou des micro-milieux humides (von Maydell 1983 : 209), comme à Fkaïrine, au sud-est de Nouadhfat, vers 3400 cal. BP. 3150 cal. BP est une date charnière : la crise aride qui survient est telle que le retour de conditions pluvieuses vers 2900 ne permet pas la restauration d’un milieu de type sahélien au nord de 20° de latitude nord, comme le montrent les datations sur test d’œuf d’autruche et la migration de la grande faune vers le sud. Le long épisode climatique globalement positif de l’Holocène se termine et les paysages commencent à ressembler à ceux d’aujourd’hui. Les datations signalant des paléomilieux humides se trouvent désormais au niveau d’une ligne Nouakchott-Tagant et plus au sud (Maley & Vernet 2013). Cependant, entre 2900 et 2500, à 19° nord, la métallurgie du cuivre, à Akjoujt, est suffisamment importante pour qu’on puisse affirmer que de notables quantités de bois sont encore disponibles (Vernet 2012). Le basculement définitif se produit après 2550 cal. BP.
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale…
Fig. 2. Témoins de milieux humides à l’Holocène dans la région de Nouakchott (dates cal. BP).
Niveau de la mer et milieu naturel littoral à l’Holocène (Fig. 2)
À la fin de la dernière glaciation, le niveau de l’Océan Atlantique remonte rapidement. Le niveau actuel est atteint vers 7000 cal. BP. Un milieu très riche se met en place pendant quelques millénaires (Barusseau et al. 2007). Des populations néolithiques 5 ont exploité, dans des conditions climatiques qui ont varié au cours du temps, le littoral saharien, où la pêche et la récolte des coquillages ont toujours été des activités essen-
tielles, très anciennement pratiquées — la pêche dès 7500 cal. BP dans la presqu’île du cap Blanc (Vernet et al. 2002). L’écosystème le plus riche — un milieu lagunaire aux eaux chaudes et saisonnièrement dessalées— fut celui du Nouakchottien (7000/5000 et sans doute encore jusque vers 3800). Il faut imaginer un milieu semblable à celui de Joal, au Sénégal, aujourd’hui, mais un peu moins humide : une mangrove où l’huître de palétuvier (Crassostrea gasar) prospérait, de même que d’autres espèces sensibles à des apports sai-
5. Caractérisées d’abord par la possession de l’outillage — lithique et céramique — classique du Néolithique, puis par l’élevage, l’agriculture ne semblant pas intervenir dans l’état actuel des connaissances, sinon au sud et au sud-est de la région.
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Robert Vernet et al.
Fig. 3. Paléolac à l’ouest de Nouadhfat : pistes et empreintes animales. Fig. 4. Un pas d’éléphant.
Fig. 5. Melanoides tuberculata.
6. Encore récemment appelé Anadara senilis.
sonniers d’eau douce. Le bivalve Senilia senilis 6, principalement consommé, a permis l’édification d’un ensemble exceptionnel d’amas coquilliers (Vernet & Tous 2004). Le golfe d’Arguin est, aujourd’hui, l’illustration relictuelle de ce milieu si favorable à la faune aquatique. Mais, progressivement, sous la double influence du recul de la mer et du changement climatique favorisant les vents de nord-ouest, le profil de la côte change. Vers 4500, les golfes nouakchottiens se ferment par des cordons littoraux, au moins partiellement. Au-delà du rivage, les lagunes évoluent peu à peu en sebkhas et les golfes et baies du Nouakchottien se transforment en sebkhas : les dernières mangroves (à part les reliques actuelles du sud du golfe d’Arguin) datent de 1800 cal. BP. Le littoral nouakchottien a donc été un milieu très favorable pendant le Néolithique. La richesse de la faune, marine, littorale et terrestre, a attiré les hommes, chaque fois que l’humidité, tant pluviométrique qu’hydrodynamique, était présente. Au nord de Nouakchott, un immense golfe s’est formé pendant plusieurs millénaires, au cours de l’épisode nouakchottien. Des fleuves côtiers, installés entre les cordons dunaires N-E / S-W de l’Aouker occidental, ont atteint par des estuaires un littoral indenté (Vernet et al. 2004, 2011). À cette époque, Nouadhfat et Tin-Yourgat se trouvaient à une trentaine de kilomètres seulement du rivage. B. La chronologie : cinq millénaires de présence humaine Depuis le début de l’Holocène moyen, la Mauritanie atlantique a été occupée à peu près en permanence par des pêcheurs et des collecteurs de coquillages marins. Certains ont vécu quasi exclusi-
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vement sur le littoral, mais d’autres étaient installés à l’intérieur, et ne faisaient que des incursions saisonnières sur la côte. La majorité des sites de plaine de Mauritanie occidentale a été habitée à de nombreuses reprises, le versant ouest des cordons dunaires offrant des possibilités illimitées d’installation — quoique certains groupes aient privilégié des buttes très basses au milieu des interdunaires, en fait sur le rivage de marigots ou de lacs (Vernet et al. 2011).
Une occupation à 7800 cal. BP Elle est documentée par trois datations. Deux sont obtenues sur charbons, prélevés sur de petits sites au matériel peu lisible. On ne peut donc en tirer d’enseignements. La troisième l’est sur un tesson de poterie, pour lequel on a utilisé l’AMS, technique a priori fiable, et ce tesson semble appartenir à une mouvance culturelle actuellement datée autour de 6300 - 5700 cal. BP. On peut néanmoins noter que ces trois dates rapprochées dans le temps proviennent d’une zone géographiquement très limitée, ce qui leur confère une certaine homogénéité. S’agit-il de passages épisodiques de petits groupes à cette époque ancienne ? Encore plus tôt, il existe, un peu au nord, à Khatt Lemaïteg en particulier, des traces archéologiques très localisées du passage d’un groupe de chasseurs épipaléolithiques de la culture de Foum Arguin, dont on ignore la chronologie, sinon qu’elle pourrait se situer aux Xe-IXe millénaires cal. BP (Vernet 2007, Vernet et al. 2007).
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale… Des chasseurs/pêcheurs à 6500/6200 cal. BP : Nouadhfat Des hommes ont occupé, au milieu du VIIe millénaire cal. BP, la rive d’un vaste paléolac à diatomites et Melanoïdes tuberculata daté de la même époque. Ils ont pêché, comme l’attestent des fragments de harpons et des restes de poissons, et chassé tant le gibier inféodé au lac que celui des plaines et collines herbeuses environnantes. Nouadhfat est le seul site de cette époque daté dans la région 7. Mais la deuxième moitié du millénaire est une période d’explosion du peuplement en Mauritanie occidentale, tant sur le littoral qu’à l’intérieur. Le mouvement semble avoir débuté vers 6500, avec des groupes sans céramique, datés à Cansado, dans la presqu’île du Cap Blanc, puis sur des amas coquilliers, au nord comme au sud du littoral mauritanien. Mais c’est dans la première moitié du VIe millénaire que se multiplient les sites. La céramique apparaît de manière incontestable. Elle semble constituer un continuum culturel, tant au niveau des techniques de fabrication (en particulier le dégraissant quartzeux grossier) que pour les décors (Vernet 2007 : chap. 5).
Des chasseurs lors d’un épisode humide vers 5000-4800 cal. BP La fin de l’Holocène moyen est bien datée en Mauritanie occidentale. À Rfayeg, en bordure de l’Amatlich, un amas de bivalves d’eau douce consommés (les taxons présents n’ont pas été déterminés, mais il s’agit probablement d’Aspatharia) a été édifié vers 5100. À 70 kilomètres au sud, dans l’Ifozouiten, le site de Tin-Yourgat a attiré les hommes à de multiples reprises. Une butte isolée dans l’aftout 8, marquée par une faune de mammifères sahéliens comprenant de l’hippopotame (et peut-être du rhinocéros), est datée sur os animal de 4750 cal. BP (Vernet & Baouba 2003 : 75). Les éleveurs du millénaire suivant Globalement, la période 4500-3200 cal. BP est favorable à l’homme : deux périodes humides, au milieu de la première moitié du millénaire, puis de la seconde, voient se reconstituer les paysages sahéliens arborés et herbacés connus aux époques antérieures, et qui avaient été mis à mal par l’épisode aride très marqué vers 4750. Pourtant, le milieu ne retrouve pas sa richesse antérieure : la faune liée aux lacs, rivières et mares semble bien moins présente. L’élevage est alors attesté dans toutes les plaines intérieures de Mauritanie occidentale, mais aussi sur le littoral, où la pêche et la collecte des mollusques marins sont probablement saisonnières (Vernet et al. 2011). L’élevage est arrivé par le nord, où il est connu (mais non encore directement daté) sans doute vers 5700 cal. BP dans le Tijirit et le Tasiast. Il devient très vite l’activité principale au sud, avec l’arrivée des hommes de la culture du Dhraïna, caractérisée par la forme conique de sa poterie (4500-3700 cal. BP) (Vernet 1993 : 249-252).
La fin du Néolithique À partir de 3200 se développe un épisode aride qui chasse vers le sud (ou vers les refuges montagneux comme l’Adrar ou le Tagant) la plupart des groupes humains. Nombre de cultures disparaissent d’ailleurs à cette époque. Il n’y aura ensuite que de brèves rémissions, d’un siècle ou deux — comme celle qui a permis la fabrication d’une énorme quantité d’outils et d’objets de parure en cuivre dans la région d’Akjoujt entre 2900 et 2500 cal. BP (Vernet 2012, Maley & Vernet 2013).
C. Nouadhfat (6500-6200 et 3650 cal. BP) Contrairement à la quasi-totalité des habitats des plaines de Mauritanie occidentale, Nouadhfat est installé dans un interdunaire, sur une butte peu élevée, formée de sédiments lacustres sableux. Le site domine de moins de deux mètres un paléolac à diatomites dans lesquelles sont imprimées des pistes de pas d’animaux. C’est un habitat de surface (Fig. 3 à 7) : un sondage n’a donné qu’un sable stérile et blanc, complètement délavé (Fig. 8). Il est important de noter que le site lui-même devait occuper un emplacement stratégique: deux occupations importantes à trois millénaires de dis-
Fig. 6. la région de Nouadhfat : l’habitat, les paléolacs (en blanc). Au sud, le cours complexe du fleuve holocène de l’Aftout Targué.
7. A une trentaine de kilomètres, un amas coquillier, Areich T24, daté autour de 5800 cal. BP, a fourni une molaire d’hippopotame qui n’a pu être datée directement (Vernet & Baouba 2003 : 53). 8. Interdunaire.
Fig. 7. Le site de Nouadhfat.
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Robert Vernet et al.
Fig. 8. Le sondage. Fig. 9. Un micocoulier actuel dans la région du lac Rkiz.
9. Mytilopsis africana était également présent, tout aussi représentatif d’un milieu lagunaire avec apport d’eau douce saisonnier (Rosso 1977).
Fig. 10. Nouadhfat : endocarpes de micocoulier, mêlés à d’infimes fragments osseux.
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tance au même endroit, sans doute la berge du lac ou l’embouchure d’une rivière se jetant dans celuici, et aucun autre site d’envergure présent dans un rayon de cinq kilomètres. Les occupants successifs de Nouadhfat ont exploité deux milieux différents. D’une part, les herbages et forêts de l’Aouker, propices au gibier puis au bétail : l’abondance des endocarpes de micocoulier sur l’habitat montre l’importance de cette espèce sahélienne (Fig. 9 & 10). D’autre part, les nombreux lacs d’eau douce, aux dimensions très variables, évoluant avec le temps en marigots : ils parsèment les interdunaires et ont dû rester fonctionnels jusqu’il y a 3200 ans (Maley & Vernet 2013). Ces lacs devaient être reliés entre eux par un réseau hydrographique se jetant dans l’Océan atlantique au sud de Nouakchott, à l’embouchure de l’Aftout Targué (Fig. 2). À quelques kilomètres à l’est coulait un grand fleuve encore fonctionnel à l’époque : il venait de l’Adrar et était sans doute la partie en aval de l’actuel oued Seguelil, comme le montre Google Earth (Fig. 6). Il se jetait dans l’Océan atlantique à l’est de Nouakchott, à environ cinquante kilomètres du littoral actuel, par un estuaire qui a sans doute fonctionné une dernière fois il y a 4200 ans, d’après une datation sur Tympanotonus, gastéropode caractéristique des eaux saumâtres des estuaires9 (Elouard 1973, Egonmwan 2008). Le vaste paléolac à diatomites situé à deux kilomètres au nord-ouest de l’habitat de Nouadhfat a fourni de très nombreuses et longues pistes d’empreintes d’éléphants et d’autres espèces animales non identifiées. Ces animaux ont traversé le lac d’est en ouest, laissant des traces très marquées. Une date indirecte, sur un échantillon de gastéropode lacustre Melanoides tuberculata, prélevé en surface, a donné 6499 ± 177 cal. BP [6675-6322]: l’épisode pourrait donc bien être contemporain de l’occupation ancienne de Nouadhfat (Fig. 5). Les empreintes de pas d’animaux dans la diatomite sont, au Sahara, une spécificité de l’Holocène mauritanien. On en connaît dans plusieurs régions: à l’est de Zouerate, dans l’Adrar (Vernet 2010 : 78) et sur le littoral atlantique (Vernet 2006). Nouadhfat occupe environ un hectare. Les différentes occupations se chevauchent et mêlent leurs restes. L’endroit, confortable, est parfois encore
occupé par des bergers, ce qui ne favorise évidemment pas la conservation du matériel archéologique. Environ 200 m2 de surface ont été passés à un tamis à mailles fines par Robert Vernet et Boutar ould elArby (Fig. 11). Le reste du site a fait l’objet d’une prospection systématique. Le résultat est spectaculaire, même si la confusion des occupations interdit de préciser certains aspects, car il est évidemment impossible d’attribuer de manière définitive tel ou tel objet à une période donnée sans multiplier les datations. On ne peut, par exemple, certifier que les dents de bœuf présentes sur le site datent bien de la seconde occupation. C’est donc à l’archéologue de prendre ses responsabilités, après avoir étudié le site et analysé la répartition des objets récoltés et leur patine. La cartographie de la zone de tamisage est à ce sujet assez claire. La comparaison avec les différentes cultures présentes dans la région achève de donner un profil original à Nouadhfat.
Les deux occupations principales Une première occupation date du milieu du VIIe millénaire cal. BP (Fig. 12). Elle est bien datée, à la fois par la faune (otolithe de tilapia), la flore (micocoulier) et la poterie. Des hommes, à la culture matérielle peu représentée sur l’habitat, en dehors de quelques tessons et de cinq fragments de harpons, ont pêché et chassé une faune d’une grande variété. La quasi-absence d’industrie lithique permettant la chasse (comme d’ailleurs sur le site voisin de Tin-Yourgat) ne manque pas d’étonner, mais la présence des fragments de harpons ne laisse aucun doute sur cette technique de pêche. Aucun objet
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale… témoignant d’autres techniques halieutiques — par exemple poids de filet — n’a été retrouvé. La céramique qui paraît liée à ces activités n’avait jamais été trouvée dans la région, mais des tessons peu nombreux trouvés au nord-ouest, en direction de l’Océan et en bordure du golfe nouakchottien de N’dramcha, présentent le même aspect (Vernet & Tous 2004). La poterie présumée appartenir au groupe ancien de Nouadhfat est rare, assez épaisse, à dégraissant généralement sableux à très gros grains, qui pourraient bien être allogènes. Un tesson (Fig. 22) a été daté à 6202 cal. BP. Le décor est à bandes parallèles au peigne à dents. Pivotant, il évoque l’utilisation, classique sur les rivages atlantiques, des dents d’une coquille du bivalve marin Senilia senilis. La durée de l’occupation semble assez longue et centrée sur le milieu du millénaire (Fig. 12). Cela pourrait indiquer une certaine permanence — des occupations saisonnières sur une longue période — de ce groupe humain qui semble avoir des affinités vers le nord-ouest, peut-être la culture de Tintan, dont le centre de gravité se situe sur le littoral atlantique, au nord du golfe d’Arguin (Vernet 2007). Des prospections, au nord de la sebkha de N’dramcha, sur la rive nouakchottienne, ont indiqué un lien vraisemblable entre les deux régions, tant au niveau de la céramique (également très rare) que de la chronologie radiométrique 10.
10. À l’ouest de la région de Nouadhfat et en bordure du golfe nouakchottien de Ndramcha : Sebkhet Ercheïm (6459 ± 155 cal. BP) ; Nord Moutounsi (6478 ± 113 cal. BP).
Fig. 11. Tamisage du gisement de surface de Nouadhfat.
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Robert Vernet et al.
Tableau 1. Datations radiocarbone de Nouadhfat.
Fig. 12. Chronologie de la première occupation de Nouadfhat.
Fig. 13. Chronologie de la culture de l’Aouker occidental .
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Une seconde occupation, typique de la période en Mauritanie occidentale, est le fait d’une culture centrée sur l’Aouker occidental. Celle-ci comprend plusieurs groupes proches entre 3900 et 3300 cal. BP, et surtout entre 3700 et 3500 (Fig. 13). Rien n’interdit cependant des occupations limitées entre les deux épisodes, les réoccupations étant fréquentes en Mauritanie occidentale au Néolithique. Cette seconde occupation est le fait d’éleveurs, dont nous ne savons pas s’ils ont pratiqué la pêche. La faune très probablement associée à cette phase contient de nombreuses dents de bovidés domestiques, à la patine toujours moins marquée que celle des ossements de la première occupation. L’abondante céramique est caractéristique d’une culture appelée « Aouker occidental » et dont on commence à appréhender la complexité (Gallin & Vernet 2004). La forme est essentiellement semi-sphérique, le dégraissant plus souvent végétal que sableux. Les décors sont très variés : cordelette roulée, peigne pivotant et flammé, registres, traits et dents parallèles. Cet ensemble céramique présente une trop grande variété pour être réellement homogène : seule une comparaison régionale permettra de démêler l’écheveau des peuplements successifs ou parallèles.
La faune de Nouadhfat (Fig. 14) Comme la faune (sauf l’otolithe de tilapia daté par le radiocarbone) ne contient pas d’arguments intrinsèques de datation, le matériel des deux périodes d’occupation sera discuté comme un ensemble. Les ossements ont tous été trouvés en surface, ce qui est le cas le plus fréquent en Mauritanie, région à 80 % sableuse, où les stratigraphies archéologiques sont très rares. Cette situation a clairement eu des conséquences assez marquées sur la préservation. Seules les pièces les plus résistantes ont survécu. Ceci explique par exemple le grand nombre d’otolithes parmi les restes de poissons, ou encore la prédominance des restes dentaires parmi les mammifères. Après le tamisage sur mailles de 3 mm, une sélection de pièces identifiables a été faite sur le terrain par des non-spécialistes fauniques, provoquant sans doute un certain biais. Malgré cela, l’étude de cette faune reste très importante du fait que, avec Tin-Yourgat, Nouadhfat est, en Mauritanie
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occidentale, le seul site néolithique où un nombre important de restes animaux a été trouvé et étudié. Les déterminations ont été effectuées en 2002 par Wim Van Neer et Veerle Linseele au Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren (Belgique), en utilisant les collections de référence de squelettes récents d’animaux africains de cet institut. Au total, 760 ossements ont été étudiés, dont 84% étaient identifiables (Tableau 2). Ce pourcentage très haut est très probablement en partie une conséquence de la sélection lors la récolte. En termes de nombre de restes, l’ensemble est dominé par des poissons. Tilapia est le taxon le plus fréquent, surtout représenté par des otolithes. Quelques épines, un ptérygophore et deux vertèbres ont également été trouvés. Les poissonschats sont aussi assez nombreux, et comprennent au moins trois taxons. Synodontis est surtout représenté par des épines, les Clariidae par des fragments de toit crânien et Auchenoglanis par trois os cleithraux. Outre tilapia et poissons-chat, quatre autres poissons sont présents, dont Gymnarchus niloticus et Heterotis niloticus qui, comme les tilapias, sont surtout représentés par des otolithes. À notre connaissance, on a rarement récolté des otolithes sur les sites archéologiques sahariens, mais il existe des habitats dans d’autres régions semi-arides où les otolithes sont plus nombreux que les restes osseux de poissons (Desse 1988). Les estimations des longueurs standard (Tableau 3) montrent surtout que, malgré la destruction à la surface, des petits individus sont présents.
Fig. 14. Sélection d’éléments fauniques typiques ou diagnostiques, trouvés à Nouadhfat : a) Otolithe de Heterotis niloticus, b) Otolithe de Gymnarchus niloticus, c) Otolithe de tilapia, d) Fragment de carapace de tortue molle, e) Plaque dermique de crocodile, f) Fragment de mandibule d’aulacode avec première et deuxième molaire, g) Troisième molaire inférieure de phacochère, h) Molaire d’hippopotame, i) Première ou deuxième molaire supérieure de céphalophe de Grimm ou d’ourébi, j) Première ou deuxième molaire inférieure de bubale, k) Quatrième prémolaire inférieure de bœuf. Trait = 1 cm.
Fig. 15. Trois éléments diagnostiques de bœuf trouvés à Tin-Yourgat : a) Quatrième prémolaire inférieure, b) Phalange 2 postérieure, vue abaxiale b vue plantaire, c) vue proximale, d) os carpi-ulnare, e) vue dorsale, f) vue proximale. Trait = 1 cm.
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Robert Vernet et al.
Fig. 16. Fragments de harpons de Nouadhfat.
Les poissons indiquent l’existence de milieux aquatiques assez riches en espèces près de Nouadhfat — très vraisemblablement le paléolac voisin, aux eaux permanentes, et alimenté plus ou moins directement par le réseau hydrographique venu du nord. L’absence de la perche du Nil, une espèce de grande taille dont les ossements se préservent d’habitude très bien, montre probablement que la teneur de l’eau en oxygène était réduite. Les Synodontis sont des indicateurs d’eaux ouvertes et permanentes, les autres espèces sont plutôt typiques d’eaux peu profondes (Tilapiae, Clariidae), parfois marécageuses, avec une végétation aquatique abondante (Gymnarchus niloticus, Heterotis niloticus, Polypterus sp.). Quant aux techniques de pêche, les harpons ne permettaient sans doute pas de capturer toutes les espèces présentes, et il faut supposer que d’autres engins, par exemple des pièges ou des nasses, ont été utilisés (Van Neer 2004). En plus des poissons, des restes de tortues molles et surtout de crocodiles, deux reptiles des milieux aquatiques, sont présents. Ils sont tous
Fig. 17. a. industrie lithique; b. industrie sur os (hors harpons).
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Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale…
Tableau 2. Les espèces récoltées sur le site de Nouadhfat (Nombre de restes).
Fig. 18. Outil composite.
Tableau 3. Estimations des longueurs de standard des poissons À cause de la fragmentation élevée et le type d’ossements préservé, les tailles des Clariidæ ne peuvent être établies que de façon assez grossière.
Fig. 19. Perles sur coquilles de Dentalium sciées.
les deux surtout représentés par les ossements résistant le mieux aux altérations diagénétiques, notamment les plaques dermiques dans le cas des crocodiles et les fragments de carapace et de plastron pour les tortues molles. Le gibier aussi est assez riche en espèces. Il comporte le varan, l’aulacode, le phacochère, l’hippopotame, une petite antilope, le cobe des roseaux et le bubale. Ceci montre des conditions plus humides qu’à l’époque actuelle et la présence d’une végétation de bord de lac et de rivière ou de forêt. Des espèces typiques des régions saharosahéliennes, par exemple la gazelle à front roux (Gazella rufifrons) ou le lièvre du Cap (Lepus capensis), manquent. Plusieurs restes de dents de grands bovidés ont été trouvés qui, sur la base de leur taille et de leur forme, sont, soit de buffle, soit de bœuf. Les 263
Robert Vernet et al. La faune de Tin-Yourgat (Fig. 15) Cette faune a été datée, sur des restes d’ossements animaux non identifiables, de 4748± 100 cal. BP [4848-4648]. Les restes identifiables sont résumés dans le tableau 4. Tin-Yourgat est, à l’intérieur de la Mauritanie, l’unique autre site de la première moitié de l’Holocène ayant produit un grand nombre de restes fauniques. Il s’agit aussi, comme d’habitude en Mauritanie occidentale, d’un site de surface. Bien que Tin-Yourgat soit plus récent de plus d’un millénaire et que son contexte archéologique soit beaucoup moins connu suite à des pillages importants, le site permet une comparaison importante pour Nouadhfat. Les restes de poissons y manquent totalement, mais la présence du crocodile et de l’hippopotame montre que des eaux permanentes existaient à proximité dans un milieu très comparable, mais où l’interdunaire, l’Amlil Bou Kerch, est bien plus vaste que celui de Nouadhfat. La faune terrestre est très comparable à celle de Nouadhfat. Quatre ossements (une P4 inférieure, un os carpi ulnaris et deux phalanges 2 postérieures) de grands bovins permettent la distinction entre buffle et bœuf selon les critères décrits par Gentry et Gentry (1978 : 316) et Peters (1986). Ils appartiennent tous au bœuf et de ce fait, nous supposons, comme pour Nouadhfat, que seul le bœuf domestique est présent. Les mesures (Tableau 5) sur des restes diagnostiques et non diagnostiques montrent la présence de grands à très grands individus (comparer avec Linseele 2007).
Tableau 4. Les espèces récoltées sur le site de TinYourgat (nombre de restes).
L’industrie
Tableau 5. Les espèces ré Mesures des ossements de bœuf (*=diagnostique) de Tin-Yourgat (selon von den Driesch 1976 & Peters 1986, Planche 9).
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deux espèces sont connues à l’Holocène mauritanien (Jousse et al. 2003). Comme la morphologie de la seule pièce diagnostique retrouvée, un P4 mandibulaire, ne correspond pas à celle du buffle (Gentry & Gentry 1978 : 316), nous supposons que les autres peuvent aussi être attribuées au bœuf. L’aurochs a été rapporté pour l’Holocène de la Mauritanie (Bouchud et al. 1981), mais compte tenu de la distribution géographique reconstruite pour l’espèce en Afrique (Linseele 2004), nous considérons sa présence improbable dans la région. Le bœuf domestique n’apparaît au sud-ouest du Sahara qu’à partir du IVe millénaire cal. BP (Jousse 2004), et sa présence doit donc être située dans la deuxième phase d’occupation de Nouadhfat. L’absence de caprinés domestiques associés aux bovins est étonnante et distingue le lieu d’autres sites avec des animaux domestiques précoces en Mauritanie (Holl 1985 ; Bathily et al. 1998) et en Afrique de l’Ouest en général (par exemple Linseele 2007).
1. Les harpons en os (Fig. 16) Les harpons pour la pêche en eau douce ne sont pas une rareté en Mauritanie : on en connaît à l’Azrag (SE de Zouerate: Vernet et al. 2016), à l’Oum Arouaba (Adrar : Chamard et al. 1970) et dans la région de Tichitt. Ils sont particulièrement nombreux dans l’Azawad malien (Gallay 1966, Camps-Fabrer 1983). Cinq fragments de harpons ont été récoltés à Noudhfat. Les restes ne permettent pas une étude typologique précise, mais on peut néanmoins les rapprocher des nombreux harpons de l’Azawad. Quelques outils en os, baguettes ou poinçons, complètent l’ensemble (Fig. 17b).
2. L’industrie lithique (Fig. 17a & 18) Elle est extrêmement réduite sur le site : deux grattoirs, sept segments de cercles, quelques perçoirs et pointes, et une hachette. On ne peut vraiment pas savoir si elle appartient à la première occupation ou à la seconde — quoique l’utilisation d’un quartzite blond à grain fin, comme pour la pointe de la figure 15 soit un indice : c’est la matière préférée du Néolithique récent dans la région. Quelques fragments de meules et de molettes complètent
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale…
l’inventaire. Le pillage est sans doute en partie en cause. Mais aucun substrat rocheux n’est présent dans la région : tout l’outillage lithique doit être importé de l’Inchiri ou de l’Adrar. Or la rareté du matériel et plus encore des débris et éclats récoltés montre que cela n’a guère été le cas : les hommes des différentes époques de Nouadhfat se sont presque complètement passés d’outils en pierre, ce qui n’est pas rare dans la région. L’industrie lithique de Tin-Yourgat est encore plus rare, mais elle a sans doute été complètement pillée.
3. La parure La parure se limite à quelques perles, une sur fragment de Senilia senilis (Fig. 20) et un collier de Dentalium (Fig. 19) : ce sont des ornements très classiques dans les régions littorales de Mauritanie au Néolithique et même plus tard. La céramique Contrairement à l’industrie lithique, la céramique de Nouadhfat est très abondante et variée. L’étude des séries de tessons a permis de former trois groupes à partir de la qualité du dégraissant: — céramique à dégraissant végétal et minéral grossier ; — céramique fine a : dégraissant végétal fin, b : dégraissant de sable fin ; — céramique à dégraissant coquillier.
3.1. La céramique à dégraissant végétal et minéral grossier (Fig. 21 à 24) Le matériel, caractéristique de l’occupation ancienne dont un tesson est daté de 6200 cal. BP (Fig. 22) est constitué d’une petite série de tessons partiellement recouverts d’un dépôt de calcite. Les formes qu’on a pu restituer sont des vases fermés. L’un d’eux a un fond conique (Fig. 21). Ils présentent deux types de figures sur le bord : soit un bandeau décoré, soit une plage couvrante. Les bandeaux décorés sont réalisés avec des bandes horizontales ou verticales de zigzags droits, couvertures avec des « trames de lignes verticales
Fig. 20. Perle sur fragment de Senilia senilis.
Fig. 21. Unique fond conique de Nouadhfat.
Fig. 22. Tesson daté à l’AMS de 6202 ± 77 cal. BP.
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Robert Vernet et al.
Fig. 23. Nouadhfat : groupe dégraissant mixte et matériel de comparaison. a) décors de Nouadhfat, groupe dégraissant mixte ; a1) 2 bandes de zigzag droit et bande de segments verticaux droits sur le bord ; a2) couverture de trame de lignes verticales d’ovales b) Lemaounek : tessons comparables à Nouadhfat, dégraissant mixte. 1 & 2. trame oblique d’ovales grossiers.
Fig. 24. La céramique ancienne de Nouadhfat.
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d’ovales » (impression roulée grossière). Le dépôt de calcite masque le plus souvent la surface des tessons de panse. Un vase porte un schéma décoratif particulier : la lèvre est ornée d’une ligne de traits obliques, le bord porte un bandeau décoré composé d’une bande de trame losangée et la panse est ornée de bandes horizontales de packed zigzags. La grammaire des décors de cette série ne fournit que des informations très partielles : nous ne connaissons que des fragments de schémas décoratifs (les bandeaux décorés sur les bords) et l’état de conservation de la céramique nous conduit à rester prudent. Les affinités culturelles semblent cependant montrer que cet ensemble a des caractéristiques comparables à celles de la céramique de TinYourgat « butte » : impression roulée grossière sur forme élancée, association de « trame losangée »
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Fig. 25. Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal » : décors des tessons. a) bande de trame losangée sur le bord et bandeau réservé sur la panse, b) bande de « packed zigzags » de points barrée de 10 lignes sur le bord, c) bandeau réservé sur le bord et trame « oblique » sur la panse, d) médaillon ovale avec une bande de « packed zigzags » à l’intérieur sur zone réservée, e) ligne, bandeau réservé et série de médaillons ovales avec une ligne à l’intérieur, sur zone réservée.
ou « ligne de traits » (tous deux incisés) avec des bandes de « packed zigzags de points ». La ressemblance des deux ensembles est également liée à la qualité de pâte comparable (à dégraissant minéral et végétal grossier). Les tessons de ce groupe présentent également quelques affinités avec ceux du gisement de Lemaounek, un amas coquillier situé dans la région de la baie de Saint-Jean, au sud-est du Banc d’Arguin (Fig. 23, b). Ils ont un dégraissant végétal grossier et sont décorés avec des roulettes grossières. Ce site a été daté à 5900 cal. BP sur Senilia senilis. Plus généralement, l’ensemble de ces tessons semble appartenir à une mouvance septentrionale allant de l’Atlantique au nord-est de la Mauritanie.
— HD3 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau réservé sur le bord et couverture sur la panse ; — HD4 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — HD5 : bandeau réservé sur le bord et bandeau décoré (ou couverture ?) sur la panse ; — HD6 : zone réservée sur le bord et la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 6.
3.2. La céramique fine Elle appartient aux occupations plus récentes, datées dans la région entre 3600 et 3200 cal. BP.
a. La céramique à dégraissant végétal (Fig. 25) Pour les tessons à dégraissant végétal, les formes de vases reconstitués sont les suivantes : huit hémisphériques à bord droit, huit hémisphériques à bord ouvert, sept subsphériques à bord droit, trente subsphériques à bord fermé, un non-sphérique à col droit et trois non-sphériques à col éversé. • Parmi les huit vases hémisphériques à bord droit, cinq ont une lèvre ogivale, un une lèvre carrée et deux une lèvre arrondie. Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 11 cm et 24 cm. Ils présentent les schémas décoratifs suivants: — HD1 : bandeau décoré sur le bord intérieur, bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — HD2 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ;
• Les huit vases hémisphériques à bord ouvert ont des lèvres de trois formes : cinq sont ogivales, deux arrondies et une carrée. Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 12 cm et 24 cm. Ils portent les schémas décoratifs suivants: — HO5 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — HO6 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — HO7 : bandeau réservé sur le bord et couverture sur la panse ; — HO8 : couverture sur le bord et la panse ; — HO9 : zone réservée sur le bord et la panse. Il est à noter que les vases HO9 ont un diamètre à l’ouverture compris entre 12 cm et 16 cm, les vases dont le schéma décoratif est différent ont
Tableau 6. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases hémisphériques à bord droit de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétalÓ».
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Robert Vernet et al.
Tableau 7. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases hémisphériques à bord ouvert de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ».
Tableau 8. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases subsphériques à bord droit de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ».
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des diamètres à l’ouverture supérieurs à 16 cm. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 7.
— SF14 : bandeau décoré sur le bord ; — SF15 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée) sur la panse ; — SF16 : bandeau décoré et bandeau réservé sur le bord et couverture sur la panse ; — SF17 : bandeau décoré sur le bord et couverture sur la panse ; — SF18 : médaillons sur zone réservée sur le bord ; — SF19 : couverture sur le bord et panse ; — SF20 : zone réservée sur le bord et la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 9 page suivante.
• Les sept vases subsphériques à bord droit ont des lèvres de trois morphologies différentes : trois sont ogivales, trois carrées et une carrée. Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 17 cm et 27 cm. Leurs schémas décoratifs sont les suivants : — SD5 : bandeau décoré sur le bord intérieur, bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — SD6 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — SD7 : bandeau réservé sur le bord et bandeau décoré (ou couverture ?) sur la panse ; — SD8 : bandeau réservé et bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — SD9 : bandeau réservé sur le bord et couverture sur la panse ; — SD10 : couverture sur le bord et la panse ; — SD11 : zone réservée sur le bord et la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 8.
• Il n’y a qu’un seul vase à col droit : sa lèvre est ogivale et son diamètre à l’ouverture est de 10 cm. Son schéma décoratif (C-D1) est composé d’un bandeau décoré sur le bord et d’une zone réservée sur la panse; Détail de la composition dans le tableau 10 ci-dessous :
• Parmi les trente vases subsphériques à bord fermé, on décompte seize vases à lèvre ogivale, treize vases à lèvre arrondie et un à lèvre carrée. Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 15 cm et 37 cm. Ils portent les schémas décoratifs suivants : — SF13 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée) sur la panse,
Schéma décoratif
Col
Panse
C-D1
3 lignes
Zr
Tableau 10. Détail de la composition du schéma décoratif du vase ovoïde à col droit de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ».
• Les trois vases à col éversé ont des lèvres arrondies (deux cas) et ogivale (un cas). Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 10 et 12 cm. Ils présentent trois schémas décoratifs : — C-E1 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau réservé sur le col et bandeau décoré (ou couverture) sur la panse ; — C-E2 : bandeau décoré sur le col et bandeau réservé (ou zone réservée) sur la panse ; — C-E3 : bandeau réservé sur le col et couverture sur la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 11 page suivante. • Cinq tessons de panse ont été récoltés sur le site : deux présentent la séquence P1 (bandeau décoré + bandeau réservé + bandeau décoré), un la séquence P2 (bandeau réservé + bandeau décoré + bandeau réservé) et deux la séquence P3 (bandeau décoré + pendentif / bandeau réservé). La composition de ces séquences de schéma décoratif est détaillée dans le tableau 12 de la page suivante. Le répertoire des motifs par zone décorée est le suivant: — bord intérieur: ligne (incision) ; — lèvre : ligne de traits obliques (incision), trame « oblique » (impression roulée de ficelle torsadée) ;
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale… — bord : ovale (incision), hachures (incision), ligne (incision), ligne de points espacés (impression au poinçon), sinusoïde (incision), sinusoïde de points (impression roulée d’une ficelle nouée), bande de traits obliques (incision), zigzag courbe ou droit (impression pivotante d’une spatule à front courbe ou droit), zigzag courbe ou droit barré (impression pivotante d’une spatule à front droit ou courbe puis incision), packed zigzag de points (impression pivotante jointive d’un peigne à dents rondes), trame losangée (incision), trame «oblique» (impression roulée de ficelle torsadée) ; — panse : Trame « oblique » (impression roulée de ficelle torsadée). Caractéristiques morphométriques Tous les vases de cet ensemble présentent des formes dérivées de la sphère, à l’exception de quatre dont les parois montrent peu de courbure et suggèrent des formes plus proches de l’ellipse voire de l’ovoïde. Les diamètres à l’ouverture des vases à profil droit ou ouvert ne dépassent pas 27 cm, ce qui montre que ces vases restaient de dimensions modestes. Seuls les vases subsphériques fermés semblent atteindre des dimensions plus élevées, avec des diamètres à l’ouverture dépassant 35 cm. Les lèvres sont de forme simple et ne présentent aucun rajout de pâte, ce qui contribue à l’impression de finesse de l’ensemble.
Tableau 9. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases subsphériques à bord fermé de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ». Tableau 11. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases ovoïdes à col éversé de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ».
Tableau 12. Détails de la composition des séquences P1 à P3 de Nouadhfat, groupe « dégraissant végétal ».
Grammaire des décors Les schémas décoratifs récurrents des vases sans col sont les suivants: — un bandeau décoré sur le bord et un bandeau réservé sur la panse, — un bandeau réservé sur le bord et une couverture sur la panse, — des médaillons sur le bord et bandeau réservé sur la panse. Les motifs de bords sont très variés : lignes horizontales, bande de trame losangée, bande de packed zigzags (avec quelquefois des lignes superposées)… L’association de lignes et de couverture
de trame « oblique » est fréquente. Dans l’ensemble, les tessons de panse portent soit un bandeau réservé sur le haut soit une couverture de trame « oblique ». Les médaillons, quant à eux, sont de forme ovale et sont composés soit de deux ovales concentriques soit d’un motif central entouré d’un ovale. Dans les deux cas, les pendentifs apparaissent sur des fonds vierges (bandeau réservé ou zone réservée). Affinités culturelles
Il n’existe pour l’instant aucune série étudiée présentant les mêmes associations de pâte, de 269
Robert Vernet et al. Fig. 26. Décors de Nouadhfat, groupe « dégraissant sableux » a) Bande de packed zigzags de points et ligne de points espacés sur le bord, bandeau réservé, bande de zigzags courbes et trame « oblique » sur la panse. b) Bande de packed zigzags de points barrée de 3 lignes sur la panse. c) Bande de grands zigzags de traits et bandeau réservé sur la panse.
Tableau 13. Détail de la composition des schémas décoratifs des vases subsphériques à bord droit de Nouadhfat, groupe « dégraissant sableux ».
forme et de décors, bien que ce type de céramique soit assez largement répandu dans la région de Nouakchott. b. La céramique à dégraissant sableux (Fig. 26 & 27) : Le matériel comprend des tessons de bord à dégraissant sableux qui ont permis de reconstituer les formes de vase suivantes : deux subsphériques à bord droit, six subsphériques à bord fermé et trois ovoïdes à col éversé. • Les deux vases subsphériques à bord droit ont des lèvres de forme ogivale. Leur diamètre à l’ouverture est pour tous deux de 19 cm. Ils présentent les schémas décoratifs suivants : — SD12 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée) sur la panse ; — SD13 : bandeau décoré sur le bord, bandeau réservé, bandeau décoré et couverture sur la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 13.
• Les six vases subsphériques à bord fermé ont des lèvres de forme ogivale (cinq cas) ou arrondie (un cas). Leurs diamètres à l’ouverture sont compris entre 14 cm et 26 cm. Ils portent les schémas décoratifs suivants: — SF21 : bandeau décoré sur le bord et bandeau réservé (ou zone réservée ?) sur la panse ; — SF22 : zone réservée sur le bord et la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 14.
Tableau 14. Id. pour les vases subsphériques à bord fermé de Nouadhfat, du même groupe.
Tableau 15. Id. pour les vases ovoïdes à col éversé de Nouadhfat, du même groupe.
270
• Les vases à col éversé présentent des lèvres arrondies. Leurs diamètres à l’ouverture sont tous de 12 cm. Leurs schémas décoratifs sont décrits comme suit: — C-E4: bandeau décoré sur la lèvre, bandeau réservé sur le col, bandeau décoré sur la panse ;
— C-E5 : bandeau décoré sur la lèvre, bandeau réservé sur le col et couverture sur la panse ; — C-E6 : bandeau réservé sur le col et couverture sur la panse. La composition des schémas décoratifs est détaillée dans le tableau 15. Le répertoire des motifs par zone décorée est le suivant: — lèvre : ligne de traits obliques (incision) ; — bord : ligne de points espacés (impression au poinçon), ligne de traits espacés (impression à la spatule), packed zigzag de points (impression pivotante jointive d’un peigne à dents rondes) ; — panse : ligne de points joints (impression au poinçon), zigzag droit ou courbe (impression pivotante à la spatule à front droit ou courbe), trame « oblique » (impression roulée de ficelle torsadée). La plupart des tessons présente une face externe engobée, voire pour SD12 et C-E5 un bord intérieur lui aussi recouvert d’engobe rouge.
Caractéristiques morphométriques Les vases sont en majorité de forme sphéroïde et les trois vases à col qui se distinguent du lot semblent s’approcher de formes plus ellipsoïdales, voire sphéroïdales. Les vases subsphériques présentent de petits gabarits comparables à ceux des vases à dégraissant végétal. Leurs parois peu épaisses et l’absence de renforcement du bord confèrent à l’ensemble une impression de finesse là encore. Les vases non-sphériques à col présentent des ouvertures très étroites (12 cm). Leurs parois sont plus épaisses et la présence d’un bourrelet sous le col leur donne une silhouette plus épaisse.
Grammaire des décors Les schémas décoratifs dont nous disposons sont la plupart du temps partiels. Cependant, nous avons observé que les vases à dégraissant sableux ont des décors plus typés que les vases à dégraissant végétal. Ainsi le schéma « bandeau décoré/ bord + bandeau réservé/panse + couverture/panse » s’agrémente d’un bandeau décoré exclusivement composé d’une bande de zigzags entre le bandeau réservé et la couverture. On en trouve un écho dans
Économie et milieu dans les plaines intérieures de Mauritanie occidentale…
le schéma C-E5 où une ligne de points espacés surmonte la couverture (toujours de trame « oblique »). En outre, les décors de bord ne sont réalisés qu’avec trois motifs : packed zigzags, ligne de traits espacés et ligne de points joints. Enfin, la présence d’engobe rouge sur presque tous les vases confirme le soin apporté à leur réalisation et suggère qu’il s’agirait d’un ensemble cohérent.
Affinités culturelles On peut citer dans la région de Nouakchott plusieurs sites qui ont fourni des vases à dégraissant de sable fin dont les décors sont comparables à ceux de Nouadhfat. Par exemple, dans l’Amoukrouz, à peu de distance de Nouadhfat, les deux vases à bord droit de la figure 27, l’un hémisphérique et l’autre subsphérique, qui présentent un schéma décoratif comparable à SD12 : un bandeau décoré sur le bord, suivi d’un bandeau réservé puis d’un bandeau décoré (une bande de zigzags) surmontant une couverture de trame «oblique». c. Les tessons à dégraissant coquillier (Fig. 28) Cet ensemble de tessons, assez énigmatique — il partage presque toujours les habitats avec d’autres groupes céramique —, a été daté sur un site du littoral nord de Nouakchott autour de 3500 cal.BP, de même qu’à Fkaïrine. Les tessons à dégraissant coquillier de Nouadhfat ont permis de reconstituer deux formes des vases : 1/ subsphérique à bord droit et 2/ subsphériques à bord fermé. • Le vase subsphérique à bord droit présente une lèvre ogivale et un diamètre à l’ouverture de 22 cm. Son schéma décoratif (SD14) est composé d’un bandeau décoré sur le bord interne et d’un bandeau décoré sur le bord externe ; le détail de l’arrangement des motifs est donné dans le tableau 16. • Les deux vases subsphériques à bord fermé ont des lèvres ogivales. Un seul diamètre à l’ouverture a pu être mesuré : 24 cm. Les schémas décoratifs que portent ces vases sont les suivants : — SF23 : bandeau décoré sur le bord intérieur et trois fois la succession d’un bandeau réservé et d’un bandeau décoré sur le bord externe ;
— SF24 : bandeau décoré sur le bord externe. L’arrangement des motifs est détaillé dans le tableau 17.
Caractéristiques morphométriques Ces trois vases présentent des formes en harmonie avec l’ensemble de la céramique de Nouadhfat. Ils s’en distinguent peu, si ce n’est par leur diamètre à l’ouverture, qui les situe dans le groupe des vases les plus grands de leur type. La forme des lèvres est ogivale, mais en présence d’un si petit effectif, nous nous garderons de considérer cet élément comme distinctif.
Grammaire des décors Les trois vases présentent des décors très proches : — les bords intérieurs portent des bandes de zigzags droits penchés ; — les bords extérieurs présentent des successions de bandes réservées, de lignes et de bandes de trame losangée ; — le soin apporté au traitement de surface (lissage et engobage ?) et à l’élaboration du décor confère à l’ensemble une impression de standardisation et de haute qualité de la production.
Affinités culturelles Plusieurs séries tout à fait comparables ont été découvertes sur le rivage du golfe nouakchottien de Ndramcha (Moutounsi, Rocher aux moules, Amoukrouz…). Elles montrent un ensemble peu abondant, mais largement diffusé dans la région.
Fig. 27. Poterie comparable à celle de Nouadhfat, groupe « dégraissant sableux ». a) Vase subsphérique à bord droit décoré d’une ligne de cinq points disposés en verticale et d’une ligne de points espacés sur le bord, d’un bandeau réservé, d’une bande de grands zigzags sur couverture de trame « oblique » sur la panse. b) Vase subsphérique à bord droit décoré d’une bande de zigzags barrée sur le bord, d’un bandeau réservé, d’une bande de zigzags entre deux lignes et d’une couverture de trame « oblique » sur la panse.
Tableau 16. Détail de la composition du schéma décoratif du vase subsphérique droit de Nouadhfat, groupe « dégraissant coquillier ».
Tableau 17. Id. pour les vases subsphériques à bord fermé de Nouadhfat, groupe « dégraissant coquillier ».
271
Robert Vernet et al.
Fig. 28. Décors de Nouadhfat, groupe « dégraissant coquillier ». a) Recto : ligne et bande de trame losangée sur le bord. Verso : trois bandes de zigzags penchés (bord intérieur). b) Bandeau réservé, bande de trame losangée, bandeau réservé et bande de trame losangée sur le bord. c) Tesson de Fkaïrine : ligne, bande de trame losangée sur le bord et bandeau réservé sur la panse.
272
La céramique de Nouadhfat : conclusion L’étude de la céramique de Nouadhfat nous a permis de mettre en évidence l’existence de groupes céramiques inédits et de poser des jalons dans la chronologie du peuplement néolithique régional. La céramique la plus ancienne (65006200 cal. BP), qui était fort peu connue, est désormais mieux cernée, particulièrement en ce qui concerne ses liens avec les régions voisines, au nord-ouest (golfe d’Arguin) et au nord (Adrar). Les ensembles céramiques récents (3600-3200 cal. BP) font montre d’une grande diversité et d’une remarquable richesse dans les techniques de fabrication, les formes et les décors. La complexité de l’occupation de l’espace et de la chronologie nécessitera de nouvelles recherches afin de mieux définir les cultures du Néolithique récent de la région de Nouakchott.
La céramique montre des liens avec des groupes humains installés plus au nord — golfe d’Arguin ou Adrar. On peut donc penser qu’ils ont fait des incursions au sud, dans la région de Nouakchott, en longeant le littoral et en suivant les interdunaires de l’Aouker occidental alors occupés par des fleuves au débit sans commune mesure avec les oueds plus ou moins désorganisés qui leur ont succédé. L’occupation récente, autour de 3600 cal. BP, présente un cas de figure nettement différent. Certes, les paléolacs autour de Nouadhfat existent toujours, mais leur niveau doit, comme les pluies, avoir fortement diminué. Il est probable que le fleuve qui coulait dans l’Aftout Targué n’était plus à cette époque qu’un gros oued au débit aléatoire. Mais l’âge radiocarbone des gastéropodes de l’estuaire (4200 cal. BP), à une cinquantaine de kilomètres en aval, marque sans doute son assèchement. Les lacs évoluent donc en marigots. L’absence de poids de filet, communs sur le littoral atlantique comme autour du lac Rkiz à la même époque, montre probablement que les habitants de cette occupation récente n’étaient pas pêcheurs. Ils étaient en fait éleveurs et appartenaient à un vaste ensemble régional de populations qui, d’après leur céramique, semblent apparentées. Mais l’étonnante variété de la poterie qui, dans la région, est constante pendant tout le millénaire succédant à l’aride de 4700/4500 cal. BP, montre un peuplement à la fois dense et divers, mais aussi souvent mêlé — comme à Fkaïrine, à Nouadhfat, à l’Aïn en-Nouss (Vernet & Boulanger 2007) et dans bien d’autres habitats de la région – où d’autres types de céramique très différents coexistent.
Remerciements Jean François Saliège n’aura pas eu l’occasion de voir paraître cet article, dans lequel sa contribution a été déterminante. Robert Vernet et les co-auteurs tiennent à saluer sa mémoire pour l’ensemble de ses travaux: sans lui, et son laboratoire de datation (LOCEAN, Université Pierre et Marie Curie), la préhistoire du Sahara ne serait pas cernée chronologiquement comme elle l’est actuellement. La contribution de Wim Van Neer à ce travail présente des résultats du Programme Pôles d’attraction Interuniversitaires — Service public fédéral de Programmation Politique scientifique.
Conclusion générale Le site de Nouadhfat est exceptionnel à plus Bibliographie d’un titre. L’occupation ancienne, autour de Barusseau Jean-Paul, Robert Vernet, Jean‑François 6400 cal. BP, présente un modèle économique Saliège & Cyr Descamps 2007. «Late holocene sedisûrement classique mais rarement observé dans mentary forcing and human settlements in the Jerf el Oustani - Ras el Sass Region (Banc d’Arguin – R. I. le sud-ouest du Sahara : l’exploitation d’un milieu Mauritania) ». Geomorphologie 1: 17-28. aquatique dans un environnement soudano sahélien. Le réseau hydrographique est fonctionnel, Bathily Mohamedou S., Mohamed Ould Khattar & avec des lacs de grandes dimensions et une faune Robert Vernet 1998. Les sites néolithiques de Khatt Lemaïteg (Amatlich) en Mauritanie occidentale. caractéristique qui est chassée et pêchée (au harNouakchott : CRIAA, 233 p. pon et sans doute avec des pièges), tandis que les plaines et collines sableuses à couverture herbacée Bouchud Jean, Philippe Brebion & Roger Saban et arborée fournissent gibier et matières végétales. 1981. «Étude des faunes holocènes provenant de
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Association des amis de l’Art Rupestre Saharien Association (loi de 1901) fondée en 1991 et dont le but social est de « promouvoir les études sur l’art rupestre saharien, faire connaître les documents s’y rapportant, et toutes les opérations liées directement ou indirectement à cet objet. L’association se propose en particulier de réunir périodiquement les personnes, amateurs et/ou professionnels de la recherche, intéressés à des titres divers par l’art rupestre saharien ; communiquer tous renseignements utiles, par échange d’informations et d’opinions, au sein de l’association ou par des publications ; publier une Lettre de l’AARS informant les membres de tous les événements, scientifiques ou autres, liés à cet objet. » Siège social et adresse postale Chez Jean-Loïc Le Quellec Brenessard, F — 85540 – St-Benoist-sur-Mer Conseil d’administration Président : Jean-Loïc Le Quellec Vice-Président : Frédérique Duquesnoy Secrétaire : Sylvia Donon Trésorière : Anne-Catherine Benchellah Trésorière adjointe : Marie-Jean Nezondet Responsable site Web : Sylvia Donon Adjoint : Patrick Dumoulin Assesseurs : Gérard Germond, Jean-Marc Rouzet Tarifs 2018: La cotisation annuelle est de 35 € Les chèques sont à libeller exclusivement à l’ordre de : « Association des Amis de l’Art Rupestre Saharien » et doivent être adressés à la trésorière : Anne-Catherine Benchellah, 34, rue Boussingault, 75013 - Paris
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tifinaγ
ء
AARS
Description, valeurs, commentaires
’
Explosive glottale (attaque vocalique comme dans «assez ! »)
ا
a
ā
Voyelle longue (â), souvent intermédiaire entre [a] et [e]
ب
b
b
Labiale occlusive sonore (comme dans bateau)
ت
t
t
Dentale occlusive sourde (comme dans tableau)
ṯ
Interdentale spirante sourde (émise avec le bout de la langue entre les dents)
j dj g
Spirante palatale sonore (comme dans jeune) pouvant, selon les régions, être articulée dj (articulation affriquée connue notamment en touareg de l’Ăjjer et en arabe algérien) ou g (en touareg de l’Ăhaggar et en arabe égyptien)
ث ج
jÐ Z
arabe tifinaγ
AARS
Description, valeurs, commentaires
ح
h
ḥ
Spirante laryngale sourde
خ
x
ḫ
Fricative vélaire sourde (comme dans l’allemand Buch)
د
d
d
Apico-dentale dentale occlusive sonore (comme dans date)
ḏ
Interdentale spirante sonore (émise avec le bout de la langue entre les dents, comme le th anglais).
ذ ر
r
r
Vibrante linguale ( [r] « roulé » ou « liquide ») comme il peut l’être par exemple en italien
ز س ش ص
z s c
z
Dentale spirante sonore (comme dans zéro)
s
Dentale spirante sourde (comme dans sortir)
š
Palatale spirante sourde (comme dans chuinter)
ṣ
Dentale spirante sourde vélarisée ( s emphatique)
ض
D
ḍ
Interdentale spirante sonore vélarisée ( [d] ou [ḏ] emphatiques)
ط
U
ṭ
Apico-dentale occlusive sourde ( [t] emphatique)
ظ
Z
ẓ
Interdentale spirante sonore vélarisée ( [ḏ] ou [z] emphatiques)
ع غ
Spirante pharyngale sonore
p\
c γ
Vélaire spirante sonore ( [r] grasseyé du français)
ف
fṛ
f
Labiodentale spirante sourde (comme dans «faux»)
ڤ
g
g
Occlusive vélaire sonore (comme dans «gamin»)
ق
qp
q
Occlusive arrière-vélaire sourde avec explosion glottale (se prononce [g] en arabe libyen, et [ ’] en arabe égyptien)
ك
k
k
Palatale occlusive sourde (comme dans kaolin)
ل
l
l
Linguale correspondant au l français (comme dans loi). Peut être exceptionnellement emphatisée, et se note alors avec un point souscrit [ ḷ ]
م ن
m n
m n
Bilabiale nasalisée (comme dans marteau)
í
ñ
Nasale vélaire voisée (comme à la fin de parking)
ه
h
h
Spirante sonore (comme dans le [h] anglais de « hello! »)
و
u
ū w
Voyelle longue (comme dans poule) ou spirante labiovélaire (comme dans ouate ou tramway)
ي
iy
ī y
Consonne longue (comme dans pile) ou semi-consonne (comme dans yeux, lien)
Dentale nasalisée (comme dans numéro)
Remarques: - Ă ă Ǝ ə: voyelles brèves; [e] se prononce toujours (comme un [é] ou un [è]); - ā ē ī ō ū : voyelles longues; - ḍ ṭ ḷ ẓ ṣ : consonnes emphatiques; - les consonnes palatisées seront notées dy ḍy ty ;
- r : c’est le [r] roulé, vibrant, alors que γ note le [r] fortement grasseyé, fricatif et vélaire, souvent noté gh dans la littérature (ex. : l’oasis de Ghat / γāt) ; - g note toujours le son [g] de « garder »; - k note le كarabe et le k touareg (ekk « aller »); - q note le قarabe et le q touareg (eqq « manger »); - s se lit [ss] (jamais [z]); seules les consonnes tendues sont redoublées à l’écrit; - š note la chuintante [ch] du français chapeau ; - ḫ note le خarabe et le x touareg (fricative vélaire sourde correspondant à la jota de l’espagnol ou au son final de l’allemand « Bach ») souvent notés [kh] dans la littérature (ex.: Takharkhouri / Taḫarḫūrī); - ñ note la nasale uvulaire [ŋ] qui est rare (ex.: Ti-n-Abañher). N.B.: Le même son peut être rendu par des caractères tifinaγ différents selon les régions et les dialectes. Le tableau et les remarques qui précèdent ne visent pas à l’exhaustivité, mais devraient permettre de faire face à la plupart des cas usuels.