Ljuba OgnenovaNouvelle interprétation de l'inscription « illyrienne » d'Albanie In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 83, livraison 2, 1959. pp. 794-799. Citer ce document / Cite this document : Ognenova Ljuba. Nouvelle interprétation de l'inscription « illyrienne » d'Albanie. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 83, livraison 2, 1959. pp. 794-799. doi : 10.3406/bch.1959.5041 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1959_num_83_2_5041 D'après En 1901 ce dessin d'abord. dans une tombe de la nécropole de la région montagneuse de Kalaja e Dalmacës. Ippen se demande s'il ne s'agit pas d'une inscription en langue illyrienne (4). Th. Il admet que les lettres sont grecques et lit. sauf pour la dernière lettre de la troisième ligne où il Fig. cit. Il propose donc la lecture dessin de Nopcsa. en commençant par la première ligne : ανα οηθη ισεβ = ana oisi isev. Zeilschrift fur Ethnologie 32 (1900). je présente ici cette étude remaniée et complétée. Il ne donne ni photographie ni dessin. D. aus Bosnien und Herzegovina 10 (1907). (1) Cette interprétation a fait l'objet d'une communication (en bulgare) dans Stadia in honorem Acad. Sur l'aimable initiative de Mr G. p. Fr. Sofia 1958. fut découverte une bague en bronze portant une inscrip tion.. Decev. Mitteilugen und Funde aus Albanien. 16-22. Il accepte la lecture d'Ippen. En 1912. Beitrage zur Vorgeschichte und Ethnologie Nord-Albaniens. suivante : ANA | ΟΗΘΗ | ICER (fig. directeur de l'École française d'Athènes. de trois lignes : ΑΝΑ | ΟΗΘΗ | ICEB. p. Nopcsa republie l'inscrip tion avec un dessin de la bague (5). au» Bosnien und der Herzegovina 12 (1912). 62. (3) Th. mais une transcription en trois lignes : ΑΝΑ | ΟΗΘΗ | ICEB. sansL'inscription explication. 43.publiée Traeger cinq (2). OGNENOVA NOUVELLE INTERPRÉTATION DE L'INSCRIPTION « ILLYRIENNE » D'ALBANIE ω En 1898. apar été P. (2) P. Denkmàler verschiedener Alterstufen in Albanien. Mitt. Traeger. Ippen. — La bague « illyrienne » : voit un R.794 L. 1). . En 1907. 1.fois. Wiss. 193. Wiss. elle avec se compose un dessin. (4) Op. Proposant cette lecture et constatant que les mots ne sont pas grecs. Ippen publie l'inscription en même temps que l'inventaire de la tombe dans laquelle elle a été trouvée (3). près du village de Koman (Albanie du Nord. Mitt. (5) Fr. flg. 333-341. 19. Daux. Nopcsa. non loin de Scutari). ou qui représente une formule magique ou apotropaïque inintelligible (2). s'il est écrit boustrophèdon. HGHO. et il date la gravure du ine siècle de notre ère. IF 46 (1928). p. 183-184 .. S'appuyant sur cette conclusion. Ugolini républie l'inscription avec un dessin agrandi du chaton de la bague. 1927. Il fait l'analyse paléographique des lettres. L'étude de Krahe. — La bague « illyrienne » inconnue (5). 85. ana aisa damatira. Eine balkanillyrische Inschrift. L. p. (4) Krahe. p. sente une dédicace et par consé quent le troisième mot iser correspondrait au mot latin sacrum (6). Krahe. 2. (2) Ibid. p. etc. L'inscription de la bague d'Albanie doit être traduite : « à la déesse ΟΗΘΗ sacrum ». Albania antica I.. L'inscription est publiée pour la cinquième fois en 1928 par H. Il déclare pourtant qu'il est impossible de tirer un sens logique du texte écrit peut-être de façon défectueuse. Là ce mot précède le nom d'une déesse. ou. Roma. cit. est le nom d'une déesse illyrienne Fig. 183. 12. L'inscription repré dessin d'Ugolini. 80. (3) H. (5) Ibid. Il compare la bague d'or de Petroassa. Krahe. qui accepte la lecture de Nopcsa : ANA | ΟΗΘΗ | ICER (3). Die Sprache der Illgrier. Cette interprétation est fondée uniquement sur les données de la linguistique . acceptée dans le monde scientifique. une bibliographie complète du moi iser et de l'inscription en général: Krahe. 1955. ana αθανα. déclarant qu'il reproduit fidèlement l'inscription (1). p. le texte est gravé sur une bague provenant d'une nécropole du pays des Illyriens. H. il soutient que certains éléments de cet alphabet sont grecs. Il admet que chaque ligne représente un mot et il voit dans ANA l'équivalent du mot des inscriptions messapiennes ana. par exemple : ana aprodita. « dédiée à la déesse ΟΗΘΗ ». sur laquelle on lit en caractères runiques : « Guian Jowi hailag ». Krahe. 62-64. Ugolini. a accrédité l'opinion que l'inscription de la bague de bronze d'Albanie représente l'unique document en langue illyrienne trouvé dans la Péninsule Balkanique. c'est-à-dire « dédiée au dieu Jupiter ». Donc ana est un adjectif ou un substantif qui qualifie une divinité féminine (4).. il déduit que le mot de la deuxième ligne ΟΗΘΗ. p. . (6) Cf.L'INSCRIPTION < ILLYRIENNE » D'ALBANIE 795 En 1927. et ne se prêtait à aucune exégèse à partir de langues mieux connues. 63-64. Sur cette base sont édifiées des conclusions concernant les (1) L. Wiesbaden. Die Sprache der Illgrier. op. on peut aboutir à une autre interprétation.796 L. Niederle. et H. C. Si l'on prend en considération les matériaux archéologiques de la nécro polede Kalaja e Dalmacës et l'inventaire de la tombe dans laquelle fut trouvée la bague. Degrand. 1930. 249-266. (3) L. (8) Ugolini. p. p. par exemple la bague à la gemme repré sentant Mercure et les monnaies de Constantin (306-337).. Degrand. cit.. Praha. Prispevky k vyvoji byzantskich sperku ze 1V-X sloleti. p. 1937. 67-66. Budapest. Musianowicz. 186 . Ugolini vers le ve siècle (8). La nécropole est signalée pour la première fois par le français A.. p. (2) A. 89-92. 48. (4) Traeger. Ceka vers les xnexve siècles (9). ont émis des opinions variées. 665. (10) L. cit. (9) H. cf. Traeger affirme qu'il s'agit d'une ancienne nécropole illyrienne. L'Anthropologie 12 (1901). (11) K. Les trouvailles ont été publiées par divers savants.. p. Paris. Cette opinion est partagée par Ippen (5). Niderle (10) et les arceaux temporaux à double torsion datés par K. 193. fig. Attribuant la nécropole aux « mystérieux Pélasges ». p. IF 46. Souvenir de la Haute-Albanie. Le préhistorien P. p. Le matériel de la nécropole prouve qu'elle a servi pendant une période prolongée. Mais les fibules.. S. sans pour autant fixer une date exacte (4). 131 et 129. Ceka. Reinach entre les années 300 et 500 de notre ère ()7. 12 . La nécropole a été fouillée à plusieurs reprises par des paysans. 271. proba typologii i chronologii. op. (6) Nopcsa. cit. Battisti. Musianowicz (11) entre le vie et le vme siècle attestent que la nécropole a été en usage jusqu'à cette époque. p. des amateurs et des archéologues. 1901. (7) S. il se demande s'il ne faut pas la dater d'il y a vingt-cinq ou trente siècles (3). trouvées dans les mêmes tombes que les boucles d'oreilles et les arceaux temporaux. (12) I. Die Haupltypen der Kaiserzeitlichen Fibeln in Pannonien. ainsi que ses rapports avec les langues de l'Italie antique considérées comme des dialectes illyriens (1). (5) Ippen. C'est dans son recueil d'impressions de voyage dans la HauteAlbanie (entre 1893 et 1899) qu'on rencontre la plus belle description de la « montagne des sépulcres » et la première publication des trouvailles (2). op. op. On peut en (1) Krahe. L. cit. Reinach. p. OGNENOVA particularités de la langue balkano-illyrienne. Les autres auteurs qui se sont occupés de la nécro poleprésument qu'elle est plus récente. Les boucles d'oreilles datées par L. . Kovrig. Certaines trouvailles. à propos de la date. Nopcsa la date de l'époque de la migration des peuples (6). 122-123. Kabtacski skroniowe. 19. marquent comme terme le vne siècle (12). Të cilës kohë janë vorret e Komanit? (De quelle époque sont les tombes de Koman ?). p. Studi Etruschi 34 (1955-6).I. Buletin i Insiitutit të shkencavet 2 (1949). Fr. Swiatowit 20 (1948/49). 260. Une nécropole en Albanie. qui. suggèrent que le début de l'utilisation ne serait pas très éloigné du ive siècle de notre ère. op. elle ne peut donc servir d'élément pour une datation aussi tardive. p. Ugolini (1). Athènes. Bref. à la troisième ligne. fig. 827. Mais sur cette bague même la deuxième ligne est pareille au trois autres. 148. M. La contribution positive de H. La bague qui porte la formule chrétienne t Κ(ύρι)ε βοήθη paraît appartenir à une autre série. et sont évidemment faites sinon en même temps. Ceka. M. Ceka consiste dans l'attention qu'il accorde à l'inscription d'une des bagues publiées par Ugolini. (2) H. du ive au vne siècle. cit. Ils sont seulement incomplets : sur l'une manque la première ligne et sur l'autre les deux premières. 332. Recueil des inscriptions grecques chrétiennes d'Asie Mineure. sont de même gravure. Et puisque sur cette espèce de bagues les lettres sont gravées en négatif. Fibule. Handbuch der christlichen Archàologie. Évidemment les trois bagues reprennent la même formule. Hadzidakis. Grégoire. col. (5) Ugolini. 40 bis. 1922. nous proposons de (1) Ugolini. L'inscription de cette deuxième bague se compose de deux lignes : t KER | ΟΗΘΗ = t Κ(ύρ&)ε βοήθη. La différence consiste dans le fait que les trois autres. (3) C. 39. cit. Freiburg in Br. Kraus. et ailleurs (4) . Les objets byzantins et post-byzantins. op. Collection Hélène Stathatos. Kaufmann. 226. 1890. de Cabrol. L'opinion de H. Cela prouve qu'il s'agit d'un texte qu'on avait coutume d'inscrire souvent sur les bagues à l'époque de l'usage de la nécropole. 1922. où il discerne la formule chrétienne bien connue. sur les bagues des ve et vie (3). nos 36. 224. 57-58. Paris. 43. selon laquelle la nécropole doit être datée du xne au xve siècle. (4) Fr.. 1479. dans la publication d' Ugolini. etc. on peut supposer que la deuxième ligne de la troisième bague était la même que sur les deux autres. 138. p. mais constamment à partir du ive siècle. Il faut remarquer que les inscriptions sur les bagues de Koman sont incisées comme sur les bagues ou anneaux sigillaires. ΟΗΘΗ. 1944. Leclercq. .L'INSCRIPTION « ILLYRIENNE » D'ALBANIE 797 déduire que la nécropole de Koman a servi depuis la fin du ive jusqu'au vne siècle. Mais. on trouve encore deux bagues portant des inscriptions. Die allchristl. La coïncidence ne peut pas être fortuite. 310. du moins dans la même période. On la rencontre sur les fibules des ive et ve (2). tandis que celle-ci porte sur la première t KER. 57-58. et publiée par L. Ces deux textes ne diffèrent pas de celui qui est considéré comme illyrien. nos 35. provenant de la même nécropole. est fondée sur l'inscription d'une autre bague trouvée là. Pour une série de bagues portant cette invocation cf. portent l'inscription ICER. dans le Did. Les quatre bagues. op. Sur l'une on déchiffre ΟΗΘΗ | ICER et sur l'autre ICER (5). Paderborn. H. 611. Chatzidakis. Un anneau byzantin. nous avons trois fois ΟΗΘΗ | ICER. M. Comme la deuxième et la troisième ligne se répètent sur deux bagues.. Pourtant cette formule se rencontre non seulement du xne au xve siècle. comme le souligne Ugolini. 41 . 25-28. Inschrift. à l'époque de Justinien (5). et j'ai dû faire mes observations d'après les publications et les dessins de Nopcsa et Ugolini (ici fig. Nous avons vu que la dernière lettre de la troisième ligne est lue tantôt R et tantôt B. 58. que portait sa pro priétaire. une inscription de l'année 371. 3 et 4. Bargala. OGNENOVA commencer la lecture de l'inscription considérée illyrienne (ANA | ΟΗΘΗ | ICER) par la troisième ligne : ICER | ΟΗΘΗ | ANA. nous pouvons admettre qu'il s'agit de B. Schlumberger. Pour la date de la bague on peut tirer des éléments non seulement de l'inventaire de la tombe dans laquelle elle a été trouvée. dans I. (5) H. 439 du Musée byzantin. Mais comme sur lés cachets et les anneaux sigillaires les lettres sont gravées en négatif et par conséquent sont souvent rétro grades ou renversées (3). La forme des lettres est celle des inscriptions grecques- (1) G. 1 et 2). Fig. comme une seule lettre : K. En tenant compte du fait qu'à l'époque de l'utilisation de la nécropole la lettre Κ peut être écrite avec une haste verticale détachée des deux obliques. Sigillographie de Vempire byzantin. nous lirons les deux premières lettres de la troisième ligne (IC). à Athènes. En se servant de la bague comme d'un cachet on s'aperçoit que le nom ANA est à l'envers. la position des lettres du nom ANA ne peut pas servir d'argument contre la lecture proposée.798 L. Leclercq. fig. Sofia. Venedikov. 1884. elles-mêmes remplacées par un sigma lunaire. et cette popularité est attestée par Procope vers le milieu du vie siècle. (2) Cf. Deloche. actuellement au musée archéologique et ethnographique de Tirana. 72-73. p. p. . suggère une popularité du culte de la mère de la Vierge. — Bague inv. mais aussi de la bague elle-même (4). article Anne. Le nom d'origine juive An(n)a. Ainsi nous arrivons à la lecture suivante : KEB | ΟΗΘΗ | ΑΝΑ = Κ(ύρι)ε βοήθη (η pour ει) "Αν(ν)α. 1948. et cela dès le ive siècle (2). Mais comme la lettre Β est écrite souvent R (1). Étude sur les anneaux sigillaires des premiers siècles du Moyen Age. dans le Dictionnaire de Gabrol. 84. Paris. col. 1900. M. (4) Je n'ai pas eu la possibilité de voir la bague même. Paris. (3) M. pages xxxiv-xxxvi. Fouilles et recherches I. elle n'est pas entièrement conservée — une partie de la circonférence du jonc manque. Sur les deux bagues.. η°·9. 3 et 4) du Musée byzantin d'Athènes présente une analogie parfaite (3). elle a le chaton formé par l'élargissement du jonc et des ornements gravés des deux côtés du chaton (4) . Athen. classent la bague d'Albanie parmi les bagues paléo-chrétiennes (2). Ε. La forme de la bague — le chaton formé par l'élargissement de l'anneau. écrite en langue grecque entre le vie et le vne siècle. Die yriechisch-christlichen Inschriften des Peloponnes. (4) La bague d'Athènes est de provenance inconnue. N. Une bague inédite (fig. ainsi que la formule chrétienne. A. 36. 1941. Bees.n'a été découverte sur la Péninsule Balkanique. Nous conclurons que jusqu'à présent aucune inscription illyrienne . Coche deop. est précédée cette fois par une croix : t KER | ΟΗΘΗΙ | OANO = Κ(ύρι)ε βοήθη Ίοάν(ν)ο(υ). 310. (1). en trois lignes. de la bague 20 millimètres. . On peut affirmer sans hésitation que la bague de bronze d'Albanie porte une formule chrétienne courante. du chaton ellipsoïdal 17 et 13 millimètres. 25. 33. Diam. Comme celle d'Albanie elle est en bronze. et Mme Chatzinikolaou de l'avoir mise à ma disposition pour l'étudier et la photographier. (3) Je remercie Mr Sotiriou. 611. Ljuba Ognenova. 17. 34. l'orthographe est simplifiée. directeur du musée byzantin d'Athènes de m'avoir généreusement autorisée à publier cette bague. n° 31(2).L'INSCRIPTION « ILLYRIENNE » D'ALBANIE 799 chrétiennes du ve au vne siècle (1).Collection fig. qui sont œuvre d'un modeste artisan. Ferté. Les objets byzantins et post-byzantins. Kaufmann. les ornements gravés des deux côtés du chaton sur les parties élargies du jonc — . 41.lacit. Hélène Stathatos. la même invocation chrétienne en négatif.