Document-20140912-115116

March 23, 2018 | Author: Diesein | Category: Sales, Law Of Obligations, Estate (Law), Transport, Property


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Répertoire de droit civilVente (3 o effets) Olivier BARRET Professeur à l'Université René Descartes (Paris V) Avocat à la Cour janvier 2007 (dernière mise à jour : juin 2014) Table des matières Généralités, 1 - 3 Chapitre 1 - Transfert de la propriété et des risques, 4 - 200 Section 1 - Moment du transfert de la propriété et des risques, 6 - 167 Art. 1 - Principe du transfert immédiat de la propriété et des risques, 9 - 24 § 1 - Transfert immédiat de la propriété, 9 - 14 § 2 - Transfert immédiat des risques, 15 - 24 Art. 2 - Exceptions légales, 25 - 57 § 1 - Choses de genre, 27 - 43 § 2 - Choses futures, 44 - 53 § 3 - Vente en libre service, 54 - 57 Art. 3 - Aménagements conventionnels, 58 - 167 § 1 - Techniques, 61 - 127 § 2 - Applications, 128 - 167 Section 2 - Opposabilité aux tiers du transfert de la propriété, 168 - 200 Art. 1 - Vente immobilière, 169 - 186 § 1 - Principe : publication obligatoire de la vente, 170 - 179 § 2 - Exceptions, 180 - 186 Art. 2 - Vente mobilière, 187 - 200 § 1 - Vente de meuble corporel, 188 - 196 § 2 - Vente de meuble incorporel, 197 - 200 Chapitre 2 - Obligations du vendeur, 201 - 763 Section 1 - Obligation de délivrance, 202 - 398 Art. 1 - Droit commun, 205 - 368 § 1 - Objet de la délivrance, 206 - 283 § 2 - Modalités d'exécution de la délivrance, 284 - 320 § 3 - Preuve de la délivrance, 321 - 324 § 4 - Sanctions de l'inexécution de la délivrance, 325 - 368 Art. 2 - Droit de la consommation, 369 - 398 § 1 - Délai de la délivrance, 370 - 373 § 2 - Garantie de conformité, 374 - 398 Section 2 - Garantie d'éviction, 399 - 528 Art. 1 - Garantie du fait personnel, 401 - 419 § 1 - Étendue de la garantie du fait personnel, 402 - 409 § 2 - Caractères de la garantie du fait personnel, 410 - 416 § 3 - Sanctions de la garantie du fait personnel, 417 - 419 Art. 2 - Garantie du fait des tiers, 420 - 528 § 1 - Conditions de la garantie du fait des tiers, 423 - 476 § 2 - Mise en oeuvre de la garantie du fait des tiers, 477 - 520 § 3 - Aménagements conventionnels de la garantie du fait des tiers, 521 - 528 Section 3 - Garantie contre les vices cachés, 529 - 702 Art. 1 - Garantie légale, 538 - 639 § 1 - Conditions de la garantie légale, 539 - 584 § 2 - Mise en oeuvre de la garantie légale, 585 - 639 Art. 2 - Garantie conventionnelle, 640 - 661 § 1 - Clauses extensives de la garantie, 641 - 644 § 2 - Clauses exclusives ou limitatives de la garantie, 645 - 657 § 3 - Clauses mixtes, 658 - 661 Art. 3 - Garantie dans les ventes d'animaux domestiques, 662 - 702 § 1 - Domaine de la garantie spécifique, 663 - 687 § 2 - Mise en oeuvre de la garantie spécifique, 688 - 696 § 3 - Effets de la garantie spécifique, 697 - 702 Section 4 - Obligation d'information et de conseil, 703 - 740 Art. 1 - Obligation d'information de tout vendeur, 705 - 710 Art. 2 - Obligation de conseil du vendeur professionnel, 711 - 740 § 1 - Fondement de l'obligation, 712 - 713 § 2 - Contenu de l'obligation, 714 - 735 § 3 - Régime de l'obligation, 736 - 740 Section 5 - Obligation de sécurité, 741 - 763 Art. 1 - Spécificité de l'obligation de sécurité du vendeur professionnel avant la loi du 19 mai 1998 sur la responsabilité du fait des produits défectueux, 744 - 747 Art. 2 - L'obligation de sécurité du vendeur professionnel à la lumière de la loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, 748 - 763 § 1 - Champ d'application de la responsabilité du fait des produits défectueux, 749 - 752 § 2 - Régime de la responsabilité civile du fait des produits défectueux, 753 - 763 Chapitre 3 - Obligations de l'acheteur, 764 - 898 Section 1 - Obligation de payer le prix, 770 - 876 Art. 1 - Paiement du prix, 771 - 809 § 1 - Objet du paiement, 772 - 789 § 2 - Modalités du paiement, 790 - 806 § 3 - Preuve du paiement, 807 - 809 Art. 2 - Sanctions du défaut de paiement du prix, 810 - 876 § 1 - Exécution forcée, 813 - 820 § 2 - Résolution, 821 - 876 Section 2 - Obligation d'enlever la chose vendue, 877 - 898 Art. 1 - Modalités d'exécution, 880 - 885 § 1 - Délai, 880 - 884 § 2 - Lieu et frais, 885 Art. 2 - Sanctions, 886 - 898 § 1 - Domaine de la résolution de plein droit, 891 - 892 § 2 - Conditions de la résolution de plein droit, 893 - 898 Bibliographie P.-H. ANTONMATTÉI et J. RAYNARD, Droit civil. Contrats spéciaux, 4 e éd., 2004, Litec. - AUBRY et RAU, Droit civil français, t. 5, Vente et louage, 6 e éd., 1952, par ESMEIN, Litec. - J.-J. BARBIÉRI, Contrats civils, contrats commerciaux, 1996, A. Colin. - A. BÉNABENT, Droit civil. Les contrats spéciaux civils et commerciaux, 7 e éd., 2006, Montchrestien. - BEUDANT et LEREBOURS- PIGEONNIÈRE, Cours de droit civil français, t. 11, La vente et le louage de choses, par BRETHE DE LA GRESSAYE, 1938, éd. Rousseau et C ie . - F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 7 e éd., 2004, Précis Dalloz. - C. DUCOULOUX-FAVARD, Droit de la vente, 1 re éd., 1990, éd. Eyrolles. - J. GHESTIN et B. DESCHÉ, Traité des contrats : La vente, 1990, LGDJ. - B. GROSS et P. BIHR, Contrats, t. 1, Ventes civiles et commerciales. Baux d'habitation, baux commerciaux, 2 e éd., 2002, PUF. - J. HUET, Les principaux contrats spéciaux, 2 e éd., 2001, LGDJ. - Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et P.-Y. GAUTIER, Droit civil. Les contrats spéciaux, 2005, Defrénois. - MAZEAUD et CHABAS, Leçons de droit civil, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, Principaux contrats : Vente et échange, 7 e éd., 1987, par DE JUGLART, Montchrestien. - PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil français, t. 10, Contrats civils, 2 e éd., 1956, Vente, par HAMEL, LGDJ. - A. SÉRIAUX, Contrats spéciaux, 2001, PUF. F. JACQUOT, Du contrat de vente au droit de la vente, thèse dactyl., Nancy, 1988. Vente immobilière : O. BARRET, Vente d'immeuble construit, in J.-L. AUBERT (sous la dir. de), Gestion de l'immeuble, 2000, Dalloz Action. - J.- L. BERGEL, Les ventes d'immeubles existants, 1983, avec supplément à jour au 10 janvier 1988, Litec. - F. COLLART DUTILLEUL et B. MAGOIS, Acheter ou vendre un bien immobilier, 3 e éd., 2004, Delmas - J. LAFOND, F. COHET-CORDEY et B. LABORRIER, Ventes d'immeubles, 2006, Lexis Nexis Litec. - 99 e Congrès des notaires de France, La vente d'immeuble : sécurité et transparence, 2003, ACNF. Vente mobilière : L. BIHL, Le droit de la vente, 1986, Dalloz. V. aussi les bibliographies spéciales dans les développements. Généralités 1. La vente a pour effet majeur de transférer à l'acquéreur la propriété du bien qui en est l'objet. Le droit français liant la propriété et les risques, elle apparaît, du même coup, comme un contrat translatif des risques de la chose. 2. Mais les effets de la vente ne se limitent pas à cela : comme tout contrat (C. civ., art. 1101), celle-ci crée des obligations ; l'article 1582 du code civil la définit, d'ailleurs, comme « une convention par laquelle l'un s'oblige à livrer une chose, et l'autre à la payer ». Il ressort des termes du texte que les obligations sont, en l'espèce, réciproques ; par quoi la vente revêt un caractère synallagmatique (V. Vente [1 o structure]). 3. L'étude des effets de la vente commande, dès lors, que soient envisagés successivement, en premier lieu, le transfert de la propriété et des risques (V. infra, n os 4 et s.), puis, en deuxième lieu, les obligations du vendeur (V. infra, n os 201 et s.), enfin, en troisième lieu, les obligations de l'acheteur (V. infra, n os 764 et s.). Chapitre 1 - Transfert de la propriété et des risques Bibliographie. - P. BLOCH, L'obligation de transférer la propriété dans la vente, RTD civ. 1988. 673. -BONHOMME, La dissociation des risques et de la propriété, Mélanges Calais-Auloy, 2004, Dalloz, p. 69 et s. - J.-P. CHAZAL et S. VICENTE, Le transfert de propriété par l'effet des obligations dans le code civil, RTD civ. 2000. 477 . - P. CROCQ, La réserve de propriété, in Commentaire de l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, JCP 2006, suppl. au n o 20, p. 23 et s. - F. DERRIDA, À propos de la clause de réserve de propriété dans les ventes immobilières à crédit, Defrénois 1989. 1089. - C. DUCOULOUX- FAVART, Le transfert de propriété, objet du contrat de vente en droit français, allemand et italien, Petites affiches 27 avr. 1990, n o 51, p. 21. - M. FABRE-MAGNAN, Le mythe de l'obligation de donner, RTD civ. 1996. 85 . - A. GHOZI, Nature juridique et transmissibilité de la clause de réserve de propriété, D. 1986, chron. 317. - F. GORÉ, Le transfert de la propriété dans les ventes de choses de genre, D. 1954, chron. 175 ; Le moment du transfert de la propriété dans les ventes de choses à livrer, RTD civ. 1947. 161. - J. LAFOND, La vente d'immeuble avec transfert de propriété différé, JCP, éd. N, 1996. I. 921. - F. PÉROCHON, La réserve de propriété dans la vente de meubles corporels, 1988, Litec. -C. SAINT-ALARY HOUIN, Réflexions sur le transfert différé de la propriété immobilière, Mélanges Raynaud, 1985, Dalloz-Sirey, p. 733 et s. - D. TALLON, Le surprenant réveil de l'obligation de donner (À propos des arrêts de la chambre commerciale de la Cour de cassation en matière de détermination du prix), D. 1992, chron. 67 . - D. VON BREITENSTEIN, La clause de réserve de propriété et le risque de perte fortuite de la chose vendue, RTD com. 1980. 43. Bibliographie. - C. ATIAS, Le transfert conventionnel de la propriété immobilière, thèse dactyl., Poitiers, 1974. - N. PRYBYS GAVALDA, La notion d'obligation de donner, thèse, Montpellier I, 1997. - D. SARGET, Les problèmes juridiques de la vente libre service, thèse dactyl., Paris I, 1982. 4. L'effet translatif de la propriété est décrit par l'article 1583 du code civil. Ce texte dispose : « … la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix ». 5. Par son libellé, il fournit, d'abord, l'indication du momen t auquel interviennent le transfert de la propriété et, partant, le transfert des risques. Mais, en énonçant que la propriété n'est acquise de droit qu'à l'égard de l'acheteur, il invite, ensuite, à s'interroger sur l'opposabilité aux tiers du transfert de la propriété. Section 1 - Moment du transfert de la propriété et des risques 6 . L'article 1583 du code civil consacre le principe du transfert immédiat de la propriété. De ce principe découle celui du transfert immédiat des risques, puisque l'article 1138, alinéa 2, de ce code, de son côté, fait supporter par le propriétaire les risques liés à la disparition fortuite de la chose. 7 . Mais les textes qui consacrent le double principe ci-dessus énoncé n'ont pas une portée absolue : la loi elle-même les écarte dans un certain nombre de cas ; de surcroît, il s'agit là de dispositions supplétives de volonté, auxquelles, par conséquent, les contractants sont libres de déroger. 8. Aussi, l'étude du moment auquel intervient, dans la vente, le transfert de la propriété et des risques postule que soient étudiés, outre le principe suivant lequel ce transfert est immédiat, les exceptions légales audit principe, ainsi que les aménagements conventionnels auxquels il peut prêter. Art. 1 - Principe du transfert immédiat de la propriété et des risques § 1 - Transfert immédiat de la propriété 9. L'article 1583 du code civil, en ce qu'il pose que « … la propriété est acquise de droit à l'acheteur […] dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé », souligne que la vente provoque automatiquement, par le simple échange des consentements et sans aucune formalité, le transfert de la propriété de la chose vendue. La règle du transfert immédiat de la propriété trouve sa source dans le principe consensualiste qui innerve le droit des contrats. 10. Il convient de préciser d'emblée que, pour que cette règle puisse s'appliquer, la chose sur laquelle porte la vente doit être individualisée au moment où celle-ci est conclue ; autrement dit, il faut que le contrat ait pour objet un corps certain ou qu'il ait la nature d'une vente en bloc (sur celle-ci, V. infra, n os 28 et s.). Dès lors qu'il en est ainsi, et sauf stipulation contraire, le transfert de la propriété se produit au moment de la formation du contrat, les dates de livraison de la chose et du paiement étant, à cet égard, indifférentes (Cass. civ. 31 oct. 1928, S. 1929. 1. 86 ; à propos d'une cession de titres de valeurs mobilières, rappr. Cass. com. 23 nov. 1993, Bull. civ. IV, n o 431). 11. L'automaticité d'un tel transfert exclut, selon certains auteurs, que celui-ci puisse être compris comme une obligation mise à la charge du vendeur ; si le vendeur a perdu la propriété au bénéfice de l'acheteur, c'est, disent-ils, par le seul effet de la rencontre des volontés sur les éléments constitutifs du contrat (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 524). Pour une autre fraction de la doctrine, en revanche, « l'obligation de transférer la propriété caractérise à la fois l'effet obligatoire du contrat et l'effet translatif de la vente » (P. BLOCH, L'obligation de transférer la propriété dans la vente, RTD civ. 1988. 673, spéc. n o 83). 12. Quel que soit le point de vue adopté, la transmission de la propriété est distincte de la délivrance et de la livraison de la chose vendue : la délivrance est l'objet d'une obligation spécifique mise à la charge du vendeur (V. infra, n os 202 et s.) ; la livraison n'incombe pas, en principe, au vendeur (V. infra, n os 877 et s.). 13. Par l'effet du transfert de la propriété, le vendeur perd les prérogatives du propriétaire. Il s'ensuit que, dès que les parties sont convenues de la chose et du prix, le bien objet de la vente quitte, en principe, le patrimoine du vendeur pour accroître à celui de l'acheteur. Concrètement, cela signifie que le vendeur ne peut plus transférer à nouveau la propriété du même bien, ni constituer un autre droit réel dessus ; c'est l'acheteur qui, désormais, tient en son pouvoir d'accomplir de tels actes. Cela signifie aussi que le bien aliéné, puisqu'il est sorti du patrimoine du vendeur, n'est plus saisissable par les créanciers de celui-ci, mais qu'au contraire, il garantit les dettes de l'acheteur (Cass. 3 e civ. 29 janv. 1980, Bull. civ. III, n o 27). 14. Les conséquences attachées au transfert immédiat de la propriété, si elles s'imposent entre les parties, ne sauraient s'appliquer à l'égard des tiers qu'autant que le contrat est opposable à ces derniers (V. infra, n os 168 et s.). § 2 - Transfert immédiat des risques 15. Le transfert immédiat de la propriété à l'acheteur emporte pour celui-ci l'obligation simultanée de supporter les risques de la perte ou de la détérioration du bien vendu ; cela, même si le bien ne lui a pas encore été livré et s'il ne peut donc exercer sur lui sa surveillance : la solution résulte de la combinaison des articles 1624 et 1138, alinéa 2, du code civil. 16. Le premier de ces deux textes renvoie, en ce qui concerne la charge des risques, au droit commun des contrats, tel qu'il est exprimé par le second. De fait, suivant l'article 1138, alinéa 2, l'obligation de livrer la chose « … rend le créancier propriétaire et met la chose à ses risques dès l'instant où elle a dû être livrée, encore que la tradition n'en ait point été faite… ». Ce texte lie donc expressément la charge des risques de la détérioration ou de la disparition de la chose à l'attribution de la propriété. Ainsi s'explique que le transfert immédiat de la propriété emporte le transfert immédiat des risques à l'acheteur. 17. Conformément à ce principe, l'acquéreur d'un immeuble doit assumer les risques de la destruction de celui-ci à la suite d'un incendie, même si, lors de l'incendie, le vendeur occupait encore l'immeuble en vertu d'une convention de maintien temporaire dans les lieux (CA Rouen, 11 juill. 1985, Gaz. Pal. 1986. 2, somm. 287). 18. De même, au cas où le vendeur établit que les livres commandés par l'acheteur ont été expédiés et où celui-ci ne les a pas reçus, les risques de leur disparition doivent être supportés par l'acheteur, lequel sera donc tenu d'en payer le prix (Cass. 1 re civ. 19 nov. 1991, Bull. civ. I, n o 325). 19. De même encore, les risques attachés au vol d'un bateau sont à la charge de l'acheteur, bien que ce vol soit intervenu avant que le bateau ait été livré, dès lors que, même si les parties ont mis à la charge du vendeur l'accomplissement des formalités de transfert de propriété, elles n'ont pas subordonné ce transfert à la remise des documents administratifs (Cass. 1 re civ. 10 oct. 1995, D. 1995, IR 246 ). 20. La solution trouve un domaine d'élection privilégié dans les ventes à distance, à propos des risques du transport nécessaire à la livraison : l'article L. 132-7 du code de commerce dispose, à cet égard : « La marchandise sortie du magasin du vendeur ou de l'expéditeur voyage, s'il n'y a convention contraire, aux risques et périls de celui à qui elle appartient, sauf son recours contre le commissionnaire et le voiturier chargés du transport ». Il ressort de ce texte qu'il revient à l'acheteur de supporter le risque de la disparition ou de la détérioration de la chose au cours du transport. La jurisprudence estime qu'il en va de la sorte même si c'est le vendeur qui doit, aux termes du contrat, prendre à sa charge les frais du transport : ainsi, selon la Cour de cassation, « la clause franco pour l'acheteur ne diffère pas le transfert de propriété » et des risques ; ces derniers sont donc à la charge de l'acheteur même lorsqu'une telle clause a été stipulée (Cass. com. 20 mai 1986, Bull. civ. IV, n o 98, à propos de la vente d'un lot d'arbres fruitiers dépéris en cours de transport ; 17 mai 1983, Bull. civ. IV, n o 146, à propos de la vente d'un lot de tôles dont une partie a rouillé pendant le transport ; adde : Cass. com. 23 juin 1998, Bull. civ. IV, n o 210). 21. Le principe du transfert immédiat des risques vaut, à la vérité, sous le bénéfice d'un double tempérament. D'une part, il n'a lieu d'être mis en oeuvre qu'autant que la destruction ou la détérioration du bien est due à un cas fortuit ; si celle-ci est imputable au fait du vendeur, l'intéressé doit en répondre. Il a été jugé, par exemple, que l'incendie de la chose en cours de transport est aux risques du vendeur lorsque la perte a pour cause unique la faute de celui-ci, qui s'était obligé à en assurer le transport et avait choisi le transporteur (Cass. com. 2 juin 1975, Bull. civ. IV, n o 154). 22. D'autre part, l'article 1138, alinéa 2, du code civil prévoit que la chose reste aux risques du vendeur qui a été mis en demeure de la livrer, la mise en demeure pouvant résulter, en vertu de l'article 1139 de ce code, d'une sommation ou de tout autre acte « équivalent, telle une lettre missive lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante… ». Encore convient-il de préciser que, même dans ce cas, les risques attachés à la disparition ou à la détérioration de la chose doivent être supportés par l'acheteur si le vendeur parvient à prouver que « la chose fut également périe chez [l'acheteur] si elle lui eût été livrée » (C. civ., art. 1302, al. 2). 23. Dans les deux cas qui viennent d'être évoqués, si l'hypothèse visée par l'article 1302, alinéa 2, est laissée de côté, l'acquéreur n'aura donc pas à payer le prix, bien que la chose ait disparu après la conclusion de la vente. 24. Malgré ces tempéraments, la règle du transfert immédiat des risques à l'acheteur peut avoir des répercussions fâcheuses pour celui-ci, puisqu'il s'ensuit qu'au cas de perte fortuite de la chose avant la livraison, le même acheteur demeure tenu de payer le prix alors que le vendeur est déchargé de la délivrance. Il serait sans doute préférable d'associer le transfert des risques à la livraison. Dans la mesure où les textes qui lient le transfert des risques au transfert de la propriété ne sont pas d'ordre public, rien n'interdit aux parties de prévoir, dans le contrat, une stipulation en ce sens (V. infra, n os 123 et s.). Telle est, d'ailleurs, la solution de principe retenue par les articles 66 à 70 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980, relative à la vente internationale de marchandises (V. C. civ. Dalloz). Art. 2 - Exceptions légales 25. La loi elle-même écarte le principe du transfert immédiat de la propriété et des risques, tel qu'il est consacré par les articles 1583 et 1138, alinéa 2, du code civil, dans un certain nombre de cas. Il convient, d'abord, de relever pour mémoire les cas où, par dérogation au principe consensualiste, la formation de la vente est soumise impérativement à des autorisations ou à l'accomplissement de formalités (V. Vente [1 o structure]) : puisque, alors, la rencontre des volontés de l'acheteur et du vendeur ne suffit pas à former le contrat, il va de soi qu'elle est impuissante à transférer la propriété et les risques de la chose. 26. Ces cas mis à part, les exceptions légales au principe du transfert immédiat de la propriété et des risques intéressent la vente portant sur des choses de genre, la vente ayant pour objet une chose future, et la vente en libre service. § 1 - Choses de genre 27. Ainsi qu'il a été précédemment indiqué (supra, n o 10), le transfert de la propriété d'un bien n'est pas concevable si la chose qui en est l'objet n'est pas individualisée ; c'est qu'alors il est impossible de désigner l'assiette de la propriété que les contractants se proposent de transférer (F. GORÉ, Le transfert de la propriété dans les ventes de choses de genre, D. 1954, chron. 175). Le transfert de la propriété d'une chose de genre, et le transfert des risques, ne peuvent donc intervenir qu'au moment où il devient possible de désigner objectivement celle-ci, c'est-à-dire lorsque la chose est individualisée. Tel est le sens de l'opposition établie par les articles 1585 et 1586 du code civil entre la vente en bloc, d'un côté, et la vente au poids, au compte et à la mesure, d'un autre côté. A. - Vente en bloc 1° - Définition 28. La vente est faite en bloc lorsqu'elle « porte sur la totalité d'une marchandise existant dans un lieu désigné et délimité, moyennant un prix fixé à tant de francs (aujourd'hui, d'euros) pour une unité de mesure » (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 545). La chose est alors individualisée immédiatement par le lieu dans lequel elle se trouve. Le fait que le comptage, le pesage ou le mesurage soit nécessaire pour déterminer le prix à payer est indifférent : dès lors que cette opération ne commande pas l'individualisation de la chose vendue, la vente doit être regardée comme une vente en bloc (Cass. 1 re civ. 1 er févr. 1983, JCP 1984. II. 20241, note J.H. ; rappr. Cass. com. 16 nov. 1993, Bull. civ. IV, n o 315, JCP 1994. II. 22287, note Gross ; 27 nov. 2001, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 42, obs. L. Leveneur). 29. Sont, au regard de cette définition, des ventes en bloc : la vente de l'entière récolte de lièges provenant des forêts du vendeur (Cass. civ. 25 févr. 1896, DP 1896. 1. 151, 1 re esp.) ; la vente d'un lot de madriers faisant l'objet de plusieurs connaissements, et dont les numéros sont précisés et les prix fixés au mètre cube (Cass. com. 22 oct. 1968, Bull. civ. IV, n o 288) ; la vente d'un lot de pommes de terre individualisé par sa localisation et dont le prix est fixé à tant la mesure (Cass. com. 15 juin 1965, D. 1965. 823) ; la vente d'un lot de douze boeufs charolais dont le prix a été fixé au kilo, et dont la pesée doit se faire aux abattoirs (Cass. 1 re civ. 1 er févr. 1983, préc.) ; la vente portant sur la récolte sur pied d'un champ déterminé (Cass. 1 re civ. 8 oct. 1980, D. 1981, IR 445, obs. B. Audit) ; la vente d'une collection de figurines en étain « d'environ 650 000 pièces, dès lors que, dans la commune intention des parties, elle a porté sur un ensemble correspondant indistinctement à la totalité de la collection, sans division ni inventaire » (CA Paris, 22 sept. 1995, D. 1995, IR 230 ). 2° - Régime 30. Puisque, dans la vente en bloc, la chose se trouve individualisée dès la formation du contrat, il y a lieu de décider qu'une telle vente doit être assimilée à une vente de corps certain, et qu'elle transfère immédiatement la propriété de la chose vendue à l'acquéreur, sauf stipulation contraire des parties. L'article 1586 énonce en ce sens : « Si […] les marchandises ont été vendues en bloc, la vente est parfaite, quoique les marchandises n'aient pas encore été pesées, comptées ou mesurées ». 31. Il découle de là, notamment, qu'à partir du moment où la vente a été conclue suivant une telle modalité, les créanciers du vendeur ne peuvent plus saisir la chose vendue (Cass. civ. 25 févr. 1896, préc. supra, n o 29), que les sûretés constituées par le vendeur sur la chose après la vente sont inopposables à l'acquéreur (CA Aix, 11 juin 1908, DP 1910. 2. 305, note J. Valéry), et que le vendeur qui revend la chose à un tiers avant que la livraison ait été effectuée commet un abus de confiance (T. corr. Auxerre, 9 mai 1950, Gaz. Pal. 1950. 2. 201, RTD com. 1950. 627, obs. J. Hémard). 32. Le transfert des risques, dans la mesure où il est lié au transfert de la propriété (V. supra, n o 6), a lieu en même temps, c'est-à-dire en l'occurrence, dès la formation de la vente (Cass. req. 17 mars 1925, DP 1927. 1. 29 ; 3 mai 1932, DH 1932. 298). La jurisprudence en a déduit, par exemple, qu'au cas de vente en bloc d'une récolte de maïs sur pied, l'acheteur doit supporter, dès la conclusion du contrat, le risque de la perte de cette récolte liée aux conditions atmosphériques (Cass. 1 re civ. 8 oct. 1980, préc. supra, n o 29) ; elle a posé pareillement que l'acheteur d'un lot d'animaux de boucherie pour un prix fixé au kilo après abattage devait payer le prix convenu, bien que la mort d'un de ces animaux soit intervenue avant le pesage (Cass. 1 re civ. 1 er févr. 1983, préc. supra, n o 28 ; rappr. Cass. req. 3 mai 1932, préc.), et que l'acheteur d'une collection de figurines doit supporter les risques tenant à une différence, même importante, entre le nombre approximatif de pièces mentionnées à l'acte de vente et celui constaté lors de l'inventaire fait par la suite (CA Paris, 22 sept. 1995, D. 1995, IR 230 ). B. - Vente au poids, au compte ou à la mesure 1° - Définition 33. La vente est dite au poids, au compte ou à la mesure lorsqu'elle « ne porte pas sur un lot tout entier, mais sur une certaine quantité de marchandises à prendre dans ce lot » (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 546). De la sorte, l'individualisation de la chose vendue ne se fait qu'au moment où celle-ci est séparée du reste du lot du vendeur, par une opération de pesage, de comptage ou de mesurage. 34. À la lumière de ce critère, ont la nature d'une telle vente : la vente portant sur un certain nombre d'hectolitres de vin à prendre dans une cuve qui en contient un volume plus élevé (Cass. com. 18 avr. 1967, JCP 1968. II. 15481, note J.H.) ou dans les chais du vendeur (Cass. com. 27 mai 1986, Bull. civ. IV, n o 107) ; la vente portant sur une certaine quantité de charbon à prendre sur le carreau d'une mine (CA Lyon, 18 févr. 1965, RTD com. 1965. 448, obs. J. Hémard) ; la vente de tant de mètres cubes de bois à prendre dans une coupe (Cass. com. 4 déc. 1957, Gaz. Pal. 1958. 1. 218). 2° - Régime 35. Selon l'article 1585 du code civil, la vente au poids, au compte ou à la mesure « n'est point parfaite, en ce sens que les choses vendues sont aux risques du vendeur jusqu'à ce qu'elles soient pesées, comptées ou mesurées… ». Au-delà du tour approximatif du texte, il convient de retenir que celui-ci lie le transfert de la propriété et des risques au mesurage (largement entendu) de la chose ; ce qui oblige à préciser les règles applicables aux opérations de mesurage. a. - Transfert de la propriété et des risques lié au mesurage 36. La formule de l'article 1585 du code civil suivant laquelle la vente au poids, au compte ou à la mesure « n'est point parfaite… » ne doit pas abuser. En vérité, la vente a été alors formée par le seul échange des consentements ; et elle a tissé, dès ce moment, un lien d'obligations entre les parties. La suite de l'article 1585 le montre bien, qui énonce : « l'acheteur peut […] demander ou la délivrance ou des dommages-intérêts, s'il y a lieu, en cas d'inexécution de l'engagement ». La jurisprudence est aussi en ce sens (Cass. com. 4 déc. 1957, Bull. civ. III, n o 335 ; 28 nov. 1986, Bull. civ. IV, n o 222). 37. Ce que signifie la formule suivant laquelle la vente « n'est point parfaite », c'est simplement qu'en présence d'une vente au poids, au compte ou à la mesure, aussi longtemps que le pesage, le comptage ou le mesurage n'a pas eu lieu, il n'y a pas d'individualisation possible de la chose objet du contrat, et que, par conséquent, la vente ne peut pas produire son effet translatif de la propriété et des risques ; autrement dit, et ainsi que l'énonce de manière tout à fait explicite un arrêt de la Cour de cassation, « lorsque la vente a pour objet une certaine quantité de marchandises à prendre dans un lieu désigné, qui en renferme une quantité qui n'a pas encore été mesurée, c'est seulement l'opération de mesurage qui individualise la chose et entraîne en conséquence la translation de la propriété » (Cass. civ. 30 juin 1925, DP 1927. 1. 29 ; rappr. Cass. com. 27 mai 1986, Bull. civ. IV, n o 107). 38. En vertu de ce principe, la Cour de cassation a posé que les risques découlant de la perte fortuite de la chose sont à la charge du vendeur tant que la marchandise n'a pas été individualisée ou spécifiée (Cass. civ. 7 juill. 1913, S. 1917. 1. 173, note A.W. ; 30 juin 1925, préc.) ; ainsi, par exemple, le vendeur doit supporter les risques de l'incendie de pailles et de foins dont il s'est réservé de conserver une certaine quantité, tant que le pesage n'a pas été effectué (Cass. req. 14 janv. 1914, DP 1916. 1. 69). 39. Les solutions ci-dessus exposées n'ont cours, il convient de le rappeler, qu'à défaut de stipulation contraire. L'article 1585 du code civil est, à l'instar des autres dispositions gouvernant la vente, un texte supplétif de volonté ; il n'interdit aucunement aux contractants, s'ils en sont d'accord, d'avancer ou de retarder le transfert de la propriété et des risques, en regard du moment défini par lui. Ainsi, les contractants sont libres de stipuler, dans une vente au poids, que le transfert de la propriété a lieu dès le jour de la conclusion du contrat (Cass. civ. 20 nov. 1894, DP 1894. 1. 568 ; Cass. req. 7 avr. 1908, DP 1908. 1. 397), ou, au contraire, qu'il n'aura lieu qu'à la date de la livraison (Cass. civ. 8 juin 1904, DP 1904. 1. 455). b. - Opérations de mesurage 40. Le mesurage s'effectue, en principe, par une individualisation contradictoire, en présence de l'acheteur et du vendeur ou de leurs représentants, afin de prévenir toute fraude par laquelle le vendeur distrairait une partie de la chose vendue avant le pesage ou le mesurage (Cass. req. 11 août 1874, DP 1876. 1. 476 ; Cass. civ. 31 déc. 1894, DP 1895. 1. 409). 41. Cependant, les parties peuvent convenir d'une individualisation unilatérale par le vendeur (Cass. civ. 1 er juill. 1874, DP 1876. 1. 473, à propos d'une vente de peaux) ; et les usages commerciaux autorisent parfois à valider une telle individualisation pourvu qu'elle soit objective (Cass. req. 22 janv. 1868, DP 1868. 1. 167, pour un pesage de bestiaux effectué en l'absence de l'acheteur par un préposé au pesage public). 42. Dans les ventes de choses de genre à distance, d'ailleurs, on considère que l'acheteur a donné mandat tacite au transporteur ou au vendeur d'assurer l'individualisation contradictoire (F. GORÉ, Le moment du transfert de propriété dans les ventes à livrer, RTD civ. 1947. 161) ; la jurisprudence en déduit que les risques sont transférés à l'acheteur lorsque la marchandise est sortie des magasins du vendeur et remise au transporteur (Cass. civ. 31 déc. 1894, DP 1895. 1. 409). 43. L'individualisation n'est soumise, dans ses modalités, à aucun formalisme : elle peut procéder de tout moyen traduisant l'affectation de la chose à l'acheteur, tel qu'un étiquetage, un marquage, un parcage, un embarquement. Elle peut, par exemple, résulter du marquage d'un taureau. § 2 - Choses futures 44. La vente de choses futures est illustrée par la vente d'immeuble à construire, par la vente de meubles à fabriquer et par la vente de produits naturels à venir. A. - Vente d'immeuble à construire 45. La vente d'immeuble à construire relevant d'une rubrique spécialisée (V. Vente d'immeuble à construire), il suffit d'indiquer ici que le transfert de la propriété - et, partant, des risques - n'intervient pas au même moment selon qu'une telle vente est conclue « à terme » ou « en l'état futur d'achèvement ». 46. Dans le premier cas, ledit transfert est reporté à la constatation de l'achèvement de la construction par acte authentique, étant observé qu'une fois cette constatation opérée, il opère rétroactivement (C. civ., art. 1601-2 ; CCH, art. L. 261-2). 47. Dans le second cas, il intervient immédiatement quant au terrain et quant aux constructions existantes à la date de la vente, et, quant aux ouvrages à venir, au fur et à mesure de leur exécution (C. civ., art. 1601-3 ; CCH, art. L. 261-3). B. - Vente de meubles à fabriquer 48. La vente de meubles à fabriquer suscite, en plus des difficultés de qualification (V. Vente [1 o structure]), une difficulté concernant la détermination du moment auquel se situe le transfert de la propriété et des risques. Il est entendu que ce moment ne peut pas coïncider avec la rencontre des volontés, puisqu'alors, par hypothèse, la chose n'existe pas encore. Mais, cela posé, doit-on considérer que la propriété et les risques sont transmis à l'acquéreur au fur et à mesure de la réalisation de la chose, ou lors de l'achèvement de celle-ci, ou encore lors de la livraison ? 49. La réponse à cette question peut être, évidemment, donnée par le contrat lui-même : lorsque la commune intention des parties s'évince, sans ambiguïté, des stipulations de la vente, il y a lieu de la respecter. Par exemple, il est permis de convenir, dans une vente de navire à construire, que l'acquéreur deviendra propriétaire de la chose au fur et à mesure de la fabrication de celle-ci (Cass. civ. 20 mars 1872, DP 1872. 1. 140). 50. À défaut de prévision contractuelle, la distinction entre les corps certains et les choses de genre à vocation à retrouver son empire. En présence d'une vente de corps certain, le transfert de la propriété et des risques devrait intervenir lors de l'achèvement de la chose, c'est-à-dire au moment où celle-ci accède effectivement à l'existence ; un arrêt de la Cour de cassation a posé en ce sens que, « dans le cas de vente de chose future, il y a transmission de la propriété dès que la chose que l'on s'est engagé à livrer est effectivement en mesure d'être livrée par le vendeur et reçue par l'acheteur » (Cass. civ. 1 er août 1950, Bull. civ. I, n o 184, D. 1951, somm. 68, rejetant le pourvoi contre CA Paris, 24 mai 1944, DA 1944. 99, JCP 1945. II. 2742, note É. Becqué, rendu à propos de la vente d'une remorque automobile construite d'après les plans fournis par l'acheteur). 51. En présence d'une vente de chose de genre, il ne suffit pas que la fabrication de la chose soit achevée pour que la propriété et les risques soient transférés à l'acheteur ; il faut, en outre, que la chose ait été individualisée : par exemple, la voiture de série commandée par un client et non encore fabriquée ne deviendra la propriété de celui-ci qu'après avoir été achevée et individualisée. C. - Vente de produits naturels à venir 52. Lorsque la vente a pour objet des produits naturels futurs non encore récoltés, comme dans le cas de la vente sur souches, elle porte bien sur une chose future, mais celle-ci n'est pas à fabriquer ; elle doit apparaître naturellement. Les parties sont libres alors de convenir que le transfert de la propriété et des risques s'opérera dès la conclusion du contrat (Cass. com. 28 févr. 1972, Bull. civ. IV, n o 72). Cependant, à défaut d'une telle stipulation, il y a lieu de poser que, conformément aux principes ci-dessus énoncés, le vendeur demeure propriétaire jusqu'à l'apparition des fruits (Cass. civ. 7 janv. 1880, S. 1882. 1. 463). 53. En application des mêmes principes, il a été jugé que, lorsque des poules pondeuses n'avaient pas d'aptitude à la ponte lors de la conclusion du contrat, il s'agissait d'une vente de choses futures, et que, par conséquent, les risques liés à la maladie contractée par ces poules avant qu'elles ne soient en état de pondre devaient être supportés par le vendeur (CA Rennes, 25 juin 1969, Gaz. Pal. 1969. 2. 201, RTD civ. 1969. 801, obs. crit. G. Cornu). § 3 - Vente en libre service 54. Dans la vente en libre service, la marchandise est exposée sur des rayons et ainsi offerte par le commerçant au public. Lorsque le client s'en saisit pour la mettre dans un chariot ou dans un sac, il est permis de penser qu'il manifeste sa volonté d'acheter aux conditions proposées et que, la marchandise ayant été individualisée, le contrat de vente est conclu. Le transfert de la propriété et des risques à l'acheteur devrait donc se produire à ce moment. 55. Une telle solution, bien que conforme aux principes du droit civil, serait incompatible avec les exigences de la répression du vol ; elle conduirait, en effet, à exclure cette infraction dans le cas où, après s'être servi, le client part sans payer, car il n'est pas possible de poursuivre pour vol le propriétaire de la chose. Aussi, la chambre criminelle de la Cour de cassation retarde, en la circonstance, le transfert de la propriété et des risques : elle considère que « la remise définitive de l'objet vendu n'est consentie par le vendeur à l'acheteur qu'au moment du versement du paiement du prix [et qu']il y a jusque-là une détention matérielle provisoire qui ne modifie pas les droits du vendeur » (Cass. crim. 4 juin 1915, DP 1921. 1. 57, note M. Nast ; 30 mai 1958, D. 1958. 513, note M. R. M. P., JCP 1958. II. 10809, note A. Chavanne ; 18 juill. 1963, Bull. crim., n o 262). En vertu de ce raisonnement, le client indélicat peut être poursuivi pour vol. 56. La jurisprudence pénale admet, en outre, que le délit de tentative de vol est caractérisé dès que le client, par les circonstances qui entourent l'appréhension de la chose, a manifesté son intention de se l'approprier sans payer, et par son comportement, a suffisamment indiqué qu'il n'entendait pas se désister de son acte (T. com. Dijon, 28 févr. 1973, JCP 1974. II. 17803, note crit. M. Puech ; adde : Cass. crim. 3 janv. 1973, Gaz. Pal. 1973. 1. 290). 57. Même au plan civil, il n'est pas interdit de considérer que l'acheteur ne consent véritablement à la vente que lorsqu'il paye le prix à la caisse (Cass. com. 8 janv. 2002, Bull. civ. IV, n o 1) ; dans le sens d'une telle analyse, certains auteurs font valoir que l'apparition des codes-barres rend l'étiquetage en rayon seulement indicatif, de sorte que l'accord ne se fait sur le prix qu'au moment où celui-ci est traduit en chiffres (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 188). Art. 3 - Aménagements conventionnels 58. Le principe du transfert immédiat de la propriété et des risques, tel qu'il découle de la combinaison des articles 1583 et 1138, alinéa 2, du code civil (V. supra, n os 6 et s.), n'est pas d'ordre public. La vente est largement dominée par l'autonomie de la volonté ; et les parties sont libres d'aménager comme elles l'entendent ce double transfert (Cass. req. 26 juin 1935, DH 1935. 414 ; Cass. 1 re civ. 24 janv. 1984, Bull. civ. I, n o 31). 59. Elles ne se privent d'ailleurs pas de le faire, en raison des inconvénients présentés par le principe du transfert immédiat de la propriété et des risques : outre que le jeu de ce principe peut s'avérer dangereux pour l'acheteur (V. supra, n o 24), il peut placer le vendeur dans une situation délicate, puisque celui-ci se trouve parfois dépouillé de son droit de propriété sur la chose avant d'avoir été payé ; enfin, il est mal adapté à la vente immobilière, dont la réalisation s'inscrit dans la durée, et dont l'opposabilité aux tiers requiert l'accomplissement de formalités de publicité (V. infra, n os 169 et s.). 60. Les techniques que le droit des obligations met à la disposition des parties pour aménager le transfert de la propriété et des risques sont donc fréquemment utilisées par la pratique. Il convient d'en dresser l'inventaire, avant de développer deux applications particulières, savoir la vente avec réserve de propriété et la vente à réméré. § 1 - Techniques 61. À l'effet d'aménager contractuellement le transfert de la propriété et des risques, les parties ont la possibilité de stipuler un terme suspensif ou une condition ; leur est aussi reconnu le droit de dissocier le transfert de la propriété et le transfert des risques. A. - Terme suspensif 62. Les parties peuvent, tout en concluant la vente de manière définitive, convenir de retarder le transfert de la propriété et des risques jusqu'à la survenance d'un événement certain appelé « terme suspensif » (Cass. 3 e civ. 12 mars 1974, Bull. civ. III, n o 114 ; Cass. 1 re civ. 24 janv. 1984, Bull. civ. I, n o 31). Cette modalité est fréquemment utilisée en matière de vente immobilière, où le terme consiste généralement : dans la rédaction de l'acte authentique appelé à succéder au compromis de vente établi sous seing privé (Cass. 3 e civ. 9 juin 1971, Bull. civ. III, n o 362 ; 2 févr. 1983, Bull. civ. III, n o 34 ; 24 janv. 1984, préc.), ou dans l'entrée de l'acheteur en possession effective de l'immeuble, ou dans le paiement du prix (sur l'efficacité d'une telle clause lorsque l'acquéreur est, avant paiement, soumis à une procédure collective de redressement ou de liquidation judiciaire, V. Cass. com. 9 janv. 1996, D. 1996. 184, note F. Derrida , Defrénois 1996. 385, obs. F. Derrida), ou encore dans l'accomplissement des formalités de publicité (Cass. 3 e civ. 12 mars 1974, préc.), rien n'interdisant aux parties de différer la prise d'effet de la vente jusqu'à la réalisation cumulée de ces différents événements. Mais le terme suspensif se rencontre aussi dans les ventes mobilières (par ex., V. Cass. 1 re civ. 7 juill. 1993, Bull. civ. I, n o 254, D. 1993, IR 208 , au cas de vente d'un bateau de plaisance, où le transfert de propriété était différé jusqu'à la livraison de ce bateau) ; telle devrait être, spécialement, la nature de la clause de réserve de propriété (V. infra, n o 133). 63. Avant d'examiner les effets de la vente à terme, il importe d'évoquer les difficultés de qualification auxquelles elle peut prêter. 1° - Qualification 64. La distinction de la vente à terme suspensif et de la vente sous condition suspensive est parfois délicate. Sans doute, les articles 1181 et 1185 du code civil ont pour objet de la préciser : le premier des deux textes invite à poser que la vente sous condition suspensive est celle dont les effets - spécialement, le transfert de la propriété - sont suspendus à la survenance d'un événement futur et incertain ; le second conduit à définir la vente à terme comme une vente dans laquelle le même transfert est reporté jusqu'à la survenance d'un événement futur et certain. Cependant, l'imprécision des stipulations de la vente, ou la nature même de l'événement dont la survenance est attendue, concourt parfois à entretenir l'hésitation sur la qualification à retenir. 65. La recherche de la commune intention des parties doit permettre alors de trancher la difficulté. C'est aux juges du fond qu'il revient de la conduire souverainement, sous réserve du contrôle de la dénaturation opéré par la Cour de cassation (Cass. 3 e civ. 9 juin 1971, Bull. civ. III, n o 364 ; 11 juin 1980, D. 1981, IR 12 ; 21 oct. 1980, D. 1981, IR 108). Lorsque les seules clauses du contrat ne suffisent pas à révéler la volonté véritable des contractants, les juges du fond ont la possibilité de prendre en compte le comportement des parties postérieur à la signature de l'acte (Cass. 3 e civ. 13 juin 1978, Gaz. Pal. 1978. 2, panor. 354). 66. Un même événement - tel que, par exemple, la rédaction de l'acte authentique ou l'accomplissement des formalités de la publicité foncière dans une vente immobilière - peut donc revêtir la nature d'un terme ou la nature d'une condition suspensive, selon que les parties ont envisagé, lors de la conclusion de la vente, sa réalisation comme certaine ou comme incertaine. 67. Un arrêt a même admis que la date limite stipulée pour la rédaction de l'acte authentique peut avoir la nature d'une condition résolutoire de la vente (Cass. 3 e civ. 31 janv. 1978, D. 1978. 348). 68. La certitude, qui permet de différencier le terme de la condition, n'implique pas forcément que la date de celui-ci soit connue lors de la conclusion du contrat ; le terme dont une vente est assortie est parfois à échéance incertaine : il en est ainsi chaque fois que les parties ont retardé les effets de la vente jusqu'à l'arrivée d'un événement dont la réalisation est considérée par elles comme certaine - en quoi cet événement a bien la nature d'un terme -, mais dont elles ignoraient, lorsqu'elles ont contracté, à quel moment précis il se produirait - en quoi l'échéance du terme convenu est incertaine ; la stipulation d'un tel terme est pleinement valable ; simplement, en cas de difficulté, il appartient au juge de fixer l'échéance du terme (à propos de la clause insérée dans une promesse de vente immobilière et reportant le transfert de propriété à la vente d'un autre bien immobilier appartenant au promettant, V. Cass. 3 e civ. 27 nov. 1969, Bull. civ. III, n o 772 ; rappr., à propos du terme à échéance incertaine affectant l'obligation de payer le prix dans une vente immobilière, Cass. 3 e civ. 4 déc. 1985, Bull. civ. III, n o 162, Defrénois 1986. 1103, obs. J.-L. Aubert, RTD civ. 1987. 98, obs. J. Mestre). 2° - Effets 69. Dans le cas de la vente à terme, le transfert de la propriété est reporté à la date de la survenance de l'événement (Cass. 3 e civ. 2 mai 1968, Bull. civ. III, n o 182). Il s'ensuit notamment que, si la vente porte sur un immeuble, le paiement de la taxe foncière, qui est lié à la propriété du bien grevé, reste à la charge du vendeur jusqu'au transfert de la propriété, nonobstant toute clause contraire (Cass. 3 e civ. 21 mai 2003, Bull. civ. III, n o 111). 70. Puisque les risques sont liés à la propriété, lorsque le transfert de celle-ci est affecté d'un terme, il en est de même des risques, sauf stipulation contraire. Ainsi, par exemple, lorsque, dans leur commune intention, le vendeur et l'acquéreur d'un navire, perdu par naufrage après la vente et avant la date prévue pour la livraison, ont entendu différer le transfert de la propriété jusqu'à la date fixée pour la livraison, les risques de la chose vendue sont demeurés à la charge du vendeur qui ne peut donc demander le paiement du prix (Cass. 1 re civ. 4 juill. 1995, Bull. civ. I, n o 305, D. 1995, IR 200 ). Corrélativement, dans la même éventualité, c'est le vendeur qui demeure bénéficiaire de la garantie de l'assureur au cas de disparition de la chose (Cass. 1 re civ. 7 juill. 1993, Bull. civ. I, n o 254, D. 1993, IR 208 ). 71. Le report du transfert de la propriété jusqu'à l'accomplissement d'un événement suscite plusieurs ordres de difficulté. Il est permis, d'abord, de se demander ce qu'il advient des droits de l'acquéreur si, avant l'échéance du terme, le vendeur, parce qu'il a trouvé un nouvel acquéreur à un meilleur prix par exemple, revend le bien. Il semble que, réserve faite du jeu des règles de la publicité foncière en matière immobilière (V. infra, n os 174 et s.) ou de la preuve de la mauvaise foi du second acquéreur, le premier acquéreur, dans la mesure où il n'est encore titulaire d'aucun droit réel sur le bien, puisse seulement se prévaloir d'une créance indemnitaire et mobilière contre son cocontractant, c'est-à-dire contre le vendeur : telle est, du moins, la solution posée par la Cour de cassation à propos d'une vente immobilière, dans un cas où les parties étaient convenues de retarder le transfert de la propriété jusqu'à la rédaction de l'acte authentique, et où, entre-temps, l'immeuble avait été vendu à une autre personne (Cass. 3 e civ. 2 avr. 1979, Bull. civ. III, n o 84, Defrénois 1980. 1057, note crit. G. Morin, JCP 1981. II. 19697, note M. Dagot). 72. Il peut arriver, ensuite, que l'une des parties refuse, en violation de son engagement, d'accomplir dans le délai convenu la formalité à partir de laquelle le transfert de la propriété devrait intervenir. En pareil cas, l'autre partie paraît en droit d'exiger l'exécution forcée de la vente (rappr. Cass. 3 e civ. 5 janv. 1983, D. 1983. 617, note P. Jourdain). Si, par exemple, il était convenu de différer le transfert de propriété jusqu'à la réitération de l'acte sous seing privé en la forme authentique, et si l'une des parties refuse de réitérer la vente devant notaire dans le délai convenu, l'autre partie est en droit de demander en justice la réalisation forcée de la vente, ou de demander que le jugement à intervenir tienne lieu d'acte authentique constatant celle-ci ; l'effet translatif de la propriété se produira alors à la date de l'assignation (Cass. 3 e civ. 22 nov. 1968, Bull. civ. III, n o 494 ; rappr. Cass. 3 e civ. 20 déc. 1994, Bull. civ. III, n o 229). 73. Enfin, au cas où l'échéance du terme intervient sans qu'ait été accomplie la formalité destinée à opérer le transfert de la propriété et des risques, la vente n'est pas forcément caduque : tout dépend du point de savoir si les contractants ont entendu faire du délai convenu un délai indicatif ou un délai de rigueur,ce qu'il revient aux juges du fond d'apprécier. Dans le premier cas, la partie la plus diligente est en droit de contraindre l'autre à exécuter son engagement ou à supporter la résolution à ses torts (Cass. 3 e civ. 11 juin 1980, D. 1981, IR 12 ; 17 juill. 1991, Bull. civ. III, n o 218 ; adde, à propos d'une cession de parts sociales : CA Paris, 1 er mars 1991, D. 1992, somm. 193, obs. G. Paisant ). Dans le second cas, sauf si les parties conviennent d'une prorogation du terme, l'acte sous seing privé devient caduc, et l'exécution forcée de la vente n'est plus possible (Cass. 3 e civ. 2 févr. 1983, Bull. civ. III, n o 34). B. - Condition 74. Aux termes de l'article 1584 du code civil : « La vente peut être faite purement et simplement, ou sous une condition soit suspensive, soit résolutoire ». Du rapprochement de ce texte avec l'article 1168 de ce code, relatif aux obligations conditionnelles, il ressort que la vente conditionnelle est celle qui, tout en étant formée dès la rencontre des volontés, voit ses effets - spécialement, le transfert de la propriété et des risques - dépendre de la survenance d'un événement futur et incertain : Tantôt, la naissance desdits effets est suspendue à la réalisation de cet événement ; la vente est alors assortie d'une condition suspensive. Tantôt, leur anéantissement éventuel est lié à la survenance de l'événement ; la vente est assortie, cette fois, d'une condition résolutoire (V. Condition). 75. Dans la mesure où la condition n'est, par définition, qu'une modalité affectant les effets de la vente, elle ne doit pas porter sur un élément constitutif de celle-ci (PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil français, t. 7, par P. ESMEIN, n o 1024 ; MARTY, RAYNAUD et JESTAZ, Droit civil. Les obligations, t. 2, Le régime, 2 e éd., 1989, Sirey, n o 70). C'est pourquoi la jurisprudence sanctionnant, sur le fondement de l'article 1174 du code civil, la clause qui consiste à abandonner à une partie la détermination du prix apparaît critiquable (V. Vente [2 o formation]). 76. Pour affecter les effets de la vente, la condition doit satisfaire à des règles de validité qu'il convient de rappeler brièvement, avant d'exposer les mécanismes respectifs de la condition suspensive et de la condition résolutoire. 1° - Validité de la condition 77. La condition doit d'abord, conformément à l'article 1172 du code civil, être morale, possible et licite (V. Condition). Ainsi, il a été jugé qu'au cas de vente d'un terrain pour construire, à charge de livrer gratuitement aux vendeurs des appartements, s'il est impossible de construire, la « dation en paiement » devient impossible et la vente est nulle (Cass. 3 e civ. 3 févr. 1982, D. 1982, IR 228). 78. L'exigence posée à l'article 1172 concerne aussi bien la condition suspensive que la condition résolutoire. Sa sanction ne réside pas forcément, contrairement à la lettre de ce texte, dans la nullité de la vente : selon que, dans l'esprit des parties, la condition illicite, immorale ou impossible était déterminante ou non du consentement, le contrat tout entier, ou simplement la clause irrégulière, est nul (V. Condition). 79. En présence d'une condition suspensive, s'ajoute à l'exigence de l'article 1172, une autre exigence. L'article 1174 du code civil dispose, en effet : « Toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ». Bien que ce texte ne distingue pas suivant que la condition est suspensive ou résolutoire, il ne concerne pas, semble-t-il, la condition résolutoire ; l'article 1659 consacre, en effet, la validité de la vente à réméré, qui n'est rien d'autre qu'une vente sous condition résolutoire potestative (contra : J. GHESTIN, L'indétermination du prix de vente et la condition potestative…, D. 1973, chron. 293). Lire la mise à jour 79, 128, 140 s., 177 s. Simplification du droit. Réméré. - Le terme de « réméré » a été supprimé par la loi n o 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit : à l'article 1659, les mots : « ou de réméré » sont supprimés ; à l'article 1662, les mots : « de réméré » sont remplacés par les mots : « en rachat »; aux articles 1664, 1667 et 1668, au premier alinéa de l'article 1671 et aux premier et deuxième alinéas de l'article 1672, le mot : « réméré » est remplacé par le mot : « rachat ». 80. Pour que la condition stipulée tombe sous le coup de l'article 1174, il faut, dit-on classiquement, qu'elle soit purement potestative, c'est-à-dire qu'elle revienne à abandonner l'exécution de l'obligation à la volonté arbitraire du débiteur. Par opposition, la condition simplement potestative, dite encore « condition mixte », dans la mesure où son accomplissement dépend à la fois de la volonté du débiteur et de circonstances extérieures, est, quant à elle, pleinement valable. 81. La frontière entre la condition purement potestative et la condition simplement potestative est souvent ténue. C'est aux juges du fond qu'il revient d'apprécier, à la lecture des stipulations du contrat, si la condition stipulée est ou non régulière au regard de l'article 1174 du code civil (Cass. req. 2 juin 1856, DP 1856. 1. 457 ; Cass. 3 e civ. 8 oct. 1980, Bull. civ. III, n o 154). Cependant, la Cour de cassation exerce un contrôle sur la qualification opérée par eux à partir des faits (Cass. 1 re civ. 28 mai 1974, D. 1975. 144, note A. Ponsard, JCP 1975. II. 17911, note H. Thuillier). 82. La mise en oeuvre du critère de distinction ci-dessus exposé conduit à des solutions qui ne se prêtent pas aisément à une systématisation. Tout juste peut-on prétendre l'illustrer. Il a été jugé, par exemple, que la condition suspensive, stipulée en faveur des acquéreurs et subordonnant la réalisation définitive de la vente à l'obtention d'un prêt bancaire par ces derniers, n'était pas purement potestative, dès lors qu'il était certain que les acquéreurs avaient l'obligation de solliciter le prêt (Cass. com. 22 nov. 1976, JCP 1978. II. 18903, note B. Stemmer). 83. En revanche, a été jugée purement potestative la condition, figurant dans la vente d'une maison d'habitation, et aux termes de laquelle l'acquéreur pouvait, de sa seule volonté, accepter ou refuser de passer l'acte authentique et de payer le prix (Cass. 3 e civ. 7 juin 1983, Bull. civ. III, n o 132, Defrénois 1984. 805, obs. J.-L. Aubert, D. 1983, IR 481, obs. B. Audit ; comp. Cass. req. 8 janv. 1947, JCP 1947. IV. 38). La réitération de l'acte sous seing privé en la forme authentique devrait, d'ailleurs, toujours avoir la nature d'un terme, et jamais celle d'une condition ; car faire de cette formalité un événement incertain, c'est laisser l'exécution de la vente à la discrétion de l'une ou l'autre des parties, et donc infecter l'engagement de réitération du vice de potestativité (rappr. F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 198). 84. La clause suspendant les effets de la vente à l'acquisition d'un autre bien par le vendeur a été également déclarée contraire à l'article 1174, dès lors qu'au regard des circonstances de fait, elle avait pour conséquence de placer la cession dans le seul pouvoir du cédant qui « pouvait, à son seul gré, décider ou non d'acquérir sans être, de surcroît, contraint par une quelconque date limite » (Cass. 3 e civ. 13 oct. 1993, Bull. civ. III, n o 121, JCP 1994. II. 22280, note Y. Dagorne-Labbe ; rappr. Cass. 3 e civ. 8 oct. 1980, Bull. civ. III, n o 154 ; comp. Cass. 3 e civ. 27 nov. 1969, Bull. civ. III, n o 772). En revanche, la clause suspendant le transfert de la propriété à la vente d'autres biens appartenant au vendeur n'est pas potestative dès lors que la circonstance relative à cette vente représente plutôt un événement à venir, mais certain, convenu entre les contractants quoiqu'à échéance indéterminée (Cass. 3 e civ. 27 nov. 1969, Bull. civ. III, n o 777 ; 22 nov. 1995, Bull. civ. III, n o 243, D. 1996. 604, note P. Malaurie , Defrénois 1996. 348, obs. D. Mazeaud ; mais comp. Cass. 3 e civ. 8 oct. 1980, préc.). 2° - Condition suspensive 85. La vente est conclue sous condition suspensive lorsque ses effets sont subordonnés à la survenance d'un événement futur et incertain, ou d'un événement actuellement arrivé, mais encore inconnu des parties (C. civ., art. 1181). Le second cas de figure est rare. Un arrêt rendu à propos d'une vente immobilière conclue sous la condition suspensive de la purge de tous les droits de préemption, alors qu'aucun droit de préemption n'avait été institué dans la commune, permet cependant de l'illustrer (Cass. 3 e civ. 12 avr. 1995, Bull. civ. III, n o 110, D. 1996, somm. 120, obs. D. Mazeaud , Defrénois 1995. 1402, obs. P. Delebecque) ; l'article 1181, alinéa 3, du code civil dispose qu'alors « l'obligation a son effet du jour où elle a été contractée ». Autrement dit, le transfert de la propriété et les autres effets de la vente opèrent alors à la date de la conclusion de celle-ci. 86. Le plus souvent, la condition suspensive a trait à un événement futur et incertain. Le caractère incertain de l'événement à venir permet de distinguer la condition suspensive et le terme (V. supra, n o 64) ; le fait que la vente ne produise pas ses effets - spécialement, le transfert de la propriété et des risques - tant que l'événement ne s'est pas réalisé permet de distinguer la condition suspensive et la condition résolutoire : lorsque la vente est conclue sous condition résolutoire, elle emporte immédiatement les effets de la vente, ceux-ci étant rétroactivement anéantis si la condition s'accomplit (V. infra, n os 114 et s.). 87. Dans les ventes immobilières, la condition suspensive est presque toujours stipulée. Elle peut alors porter sur l'obtention d'un prêt, étant observé qu'elle donne lieu à une réglementation spécifique dans le droit du crédit immobilier au consommateur, réglementation qui figure aujourd'hui aux articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation (V. Crédit immobilier) ; la condition suspensive stipulée dans une vente immobilière peut aussi avoir trait à la réitération de l'acte sous seing privé en la forme authentique (Cass. 3 e civ. 9 juin 1971, Bull. civ. III, n o 364), au défaut d'exercice d'un droit de préemption, à l'absence de servitude conventionnelle ou administrative grevant l'immeuble, à la délivrance d'un certificat d'urbanisme, par exemple. 88. Elle offre, au plan fiscal, l'avantage de soustraire, jusqu'à sa réalisation, la vente aux droits de mutation. L'article 676 du code général des impôts dispose : « En ce qui concerne les mutations et conventions affectées d'une condition suspensive, le régime fiscal applicable et les valeurs imposables sont déterminés en se plaçant à la date de réalisation de la condition ». La solution est logique puisque, tant que la condition suspensive n'a pas été accomplie, celle-ci empêche le transfert de la propriété. 8 9 . Cette considération fiscale n'est évidemment pas étrangère à la stipulation presque systématique de conditions suspensives dans les ventes immobilières. Mais une telle condition se rencontre aussi dans les ventes de biens meubles, comme le montre, spécialement, le cas de la vente à l'essai (V. Vente [2 o formation]). Pour en mesurer les effets, il importe de les examiner d'abord, tant que la condition est pendante, c'est-à-dire tant qu'on ignore si elle se réalisera ou non ; après quoi, il conviendra d'envisager successivement le cas où la condition est accomplie et celui où la condition est défaillie. a. - Condition pendante 90. Tant que la condition est pendante, le vendeur demeure propriétaire, et il conserve la charge des risques, ainsi que l'énonce l'article 1182 du code civil. Si, dès lors, la chose est entièrement périe par cas fortuit, le contrat est caduc. Si elle l'est partiellement, et pour la même cause, l'acquéreur a le choix entre la caducité de la vente ou l'exécution de celle-ci, mais sans diminution du prix (pour une application au cas de destruction partielle par un incendie de l'immeuble objet d'une vente assortie d'une telle condition, V. Cass. 1 re civ. 20 nov. 1990, D. 1990, IR 294 , JCP 1992. II. 21841, note M. Dagot). 91. Pendente conditione, le contrat est formé, et aucune des parties ne peut se délier sans l'accord de l'autre. D'ailleurs, la vente a fait naître des obligations à la charge de chacune d'entre elles, en même temps que des droits sur la chose pour l'acquéreur. 92. Au titre des obligations, tout d'abord, chacun des contractants doit s'employer à favoriser l'accomplissement de la condition, dans la mesure où il en a le pouvoir (pour le vendeur, V. Cass. 1 re civ. 13 nov. 1950, Bull. civ. I, n o 221 ; pour l'acquéreur, V. infra, n os 98 et s.). La sanction de la méconnaissance de cette obligation par le vendeur ne peut consister, selon la jurisprudence, que dans une créance mobilière d'indemnité au profit de l'acquéreur (Cass. 1 re civ. 30 avr. 1970, Bull. civ. I, n o 148, JCP 1971. II. 16674, note L. Mourgeon). En outre, le vendeur ne doit rien faire qui soit de nature à contrarier le droit de l'acquéreur si la condition vient à se réaliser (Cass. 1 re civ. 13 nov. 1950, préc.). Ainsi, par exemple, il ne saurait, sans l'accord de son cocontractant, constituer une sûreté sur ce bien, ni le louer. Cependant, si la condition vient à s'accomplir, l'acquéreur ne sera protégé contre de tels actes que dans la mesure où la vente conclue sous condition suspensive était opposable aux tiers au moment où ils ont été passés (V. infra, n o 175). 93. Au titre des droits sur la chose, l'acquéreur se voit reconnaître, par l'article 1180 du code civil, le droit de faire tous actes conservatoires ; et l'article 2414 de ce code, substitué à l'ancien article 2125 par l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés, l'autorise, lorsque la vente porte sur un immeuble, à constituer une hypothèque sur celui-ci, laquelle sera évidemment suspendue à la même condition que la vente. De façon générale, la jurisprudence admet que les droits dont la réalisation est soumise à une condition suspensive peuvent être valablement cédés sous la même condition (Cass. 3 e civ. 20 juin 1973, Bull. civ. III, n o 433). b. - Condition accomplie 94. Relativement à l'accomplissement de la condition, il convient d'examiner deux questions : celle de la constatation de l'accomplissement et celle de l'effet rétroactif qui en découle. 95. La constatation de l'accomplissement de la condition, tout d'abord, doit, en cas de difficulté, être opérée suivant la directive énoncée par l'article 1175 du code civil ; ce texte dispose : « Toute condition doit être accomplie de la manière que les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût ». C'est donc la recherche de la commune intention des parties qui doit guider la démarche des juges du fond, dont l'appréciation est souveraine en la matière. Par exemple, ceux-ci sont fondés à décider, sur le fondement de l'article 1175, que des contractants n'ont pas pu envisager que les conditions suspensives relatives à l'obtention d'un prêt et à la délivrance d'un permis de construire auxquelles était subordonnée la vente d'une propriété, puissent s'accomplir plus de six ans après la signature du contrat, dès lors qu'aucune indexation, ni aucun coefficient de revalorisation du prix n'a été prévu (Cass. 3 e civ. 3 févr. 1982, Bull. civ. III, n o 37). 96. Cependant, il importe de compléter le principe de solution posé par l'article 1175 à l'aide de deux directives particulières. La première, dictée par la jurisprudence, intéresse la vente immobilière à crédit. L'article L. 312-16 du code de la consommation prévoit que, lorsqu'à l'occasion d'une opération relevant de la réglementation du crédit immobilier au consommateur (V. Crédit immobilier), l'acquéreur a indiqué qu'il entendait recourir à un prêt pour financer son achat, la vente (ou la promesse de vente) est conclue « sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assurent le financement ». La condition suspensive visée par l'article L. 312-16 est donc accomplie lorsque le prêt est obtenu. Mais, la loi n'ayant pas défini la notion d'obtention du prêt, celle-ci a été longtemps controversée. La Cour de cassation a marqué sa volonté de clore la discussion à la faveur, spécialement, de deux arrêts rendus par la première chambre civile. Le premier a énoncé que la condition d'obtention du prêt, au sens du texte, « est réputée réalisée dès la présentation par un organisme de crédit d'une offre régulière correspondant aux caractéristiques du financement de l'opération stipulées par l'emprunteur dans l'acte [de vente ou de promesse de vente] » (Cass. 1 re civ. 9 déc. 1992, Bull. civ. I, n o 309, D. 1993, somm. 210, obs. A. Penneau , JCP, éd. N, 1993. II. 121, note A. Gourio). Le second est venu préciser que l'offre répondant aux exigences précédemment énoncées ne doit pas, en outre, avoir été rétractée, par exemple, à l'annonce du licenciement de l'acquéreur-emprunteur, avant la date ultime prévue pour la réalisation de la vente (Cass. 1 re civ. 20 janv. 1993, Bull. civ. I, n o 30, JCP, éd. N, 1993. II. 121, note A. Gourio ; adde : Cass. 1 re civ. 17 nov. 1998, Bull. civ. I, n o 324 ; 9 févr. 1999, Dalloz Affaires 1999. 587). De ces décisions, il ressort que le prêt doit être considéré comme obtenu, et donc la condition suspensive accomplie, dès lors que l'emprunteur a reçu, dans le délai fixé par les parties, une offre de prêt régulière et conforme aux stipulations du contrat de vente (ou de promesse de vente). 97. La jurisprudence se montre très rigoureuse dans l'appréciation de la conformité de l'offre de prêt aux stipulations de la vente. Ainsi, au cas où le prêt n'a pas été acquis de l'organisme auprès duquel il était sollicité et où une offre de financement est faite par le vendeur aux mêmes conditions que celles qui ont été refusées par ledit organisme, le destinataire est libre de la décliner si les parties ne sont pas convenues, à l'avance, d'un financement de substitution (Cass. 3 e civ. 9 nov. 1988, D. 1989, somm. 340, obs. J.-L. Aubert). De même, lorsque le délai dont la condition d'obtention du prêt était assortie est expiré au moment où l'offre de prêt parvient à son destinataire, celui-ci est en droit d'opposer que la condition suspensive ne s'est pas réalisée ; la solution vaut alors même que ledit destinataire aurait été informé en temps utile par l'organisme prêteur auquel il s'est adressé, de « l'accord émis » sur sa demande (Cass. 3 e civ. 18 nov. 1992, Bull. civ. III, n o 303). 98. La seconde directive relative à la constatation de l'accomplissement de la condition est, quant à elle, posée par la loi. Elle concerne le cas où le défaut d'accomplissement de la condition est dû à une faute du débiteur. Aux termes de l'article 1178 du code civil : « La condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ». La jurisprudence a fait application de cette disposition, notamment, à propos de la condition suspensive de l'obtention de prêt assortissant la vente ou la promesse de vente immobilière : lorsque, par exemple, l'acquéreur n'a pas obtenu le prêt conditionnant son achat en raison de démarches insuffisantes (Cass. 3 e civ. 25 avr. 1978, JCP 1979. II. 19056, note S. Galle), ou de l'absence de toute demande de prêt en temps utile (Cass. 1 re civ. 19 juin 1990, Bull. civ. I, n o 175, D. 1990, IR 175 ), ou du retrait des pièces déposées à l'appui de sa demande sans attendre la réponse de l'organisme de crédit (Cass. 3 e civ. 4 févr. 1987, Bull. civ. III, n o 22), ou encore d'une demande incomplète, imprécise ou inexacte, déposée de surcroît à la hâte en sachant qu'elle est vouée à l'échec (Cass. 1 re civ. 25 oct. 1994, Defrénois 1995. 755, obs. D. Mazeaud), la condition d'obtention du prêt est réputée accomplie en vertu de l'article 1178. Lire la mise à jour 98. Illustration d'une condition suspensive dont l'accomplissement est empêché par le débiteur. - Cession d'un office notarial conclue sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt et d'une garantie : le cessionnaire avait commis l'erreur d'adresser lui-même une copie de la lettre destinée au cédant faisant part de ses inquiétudes à la chambre départementale des notaires, et il n'avait ni signé ni communiqué aux instances professionnelles la convention que le cédant était prêt à signer pour faire face à ses inquiétudes (Civ. 1 re , 6 mai 2010, n o 09-14.690 , Dalloz actualité, 25 mai 2010, obs. Guiomard). Demande de prêt non conforme au contrat : condition réputée accomplie. - Les particuliers qui s'engagent à acquérir un bien immobilier sous condition suspensive d'obtention d'un prêt et effectuent une demande au nom d'une société civile immobilière en cours de constitution, sans avoir exercé la faculté de substitution prévue à l'acte, ne justifient pas d'une demande de prêt conforme aux caractéristiques stipulées dans l'acte sous seing privé. Dès lors, en application de l'article 1178 du code civil, la condition est réputée accomplie (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 12-13.796 , Dalloz actualité, 2 avr. 2013, obs. Garcia). 99. La jurisprudence a précisé, de surcroît, que, si l'emprunteur n'obtient pas le prêt, c'est à lui qu'il revient de prouver qu'il a sollicité, dans le délai convenu, un financement conforme aux caractéristiques définies dans la promesse ou dans la vente (Cass. 1 re civ. 13 nov. 1997, Bull. civ. I, n o 310 ; 9 févr. 1999, Dalloz Affaires 1999. 587 ; 13 févr. 2001, Bull. civ. I, n o 33 ; 7 mai 2002, JCP 2002. IV. 2030) ; à défaut de quoi la condition est réputée accomplie. 100. Enfin, il convient de rappeler que, selon l'article 1178 du code civil, pour que la condition soit réputée accomplie, il faut que sa réalisation ait été empêchée par le contractant « obligé sous cette condition ». La Cour de cassation en a déduit, dans une affaire où deux époux avaient acquis une propriété rurale sous la condition suspensive de l'obtention de prêts, et où le refus du père de l'épouse de se porter caution solidaire des intéressés avait empêché l'obtention de ces prêts, que l'article 1178 n'était pas applicable (Cass. 1 re civ. 23 nov. 1983, Bull. civ. I, n o 279). 101. Une fois l'accomplissement de la condition constaté, il convient, ensuite, d'en mesurer l'effet. Abstraction faite des difficultés éventuellement suscitées par son opposabilité aux tiers (V. infra, n o 175), la condition a, en principe, un effet rétroactif. L'article 1179 du code civil dispose en ce sens : « La condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté ». Il en découle que, lorsque la condition suspensive est réalisée, elle rétroagit à la date du contrat. 102. Appliqué à la vente, le principe de rétroactivité de la condition signifie que l'acquéreur est réputé propriétaire depuis le jour où le contrat a été conclu, et non à la date de réalisation de la condition. Ainsi s'explique notamment que, pour savoir s'il y a eu ou non lésion, il faille se placer au moment de la conclusion de la vente et non au jour de l'accomplissement de la condition (V. Vente [2 o formation]). Surtout, le jeu de la rétroactivité de la condition a pour effet de valider définitivement les actes accomplis par l'acquéreur sur le bien pendant la période d'incertitude. Par exemple, il a été jugé que le congé délivré au actes accomplis par l'acquéreur sur le bien pendant la période d'incertitude. Par exemple, il a été jugé que le congé délivré au preneur par l'acquéreur d'un domaine rural durant la période où la condition de non-exercice du droit de préemption était pendante, devait être regardé comme valable dès lors que la condition s'était accomplie (Cass. 3 e civ. 3 févr. 1982, Bull. civ. III, n o 35). 103. Le principe de la rétroactivité attachée à l'accomplissement de la condition n'a pas, toutefois, une portée absolue. En premier lieu, les parties sont libres de l'écarter, puisque l'article 1179 du code civil n'est pas un texte d'ordre public. Par l'effet d'une telle renonciation à la rétroactivité, la vente ne produira ses pleins effets qu'à partir du jour de la réalisation de la condition. Par exemple, les contractants sont en droit d'inclure, dans une promesse synallagmatique de vente immobilière conclue sous la condition suspensive de la réitération du compromis en la forme d'un acte authentique, une clause stipulant que le transfert de la propriété aura lieu, si la condition se réalise, non au jour de la promesse, mais à la date de la rédaction dudit acte authentique (Cass. 1 re civ. 30 avr. 1970, JCP 1971. II. 16674, note L. Mourgeon). De même, l'acte de vente peut stipuler que l'acquéreur n'aura la jouissance de l'immeuble (en l'occurrence, le droit de percevoir les loyers) qu'à compter de la réalisation de la condition ; en ce cas, le même acquéreur ne saurait invoquer le caractère rétroactif du transfert de propriété, lié à la survenance de la condition, pour prétendre à la perception des loyers dès la conclusion de l'acte de vente (Cass. 3 e civ. 19 juill. 1995, Defrénois 1996. 346, obs. P. Delebecque). 104. En second lieu, le jeu de la rétroactivité de la condition est contrarié par deux tempéraments importants. L'un, qui est de source légale, a trait à la question des risques de la chose. L'article 1182 du code civil dispose à cet égard : « Lorsque l'obligation a été contractée sous une condition suspensive, la chose qui fait la matière de la convention demeure aux risques du débiteur qui ne s'est obligé de la livrer que dans le cas de l'événement de la condition ». Il ressort de ce texte que, durant la période où la condition suspensive est pendante, le vendeur conserve la charge des risques, et que cette solution est maintenue même après que la condition se soit réalisée. Par là, la loi opère une dissociation entre le transfert de la propriété, qui rétroagit à la date de la conclusion du contrat, et le transfert des risques qui, quant à lui, n'intervient qu'à compter de la réalisation de la condition. Il s'ensuit, spécialement, qu'au cas de perte partielle de l'immeuble vendu, consécutive à un incendie survenu avant l'accomplissement de la condition, c'est le vendeur qui conserve le bénéfice de l'indemnité d'assurance (Cass. 1 re civ. 20 nov. 1990, JCP 1992. II. 21841, note M. Dagot). 105. L'autre tempérament apporté au jeu de la rétroactivité de la condition est de source prétorienne : à la lecture de décisions anciennes, il semble que la restitution des fruits perçus par le vendeur pendant la période d'incertitude soit écartée, alors que la rétroactivité devrait logiquement permettre à l'acquéreur de prétendre aux fruits dès le jour du contrat (CA Paris, 28 oct. 1893, DP 1894. 2. 104). c. - Condition défaillie 106. La constatation de la défaillance de la condition peut susciter des difficultés. Selon l'article 1176 du code civil : « Lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixe, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé ». Ainsi, la seule survenance du terme du délai prévu par le contrat pour la réalisation de la condition emporte la défaillance de celle-ci (pour un cas où la réalisation d'un acte sous seing privé en la forme authentique, à laquelle étaient suspendus les effets de la vente, n'était pas intervenue dans le délai convenu, V. Cass. 3 e civ. 11 oct. 1978, D. 1979, IR 60). 107. Si les parties n'ont soumis l'accomplissement de la condition à aucun délai, le même texte énonce : « … la condition peut toujours être accomplie ; et elle n'est censée défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas ». La jurisprudence veille, de façon générale, à l'application scrupuleuse de ce texte. Ainsi, par exemple, elle a censuré, pour violation de l'article 1176 du code civil, une cour d'appel qui avait déclaré caduque la promesse synallagmatique de vente d'un local commercial conclue en décembre 1967 sous la condition suspensive que l'acquéreur obtiendrait la licence d'exploitation d'une pharmacie, au seul motif que cette licence avait été obtenue seulement en janvier 1973 (Cass. 3 e civ. 4 mars 1975, JCP 1976. II. 18510, note M.-F. Nicolas). Plus récemment, et toujours à propos d'une vente immobilière, la même juridiction a rappelé que « la stipulation d'une condition suspensive sans terme ne confère pas à l'obligation un caractère perpétuel », et donc que le contrat subsiste aussi longtemps que la condition n'est pas défaillie (Cass. 1 re civ. 4 juin 1991, D. 1992. 170, note M.-O. Gain , RTD civ. 1991. 737, obs. J. Mestre , Defrénois 1992. 322, obs. J.-L. Aubert ; adde : Cass. 3 e civ. 24 juin 1998, Bull. civ. III, n o 139, D. 1999. 403, note H. Kenfack , Defrénois 1998. 1411, obs. D. Mazeaud ; 4 mai 2000, Bull. civ. III, n o 99, RD imm. 2000. 585, obs. J.-C. Groslière ; 19 déc. 2001, Bull. civ. III, n o 158, D. 2002. 1586, note H. Kenfack , Contrats, conc., consom. 2002, comm. 57, obs. L. Leveneur). 108. La solution est rigoureuse pour le vendeur dont le bien risque, de la sorte, d'être immobilisé durant un temps très long. Aussi, un arrêt de la Cour de cassation paraît de nature à la tempérer par le recours, semble-t-il, à la notion de délai tacitement convenu. Il approuve une cour d'appel d'avoir jugé caduque une vente immobilière conclue sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire, bien que la condition, qui n'était enfermée dans aucun délai, se soit réalisée, dès lors que ladite cour d'appel « a, par une recherche de la commune intention des parties, retenu souverainement que celles-ci n'avaient pu envisager que les conditions suspensives prévues puissent s'accomplir plus de six ans après la convention, alors qu'il n'avait été stipulé aucune indexation du prix de vente ni aucun coefficient de revalorisation » (Cass. 3 e civ. 3 févr. 1982, Bull. civ. III, n o 37). À la lecture de cet arrêt, il apparaît qu'en se fondant sur la commune intention des parties, le juge peut décider qu'une condition non accomplie est « censée défaillie », bien que le contrat n'ait enfermé dans aucun délai la réalisation de cette condition. 109. La conséquence de la défaillance de la condition est, en principe, la caducité de la vente. Cela signifie que, si la condition ne se réalise pas, la vente est de plein droit anéantie. Ainsi, par exemple, il a été jugé que, dans le cas d'une vente immobilière conclue sous la condition suspensive de non-exercice par le preneur de son droit de préférence, la volonté manifestée expressément par le même preneur, dans le délai fixé, de préempter rend la vente au tiers caduque par défaillance de la condition et, en l'espèce, parfaite entre le vendeur et le preneur (Cass. 3 e civ. 16 juin 1999, Bull. civ. III, n o 142). La caducité peut être invoquée aussi bien par le vendeur que par l'acquéreur, dès lors que la condition n'a pas été stipulée dans l'intérêt exclusif d'une partie (Cass. 3 e civ. 13 juill. 1999, Bull. civ. III, n o 179, Dalloz Affaires 1999. 1461, obs. J. F., RD imm. 1999. 666, obs. J.-C. Groslière ). 110. Du fait de l'anéantissement de la vente conditionnelle, les choses sont remises dans l'état antérieur. Le vendeur n'est donc pas tenu de livrer le bien ; et il doit restituer les arrhes et acompte que l'acquéreur lui a éventuellement versés (Cass. 3 e civ. 6 mars 1973, Bull. civ. III, n o 176). La loi fait application expresse de ce principe dans le cadre de la réglementation de la vente immobilière à crédit au consommateur : l'article L. 312-16, alinéa 2, du code de la consommation énonce que, lorsque la condition d'obtention du prêt n'est pas réalisée, « toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit ». Par sa généralité, le texte intéresse l'ensemble des sommes éventuellement versées d'avance par le bénéficiaire, que ce soit à titre d'arrhes ou de dédit, de clause pénale ou d'indemnité d'immobilisation. Il en ressort expressément que le droit à restitution naît, au profit de l'acquéreur-emprunteur, dès l'instant où la condition d'obtention du prêt est défaillie, c'est-à-dire lorsque le prêt est refusé ou à l'expiration du délai dans lequel le prêt devait être accordé, si, à ce moment, l'acquéreur n'a pas reçu une offre régulière et conforme aux stipulations du contrat de vente (ou de promesse de vente). Le remboursement doit donc être immédiat. 111. Afin d'inciter le vendeur (ou le promettant) à faire diligence, l'article L. 312-16, alinéa 2, précise que : « À compter du quinzième jour suivant la demande de remboursement, [la créance de restitution] est productive d'intérêts au taux légal majoré de moitié ». Au surplus, le défaut de remboursement des sommes dues à l'acquéreur-emprunteur expose le contrevenant à une peine d'amende de 30 000 € (C. consom., art. L. 312-35). 112. Le principe de caducité de la vente, au cas de défaillance de la condition suspensive dont le contrat était assorti, souffre deux exceptions. La première concerne le cas, déjà rencontré, où cette défaillance est due à la faute de « la partie qui s'oblige » ; la condition est alors réputée accomplie (C. civ., art. 1178 ; V. supra, n o 98). 113. La seconde exception réside dans la renonciation à la condition. Lorsque la condition a été stipulée au profit d'une seule partie, celle-ci est en droit d'y renoncer unilatéralement, et, du même coup, de contraindre l'autre partie à réaliser la vente malgré la défaillance de la condition (Cass. 3 e civ. 5 févr. 1971, D. 1971. 281 ; adde : Cass. 3 e civ. 26 juin 1996, Bull. civ. III, n o 163, Defrénois 1996. 1359, obs. P. Delebecque). Au cas où la condition répond à l' intérêt des deux contractants, ceux-ci peuvent convenir de renoncer à se prévaloir des conséquences juridiques de sa défaillance (Cass. 1 re civ. 24 oct. 1978, Bull. civ. I, n o 321, Defrénois 1979. 870, obs. J.-L. Aubert). La renonciation n'est soumise à aucune formalité particulière ; elle peut résulter de l'exécution du contrat malgré la défaillance de la condition (même arrêt). 3° - Condition résolutoire 114. Aux termes de l'article 1183 du code civil : « La condition résolutoire est celle qui, lorsqu'elle s'accomplit, opère la révocation de l'obligation, et qui remet les choses au même état que si l'obligation n'avait pas existé ». Il ressort de cette définition que, lorsqu'une vente est assortie d'une telle condition, si celle-ci survient, la vente est résolue, c'est-à-dire rétroactivement anéantie. 115. À la différence de la condition suspensive, la condition résolutoire est rarement stipulée dans la vente immobilière, qu'elle a pour effet de soumettre à un régime fiscal très désavantageux (V. infra, n o 122). Elle se rencontre cependant même en cette matière, ainsi que l'attestent diverses illustrations jurisprudentielles : il été jugé, par exemple, qu'est contractée sous condition résolutoire la vente qui prévoit qu'en cas de non-paiement du prix à l'époque convenue, le vendeur se réserve la faculté de faire prononcer la résolution du contrat (Cass. req. 7 avr. 1874, DP 1874. 1. 289) ; de même, l'adjudicataire d'un immeuble saisi est considéré comme propriétaire sous condition résolutoire d'une déclaration de surenchère (Cass. civ. 18 nov. 1924, DP 1925. 1. 25, note P. Matter) ; de même encore, la stipulation, enfermée dans un acte sous seing privé, et suivant laquelle la réitération en la forme authentique devra intervenir avant une date limite, a été interprétée comme énonçant une condition résolutoire (Cass. 3 e civ. 31 janv. 1978, D. 1978. 348). 116. La loi organise, d'ailleurs, avec la vente à réméré, une vente sous condition résolutoire qui n'est pas totalement délaissée par la pratique dans le domaine immobilier (V. infra, n o 143). Mais, pour la raison fiscale précédemment évoquée, les ventes qui sont assorties d'une condition résolutoire sont surtout des ventes mobilières : la vente à réméré est fréquemment utilisée dans le cadre des cessions de valeurs mobilières (V. infra, n o 143) ; et la vente de marchandises avec faculté de restitution, lorsqu'elle a la nature d'un contrat estimatoire, est, en principe, une vente sous condition résolutoire (V. Vente [2 o formation]). 117. L'étude de l'incidence de la condition résolutoire sur la vente commande de distinguer selon que la condition est pendante, défaillie ou accomplie. Tant que la condition est pendante, il ressort de l'article 1183 du code civil que la vente produit tous ses effets, et ce, dès sa conclusion. Spécialement, elle emporte, au jour de l'accord des volontés, le transfert immédiat de la propriété et des risques, du vendeur vers l'acheteur, sauf stipulation contraire des parties. Conformément à ce principe, au cas de vente de marchandises avec faculté de restitution, puisque les risques de la chose sont à la charge de l'acheteur dès la conclusion du contrat, celui-ci doit payer le prix desdites marchandises si elles périssent par cas fortuit ou si elles lui ont été volées (CA Chambéry, 8 juin 1897, DP 1898. 2. 246) ; de même, dans l'éventualité où la marchandise a été détériorée, le vendeur a le droit de la refuser lors de la restitution. 118. La constatation de la défaillance de la condition résolutoire peut susciter les mêmes difficultés que celle de la condition suspensive (V. supra, n os 106 et s. ; V. aussi Condition). Dans une vente assortie d'une faculté de restitution, on considère que la condition est défaillie lorsque, à l'intérieur du délai déterminé par le contrat ou par les usages, l'acquéreur a revendu la que la condition est défaillie lorsque, à l'intérieur du délai déterminé par le contrat ou par les usages, l'acquéreur a revendu la marchandise, ou lorsqu'il a manifesté son intention de conserver celle-ci. La vente est alors consolidée ; et l'acquéreur doit payer le prix desdites marchandises (CA Paris, 12 déc. 1980, D. 1981, IR 447, obs. C. Larroumet). 119. Si l'événement incertain qui constitue la condition vient à s'accomplir, le contrat est, en vertu de l'article 1183 du code civil, résolu, autrement dit rétroactivement anéanti. Le vendeur recouvre la propriété de son bien comme si la vente n'avait pas eu lieu ; et l'acquéreur est censé n'avoir jamais été propriétaire. Cela signifie, par exemple, que, toujours dans le cas d'une vente de marchandise avec faculté de restitution, si, au terme du délai convenu ou prévu par les usages, l'acquéreur n'a pas revendu la marchandise et n'a pas manifesté son intention de la conserver, la vente devient caduque ; l'acquéreur peut donc restituer la chose. 120. Pour mesurer la véritable portée de l'anéantissement rétroactif de la vente, consécutif à la réalisation de la condition, il importe d'examiner successivement le sort réservé aux actes accomplis sur le bien durant la période où la condition était pendante, et les conséquences attachées à la rétrocession de celui-ci. Quant aux actes accomplis sur le bien, la jurisprudence établit une distinction entre, d'une part, les actes constitutifs de droits réels, et, d'autre part, les actes conservatoires, les actes d'administration et de jouissance : les premiers sont anéantis ; par conséquent, les droits réels constitués sur le bien pendente conditione par l'acquéreur disparaissent, sous réserve que la condition résolutoire ait été opposable à leurs titulaires au moment où ces droits leur ont été consentis (V. infra, n os 168 et s.). Les seconds, spécialement les actes d'administration et de jouissance, ne sont pas affectés par la rétroactivité dès lors qu'ils ont été accomplis sans fraude (Cass. civ. 18 nov. 1924, DP 1925. 1. 25, note P. Matter) ; de même, l'acquéreur conserve les fruits (même arrêt ; adde : Cass. req. 26 févr. 1908, S. 1909. 1. 461 ; Cass. 1 re civ. 18 févr. 1975, Bull. civ. I, n o 67, D. 1975, somm. 71). 121. Quant aux conséquences attachées à la rétrocession, le jeu de la condition résolutoire conduit, comme celui de la condition suspensive, à dissocier la question des risques et celle de la propriété. Les risques de la chose, survenus pendente conditione, devraient a priori, sauf stipulation contraire, demeurer à la charge de l'acquéreur, la rétroactivité de la condition résolutoire souffrant, à cet égard et par analogie, le même tempérament que la rétroactivité attachée à la condition suspensive (V. supra, n o 104). Pourtant, à propos d'une vente de marchandises assortie d'une faculté de restitution, il a été jugé que, parce qu'il est tenu d'une obligation qui s'apparente à celle d'un dépositaire, le détaillant qui doit garder et restituer à son fournisseur les marchandises invendues peut, en cas de perte de celles-ci, s'exonérer de toute responsabilité en démontrant que ce dommage n'était pas imputable à sa faute (Cass. 1 re civ. 22 janv. 1991, Bull. civ. I, n o 28). 122. S'agissant de la propriété, la rétroactivité de la condition résolutoire est assortie d'une limite importante, dans la mesure où, en matière de vente immobilière, l'administration fiscale refuse d'en tenir compte ; cette administration considère qu'en réalité, le jeu de la condition résolutoire entraîne un second transfert de la propriété : après celui opéré du vendeur vers l'acheteur lors de la conclusion de la vente, s'opère un nouveau transfert de la propriété, de l'acheteur vers le vendeur cette fois. En raison de ce double transfert, l'impôt de mutation est dû deux fois : d'une part, lors de la conclusion de la vente ; d'autre part, lors de la réalisation de la condition, étant observé que l'article 1961 du code général des impôts interdit alors de restituer à l'acquéreur l'impôt versé une première fois. Ces considérations d'ordre fiscal expliquent que la condition résolutoire ne soit guère stipulée dans la vente immobilière. C. - Dissociation du transfert de la propriété et des risques 123. La règle de l'article 1138, alinéa 2, du code civil, qui lie les risques à la propriété est, comme celle du transfert immédiat de la propriété, une règle supplétive de volonté ; les parties sont donc libres d'y déroger. À cet égard, il y a lieu de rappeler, tout d'abord, que la dissociation du transfert de la propriété et du transfert des risques découle normalement, même si elle n'a pas été recherchée, de la stipulation, dans le contrat de vente, d'une condition suspensive ou résolutoire. En effet, l'accomplissement de la condition suspensive, s'il investit rétroactivement l'acquéreur de la propriété du bien durant la période où la condition était pendante, n'en laisse pas moins les risques à la charge du vendeur durant la même période (V. supra, n o 104) ; la solution paraît transposable - mais, cette fois, à la charge de l'acheteur - lorsqu'une condition résolutoire a été prévue et vient à se réaliser, en dépit d'un arrêt contraire (V. supra, n o 121). 124. Mais, même en dehors de ces cas, les contractants sont en droit, par une clause adéquate, de rompre le lien entre la propriété et les risques : la Cour de cassation a posé en ce sens, par exemple, que « si en principe la vente d'un corps certain met la chose vendue aux risques de l'acheteur, les parties peuvent, par une convention particulière, laisser les risques de cette chose à la charge du vendeur pendant un certain temps, et notamment jusqu'à la livraison » (Cass. civ. 8 juin 1904, DP 1904. 1. 455, à propos d'un cheval mort avant la livraison, le contrat de vente stipulant expressément le maintien des risques à la charge du vendeur jusqu'à cette date). 125. Pour que la clause dissociant le transfert de la propriété et le transfert des risques soit efficace, il faut qu'elle réunisse deux conditions : elle doit, d'abord, être dépourvue d'ambiguïté, car la jurisprudence incline à poser qu'une stipulation qui, par exemple, vise le seul transfert des risques, concerne également, à défaut de précision contraire, le transfert de la propriété (Cass. com. 19 juill. 1965, D. 1966. 450, note P.-M.-F. Durand ; CA Rouen, 6 juin 1991, RJDA 1991, n o 700, p. 613). 126. La clause considérée doit, ensuite, avoir été connue et acceptée par les deux parties. Il a été jugé sur ce point qu'une clause qui figurait, parmi plusieurs autres, au dos du bon de commande d'un mobilier, et qui stipulait que les marchandises voyageaient aux risques et périls du destinataire, n'avait pas été acceptée par l'acquéreur, auquel elle était donc inopposable, dès lors que celui-ci n'avait signé que le recto de ce document (Cass. 1 re civ. 3 mai 1979, Bull. civ. I, n o 128, Gaz. Pal. 1979. 2, somm. 431). 127. Les clauses dissociant le transfert de la propriété et le transfert des risques se rencontrent fréquemment dans les ventes où une clause de réserve de propriété est stipulée (D. VON BREITENSTEIN, La clause de réserve de propriété et le risque de perte fortuite de la chose vendue, RTD com. 1980. 43) ; on les rencontre également très souvent dans les ventes maritimes. § 2 - Applications 128. Les aménagements conventionnels auxquels peut prêter le transfert de la propriété et des risques relèvent d'un régime spécifique dans deux cas particuliers, savoir : d'une part, lorsque la vente est assortie d'une clause de réserve de propriété, et, d'autre part, lorsque la vente a été conclue à réméré. Lire la mise à jour 79, 128, 140 s., 177 s. Simplification du droit. Réméré. - Le terme de « réméré » a été supprimé par la loi n o 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit : à l'article 1659, les mots : « ou de réméré » sont supprimés ; à l'article 1662, les mots : « de réméré » sont remplacés par les mots : « en rachat »; aux articles 1664, 1667 et 1668, au premier alinéa de l'article 1671 et aux premier et deuxième alinéas de l'article 1672, le mot : « réméré » est remplacé par le mot : « rachat ». A. - Vente avec réserve de propriété 129. Chaque fois qu'une vente est conclue à terme ou sous condition suspensive, puisque le transfert de la propriété n'a pas lieu immédiatement, le propriétaire « se réserve » la propriété du bien jusqu'à la survenance du terme ou de la condition. Mais la clause reportant ou suspendant de la sorte ledit transfert ne s'analyse pas forcément comme une clause de réserve de propriété au sens précis du terme ; celle-ci peut être définie, en effet, comme une clause par laquelle le vendeur à crédit d'un bien, tout en livrant ce bien, stipule qu'il en conservera la propriété, à titre de garantie, jusqu'au complet paiement. Lire la mise à jour 129 s. Clause de réserve de propriété et procédures collectives. - Bibliographie. – SOUWEINE, Revendication du prix de revente par le bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété : à la recherche d'une cohérence en droit des entreprises en difficulté, D. 2011. 2617 . Clause de réserve de propriété : action en paiement contre le sous-acquéreur. - L'action en paiement exercée par le vendeur initial à l'encontre d'un sous-acquéreur de biens vendus avec clause de réserve de propriété s'analyse en une action personnelle et non en une action réelle. Viole, dès lors, les articles L. 622-7, L. 622-21, L. 624-18, L. 631-14 et L. 631-18 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, la cour d'appel qui accueille la demande en paiement du prix impayé formée par le vendeur initial à l'encontre du sous-acquéreur en liquidation judiciaire, alors que l'action tendait au paiement d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de ce dernier (Com. 6 oct. 2009, n o 08-15.048 , D. 2009. 2482, obs. Lienhard ; D. 2009. Chron. 2580 ; JCP 2009. 566, note Dallemagne). 130. La clause de réserve de propriété ainsi comprise se rencontre parfois dans les ventes immobilières (C. ATIAS, Le transfert conventionnel de la propriété immobilière, thèse dactyl., Poitiers, 1974 ; C. SAINT-ALARY HOUIN, Réflexions sur le transfert différé de la propriété immobilière, Mélanges Raynaud, 1985, Dalloz-Sirey, p. 733 et s. ; F. DERRIDA, À propos de la clause de réserve de propriété dans les ventes immobilières à crédit, Defrénois 1989. 1089). Mais, en raison de sa faible utilisation en cette matière, elle n'a suscité aucune attention particulière de la part du législateur ; de sorte que, pour en définir la nature et le régime, il suffit d'interpréter la commune intention des parties : selon que celles-ci ont entendu faire du paiement, dans le délai convenu, un terme ou - de manière critiquable (V. infra, n o 133) - une condition suspensive, ou selon qu'elles ont fait du non-paiement, dans le même délai, une condition résolutoire, la vente immobilière assortie d'une clause de réserve de propriété doit se voir appliquer les règles de la vente à terme, de la vente sous condition suspensive ou de la vente sous condition résolutoire (rappr. F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 194 ; comp. C. SAINT-ALARY HOUIN, article préc., spéc. p. 743 et s.). 131. Le législateur a, en revanche, accordé sa sollicitude à la clause de réserve de propriété stipulée dans une vente de meubles corporels, spécialement au cas où l'acheteur qui ne paie pas à l'échéance convenue est soumis à une procédure collective. L'efficacité de la clause de réserve de propriété à l'égard de la procédure collective a été consacrée par la loi n o 80- 335 du 12 mai 1980 (D. 1980. 200), modifiant la loi n o 67-563 du 13 juillet 1967 relative au règlement judiciaire et à la liquidation des biens (D. 1967. 269), puis par les législations postérieures gouvernant la matière, qu'il s'agisse de la loi n o 85- 98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires (D. 1985. 147), de la loi n o 94-475 du 10 juin 1994 relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises (D. 1994. 308), ou encore, plus récemment, de la loi n o 2005-845 du 26 juillet 2005, dite « de sauvegarde des entreprises », à travers le nouvel article L. 624-16, alinéa 2, du code de commerce (lui-même modifié par l'Ord. n o 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés, D. 2006. 1311). Mais il est remarquable que, tandis que, jusqu'alors, la clause de réserve de propriété incluse dans une vente de meubles corporels n'était soumise qu'à une réglementation relevant de textes compris dans le code de commerce, à la faveur de l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés, figure désormais dans le code civil, au sein des textes traitant des sûretés réelles portant sur les meubles, un chapitre spécial relatif à « la propriété retenue à titre de garantie », qui englobe les nouveaux articles 2367 à 2372 du code civil. Même si l'introduction de la réserve de propriété dans le code civil a dû être effectuée à droit constant, elle n'en traduit pas moins la prise de conscience par le législateur de la spécificité et du rayonnement de ce mécanisme. 132. L'article 2367 du code civil dispose, à l'alinéa 1 er : « La propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation ». Ce texte, outre qu'il vise au premier chef la vente à travers la référence au contrat doté d'un effet translatif, affecte, en présence de ce contrat, la réserve de propriété au service du paiement du prix, qui constitue la contrepartie du transfert. En quoi - l'alinéa 2 du même texte le confirme expressément - « La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement » et, du même coup, doit être rangée dans la catégorie des sûretés, comme l'énonce d'ailleurs le nouvel article 2329 du code civil, issu de la même ordonnance. Sur ces points, les nouveaux textes transposent en matière civile les solutions posées par la jurisprudence commerciale antérieure (V., par ex., Cass. com. 15 mars 1988, D. 1988. 330, note F. Pérochon). 133. En ce qu'il dote la clause d'un effet suspensif du transfert de la propriété, l'article 2367 du code civil n'est pas dépourvu d'ambiguïté. Sans doute, il exclut que la réserve de propriété puisse affecter la formation même de la vente, puisqu'il évoque uniquement la suspension de l'effet translatif. Mais il ne dit rien du point de savoir si cette suspension a la nature d'une condition ou celle d'un terme. On sait que, dans le droit des procédures collectives, à défaut de clause contraire, la jurisprudence analyse la réserve de propriété comme une condition suspensive attachée au paiement du prix (Cass. com. 19 oct. 1982, Bull. civ. IV, n o 321, D. 1983, IR 482, obs. B. Audit, RTD civ. 1984. 515, obs. J. Huet ; 11 juin 1985, Bull. civ. IV, n o 190). Avant la modification apportée à l'article L. 624-16, alinéa 2, du code de commerce par l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006, la solution pouvait s'autoriser de la définition littérale de la clause donnée en la matière, ce texte, à l'instar des textes antérieurs, décrivant la clause de réserve de propriété comme « subordonnant le transfert de propriété au paiement intégral du prix ». Elle n'en était pas moins regrettable, car elle revenait à analyser un effet de la vente, savoir l'obligation de payer, comme une condition, laquelle est par définition un élément extérieur au contrat ; de surcroît, faire du paiement un événement incertain a pour effet de lui conférer la nature d'une condition purement potestative pour l'acquéreur (rappr., à propos de la réitération de l'acte sous seing privé en la forme authentique, supra, n o 83). Aussi, une partie de la doctrine a toujours préféré voir dans la réserve de propriété un terme suspensif (V. J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 605 ; comp. PÉROCHON, La réserve de propriété dans la vente des meubles corporels, 1988, Litec, n os 25 et s.). Cette dernière analyse paraît désormais compatible avec la lettre des textes : d'une part, l'article L. 624-16, alinéa 2, du code de commerce, dans sa dernière version, ne décrit plus la clause de réserve de propriété comme « subordonnant le transfert de propriété au paiement intégral du prix » ; d'autre part, le nouvel article 2367 du code civil énonce que la clause de réserve de propriété « suspend [et non pas subordonne] l'effet translatif jusqu'au complet paiement ». Il suggère ainsi que, dans l'esprit des rédacteurs de la clause, le paiement doit être envisagé comme certain pour que celle-ci puisse être analysée comme une réserve de propriété ; ce qui oriente la qualification d'une telle réserve vers le terme plutôt que vers la condition. 134. L'intérêt du débat n'est pas académique, dans la mesure où, si le terme, comme la condition suspensive, empêche le transfert immédiat de la propriété et des risques, sa survenance ne produit pas l'effet rétroactif attaché, sauf convention contraire, à l'accomplissement de la condition (V. supra, n os 69 et s., pour le terme, et n os 101 et s., pour la condition suspensive). Pour le reste - et quelle que soit l'analyse retenue -, puisque le vendeur conserve la propriété de la chose jusqu'au complet paiement, il conserve aussi, sauf clause contraire, la charge des risques. Il a été jugé en ce sens que les risques nés de la perte d'une installation de nickelage, vendue et livrée par le vendeur mais non encore intégralement payée, devaient être supportés par celui-ci, bien que la perte fût consécutive à un incendie survenu dans les ateliers de l'acheteur (CA Metz, 29 oct. 1980, sur renvoi après cassation de Cass. com. 20 nov. 1979, JCP 1981. II. 19615, note J. Ghestin, D. 1981. 138, note Y. Guyon ; et, sur pourvoi contre l'arrêt de la cour de Metz, Cass. com. 19 oct. 1982, préc. supra, n o 133). De même, au cas de cession d'actions de société assortie d'une clause de réserve de propriété, les risques liés à la perte de valeur desdites actions doivent être supportés par le cédant (Cass. com. 11 juin 1985, préc. supra, n o 133). 135. La jurisprudence se montre, d'ailleurs, particulièrement favorable à l'acheteur lorsque le matériel ou la marchandise restitué par celui-ci en raison du défaut de paiement a été détérioré : elle pose que l'obligation de restitution de l'acheteur est une obligation de moyens et non de résultat, et que, partant, c'est au vendeur qui souhaite être indemnisé d'établir que l'acheteur n'a pas apporté à la conservation de la chose tous les soins d'un bon père de famille (Cass. com. 19 oct. 1982, préc. supra, n o 133). Corrélativement, si les marchandises ont été sinistrées, les droits du vendeur doivent être reportés sur l'indemnité d'assurance (CA Aix-en-Provence, 18 oct. 1990, JCP, éd. E, 1991. I. 46, n o 13, obs. M. Cabrillac ; CA Rouen, 25 avr. 1991, Rev. proc. coll. 1993. 124, obs. B. Soinne). Le nouvel article 2372 du code civil dispose, d'ailleurs, en ce sens : « Le droit de propriété se reporte […] sur l'indemnité d'assurance subrogée au bien ». Lire la mise à jour 135. Vente sous réserve de propriété : obligation de conservation de la chose est une obligation de moyens. - Il est admis, en cas de vente sous réserve de propriété, que c'est le vendeur qui doit supporter les risques de perte de la chose vendue, tant que le prix n'a pas été intégralement payé par l'acheteur, car ils sont liés à la propriété de la chose, en application de l'adage res perit domino. Cela ne signifie pas pour autant que l'acheteur auquel la chose vendue a été livrée et qui se trouve désormais physiquement dans ses locaux est dédouané de toute responsabilité. Tout comme le locataire et le dépositaire, il est tenu d'une obligation de conservation, que la jurisprudence qualifie logiquement d'obligation de moyens, puisqu'elle la fonde sur l'article 1137, alinéa 1 er , du code civil, texte qui exige simplement de l'acheteur qu'il apporte à la chose acquise « tous les soins d'un bon père de famille ». Cette solution a d'abord été posée par la jurisprudence, dans la célèbre (en son temps) affaire Mécarex, à propos de l'hypothèse d'un matériel péri par incendie dans les locaux de l'acquéreur (Com. 19 oct. 1982, Bull. civ. IV, n o 321 ; D. 1983. IR 482, obs. Audit ; RTD civ. 1984. 515, obs. Huet). Elle l'étend aujourd'hui, sans surprise, à celle de la chose volée. L'enjeu de cette qualification d'obligation de moyens se situe, comme souvent, sur le terrain de la preuve : le vendeur, qui tente d'obtenir le complet paiement du prix – ce à quoi tente de s'opposer l'acheteur – devra établir, outre que la chose commandée a été effectivement livrée, ce qui est aisé, que l'acquéreur a manqué à son obligation de conservation, ce qui l'est moins (Com. 26 mai 2010, n o 09-66.344 , Dalloz actualité, 4 juin 2010, obs. Delpech). 136. La conservation de la propriété par le vendeur, indépendamment de ses conséquences au regard des risques, implique que l'acquéreur n'a que la détention de la chose et ne devrait donc pouvoir ni en user, ni en disposer. Cependant une telle solution, en dépit de son orthodoxie, serait inappropriée : au cas d'achat de matériel d'équipement, il importe de laisser l'acquéreur utiliser ce matériel, sinon l'investissement réalisé ne présenterait aucun intérêt ; et, au cas d'achat de marchandises destinées à la revente, interdire à l'acheteur de revendre celles-ci jusqu'à ce qu'il les ait payées aurait pour conséquence de paralyser le fonctionnement des circuits commerciaux. Il convient, sur ce dernier point, de permettre à l'acheteur de revendre les marchandises, même s'il ne les a pas payées, étant précisé que, toujours selon l'article 2372 du code civil, la réserve de propriété se reporte alors sur le prix de revente du bien. La subrogation réelle ainsi admise est d'autant plus remarquable qu'à défaut de restriction énoncée par le texte, son domaine a vocation à s'étendre au-delà de l'hypothèse de la procédure collective de l'acheteur. 137. Pour le reste, le droit civil de la réserve de propriété appelle deux précisions : la première a trait à la condition de validité de la clause prévoyant une telle réserve : cette clause ne peut en aucun cas être imposée par le vendeur, sans le consentement de l'acquéreur ; et, pour protéger ce dernier, aucune présomption de consentement ne saurait être posée. L'article 2268 dispose en conséquence : « La réserve de propriété est convenue par écrit ». La seconde concerne les effets de la réserve de propriété au cas de défaillance de l'acquéreur. L'article 2371 énonce qu'alors « le créancier [en l'espèce, le vendeur] peut demander la restitution du bien afin de recouvrer le droit d'en disposer ». Cette demande prendra, au besoin, la forme d'une action en revendication. 138. Afin de faciliter la reprise du bien, les articles 2369 et 2370 nouveaux du code civil, consacrant les solutions applicables au cas de procédure collective, ont posé, le premier, que, lorsque la propriété du vendeur a été réservée sur un bien fongible, elle « peut s'exercer, à concurrence de la créance restant due, sur des biens de même nature et de même qualité détenus par le débiteur ou pour son compte », et le second que : « L'incorporation d'un meuble faisant l'objet d'une réserve de propriété à un autre bien ne fait pas obstacle aux droits du créancier lorsque ces biens peuvent être séparés sans subir de dommage ». 139. Quant au régime de la restitution, l'article 2371 envisage le cas où la valeur du bien repris est inférieure au montant de la créance - ce qui suppose, dans le cas de la vente avec réserve de propriété, que le bien s'est déprécié depuis la vente, ou que sa valeur n'épuise pas les frais attachés aux conditions de sa restitution ; alors, selon l'alinéa 2 de l'article 2371 : « La valeur du bien repris est imputée, à titre de paiement, sur le solde de la créance garantie ». L'alinéa 3 envisage l'hypothèse inverse, celle où le prix du bien excède le montant de la dette encore exigible - ce qui suppose, en l'espèce, que le bien vendu a pris de la valeur depuis la vente : alors, dispose le texte, « le créancier doit au débiteur une somme égale à la différence ». La solution, transposée à partir des solutions de la jurisprudence commerciale et justifiée par l'idée qu'une sûreté ne doit jamais procurer un enrichissement injuste (P. CROCQ, La réserve de propriété, in Commentaire de l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, Cah. dr. entr. 20/2006, p. 23 et s., spéc. n o 6), n'emporte pas l'adhésion de manière irrésistible : voici un acquéreur qui, par hypothèse, n'a jamais été et ne sera jamais (puisqu'il n'a pas payé le prix) propriétaire du bien objet de la vente, et qui se voit investi d'une créance de plus-value sur ce bien contre le vendeur qui, lui, n'a jamais cessé d'être propriétaire. L'enrichissement injuste paraît se situer plutôt du côté de l'acquéreur défaillant, auquel son inexécution profite. B. - Vente à réméré Bibliographie. - J.-B. HEINRICH, La vente à réméré d'obligations, JCP, éd. E, 1984. II. 14282. - A. PERROT, La vente à réméré de valeurs mobilières, RTD com. 1993. 1 . 140. La vente à réméré est définie par l'article 1659 du code civil comme « un pacte par lequel le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal et le remboursement » de certains frais (sur lesquels, V. infra, n os 165 et 166). Elle a la nature d'une vente sous condition résolutoire potestative au profit du vendeur (V., par ex., F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 196 ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n os 570 et s.) : en concluant une telle opération, le vendeur qui a aliéné son bien sous la pression d'une nécessité financière, mais qui désire en recouvrer la propriété le jour où il sera revenu à meilleure fortune, se ménage la faculté de le racheter. Lire la mise à jour 79, 128, 140 s., 177 s. Simplification du droit. Réméré. - Le terme de « réméré » a été supprimé par la loi n o 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit : à l'article 1659, les mots : « ou de réméré » sont supprimés ; à l'article 1662, les mots : « de réméré » sont remplacés par les mots : « en rachat »; aux articles 1664, 1667 et 1668, au premier alinéa de l'article 1671 et aux premier et deuxième alinéas de l'article 1672, le mot : « réméré » est remplacé par le mot : « rachat ». 141. La vente à réméré a pu, il est vrai, jusque récemment servir un autre objectif : elle a été parfois employée pour détourner la prohibition des pactes commissoires consacrée, jusqu'aux modifications apportées à la numérotation du code civil par l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés, en matière mobilière, par l'article 2078 et, en matière immobilière, par l'article 2088 dudit code. Elle servait alors à dissimuler un prêt assorti d'un gage, d'une hypothèque ou d'une antichrèse et consenti par le pseudo-acheteur, qui était appelé à conserver le bien grevé si, à l'échéance, le pseudo-vendeur ne le remboursait pas (L. AYNÈS et P. CROCQ, Les sûretés. La publicité foncière, 2 e éd., 2006, Defrénois, n o 752). Utilisée de la sorte, cette modalité de la vente était infectée par la fraude, et pouvait être querellée comme telle. L'appréciation du caractère frauduleux ou non de l'opération relevait du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. req. 30 juill. 1895, S. 1896. 1. 353 ; Cass. 1 re civ. 28 avr. 1964, Bull. civ. I, n o 220), la vileté du prix stipulé pouvant contribuer à le révéler (T. com. Narbonne, 28 oct. 1935, Gaz. Pal. 1935. 2. 924). 142. Le recours à la vente à réméré pour contourner la prohibition des pactes commissoires, outre qu'il a toujours été marginal, a perdu aujourd'hui pratiquement tout intérêt. En effet, le droit des sûretés issu de l'ordonnance du 23 mars 2006 valide le pacte commissoire en matière mobilière comme en matière immobilière : en matière mobilière, le nouvel article 2348 du code civil énonce : « Il peut être convenu, lors de la constitution du gage ou postérieurement, qu'à défaut d'exécution de l'obligation garantie le créancier deviendra propriétaire du bien gagé » ; ce texte n'est écarté, par l'article L. 622-7 nouveau du code de commerce, dans la rédaction que lui a donné la loi n o 2005-845 du 26 juillet 2005, qu'au cas où le débiteur est soumis à une procédure collective de sauvegarde (V. D. LEGEAIS, Le gage des meubles corporels, in Commentaire de l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, Cah. dr. entr. 20/2006, p. 12 et s., spéc. n o 28). En matière immobilière, le nouvel article 2459 du code civil dispose : « Il peut être convenu dans la convention d'hypothèque que le créancier deviendra propriétaire de l'immeuble » hypothéqué. Il réserve, cependant, le cas où le pacte porterait sur « l'immeuble qui constitue la résidence principale du débiteur » ; un tel pacte n'étant pas valable, telle serait donc la seule hypothèse où serait envisageable la conclusion d'une vente à réméré frauduleuse. 143. Sous le bénéfice de ces remarques, la vente à réméré est peu pratiquée aujourd'hui en matière immobilière, sinon pour permettre à l'acheteur marchand de biens d'échapper à l'inconvénient fiscal normalement attaché aux ventes conclues sous condition résolutoire (V. cep. Cass. 3 e civ. 31 janv. 1984, Bull. civ. III, n o 21 ; Cass. com. 2 juin 1992, Bull. civ. IV, n o 218, JCP, éd. N, 1993. II. 94) ; l'acquéreur a, en effet, la possibilité d'opter pour une exonération du paiement de l'impôt de mutation jusqu'à l'expiration du délai dans lequel est enfermée la faculté de rachat (CGI, art. 688), ce qui permet d'éviter le paiement du double droit de mutation. En revanche, l'utilisation de la vente avec pacte de rachat s'est récemment développée, dans le cadre des opérations portant sur des valeurs mobilières (J.-B. HEINRICH, La vente à réméré d'obligations, JCP, éd. E, 1984. II. 14282; A. PERROT, La vente à réméré de valeurs mobilières, RTD com. 1993. 1 ). 144. La vente à réméré n'étant qu'une modalité de la vente sous condition résolutoire, les développements consacrés précédemment à cette dernière ont vocation à la concerner. Il suffit d'y renvoyer pour ce qui concerne ses effets pendente conditione - c'est-à-dire en l'espèce, tant que le vendeur n'a pas exercé la faculté de rachat -, et au cas de défaillance de la condition - autrement dit, au cas où le vendeur renonce à exercer la faculté de réméré (V. supra, n os 117 et 118). L'exercice du réméré et ses effets appellent, pour leur part, des précisions complémentaires. 1° - Exercice du réméré 145. Puisque le vendeur s'est réservé la faculté de rachat, c'est à lui qu'il revient d'exercer le réméré. Des difficultés peuvent se présenter lorsque le bien vendu à réméré appartient à plusieurs personnes ou lorsque l'acquéreur est décédé. Il convient de les évoquer avant d'exposer les règles relatives au délai et au mode d'exercice du réméré. a. - Pluralité de vendeurs 146. Lorsque le bien vendu à réméré appartient à plusieurs personnes, les articles 1668 à 1671 du code civil, qui sont également applicables au cas de rescision pour lésion (V. Vente [2 o formation]), invitent à distinguer suivant que la vente a été faite conjointement ou non. 147. Dans le premier cas, auquel il convient d'assimiler celui où, depuis la vente, le vendeur est décédé en laissant plusieurs héritiers, les covendeurs ou les cohéritiers ne peuvent user de la faculté de rachat que pour leur part sur le bien (C. civ., art. 1668 et 1669). Mais l'acquéreur peut, pour les raisons exposées lors de l'étude de la rescision pour lésion, les contraindre, en les appelant tous à la cause, à se mettre d'accord pour effectuer le rachat ; à défaut d'un tel accord, ceux-ci verront leur demande de rachat rejetée (C. civ., art. 1670). 148. Il convient d'assortir ces principes de solution des mêmes tempéraments que ceux évoqués en matière de rescision pour lésion. Par exemple, l'accord de l'ensemble des cohéritiers ou des covendeurs n'est pas requis lorsque l'acquéreur est l'un d'entre eux (Cass. 1 re civ. 2 mai 1961, D. 1961. 476). 149. Dans le second cas - celui où la vente n'a pas été effectuée conjointement -, chacun des vendeurs n'a vendu que sa part sur le bien ; aussi, il peut « exercer séparément l'action en réméré sur la portion qui [lui] appartenait » ; cela, sans que l'acquéreur puisse le « forcer […] à retirer le tout » (C. civ., art. 1671). b. - Décès de l'acquéreur 150. Au cas où l'acquéreur est décédé pendant le délai d'exercice du réméré en laissant plusieurs héritiers, l'article 1672 du code civil reproduit, de manière symétrique en quelque sorte, les règles dégagées au cas de décès du vendeur. Il en résulte que, si la chose vendue est encore indivise ou si elle a été partagée entre les héritiers, l'action en réméré ne peut être exercée contre chacun d'eux que pour sa part, mais que si, au terme du partage, la chose a été attribuée à un seul des héritiers, l'action en réméré peut être exercée contre celui-ci pour le tout. c. - Délai 151. La condition résolutoire, qui tient dans l'exercice de la faculté de rachat par le vendeur, contribue à créer une incertitude relativement au sort du bien vendu. Parce qu'il n'est pas souhaitable, au regard de la sécurité des conventions, que cette incertitude se prolonge trop longtemps, l'article 1660, alinéa 1 er , du code civil, limite à cinq années le délai durant lequel la faculté de rachat peut être exercée. Si un délai plus long a été stipulé, l'alinéa 2 du même texte dispose qu'il est réduit à cinq ans. 152. Le délai de l'article 1660 est un délai préfix ; il ne peut donc être ni interrompu, ni suspendu : l'article 1663 énonce en ce sens qu'il court même contre les mineurs. 153. Le point de départ de ce délai se situe, normalement, à la date de la conclusion du contrat. Cependant, il a été admis que les contractants le fixent à un autre moment - la date de la livraison, par exemple -, dès lors que ne découle pas d'un tel aménagement une prorogation du délai au-delà de cinq années à compter du jour de la vente (Cass. req. 10 févr. 1855, DP 1855. 1. 74). Au regard de cette exigence critiquable, apparaît l'arrêt qui a jugé que, la femme d'un prisonnier de guerre ayant vendu la voiture automobile de son mari en stipulant que celui-ci n'aurait la faculté de rachat qu'« après sa libération », il fallait en déduire que le mari pouvait invoquer cette clause pendant cinq années à compter de sa libération (CA Douai, 20 févr. 1947, D. 1948, somm. 7). 154. Si, à l'expiration du délai légal, ou du terme convenu lorsque celui-ci est inférieur à cinq ans, le vendeur n'a pas exercé la faculté de réméré, ni les parties ni le juge n'ont la possibilité de proroger ledit délai, car le terme fixé est « de rigueur » (C. civ., art. 1161) ; la vente est alors censée avoir été conclue purement et simplement, et « l'acquéreur demeure propriétaire irrévocable » (C. civ., art. 1662) ; le vendeur perd donc le droit d'exercer la faculté de rachat (Cass. 3 e civ. 13 nov. 1970, Bull. civ. III, n o 601). 155. De là, il découle, au plan fiscal, qu'à partir du même moment, l'acquéreur d'un immeuble acheté à réméré ne bénéficie plus de l'exonération des droits d'enregistrement qui lui est accordée par l'article 688 du code général des impôts ; il doit donc acquitter ces droits (Cass. com. 2 juin 1992, Bull. civ. IV, n o 218, JCP, éd. N, 1993. II. 94). d. - Mode d'exercice 156. Aux termes de l'article 1673 du code civil, le vendeur « use du pacte de rachat » en remboursant l'acheteur. Un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 6 juin 1967 (Bull. civ. I, n o 205) paraît avoir déduit de ce texte que le remboursement des sommes dues à l'acheteur, dans le délai imparti au vendeur, est le seul mode d'exercice de la faculté de rachat ; cet arrêt énonce, en effet : « La déclaration d'intention du vendeur d'exercer le rachat, accompagnée de la remise d'une somme au notaire avec l'offre de parfaire, ne constitue pas l'exercice du réméré qui suppose que soit remplie la condition de restitution et du remboursement exigée par les articles 1659 et 1673 du code civil ». 157. Cependant, d'autres décisions, approuvées par la doctrine (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 579), ne subordonnent pas la validité de l'exercice du réméré à ce remboursement ; elles observent qu'aucun texte ne pose d'exigence de forme pour l'exercice par le vendeur de son droit de rachat, et elles en déduisent que, sauf stipulation contraire, la notification à l'acheteur, avant l'expiration du terme, de l'intention d'exercer la faculté de rachat, suffit pour conserver les droits du vendeur (Cass. civ. 23 avr. 1909, DP 1911. 1. 438 ; Cass. 1 re civ. 15 juill. 1957, Bull. civ. I, n o 332 ; Cass. com. 23 févr. 1953, Bull. civ. III, n o 81 ; 2 juin 1992, préc. supra, n o 143). 158. Selon les mêmes décisions, le vendeur est alors lié par sa déclaration ; de sorte que, si celle-ci n'est pas exécutée, l'acquéreur est investi d'une action en remboursement du prix de vente et des sommes prévues par l'article 1673 du code civil (Cass. civ. 23 avr. 1909, préc.). 159. La décision d'exercer la faculté de rachat doit, pour être opposable à l'administration fiscale et permettre à l'acquéreur de bénéficier du régime de l'article 688 du code général des impôts, être constatée par un acte ayant date certaine, émanant du vendeur lui-même, ce qui n'est pas le cas d'un acte d'huissier établi à la seule requête de l'acquéreur (Cass. com. 2 juin 1992, préc.). 2° - Effets de l'exercice du réméré 160. Même si l'on admet que la faculté de réméré peut être exercée avant que le remboursement soit effectué, la condition résolutoire n'est accomplie qu'au jour où celui-ci a lieu : jusque-là, l'acquéreur demeure propriétaire de la chose (Cass. req. 19 oct. 1904, DP 1907. 1. 426). C'est donc le remboursement, et lui seul, qui fait produire effet à l'exercice du réméré (V. J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 580). Il importe d'en définir l'assiette, puis de cerner la portée de l'anéantissement rétroactif de la vente qui en découle. a. - Assiette du remboursement 161. Selon l'article 1673 du code civil, le remboursement doit porter sur « non seulement le prix principal, mais encore les frais et loyaux coûts de la vente, les réparations nécessaires, et celles qui ont augmenté la valeur du fonds, jusqu'à concurrence de cette augmentation ». 162. À propos du « prix principal »,tout d'abord, il est notable que les parties conviennent parfois d'un prix de rachat supérieur ou inférieur au prix de la vente. La validité de principe d'une telle modification du prix n'est pas douteuse : rien, dans l'article 1673, n'autorise à la contester (Cass. 3 e civ. 13 nov. 1970, Bull. civ. III, n o 601 ; 31 janv. 1984, Bull. civ. III, n o 21). Il y a lieu simplement de réserver le cas où la majoration du prix dissimulerait un prêt à un taux usuraire ; car alors, l'illicéité de celle-ci vicierait l'ensemble de l'opération, au point de la rendre annulable (Cass. req. 15 avr. 1872, DP 1872. 1. 415). 163. Ce cas mis à part, la compatibilité de la stipulation d'une majoration ou d'une diminution de prix, sinon avec la vente à réméré (V. supra, n o 162), du moins avec le mécanisme de la condition résolutoire est discutée en doctrine ; une telle stipulation conférerait à la convention la nature d'une « vente assortie d'une promesse de rétrocession souscrite par l'acquéreur », promesse qui, au cas où elle serait exécutée, serait dépourvue de rétroactivité (A. BÉNABENT, op. cit., n o 108). Certaines décisions anciennes distinguent la vente à réméré et la promesse de revente, mais sans mettre en oeuvre ce critère (CA Agen, 1 er juill. 1929, S. 1929. 2. 172 : l'arrêt se fonde, en l'espèce, sur la longueur du délai de la faculté de rachat stipulée dans la vente, ce qui n'est pas non plus probant au regard de l'art. 1660 c. civ.) ; il semble, en vérité, que le trait distinctif entre les deux contrats doive résider dans la volonté commune des parties de conclure une convention divisible ou non (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 572). 164. À propos des intérêts du prix, ensuite, l'article 1673 du code civil n'évoque pas leur remboursement. Il y a donc lieu de faire application, ici, du droit commun. Celui-ci invite à distinguer suivant que l'acquéreur a été mis ou non en possession de la chose lors de la vente : si tel a été le cas, il a eu la jouissance de la chose ; par conséquent, il ne saurait prétendre au remboursement des fruits sans s'enrichir injustement. Dans le cas contraire, ou si le vendeur est rentré en possession de son bien avant d'avoir remboursé, l'acquéreur a droit aux intérêts jusqu'au jour du paiement (Cass. civ. 17 août 1870, DP 1870. 1. 332). 165. Le s « frais et loyaux coûts de la vente » comprennent les frais dont le paiement incombe à l'acquéreur en vertu de l'article 1593 du code civil (V. infra, n os 775 et s.). 166. Les « réparations » visées par l'article 1673 englobent les impenses nécessaires et les impenses utiles, les dernières nommées n'étant remboursables que dans la mesure de la plus-value qu'elles ont apportée au bien. Les constructions nouvelles élevées depuis la vente, de même que les transformations excédant les prévisions des parties lors du contrat, ne relèvent pas du texte : l'acquéreur, qui savait que le vendeur pouvait exercer le réméré, les a faites à ses risques et périls ; il devrait donc, semble-t-il, être traité comme le possesseur de mauvaise foi qui a construit sur le terrain d'autrui. b. - Portée de la rétroactivité 167. Ainsi qu'il a été dit (supra, n o 160) au plan civil, le réméré accomplit la condition résolutoire ; il n'y a donc pas une seconde mutation, mais l'anéantissement rétroactif de la vente (Cass. civ. 24 oct. 1950, Bull. civ. I, n o 203). En conséquence, le transfert de la propriété est censé n'avoir jamais eu lieu ; et, pourvu que le réméré soit opposable aux tiers, les droits accordés à ceux-ci par l'acquéreur sont censés n'avoir jamais existé. La rétroactivité est, cependant, assortie des exceptions admises en présence de toute condition résolutoire (V. supra, n os 119 et s.). Section 2 - Opposabilité aux tiers du transfert de la propriété 168. En posant que « … la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur,dès qu'on est convenu de la chose et du prix… », l'article 1583 du code civil suggère, à première vue, que le principe du transfert immédiat de la propriété concerne uniquement les parties, non les tiers. En vérité, une telle lecture du texte serait erronée. Mais, pour que le transfert de la propriété et ses modalités éventuelles soient efficaces à l'égard des tiers, il importe que ceux-ci aient pu en avoir connaissance. Le dispositif légal destiné à assurer leur information diffère selon que la vente porte sur un bien immobilier ou sur un bien mobilier. Art. 1 - Vente immobilière 169. L'opposabilité aux tiers de la vente immobilière, et donc du transfert de la propriété qui en découle, postule, en principe, la publication de l'acte qui constate la vente à la conservation des hypothèques ; cette règle reçoit, cependant, quelques exceptions. § 1 - Principe : publication obligatoire de la vente A. - Vente pure et simple 170. Il ressort de la combinaison des articles 28 et 30 du décret n o 55-22 du 4 janvier 1955, portant réforme de la publicité foncière (V. C. civ. Dalloz), que la vente d'un immeuble, pour être opposable aux personnes qui ont acquis, sur celui-ci et du même auteur, des droits concurrents, doit être publiée à la conservation des hypothèques. 171. En vertu de ce principe, si une promesse synallagmatique de vente n'a pas été publiée, et si, au mépris de celle-ci, le vendeur aliène une seconde fois l'immeuble à un tiers qui, lui, publie son acquisition, le bénéficiaire du premier « compromis » est normalement évincé (Cass. 3 e civ. 13 mars 1974, Bull. civ. III, n o 119 ; rappr. Cass. 3 e civ. 11 juin 1992, Bull. civ. III, n o 200). 172. De même, entre deux acquéreurs successifs d'un même immeuble, qui ont publié tous les deux leurs titres, la priorité est définie d'après l'antériorité des inscriptions ; et, par exemple, il a été jugé que, dès lors que les parties en conflit « sont les ayants droit d'un même auteur qui a vendu le même immeuble à l'un et à l'auteur de l'autre […], le conflit doit se régler en vertu des principes de la publicité foncière par la priorité de publication de l'acte d'acquisition, à moins qu'il ne soit prouvé que le second acquéreur avait eu connaissance de la première aliénation » (Cass. 3 e civ. 28 mai 1979, Bull. civ. III, n o 116). 173. La solution n'intéresse, d'ailleurs, pas uniquement le concours entre les acquéreurs successifs d'un même immeuble appartenant au même auteur ; elle permet de régler aussi les conflits susceptibles d'opposer l'acquéreur et les tiers auxquels le vendeur aurait concédé des droits sur le bien vendu, lorsque ces droits sont eux-mêmes soumis à publicité foncière : la vente n'est opposable à ces tiers que dans la mesure où elle a été publiée avant que les droits en cause soient concédés. Ainsi, par exemple, l'acquéreur qui publie son titre après qu'ait été régulièrement inscrite une servitude ou une hypothèque constituée par le vendeur sur le même immeuble, ne peut invoquer le transfert de propriété qui est intervenu à son profit pour mettre en échec la servitude ou l'hypothèque (V. Publicité foncière). B. - Modalités de la vente 174. Le caractère obligatoire de la publication concerne non seulement la vente pure et simple, mais aussi les ventes conditionnelles et la vente à terme : l'article 28-1 o du décret du 4 janvier 1955 (préc. supra, n o 170) dispose en ce sens que « sont obligatoirement publiés au bureau des hypothèques de la situation des immeubles […] tous actes, même assortis d'une condition suspensive […], portant ou constatant entre vifs […] mutation […] de droits réels immobiliers ». 175. Il ressort expressément de ce texte que, pour être opposable aux tiers dès sa conclusion, la vente immobilière affectée d'une condition suspensive doit être publiée à la conservation des hypothèques. C'est seulement à partir du moment où cette formalité aura été accomplie qu'au cas de réalisation de la condition, la rétroactivité du transfert de la propriété s'imposera aux tiers qui se seraient vus accorder, par le vendeur,des droits sur le bien pendant la période d'incertitude, et qui les auraient fait publier (V. supra, n o 92). 176. Il ressort aussi du même texte, implicitement cette fois, qu'à peine d'inopposabilité, la vente sous condition résolutoire et la vente à terme doivent pareillement être publiées ; la solution s'autorise tant de la lettre de l'article 28-1 o , lequel vise « tous actes […] portant ou constatant entre vifs […] mutation […] de droits réels immobiliers », que d'un argument a fortiori : si la vente sous condition suspensive, dont la conclusion n'est pas en soi translative de la propriété, est soumise à la publicité obligatoire alors qu'il n'est pas sûr qu'en définitive elle produira un tel effet, à plus forte raison doit-il en aller ainsi de la vente à terme, qui diffère le transfert de la propriété sans lui ôter son caractère certain, et de la vente sous condition résolutoire où ce transfert intervient immédiatement. 177. D'ailleurs, dans le cas de la vente à réméré, qui est une vente sous condition résolutoire, l'article 1673, alinéa 2, du code civil fait dépendre le jeu de la rétroactivité attachée à l'exercice du réméré de la publication du contrat ; il dispose, en effet : « Lorsque le vendeur rentre dans son héritage par l'effet du pacte de rachat, il le reprend, exempt de toutes les charges et hypothèques dont l'acquéreur l'aurait grevé, à la condition que ce pacte ait été régulièrement publié au bureau des hypothèques, antérieurement à la publication desdites charges et hypothèques ». Lire la mise à jour 79, 128, 140 s., 177 s. Simplification du droit. Réméré. - Le terme de « réméré » a été supprimé par la loi n o 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit : à l'article 1659, les mots : « ou de réméré » sont supprimés ; à l'article 1662, les mots : « de réméré » sont remplacés par les mots : « en rachat »; aux articles 1664, 1667 et 1668, au premier alinéa de l'article 1671 et aux premier et deuxième alinéas de l'article 1672, le mot : « réméré » est remplacé par le mot : « rachat ». 178. L'article 28-4 o -b du décret du 4 janvier 1955 oblige, en outre, à publier l'acte constatant l'accomplissement de la condition suspensive ; et l'article 28-4 o -c pose une règle identique à propos, notamment, des « actes […] constatant […] la résolution » de la vente immobilière ; ce dernier texte paraît donc avoir vocation à s'appliquer au cas d'accomplissement de la condition résolutoire, spécialement au cas d'exercice de la faculté de réméré. 179. Il est notable, cependant, que la méconnaissance des dispositions de l'article 28-4 o du décret de 1955 n'expose pas les actes concernés par celle-ci à l'inopposabilité ; elle ouvre simplement un droit indemnitaire au tiers qui, ayant publié son droit, établit qu'il a subi un préjudice en raison du défaut de publication, ou du caractère incomplet ou irrégulier de la publication (Décr. 1955, art. 30-4). § 2 - Exceptions 180. Le principe suivant lequel le transfert de la propriété n'est opposable aux tiers que si la vente immobilière a été publiée à la conservation des hypothèques supporte trois ordres d'exceptions. 181. En premier lieu, il peut arriver que le propriétaire d'un même immeuble l'ait vendu successivement à deux acquéreurs, et qu'aucun des actes n'ait été publié. En ce cas, il y a lieu de mettre en oeuvre les seules règles du droit de la vente ; celles-ci conduisent à poser que le vendeur a perdu la propriété du bien litigieux par l'effet de la première vente, et que, par conséquent, la seconde vente est nulle, car il s'agit d'une vente de la chose d'autrui. C'est donc le bénéficiaire de la première vente qui a la propriété de l'immeuble (Cass. 1 re civ. 12 nov. 1975, JCP 1976. II. 18359, note M. Dagot). 182. En deuxième lieu, la priorité normalement accordée au second acquéreur sur le premier acquéreur lorsque seul celui-là a publié son titre ou lorsqu'il l'a publié antérieurement, est écartée s'« il est prouvé que le second acquéreur avait eu connaissance de la première aliénation » (Cass. 3 e civ. 28 mai 1979, Bull. civ. III, n o 116), et à plus forte raison si un concert frauduleux a lié le second acquéreur et le vendeur : la jurisprudence ne veut pas que le tiers qui a eu connaissance d'une vente utilise les règles de la publicité foncière pour porter délibérément préjudice à l'acquéreur qui n'a pas inscrit son droit sur l'immeuble. Il a été jugé en ce sens que l'acquisition d'un immeuble, en connaissance de la cession de celui-ci à un tiers, est constitutive d'une faute qui ne permet pas à l'acheteur de se prévaloir des règles de la publicité foncière (Cass. 3 e civ. 30 janv. 1974, Bull. civ. III, n o 50, Defrénois 1974. 637, obs. G. Goubeaux). 183. Une telle connaissance, dont la preuve doit être rapportée par celui qui l'invoque, s'apprécie à la date de la conclusion de la seconde vente, non lors de la publication de celle-ci (Cass. 3 e civ. 4 janv. 1983, Bull. civ. III, n o 3, Defrénois 1983. 1219, obs. J.-L. Aubert), ni lors de la réitération de la seconde vente en la forme authentique (Cass. 3 e civ. 22 mai 1990, Bull. civ. III, n o 128). 184. Elle s'apprécie en la seule personne à laquelle l'acquéreur qui n'a pas publié entend opposer son droit. Ainsi, au cas où le second acquéreur, qui avait connaissance de la première vente non publiée, a revendu l'immeuble à des sous-acquéreurs, et où ceux-ci ont publié leur titre sans avoir connaissance de la vente initiale, ils sont en droit de se prévaloir du défaut de publication de la première vente sans que puisse leur être opposée la faute du deuxième acquéreur (Cass. 1 re civ. 11 juin 1992, JCP, éd. N, 1993. II. 97). 185. Sous le bénéfice de ces remarques, il demeure que le transfert de propriété opéré par la vente non publiée est opposable au tiers qui, en connaissance de cause, a acquis postérieurement du vendeur initial, même s'il a inscrit régulièrement son titre. 186. En troisième lieu, il est un dernier cas où l'acquéreur qui a publié le premier son titre ne peut invoquer les règles de la publicité foncière contre l'acquéreur qui a publié après lui ou qui n'a pas publié, c'est celui où il devient l'ayant cause universel ou à titre universel du vendeur ; car il doit alors, en sa qualité de successeur dudit vendeur, garantir contre l'éviction l'acquéreur qu'il aurait, en principe, vocation à primer (rappr., à propos d'une donation portant sur un immeuble, Cass. 3 e civ. 20 mars 1991, D. 1992. 151, note A. Fournier ; sur la garantie contre l'éviction du fait personnel du vendeur, V. infra, n os 401 et s.). Art. 2 - Vente mobilière 187. Il n'existe pas, en matière mobilière, d'organisation d'un système général de publicité des mutations. La situation des tiers peut s'en trouver, de prime abord, fragilisée. En vérité, diverses dispositions légales ont pour objet d'écarter les inconvénients attachés à la « clandestinité des transmissions » (F. TERRÉ et P. SIMLER, Les biens, 7 e éd., Précis Dalloz, n o 409). La question de l'opposabilité de la vente aux tiers se pose, en matière mobilière, de manière différente suivant que la vente porte sur un meuble corporel ou sur un meuble incorporel. § 1 - Vente de meuble corporel 188. Au cas de vente portant sur un meuble corporel, l'opposabilité de la vente peut susciter des difficultés dans deux types de situation : d'une part, lorsque l'acquéreur a non domino entre en conflit avec le véritable propriétaire ; et, d'autre part, lorsque deux acquéreurs successifs d'un même bien entrent en conflit. A. - Conflit entre l'acquéreur a non domino et le véritable propriétaire 189. On sait qu'en vertu de la règle de l'article 2279, alinéa 1 er , du code civil, la possession, lorsqu'elle est exercée de bonne foi, vaut titre de propriété ; elle investit le possesseur de la qualité de propriétaire, qualité qu'en raison du caractère réel de son droit, le possesseur pourra opposer à tous. Lire la mise à jour 189 s., 874. Réforme de la prescription en matière civile. - La loi n o 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (D. 2008. Actu. Lég. 1614 ; RDI 2008. 368, obs. Malinvaud ; AJ fam. 2008. 291, obs. Bardout ) a modifié la numérotation de l'article 2279 du code civil qui est devenu l'article 2276. Une nouvelle section intitulée « De la prescription acquisitive en matière mobilière » fait son entrée dans le code civil, comprenant les seuls articles 2279 et 2280 (auparavant intégrés dans la section « De quelques prescriptions particulières »), qui deviennent respectivement les articles 2276 et 2277. 190. En vertu de cette règle, celui qui acquiert de bonne foi un meuble du non-propriétaire, dès lors qu'il est mis en possession de la chose, peut, réserve faite des cas de la perte et du vol (C. civ., art. 2279, al. 2, et 2280), opposer son droit de propriété à tous, y compris au véritable propriétaire. 191. Il convient de souligner que ce n'est pas la vente qui, alors, lui a transféré la propriété, car celle-ci, consentie par quelqu'un qui n'avait pas la qualité de propriétaire de la chose vendue, est en soi nulle (V. Vente [2 o formation]) ; l'acheteur est devenu propriétaire par le seul effet de la possession de bonne foi. 192. La jurisprudence fait régulièrement application de la règle énoncée par l'article 2279, alinéa 1 er , du code civil, en présence des ventes avec réserve de propriété, lorsque l'acquéreur revend une marchandise avant de l'avoir payée : chaque fois que le sous-acquéreur peut invoquer la possession de bonne foi, il est protégé contre la revendication du vendeur, et la clause de réserve de propriété est alors mise en échec (Cass. com. 1 er oct. 1985, Bull. civ. IV, n o 224 ; 19 mai 1987, Bull. civ. IV, n o 120, D. 1988, somm. 12, obs. F. Derrida). 193. Défavorable au vendeur dans l'exemple qui vient d'être pris, la mise en oeuvre de l'article 2279 peut aussi se retourner contre l'acquéreur. Il faut voir, en effet, que la solution énoncée par le texte vaut pour n'importe quel transfert de droit réel. En conséquence, lorsque, par exemple, le vendeur a constitué après la vente un gage sur la chose vendue au profit d'un créancier qui ignorait cette vente, la mise en possession du créancier gagiste le protège contre la revendication exercée par l'acquéreur (Cass. civ. 19 juin 1928, DP 1929. 1. 45). 194. Si le gage a été constitué par l'acquéreur à crédit avant que celui-ci ait payé la marchandise ou le matériel, et alors que la vente était assortie d'une réserve de propriété, l'article 2279, alinéa 1 er , protégeant le créancier gagiste de bonne foi contre la revendication du vendeur, la solution préjudiciera à nouveau à ce dernier (Cass. com. 28 nov. 1989, Bull. civ. IV, n o 300, D. 1990, somm. 387, obs. L. Aynès , D. 1991, somm. 43, obs. F. Pérochon ). B. - Conflit entre les deux acquéreurs d'un même bien 195. Lorsqu'un litige oppose deux acquéreurs successifs d'un même bien mobilier, l'article 1141 du code civil s'attache à le vider. Il énonce : « Si la chose qu'on s'est obligé de donner ou de livrer à deux personnes successivement, est purement mobilière, celle des deux qui en a été mise en possession réelle est préférée et en demeure propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu toutefois que la possession soit de bonne foi ». 196. Ce texte n'est, en vérité, qu'une application de l'article 2279 du code civil ; il en ressort que, des deux acquéreurs, c'est celui qui a été mis en possession de bonne foi le premier qui se voit reconnaître la qualité de propriétaire, les dates respectives des deux acquisitions n'important pas. Au cas où le second acquéreur a été mis en possession le premier, c'est la mise en possession qui lui confère son titre de propriété, puisque l'acte en vertu duquel il a acquis est nul comme ayant été consenti par un vendeur qui n'était plus propriétaire. § 2 - Vente de meuble incorporel 197. L'opposabilité aux tiers des effets - spécialement, du transfert de la propriété - produits par les cessions de meubles incorporels, est gouvernée par des règles très différentes suivant les biens en jeu ; il y a donc lieu de renvoyer aux rubriques spécialisées. Il suffit ici d'observer que trois grandes catégories de régime existent. 198. Pour certaines cessions, des systèmes de publicité par inscription sur des registres spéciaux sont prévus : il en est ainsi, par exemple, pour les cessions de brevets, dessins et modèles, fonds de commerce. 199. Pour d'autres, la publicité est assurée par une formalité de notification ; tel est le cas, en particulier, de la cession de créance civile (C. civ., art. 1690 ; V. Cession de créance), ou des cessions de parts sociales (C. civ., art. 1865). 200. Enfin, certaines cessions échappent à toute formalité de publicité commandant leur opposabilité aux tiers : tel est le cas, spécialement, des cessions de créances professionnelles organisées par la loi n o 81-1 du 2 janvier 1981, facilitant le crédit aux entreprises (D. 1981. 40), et aujourd'hui réglementées par les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier (V. Rép. com., V o Cession et nantissement de créances professionnelles) ; de telles cessions deviennent opposables aux tiers à la date portée sur les actes qui les constatent (V. C. mon. fin., art. L. 313-27). Chapitre 2 - Obligations du vendeur 201. Selon l'article 1603 du code civil, le vendeur « a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend ». Il est notable d'emblée que l'obligation de garantie comporte deux aspects qui sont énumérés à l'article 1625 de ce code : il s'agit, d'une part, de la garantie d'éviction, et, d'autre part, de la garantie des vices cachés. Mais il y a lieu d'ajouter que, par son libellé, l'article 1603 suggère que, en plus des obligations « principales », le vendeur est tenu d'obligations complémentaires. Celles-ci se sont considérablement développées à l'époque contemporaine, sous l'influence de divers facteurs socio-économiques que la jurisprudence s'est efforcée de prendre en compte. De sorte que, outre les obligations de délivrance,de garantie contre l'éviction et de garantie contre les vices cachés qui pèsent sur le vendeur, il convient d'évoquer, au titre des obligations complémentaires, l' obligation d'information doublée, à la charge du vendeur professionnel, d'une obligation de conseil, et - également à la charge du vendeur professionnel - l'obligation de sécurité. Section 1 - Obligation de délivrance 202. La délivrance est définie par l'article 1604 du code civil comme « le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur ». Cette définition ne s'accorde pas avec le principe du transfert immédiat de la propriété, tel qu'il a été consacré par le code civil (V. supra, n os 6 et s.) : dès le transfert de la propriété, le vendeur n'est plus que le détenteur de la chose vendue. Aussi, mieux vaut dire que l'obligation de délivrance tient dans la remise du bien vendu à la disposition de l'acheteur pour qu'il en prenne livraison (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par DE JUGLART, n o 930 ; rappr. Conv. Vienne 11 avr. 1980 relative à la vente internationale de marchandises, art. 31-c : V. C. civ. Dalloz). Lire la mise à jour 202 s. Inexécution de l'obligation de délivrance. Délivrance à un tiers. - Le vendeur manque à son obligation de délivrance en délivrant la chose vendue non à l'acquéreur, mais à un tiers (Civ. 1 re , 12 mai 2008, n o 10-18.045, Dalloz actualité, 24 mai 2011, obs. Guiomard). 203. Ainsi définie, la délivrance se distingue à la fois du transfert de la propriété et de la livraison : du transfert de la propriété, tout d'abord, en ce que celui-ci porte sur la maîtrise de droit exercée par le vendeur sur la chose, alors que la délivrance porte sur « la maîtrise matérielle de la chose et repose donc sur un acte de fait » (A. BÉNABENT, op. cit., n o 183) ; de la livraison, ensuite, car la délivrance consiste simplement à mettre la chose à la disposition de l'acheteur, alors que la livraison tient dans la remise matérielle d'un bien meuble à l'acheteur, remise qui n'incombe pas, en principe, au vendeur (V. infra, n o 877). 204. Le régime de l'obligation de délivrance est défini aujourd'hui, non seulement par les règles du code civil, mais aussi par des règles particulières intéressant la vente d'un bien mobilier corporel conclue entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur. Cette seconde catégorie de règles est issue de la transposition, par l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 (JO 18 févr.) ratifiée par la loi n o 2006-406 du 5 avril 2006 (JO 6 avr.), de la directive du Parlement et du Conseil n o 1999/44/CE du 25 mai 1999 sur les garanties dans la vente de biens de consommation (JOCE, n o L 171, 7 juill.). L'obligation de délivrance - tout comme la garantie des vices cachés, d'ailleurs (V. infra, n o 535) - se trouve, de la sorte, soumise à deux régimes différents qu'il y a lieu de présenter successivement, en indiquant d'emblée que l'acheteur consommateur peut, à son choix, invoquer indifféremment l'un ou l'autre (V. infra, n o 398). On envisagera donc successivement : l'obligation de délivrance du droit commun, et l'obligation de délivrance du code de la consommation. Art. 1 - Droit commun Bibliographie. - M. ALTER, L'obligation de délivrance dans la vente des meubles corporels, 1972, LGDJ. - C. BLOND, La protection de l'acheteur insatisfait de l'état de l'immeuble, 1999, PU Aix-Marseille. - O. DESHAYES, La transmission de plein droit des obligations à l'ayant cause à titre particulier, 2004, LGDJ. - J. GHESTIN, Conformité et garantie dans la vente, 1983, LGDJ. Bibliographie. - C. ATIAS, L'obligation de délivrance conforme, D. 1991, chron. 1 ; La distinction du vice caché et de la non- conformité, D. 1993, chron. 265 ; L'équilibre renaissant de la vente, D. 1993, chron. 1 . - A. BÉNABENT, Conformité et vices cachés dans la vente : l'éclaircie…, D. 1994, chron. 115 . - J. CALAIS-AULOY, Une nouvelle garantie pour l'acheteur : la garantie de conformité, RTD civ. 2005. 701 . - L. CASAUX-LABRUNÉE, Vice caché et défaut de conformité : propos non- conformistes sur une distinction viciée, D. 1999, chron. 1 . - J.-M. DELPERIER et J.-D. ROCHE, La transmission des actions judiciaires en matière immobilière, Defrénois 2003. 351. - L. MERCIE, Les contours de l'obligation de délivrance de la vente d'automobile, Petites affiches 7 mars 2000, n o 47, p. 4. - J. PICARD, Les clauses d'exonération de garantie dans les contrats de vente d'immeubles, JCP, éd. N, 1976. I. 2797. - P. SARGOS, Définition et étendue de l'obligation de délivrance dans la vente de meubles corporels, Defrénois 1988. 199. - O. TOURNAFOND, Les prétendus concours d'actions et le contrat de vente (erreur sur la substance, défaut de conformité, vice caché), D. 1989, chron. 237. - P. le TOURNEAU, Conformités et garanties dans la vente d'objets mobiliers corporels, RTD com. 1980. 231. Bibliographie. - BOULAY, La conformité des biens dans la vente de meubles corporels. Étude comparative, thèse, Paris II, 1979. - J.-L. FIRON, Les sanctions atypiques du manquement à l'obligation de délivrance dans les ventes commerciales, thèse dactyl., Nancy, 2004. 205. Le régime de l'obligation de délivrance, tel qu'il est organisé par le code civil, comprend les règles relatives, en premier lieu, à l'objet de la délivrance, en deuxième lieu, aux modalités d'exécution de la délivrance, en troisième lieu, à la preuve de la délivrance, en quatrième et dernier lieu, aux sanctions de l'inexécution de la délivrance. § 1 - Objet de la délivrance 206. La délivrance porte non seulement sur la chose vendue,mais aussi, conformément à l'article 1615 du code civil, sur les accessoires de celle-ci. A. - Délivrance de la chose vendue 207. La délivrance doit porter sur la chose vendue, telle que celle-ci a été définie par les parties. La solution s'autorise de la force obligatoire du contrat (C. civ., art. 1134) ; elle est exprimée par l'article 1243 du code civil, aux termes duquel : « Le créancier ne peut être contraint de recevoir une autre chose que celle qui lui est due, quoique la valeur de la chose offerte soit égale ou même plus grande », et, plus directement encore, par l'article 1603 de ce code, suivant lequel le vendeur doit délivrer « la chose qu'il vend ». Tenu de délivrer la chose qui a été convenue, le vendeur ne peut pas se libérer de son obligation en substituant à la chose vendue une autre chose, alors même que la substitution effectuée ne préjudicierait pas à l'acheteur. 208. La solution s'impose, d'abord, en présence d'une vente portant sur un corps certain. Ainsi, par exemple, le vendeur ne peut pas contraindre l'acheteur d'un livre numéroté à accepter un autre numéro que le numéro convenu (Cass. 1 re civ. 26 nov. 1980, Bull. civ. I, n o 310, RTD civ. 1981. 647, obs. G. Cornu, D. 1981, IR 439, obs. C. Larroumet) ; de même, le vendeur d'un appartement qui transfère les parts d'une société immobilière donnant vocation à cet appartement n'exécute pas son obligation de délivrance (Cass. 3 e civ. 17 mars 1981, Bull. civ. III, n o 57) ; de même encore, manque à cette obligation le vendeur qui délivre un véhicule doté d'un moteur qui ne correspond pas à celui mentionné sur la carte grise, étant observé qu'en l'espèce, le véhicule n'était de surcroît pas conforme à la réglementation technique et ne pouvait pas être assuré (Cass. 1 re civ. 25 janv. 2005, JCP 2005. II. 10184, note C. Lièvremont). 209. La solution s'impose pareillement, ensuite, en présence d'une vente portant sur des choses de genre : la chose délivrée doit être alors de la même espèce que l'espèce vendue. Aussi, lorsque, par exemple, un pépiniériste a commandé à un arboriculteur une importante quantité de plants de pommiers d'une certaine variété, le fournisseur n'exécute pas convenablement son obligation de délivrance s'il délivre des plants d'une autre variété (Cass. 1 re civ. 24 nov. 1993, Contrats, conc., consom. mars 1994, p. 2, obs. L. Leveneur ; rappr., à propos d'une vente de plants de kiwis, Cass. 1 re civ. 20 déc. 1988, Bull. civ. I, n o 373) ; il en est de même du vendeur qui délivre des graines de betteraves fourragères au lieu de betteraves sucrières (Cass. 1 re civ. 11 oct. 1966, Bull. civ. I, n o 466), de l'huile minérale au lieu de l'huile d'olive (Cass. req. 10 janv. 1870, DP 1870. 1. 423), ou encore du vendeur qui, au lieu de délivrer le véhicule d'occasion d'une marque déterminée qui lui a été commandé, délivre un véhicule constitué de l'assemblage de l'épave d'un véhicule accidenté avec une coque dont le numéro de série d'origine a été maquillé (Cass. 1 re civ. 5 nov. 1996, Bull. civ. I, n o 185, JCP 1997. II. 22872, note C. Radé), ou du vendeur qui délivre des volants roulants en PVC au lieu des volets d'aluminium convenus (Cass. com. 5 mars 2002, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 107, obs. L. Leveneur)… 210. L'exigence suivant laquelle la chose délivrée doit être identique à la chose vendue est prolongée par la disposition de l'article 1614, alinéa 1 er , du code civil, qui énonce : « La chose doit être délivrée en l'état où elle se trouve au moment de la vente ». La règle est de bon sens, car c'est en l'état où la chose se trouvait le jour de l'échange des consentements que l'acquéreur a entendu l'acheter. De là il se déduit, d'abord, que la commande d'une chose neuve s'entend d'une chose n'ayant subi aucune dégradation (Cass. 1 re civ. 3 mai 2006, D. 2006, IR 1405 ) ; il se déduit, ensuite, que lorsqu'au moment de la vente le bien vendu était en mauvais état, l'acquéreur ne saurait exiger, à défaut de stipulation contraire, que lui soit délivré un bien en meilleur état. L'accord sur la chose et sur le prix s'est fait en considération de la vétusté ou des détériorations de cette chose. Aussi, le vendeur d'un immeuble, par exemple, ne saurait être tenu d'effectuer des réparations au motif que l'immeuble est en mauvais état, dès lors que cet état ne s'est pas modifié après la vente. 211. De la règle posée à l'article 1614, alinéa 1 er , du code civil, il se déduit, enfin, que la chose doit demeurer, jusqu'à ce qu'elle soit à la disposition de l'acquéreur, dans l'état où elle était lors de la vente. Le vendeur est tenu, dans cette mesure, de l'obligation de conserver la chose dont il est, jusqu'à ce que la délivrance intervienne, le dépositaire. À ce titre, Il doit rendre compte à l'acquéreur des détériorations survenues par sa faute entre la conclusion du contrat et le moment de la délivrance. Il revient à l'acquéreur de prouver une telle faute, s'il souhaite engager la responsabilité civile du vendeur, car celui-ci n'est tenu que d'une obligation de moyens (C. civ., art. 1137 ; adde : Cass. com. 19 oct. 1982, Bull. civ. IV, n o 321, D. 1983, IR 482, obs. B. Audit, RTD civ. 1984. 515, obs. J. Huet ; comp. Cass. 1 re civ. 22 janv. 1991, Bull. civ. I, n o 28, qui paraît poser une présomption de faute du dépositaire au cas de perte de la chose). Mais, quant aux détériorations ou à la perte de la chose dues à un cas fortuit, c'est la partie qui assume la charge des risques qui doit en supporter les conséquences, autrement dit, en principe, l'acheteur (V. supra, n os 6 et s.). 212. Cela étant, s'il n'est pas concevable que le vendeur se soustraie à l'intégralité de l'obligation de délivrance sans priver le contrat de toute signification véritable, les parties demeurent libres de déroger conventionnellement à la règle de l'article 1614 du code civil. Le caractère supplétif de ce texte incline du moins à le penser, sous réserve de la solution particulière énoncée par la loi à propos des ventes mobilières conclues entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur. En effet, l'article R. 132-2 du code de la consommation énonce, à l'alinéa 1 er , qu'« est interdite [comme abusive au sens de l'alinéa 1 er de l'article L. 132-1 du code de la consommation] la clause ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer… ». 213. La prohibition ainsi édictée n'est assouplie, par l'alinéa 2 du même texte, que relativement aux « modifications liées à l'évolution technique ». Encore cet assouplissement est-il enfermé dans des conditions strictes : de la modification apportée il ne doit résulter ni augmentation du prix, ni altération de la qualité de la chose ; de plus, la clause prévoyant cette modification doit accorder au non-professionnel ou consommateur « la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement » (rappr., à propos de la « garantie légale de conformité » issue de l'ordonnance du 17 févr. 2005 [préc. supra, n o 204], infra, n os 392 et s.). 214. Sous le bénéfice de ces remarques, l'exécution de l'obligation de délivrer la chose convenue prête à difficulté, principalement lorsqu'il s'agit d'apprécier la conformité de cette chose aux prévisions du contrat. La conformité s'entend alors, outre d'une conformité qualitative - le vendeur s'obligeant à délivrer la chose dont les spécifications ont été définies par le contrat -, d'une conformité quantitative - la délivrance devant porter sur la quantité de la chose qui été promise par le vendeur. 1° - Conformité qualitative de la chose délivrée 215. Dire que le vendeur est tenu de délivrer une chose conforme signifie non seulement que le bien délivré doit être celui-là même qui a été désigné par le contrat, mais en outre que ce bien doit présenter les qualités et caractéristiques que l'acquéreur est en droit d'en attendre. Celles-ci s'apprécient au regard des normes administratives et au regard des qualités convenues entre les parties. La question de savoir si la délivrance conforme s'étend à l'usage que l'acquéreur entend faire de la chose suscite, quant à elle, une réflexion spécifique. a. - Conformité aux normes administratives 216. Le bien vendu doit être conforme aux normes administratives dont, éventuellement, il relève : il paraît logique, à défaut de stipulation contraire, d'exiger du vendeur qu'il délivre un bien en état d'usage ; il s'agit là d'une suite naturelle du contrat (C. civ., art. 1135). Ainsi, par exemple, le lotisseur qui délivre un terrain ne satisfaisant pas aux normes de constructibilité (Cass. 3 e civ. 17 janv. 1990, Bull. civ. III, n o 26, D. 1991, somm. 168, obs. O. Tournafond ), le vendeur qui délivre un hôtel- restaurant dont l'installation électrique ne répond pas aux règles de sécurité (Cass. com. 21 janv. 1992, Bull. civ. IV, n o 33), la société venderesse qui installe un système d'alarme, avec sirène extérieure, au domicile d'un particulier sans s'être assurée de l'obtention administrative obligatoire (rappr. Cass. 1 re civ. 27 oct. 1981, Bull. civ. I, n o 315, D. 1982, IR 532, obs. B. Audit), le vendeur qui délivre un véhicule automobile volé, dont la carte grise a été falsifiée (Cass. 1 re civ. 29 mai 1996, Bull. civ. I, n o 230, D. 1997, somm. 346, obs. O. Tournafond ), ou un véhicule non conforme aux indications du contrôle technique (Cass. 1 re civ. 29 janv. 2002, Bull. civ. I, n o 35 ; rappr. Cass. 1 re civ. 25 janv. 2005, préc. supra, n o 208), n'exécutent pas convenablement l'obligation de délivrance à laquelle ils sont tenus. b. - Conformité aux qualités convenues 217. La conformité du bien délivré aux normes administratives n'est pas suffisante : celui-ci doit présenter aussi les qualités convenues, qu'elles reposent sur des considérations objectives, telles que l'origine, la matière, le type ou la marque, ou qu'elles soient d'ordre purement subjectif et se rapportent, par exemple, à un critère esthétique… En cas de difficulté sur ce point, il importe, bien sûr, de s'attacher aux stipulations du contrat. Ainsi, dans une vente immobilière, si l'appartement situé au 19 e étage d'un immeuble qui en compte trente, est desservi par un ascenseur dont les performances sont très inférieures à celles qui ont été mentionnées dans l'acte (CA Paris, 30 juin 1987, Gaz. Pal. 1988. 2, somm. 361), ou si un appartement vendu avec le label « confort acoustique » se révèle non conforme aux spécifications de ce label (Cass. 3 e civ. 12 juin 1979, Bull. civ. III, n o 127 ; 2 juin 1982, Gaz. Pal. 1982. 2, panor. 372, obs. A.P.), le vendeur ne peut être considéré comme ayant exécuté son obligation de délivrance. Il en est de même si un appartement a été vendu avec des placards dont il est, en réalité, dépourvu (Cass. 3 e civ. 3 janv. 1979, Bull. civ. III, n o 3), si sa disposition a été modifiée par rapport aux plans de l'immeuble déposés chez le notaire en annexe à l'acte de vente (Cass. 3 e civ. 26 mai 1994, Bull. civ. III, n o 110, D. 1995, somm. 277, obs. F. Magnin ), si un immeuble vendu libre d'occupation se révèle, en vérité, loué (Cass. 3 e civ. 29 janv. 2003, Bull. civ. III, n o 23, Defrénois 2003. 844, obs. E. Savaux), ou encore si l'acte de vente portant sur une maison d'habitation avec cour et magasin mentionne que les trois fenêtres murées du magasin pourront être réouvertes, alors qu'en réalité une telle possibilité n'est pas offerte à l'acquéreur (Cass. 3 e civ. 25 mai 2005, D. 2005, IR 1734 ) ; c'est qu'en tous ces cas, bien que les immeubles délivrés soient ceux qui ont été vendus, ils ne présentent pas les qualités expressément convenues. Lire la mise à jour 217 s. Obligation de délivrance conforme aux stipulations contractuelles. Dépollution des biens cédés. - Le bien vendu étant présenté dans l'acte de vente comme dépollué, les vendeurs sont tenus de livrer un bien conforme à cette caractéristique (Civ. 3 e , 29 févr. 2012, n o 11-10.318 , Dalloz actualité, 23 mars 2012, obs. Kebir). 218. La solution est évidemment identique en présence des ventes mobilières, quelles que soient leurs modalités ; le défaut de conformité de la chose à l'échantillon, ou aux indications du catalogue ou du bon de commande, ou encore aux spécifications de tout autre document contractuel, établit l'inexécution de l'obligation de délivrance. Par exemple, il n'y a pas délivrance conforme lorsque les ferrures, les couleurs et les éléments mobiliers qui sont l'objet de la vente d'une chambre à coucher sont différents des indications fournies sur le bon de commande (Cass. 1 re civ. 1 er déc. 1987, Bull. civ. I, n o 324, RTD civ. 1988. 368, obs. P. Rémy ; rappr., à propos de la différence d'aspect et de teinte d'un mobilier de cuisine exposé en magasin, CA Versailles, 26 oct. 1990, D. 1991, somm. 165, obs. O. Tournafond ) ; il en est de même si les peaux de mouton délivrées ne correspondent pas aux précisions du contrat (Cass. com. 24 nov. 1966, Bull. civ. III, n o 457, JCP 1967. II. 15288, note J.H.), si le vendeur délivre du lin contenant du propylène au lieu de lin pur (Cass. com. 22 mai 1991, Bull. civ. IV, n o 176, D. 1992, somm. 200, obs. O. Tournafond ), si une voiture a été vendue d'occasion avec un kilométrage supérieur à celui affiché au compteur (Cass. 1 re civ. 16 juin 1993, D. 1994. 210 ; adde : Cass. 1 re civ. 15 mars 2005, D. 2005, IR 919 , JCP 2005. IV. 1972, pour un cas où, en plus, le numéro de série du véhicule avait été dissimulé), si le véhicule commandé pour le transport de handicapés se révèle inapte à un tel transport (Cass. 1 re civ. 17 juin 1997, Bull. civ. I, n o 206, Dalloz Affaires 1997. 1218), ou encore si le portique de manutention de gravats délivré n'est pas en mesure d'atteindre les performances pour lesquelles il avait été commandé et fabriqué (Cass. com. 19 déc. 2000, D. 2002, somm. 1007, obs. G. Pignarre ; rappr., à propos d'une machine à libeller des chèques prétendument infalsifiables, alors que tel n'était pas le cas : Cass. com. 17 juin 1997, Bull. civ. IV, n o 195, D. 1998. 248, note G. Pignarre et G. Paisant ; à propos d'une machine produisant des sachets d'un poids supérieur à celui contractuellement prévu, ce qui avait entraîné une perte de productivité préjudiciable à l'acheteur : Cass. com. 7 juill. 1998, Dalloz Affaires 1998. 1529, obs. J. F.). 219. Mais, quant à la qualité, la délivrance conforme ne saurait s'apprécier à la lumière des seules stipulations du contrat. D'abord, il peut arriver que celles-ci soient obscures ou imprécises ; en ce cas, l'article 1602, alinéa 2, du code civil énonce : « Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur ». La Cour de cassation en a déduit que, dans une vente d'ordinateur, les juges du fond ne sauraient s'arrêter au seul fait que le bon de commande ne précise pas l'étendue de l'engagement du vendeur, pour écarter la contestation de l'acquéreur faisant valoir que la capacité réelle de l'ordinateur délivré est inférieure à celle convenue (Cass. 1 re civ. 13 oct. 1993, D. 1994. 211 ). 220. Ensuite, au-delà des stipulations contractuelles, les juges ne doivent pas hésiter, en cas de difficulté, à prendre en compte les caractéristiques de la chose en considération desquelles la vente est censée avoir été conclue, ou, si l'on préfère, les qualités de la chose qui, au regard de la nature de celle-ci, sont présumées être entrées dans le champ contractuel (P. RÉMY, obs. RTD civ. 1988. 368) : par exemple, lorsqu'un client commande à un constructeur automobile une voiture de sport, et que celle qui lui est délivrée présente des « ondulations imputables à une maîtrise insuffisante de la peinture sur des coques plastiques », il est permis de présumer qu'il entendait acquérir une automobile exempte de tout défaut de peinture, et d'en déduire que le vendeur n'a pas exécuté convenablement son obligation de délivrance (Cass. 1 re civ. 1 er déc. 1987, Bull. civ. I, n o 325, RTD civ. 1988. 368 ; 4 avr. 1991, Bull. civ. I, n o 130, D. 1992, somm. 201, obs. O. Tournafond ). 221. Enfin, il y a lieu de rappeler que, dans les ventes de choses de genre, au cas où le contrat n'a pas précisé la qualité de la chose vendue et où il n'existe pas d'indice permettant de connaître la volonté des parties sur ce point, la chose délivrée doit, conformément à l'article 1246 du code civil, être de qualité moyenne (V. Vente [2 o formation]) ; cette exigence est renforcée, dans les ventes de marchandises, où la marchandise doit être « loyale et marchande », ce qui « impose une qualité correcte, en rapport avec la destination normale du produit » (A. BÉNABENT, op. cit., n o 187). Il s'agit là de qualificatifs dont l'appréciation est abandonnée au pouvoir souverain des juges du fond (Cass. req. 5 janv. 1875, DP 1876. 1. 111 ; Cass. com. 10 juin 1974, Bull. civ. IV, n o 185). c. - Conformité à l'usage recherché par l'acquéreur 222. Il peut arriver que, bien que la chose délivrée soit celle désignée par le contrat, elle ne réponde pas à l'usage que l'acquéreur en attendait. Lorsque cet usage a été précisé lors de la conclusion de la vente, le défaut de conformité n'est pas douteux, puisque la chose délivrée ne satisfait pas à la destination que les parties étaient convenues de lui donner : il en est ainsi, par exemple, si le véhicule vendu est inapte au transport des handicapés, alors qu'il avait été explicitement commandé pour cet usage (V. Cass. 1 re civ. 17 juin 1997, n o 95-13.389 , préc. supra, n o 218), ou si un enduit délivré est inapte à l'utilisation contractuellement définie en tant qu'enduit extérieur (Cass. 1 re civ. 17 juin 1997, n o 95-18.981 , Bull. civ. I, n o 205). La délivrance d'une chose ne satisfaisant pas à l'usage communément défini par l'acheteur et par le vendeur procède donc, sans conteste, d'un manquement à l'obligation de délivrance du vendeur. Il en est assurément de même lorsque l'usage que l'acquéreur entend faire de la chose peut être présumé convenu : par exemple, il est permis de présumer que l'acquéreur d'un véhicule automobile entend que celui-ci soit apte à la circulation ; si tel n'est pas le cas, le même acquéreur est en droit de se prévaloir d'un défaut de délivrance conforme. Lire la mise à jour 222, 254. Appréciation de la gravité du vice au regard de l'usage convenu. - Le vice dont la cour relève l'existence doit suffire à rendre la chose vendue impropre à l'usage auquel l'acquéreur peut sérieusement s'attendre (vente de deux véhicules Volkswagen Iltis, anciens véhicules militaires légers réformés de l'armée allemande : Civ. 1 re , 19 mars 2009, n o 08-12.657 ). 223. Au cas où l'usage particulier pour lequel le bien a été acheté n'a pas été convenu, en revanche, il ne paraît pas possible à l'acquéreur de se prévaloir d'une délivrance non conforme, dès lors que ce bien présente les qualités et caractéristiques stipulées au contrat. En effet, dans cette hypothèse, l'insatisfaction de l'acquéreur tient ou bien à ce qu'il a acquis la chose à la légère, sans s'informer suffisamment, ou bien à ce qu'il n'a pas été suffisamment informé par le vendeur tenu du devoir de l'informer - voire, si le vendeur est un professionnel, de le conseiller (V. infra, n os 703 et s.) -, ou bien à ce que la chose présente un défaut qui, dans la mesure où il n'était pas apparent à la livraison, est de nature à constituer un vice caché et relève à ce titre d'une garantie spécifique (V. infra, n os 529 et s.). 224. Il est vrai que, dans ce dernier cas, la distinction entre défaut de conformité et vice caché est, bien souvent, malaisée à mettre en oeuvre. Le législateur en a d'ailleurs pris acte, qui, à l'occasion de la transposition de la directive du 25 mai 1999 sur la vente et les garanties des biens de consommation, a englobé sous l'appellation de conformité à la fois l'obligation de délivrance conforme et la garantie des vices cachés (V. infra, n os 378 et s.). Il reste que le rapprochement des deux notions n'est opéré que dans le cadre du droit de la consommation, et qu'en dehors, leur distinction est de droit positif. 225. La portée pratique de cette distinction est importante, car le code civil français distingue nettement les régimes de l'inexécution de l'obligation de délivrance et de l'inexécution de l'obligation de garantie des vices cachés (pour l'obligation de délivrance, V. infra, n os 325 et s. ; pour la garantie des vices cachés, V. infra, n os 585 et s.). Spécialement, la mise en oeuvre de la garantie des vices cachés doit intervenir dans le « bref délai » - fixé à deux ans à compter de la découverte du vice, depuis la modification apportée à l'article 1648 du code civil par l'ordonnance du 17 février 2005 qui a transposé la directive de 1999 (V. infra, n o 597) -, tandis que les actions relatives à l'inexécution de l'obligation de délivrance sont soumises à la prescription trentenaire ou décennale, selon que la vente est civile ou commerciale. Le caractère nettement plus favorable pour l'acheteur du régime des sanctions applicables au cas de non-conformité de la délivrance explique que celui-ci cherche souvent à invoquer contre le vendeur ce défaut d'exécution plutôt que l'existence d'un vice caché. À cet effet, il prétendra que le manquement à l'obligation de délivrance tient à ce que la chose n'est pas apte à remplir l'usage pour lequel il en a fait l'acquisition. 226. Une telle prétention procède d'une conception large - dite parfois « fonctionnelle » - de la délivrance conforme. Elle a séduit un temps la jurisprudence, puisqu'un arrêt rendu en 1986 par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation a paru implicitement la consacrer (Cass. ass. plén. 7 févr. 1986, D. 1986. 293, note A. Bénabent, JCP 1986. II. 20616, 2 e esp., note P. Malinvaud), et que la première chambre civile de la Cour de cassation (V., par ex., Cass. 1 re civ. 8 nov. 1988, Bull. civ. I, n o 314, D. 1988, IR 280, imposant au vendeur de « délivrer une chose conforme à l'usage auquel elle est destinée » ; adde : Cass. 1 re civ. 14 févr. 1989, Bull. civ. I, n o 83 ; 20 mars 1989, Bull. civ. I, n o 140, D. 1989, IR 178), puis la chambre commerciale (Cass. com. 22 mai 1991, Bull. civ. IV, n o 176 ; 18 févr. 1992, Bull. civ. IV, n o 82 ; 1 er déc. 1992, Bull. civ. IV, n o 389, D. 1993, somm. 240, obs. O. Tournafond ) l'ont momentanément ralliée. Cependant une conception aussi dilatée de la délivrance conforme est, en l'état des textes du code civil, critiquable, car elle repose sur une confusion entre l'obligation de délivrance conforme et la garantie des vices cachés, alors qu'il s'agit là, en vérité, d'obligations dont l'objet est distinct et dont l'exécution s'apprécie à des moments différents. En effet, la première de ces obligations, qui consiste à mettre à la disposition de l'acquéreur un bien présentant les caractéristiques convenues, s'apprécie au moment de la délivrance, et elle est exécutée dès la réception de la chose par l'acquéreur ; tandis que la seconde, qui consiste à garantir le vendeur contre les défauts non apparents lors de la vente, dès lors que ceux-ci rendent la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée, prolonge l'obligation de délivrance. Or, poser que l'obligation de délivrance conforme englobe la conformité de la chose vendue à l'usage pour lequel elle est destinée, implique inévitablement le chevauchement de l'obligation de délivrance et de l'obligation de garantie. 227. Semblable chevauchement ne présenterait pas d'inconvénient dans un système juridique où la distinction du contenu et du régime des deux obligations ne serait pas faite. Tel est le cas, par exemple, de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 relative à la vente internationale des marchandises, dont l'article 35, 2, englobe, dans l'obligation de délivrance conforme, la conformité aux spécifications du contrat et la conformité à l'usage attendu de la chose. Tel est aussi le cas de la « garantie de conformité » des consommateurs, telle qu'elle est issue de la transposition en droit français de la directive du 25 mai 1999 (V. infra, n o 378). Mais, ainsi qu'il a été dit, tel n'est pas le cas du code civil français, lequel distingue nettement le régime de l'inexécution de chacune des deux obligations. Voilà pourquoi la troisième chambre civile de la Cour de cassation n'a jamais consacré la conception extensive de l'obligation de délivrance (Cass. 3 e civ. 25 janv. 1989, Bull. civ. III, n o 20 ; 27 mars 1991, Bull. civ. III, n o 107, D. 1992. 95, note J.-P. Karila , D. 1992, somm. 200, obs. O. Tournafond , JCP 1992. II. 21935, note C. Ginestet ; 23 oct. 1991, Bull. civ. III, n o 249, D. 1993, somm. 239, obs. O. Tournafond ), et pourquoi, depuis 1993, la première chambre civile, d'abord (Cass. 1 re civ. 5 mai 1993, D. 1993. 506, note A. Bénabent ; 27 oct. et 8 déc. 1993, D. 1994. 212 ), la chambre commerciale, ensuite (Cass. com. 26 avr. 1994, Bull. civ. IV, n o 159, JCP, éd. E, 1994. II. 607, note L. Leveneur ; 31 mai 1994, Bull. civ. IV, n o 199), l'ont abandonnée dans son principe : il découle des arrêts rendus à cette époque que le défaut de conformité ne couvre que le manquement aux spécifications du contrat et que, dès lors qu'est en cause une non-conformité à l'usage normal de la chose, l'inexécution de l'obligation du vendeur ressortit à la garantie des vices cachés, non à la délivrance (sur la notion de vice caché, V. infra, n os 540 et s.). 228. La jurisprudence ultérieure a confirmé, dans son principe, cette distinction (V., par ex., Cass. 3 e civ. 6 oct. 2004, n o 02- 21.088 , D. 2004, IR 2766 , énonçant que le défaut d'étanchéité d'un immeuble, puisqu'il fait obstacle à l'utilisation de l'immeuble dans des conditions normales, est un vice caché, non un défaut de conformité ; Cass. 3 e civ. 6 oct. 2004, n o 02- 20.755 , Bull. civ. III, n o 167, 3 e esp., D. 2004, IR 2894 , Contrats, conc., consom. 2005, comm. 24, obs. L. Leveneur, posant que l'absence d'installations électriques individuelles sur les lots de bâtiments vendus sous le régime de la copropriété destinés à l'habitation individuelle constitue un manquement à l'obligation de délivrance, non un vice caché ; Cass. 1 re civ. 24 janv. 2006, D. 2006, IR 397 , JCP 2006. IV. 1341, pour qui constitue un manquement à l'obligation de délivrance, non un vice caché, la livraison d'un véhicule non conforme aux spécifications contractuelles découlant, en l'espèce, des mentions d'un certificat d'immatriculer). Encore convient-il d'observer que ne saurait être exclu de manière absolue le cumul d'une délivrance non conforme et d'un vice caché. L'hypothèse d'un tel cumul requiert, ainsi que l'a fait remarquer un auteur (A. BÉNABENT, Conformité et vices cachés dans la vente : l'éclaircie (à propos des cinq arrêts des 16 juin, 13 octobre, 27 octobre et 8 décembre 1993), D. 1994, chron. 115 , spéc. n o 7), la réunion de trois conditions : elle suppose, tout d'abord, que la chose ne soit pas conforme aux spécifications convenues, ensuite, que s'ensuive une diminution d'usage, et, enfin, que l'acquéreur ne se soit aperçu du défaut de conformité qu'après la réception de la chose. Lorsqu'elle se présente, la logique voudrait que l'acquéreur se place sur le terrain de son choix. La jurisprudence ne paraît pas l'admettre toujours, lui imposant parfois le régime de la garantie des vices cachés (Cass. 3 e civ. 24 avr. 2003, Bull. civ. III, n o 86). Lire la mise à jour 228. Délivrance non conforme et vice caché. Cumul de qualifications. - Cassation pour défaut de motifs de l'arrêt qui, pour débouter un acquéreur de sa demande, se contente d'affirmer que l'action fondée sur l'obligation de délivrance conforme se confond avec celle fondée sur l'existence d'un vice caché, et qu'elle est partant soumise au bref délai de l'article 1648 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n o 2005-136 du 17 févr. 2005, sans constater que la garantie des vices cachés constituait l'unique fondement possible de l'action de l'acquéreur (Civ. 3 e , 25 janv. 2012, n o 10-27.357 , Dalloz actualité, 13 févr. 2012, obs. Forest). 229. En dehors du cas où sont cumulés un défaut de conformité et un vice caché, il appartient à l'acheteur d'exercer l'action appropriée, la première chambre civile de la Cour de cassation ayant précisé que l'article 12 du nouveau code de procédure civile oblige le juge à requalifier au besoin l'action exercée sur un fondement erroné (Cass. 1 re civ. 16 juin 1993, D. 1994. 210 ), tout en respectant, évidemment, le principe de la contradiction (Cass. 1 re civ. 27 oct. 1993, D. 1994. 211 ). Ainsi, par exemple, a été cassé au visa des articles 1603 du code civil et 12, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, l'arrêt qui avait rejeté une demande en résolution de la vente exclusivement fondée par l'acquéreur sur la garantie des vices cachés en présence d'un manquement à l'obligation de délivrance, pour ne pas avoir recherché « si cette demande inexactement fondée sur la garantie des vices cachés, ne pouvait aboutir sur le fondement d'un manquement du vendeur à son obligation de délivrance… (que la cour d'appel) avait retenu » (Cass. 1 re civ. 25 janv. 2005, préc. supra, n o 208 ; adde : Cass. 1 re civ. 24 janv. 2006, préc. supra, n o 228). 2° - Conformité quantitative de la chose délivrée Bibliographie. - La question de la contenance dans les contrats de vente immobilière. Notaires-géomètres-experts : une ligne de conduite commune (Accord du 28 juin 1989), Defrénois 1989. 1369, et RD imm. 1989. 431, avec présentation de P. DUBOIS. - P. CAPOULADE et C. GIVERDON, Loi n o 96-1107 du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs des lots de copropriété, RD imm. 1997. 31 . - M. DAGOT, Garantie de contenance du lot de copropriété vendu, JCP 1997. I. 4034. - P. DUBOIS, La recommandation de la Commission des clauses abusives relative aux clauses d'exonération de garantie dans les actes de vente de biens immobiliers, RD imm. 1988. 71. - J. PICARD, Les clauses d'exonération de garantie dans le contrat de vente d'immeubles, JCP, éd. N, 1976. I. 2797. - O. SALVAT, Une question irritante : la portée des clauses de non- garantie de contenance dans les ventes d'immeubles, JCP, éd. N, 1987. I. 143. 230. Lorsque les parties ont fait de l'exacte quantité à livrer un élément essentiel de la vente, l'acheteur est en droit de refuser, pour défaut de conformité, une livraison inférieure ou supérieure à la quantité convenue. Ainsi, lorsque le vendeur s'est engagé à livrer une quantité minimale, s'il n'est pas en mesure de la fournir, il n'exécute pas son obligation de délivrance conforme (pour une vente où un poids minimum était stipulé, V. Cass. req. 28 mars 1905, DP 1905. 1. 192). Cette carence du vendeur pourra être sanctionnée, à la demande de l'acquéreur, suivant les mêmes modalités que celles tenant au défaut de conformité qualitative, en présence d'une vente mobilière (V. infra, n os 344 et s.) ; comp., pour les régimes particuliers des sanctions du défaut de contenance dans les ventes immobilières, infra, n os 232 et s.). 231. Dans les ventes de marchandises, les parties conviennent parfois d'aménager, par des clauses telles que la « clause environ », la clause des « réserves de disponibilités » ou la clause « aux besoins du client », l'exécution de l'obligation de délivrance quant à la quantité de la chose vendue ; l'appréciation de la conformité de la délivrance est faite alors par référence aux stipulations du contrat, mais aussi, en tant que de besoin, au regard du principe de bonne foi dans l'exécution des contrats (C. civ., art. 1134, al. 3) et, éventuellement, en tenant compte des usages et des pratiques antérieurement suivies par les parties. 232. Dans les ventes d'immeubles, la question de la conformité de la délivrance, relativement à la quantité livrée, se pose au cas où, alors que la superficie promise est indiquée dans l'acte (ce qui n'est pas obligatoire dès lors que la vente ne porte pas sur un lot de copropriété), la superficie délivrée n'est pas la même que la superficie promise. Une telle différence établit, sans conteste, l'inexécution de l'obligation de délivrance conforme (CA Paris, 9 mai 1990, D. 1991, somm. 167, obs. O. Tournafond , à propos d'un parking privé, d'une superficie inférieure à celle convenue). Les difficultés susceptibles de s'ensuivre peuvent être résolues par le recours aux règles qui gouvernent la contenance des immeubles. 233. L'article 1616 du code civil dispose : « Le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu'elle est portée au contrat… ». Sans préjudice des règles particulières applicables en matière de vente d'un lot de copropriété, l'incidence d'une différence de contenance entre la construction ou le terrain délivré, et la construction ou le terrain désigné dans l'acte, est prévue par les articles 1617 et suivants du code civil. 234. Ces textes n'intéressent que les ventes immobilières. Ils ne sauraient être appliqués, dès lors, en présence d'une vente de coupes de bois (Cass. civ. 17 déc. 1923, DP 1924. 1. 14), d'une vente de récolte sur pied (Cass. 1 re civ. 18 févr. 1957, Bull. civ. I, n o 85), ou d'une vente de truites cédées indépendamment du terrain sur lequel étaient implantés les bassins piscicoles, de sorte qu'elles ne pouvaient présenter le caractère d'immeubles par destination (Cass. 1 re civ. 11 janv. 2005, JCP 2005. IV. 1348). De même, leur application est exclue en présence d'une cession de terrain contre remise d'un local à construire, parce qu'il ne s'agit pas là d'une vente (Cass. 3 e civ. 19 juill. 1983, Bull. civ. III, n o 168). 235. Les conséquences du défaut ou de l'excès de contenance, telles qu'elles sont aménagées par les textes, varient suivant que la vente est faite pour un prix global ou pour un prix « à raison de tant la mesure ». Il convient de les mesurer dans chacun des deux cas, avant d'examiner le régime des actions fondées sur l'insuffisance ou sur l'excès de contenance, ainsi que le régime d e s clauses dérogatoires aux règles sur la contenance fixées par le code civil. Il y aura lieu, enfin, d'évoquer le régime particulier applicable aux ventes de lots de copropriété. a. - Vente immobilière pour un prix global 236. Lorsque la vente est faite pour un prix global, le mode de fixation du prix révèle que la contenance de l'immeuble n'est pas déterminante dans l'intention des contractants ; c'est pourquoi le défaut ou l'excès de contenance n'a, en principe, aucune incidence sur la vente. Mais ce principe comporte deux exceptions. 237. La première est prévue par l'article 1619 du code civil, qui dispose que, si la contenance délivrée est moindre que celle convenue d'au moins un vingtième, l'acheteur a droit à une diminution du prix. Il s'agit là de la seule sanction prévue par ce texte ; de sorte que l'acheteur ne peut pas prétendre, en se fondant sur l'article 1619, exercer une autre action, spécialement une action en revendication du complément de superficie (Cass. 3 e civ. 24 janv. 1990, Bull. civ. III, n o 32, D. 1991, somm. 165, obs. G. Paisant ). Mais, si l'acheteur est en mesure d'établir que l'exacte contenance était à ses yeux, compte tenu de l'usage qu'il entendait faire de l'immeuble, une qualité déterminante de celui-ci, il peut envisager de poursuivre la nullité du contrat pour vice de consentement (Cass. civ. 23 nov. 1931, DP 1932. 1. 129, note L. Josserand, Gaz. Pal. 1932. 1. 96), ou d'exercer une action en garantie des vices cachés, aux conditions prévues par la loi (sur les vices du consentement, V. Vente [2 o formation] ; sur la garantie des vices cachés, V. infra, n os 529 et s.). 238. La seconde exception au principe ci-dessus posé est issue des articles 1619 et 1620 du code civil. En vertu de l'article 1620, si, au contraire du cas précédent, la contenance délivrée est supérieure d'au moins un vingtième à celle convenue, l'acquéreur a le choix entre payer un supplément de juste prix ou résoudre le contrat (Cass. 3 e civ. 27 janv. 1981, Gaz. Pal. 1981. 2, panor. 192). Le texte ajoute que l'acquéreur doit « les intérêts s'il a gardé l'immeuble ». Il s'agit là des intérêts du prix principal ; les intérêts du supplément ne sont dus que dans la mesure et au taux du prix principal, puisque le supplément du prix n'est qu'une partie du prix principal et que, par conséquent, il doit en suivre le régime. 239. La mise en oeuvre des articles 1619 et 1620 du code civil appelle deux précisions complémentaires. La première concerne le mode d'évaluation de l'insuffisance ou de l'excès de contenance : le calcul doit se faire par rapport à la valeur de l'immeuble, et non par rapport à la superficie en tant que telle ; autrement dit, pour savoir s'il y a lieu d'appliquer l'un ou l'autre des deux textes précités, il importe de vérifier si le déficit ou l'excédent observé en regard des indications portées à l'acte de vente représente en valeur la vingtième partie au moins du prix total. 240. La seconde précision est relative à l'assiette de l'évaluation de la contenance, lorsque la vente porte sur plusieurs fonds distincts ou sur un immeuble divisé en plusieurs parties. La détermination de cette assiette oblige à distinguer les trois cas suivants. Si, tout d'abord, la vente, tout en comprenant des fonds distincts dont la contenance est indiquée séparément, a été conclue pour un prix global, l'unicité de l'opération conduit à poser qu'au cas où il y a excédent sur un fonds et déficit sur un autre, « on fait compensation jusqu'à due concurrence » (C. civ., art. 1623). Pour savoir si les articles 1619 et 1620 du code civil sont applicables, il convient donc d'évaluer l'excédent ou l'insuffisance de contenance par rapport à la valeur de l'ensemble des fonds vendus. 241. Si, maintenant, un prix distinct a été fixé pour chaque fonds, il y a autant de ventes que de fonds, et l'excédent ou l'insuffisance du vingtième doit être apprécié au regard de la contenance de chaque fonds pris séparément ; aucune compensation ne peut donc être effectuée entre l'excédent de contenance d'un fonds et l'insuffisance de contenance d'un autre fonds. 242. Si, enfin, la vente porte sur plusieurs fonds, ou sur un immeuble divisé en plusieurs parties, mais que la contenance est indiquée en bloc, l'insuffisance ou le dépassement ne peut s'apprécier qu'au regard de la contenance en bloc (Cass. civ. 25 mars 1884, DP 1884. 1. 321). b. - Vente immobilière « à raison de tant la mesure » 243. Lorsque l'immeuble a été vendu « à raison de tant la mesure », c'est-à-dire lorsque le prix a été déterminé en fonction de la superficie (au mètre carré, si l'on préfère), les parties ont fait de la contenance un élément déterminant de leur consentement. En vertu de l'article 1617 du code civil, le vendeur est alors « obligé de délivrer à l'acquéreur, s'il l'exige, la quantité indiquée au contrat… ». Et le défaut de concordance entre la contenance définie à l'acte et la contenance délivrée participe à une exécution défectueuse de l'obligation de délivrance. 244. Les articles 1617 et 1618 s'attachent à régler les conséquences d'une telle situation. L'article 1617 énonce qu'au cas où la contenance réelle est inférieure à la contenance indiquée, l'acheteur peut exiger la délivrance de la contenance indiquée ; si cette délivrance est impossible, ou si l'acquéreur ne l'exige pas, le même texte prévoit que le vendeur devra souffrir une diminution proportionnelle du prix. Au demeurant, il est permis de poser que, si la contenance réelle rend impossible l'utilisation de l'immeuble prévue par l'acheteur (aménagement d'une piscine couverte de compétition ou stationnement d'un véhicule, par ex.), et si le vendeur, qui avait connaissance de l'intention dudit acheteur, n'est pas en mesure de délivrer la contenance vendue, celui-ci est en droit de remettre en cause la vente pour vice du consentement ou pour vice caché (rappr. supra, n o 237 ; CA Orléans, 8 janv. 1885, DP 1895. 2. 418). 245. L'article 1618, pour sa part, gouverne le cas où la contenance réelle est supérieure à la contenance indiquée : il dispose que, si la contenance réelle dépasse d'un vingtième la contenance convenue, l'acheteur a le choix entre verser un supplément de prix et se désister du contrat. c. - Régime des actions fondées sur l'erreur de contenance 246. L'article 1622 du code civil enferme les actions fondées sur une erreur de contenance dans un délai bref. Il dispose en effet : « L'action en supplément de prix de la part du vendeur, et celle en diminution de prix ou en résiliation du contrat de la part de l'acquéreur, doivent être intentées dans l'année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance ». 247. La règle ainsi posée concerne les seules actions spécifiquement fondées sur une erreur de contenance, c'est-à-dire sur les articles 1617 et suivants du code civil. Il n'y a donc pas lieu de l'étendre à l'action par laquelle l'acquéreur réclame une parcelle déterminée, ni à l'action en restitution d'une partie de l'immeuble que le vendeur soutiendrait n'avoir pas vendue ; de telles actions peuvent être exercées pendant trente ans (Cass. req. 8 mai 1872, DP 1873. 1. 479 ; Cass. civ. 11 juin 1929, Gaz. Pal. 1929. 2. 416). 248. L'article 1622 du code civil n'est pas davantage applicable à l'action tendant à faire opérer le mesurage pour faire fixer le prix, lorsque la vente a été faite à tant la mesure ; cette action est une action en exécution du contrat de vente, et non une action en supplément ou en diminution de prix (Cass. req. 31 mars 1853, DP 1853. 1. 289). 249. L'article 1622 doit également être écarté si la contenance du terrain est une qualité substantielle de l'objet du contrat, et si l'acquéreur agit en nullité de la vente pour vice du consentement (V. supra, n o 244). 250. Le domaine de l'article 1622 du code civil étant ainsi délimité, reste à préciser les modalités de la mise en oeuvre de ce texte. Quant à la nature du délai prévu par lui, ce délai est fondé sur des considérations analogues à celles qui gouvernent les prescriptions : il s'agit d'assurer la sécurité de la vente, en évitant que les contestations fondées sur les erreurs de contenance ne puissent être soulevées pendant un temps trop long. Dans ces conditions, si rien n'interdit aux parties de convenir que l'action éventuellement intentée sur le fondement des articles 1617 et suivants de ce code devra être engagée dans un délai plus court que le délai légal, la possibilité de stipuler un délai plus long paraît devoir leur être refusée. 251. L'assimilation du délai étudié au délai de prescription conduit à poser également que le cours de ce délai peut être interrompu par les causes prévues aux articles 2244 et suivants du code civil. 252. Enfin, le point de départ du délai se situant le « jour du contrat », c'est, normalement, à partir de la date de la rencontre des volontés qu'il conviendrait de le calculer. Cependant, le souci d'assurer à l'acquéreur ou au vendeur diligent la possibilité concrète de mettre en oeuvre les actions visées par l'article 1622 du code civil a conduit la jurisprudence à prendre pour point de départ la date à laquelle le contrat est devenu définitif. Ainsi, lorsque la vente a été consentie par un tiers comme se portant fort du propriétaire, le délai ne court, à l'égard dudit propriétaire, que du jour où celui-ci a ratifié l'acte (Cass. civ. 10 févr. 1869, DP 1869. 1. 176) ; dans le cas où la prise de possession de l'immeuble vendu est suspendue à l'accomplissement d'une condition, le même délai se calcule à partir du jour de la réalisation de la condition suspensive ; dans le cas d'une revente sur folle enchère, il court à compter du jour de cette revente, et non du jour de la première adjudication (CA Toulouse, 14 juin 1845, DP 1847. 2. 49) ; enfin, si le terrain n'est ni borné, ni délimité dans l'acte ou sur le sol, le délai de l'article 1622 part du jour prévu d'un commun accord par les parties pour la délimitation du terrain (Cass. 3 e civ. 19 déc. 1978, D. 1979, IR 222). d. - Clauses de non-garantie de contenance 253. Les articles 1616 et suivants du code civil ne sont pas d'ordre public. Les parties sont donc, en principe, libres d'y déroger. La dérogation peut être expresse ; elle résultera alors de la stipulation suivant laquelle il n'y aura aucun recours ni de la part du vendeur, ni de la part de l'acquéreur, même si la différence entre la mesure exprimée et la mesure réelle dépasse un vingtième (Cass. civ. 7 nov. 1853, DP 1854. 1. 7 ; Cass. 3 e civ. 20 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 144, D. 1973, somm. 92 ; 31 mars 1981, D. 1982, IR 530, obs. B. Audit). Mais la dérogation peut être également tacite, pourvu que la volonté des parties ressorte clairement des clauses de l'acte (Cass. req. 30 janv. 1866, DP 1866. 1. 165). 254. Le principe de la validité des clauses de non-garantie de contenance souffre, cependant, une exception importante : ces clauses n'apparaissent pas compatibles avec la réglementation des clauses abusives, lorsque le vendeur est un professionnel et que l'acheteur ne l'est pas : l'article R. 132-1 du code de la consommation interdit, en raison de son caractère abusif, « la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à la réparation du non-professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ». La clause de non- garantie de contenance paraît susceptible de relever de ce texte. Lire la mise à jour 222, 254. Appréciation de la gravité du vice au regard de l'usage convenu. - Le vice dont la cour relève l'existence doit suffire à rendre la chose vendue impropre à l'usage auquel l'acquéreur peut sérieusement s'attendre (vente de deux véhicules Volkswagen Iltis, anciens véhicules militaires légers réformés de l'armée allemande : Civ. 1 re , 19 mars 2009, n o 08-12.657 ). 255. Indépendamment de la validité de la clause de non-garantie de contenance, se pose la question de la portée d'une telle clause : celle-ci doit, selon la jurisprudence, être interprétée strictement ; spécialement, elle ne doit pas dispenser le vendeur de garantir l'acheteur contre l'éviction d'une partie de l'immeuble vendu (Cass. 1 re civ. 5 janv. 1967, D. 1967. 430, RTD civ. 1967. 654, obs. G. Cornu ; Cass. 3 e civ. 12 janv. 1982, Bull. civ. III, n o 12, RTD civ. 1983. 147, obs. P. Rémy ; sur la garantie d'éviction, V. infra, n os 399 et s.). 256. Enfin, quant à l'efficacité de la clause de non-garantie de contenance, il est entendu que, conformément au droit commun des clauses limitatives ou exclusives de responsabilité, cette clause est inefficace au cas de faute lourde du vendeur (Cass. 1 re civ. 16 déc. 1959, Bull. civ. I, n o 542, RTD civ. 1961. 146, obs. J. Carbonnier) et au cas où le vendeur, par son dol, a induit sciemment l'acheteur en erreur sur la contenance du bien vendu (Cass. req. 29 nov. 1875, DP 1877. 1. 324 ; Cass. civ. 11 juin 1929, Gaz. Pal. 1929. 2. 416 ; CA Versailles, 4 oct. 1996, Bull. inf. C. cass. 1 er avr. 1997, n o 408, Gaz. Pal. 1997. 1, somm. 289). Il en est de même lorsque la délimitation de la contenance de l'immeuble vendu est laissée à la discrétion du vendeur (Cass. 1 re civ. 16 déc. 1959, Bull. civ. I, n o 542, RTD civ. 1961. 146, obs. J. Carbonnier ; Cass. 3 e civ. 24 mars 1999, Bull. civ. III, n o 79, Defrénois 1999. 1140, obs. H. Périnet-Marquet, et 1328, obs. P. Delebecque) : c'est qu'alors, poser la solution contraire reviendrait à conférer à l'obligation de délivrer la contenance de l'immeuble un caractère potestatif. e. - Cas particulier : erreur de contenance dans la vente d'un lot de copropriété 257. Il a été précédemment indiqué que, lorsque la vente porte sur un lot ou une fraction de lot de copropriété, l'article 46, ajouté par la loi n o 96-1107 du 18 décembre 1996 à la loi n o 65-557 du 10 juillet 1965 sur la copropriété (V. C. civ. Dalloz), exige que soit porté sur l'acte qui constate la vente, à peine de nullité de cet acte, la mention de la superficie de la partie privative du lot ou de la fraction de lot concerné (V. Vente [2 o formation]). Lorsque cette indication est portée, mais qu'elle est inexacte, le même texte soumet l'erreur de contenance à un régime différent selon que la superficie est supérieure ou inférieure à celle énoncée dans l'acte : Au premier cas, l'excédent de mesure ne peut donner lieu à aucun supplément de prix ; le vendeur est donc dépourvu de tout recours contre l'acquéreur au titre de l'erreur de mesurage qu'il a commise. Au second cas, l'acquéreur est fondé à demander au vendeur une diminution du prix « proportionnelle à la moindre mesure » (L. 10 juill. 1965, art. 46, al. 7), si la superficie est inférieure de plus d'un vingtième à celle exprimée dans l'acte (sur les surfaces à prendre en compte pour calculer la superficie, V. Cass. 3 e civ. 7 nov. 2001, Bull. civ. III, n o 124) ; mais il devra alors engager son action en diminution du prix, pour que celle-ci soit recevable, dans le délai préfix d'un an à compter de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente ; car, passé ce délai, il est déchu du droit d'agir (L. 10 juill. 1965, art. 46, al. 8). B. - Délivrance des accessoires de la chose vendue 258. Selon l'article 1615 du code civil : « L'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel ». Cette règle est supplétive de la volonté des parties, qui sont libres d'y déroger en excluant de la délivrance certains éléments accessoires de la chose. Au demeurant, elle doit être conciliée avec le principe, fixé par l'article 1614 et précédemment rencontré, suivant lequel : « La chose doit être délivrée en l'état où elle se trouve au moment de la vente » (V. supra, n o 210). Il s'ensuit, spécialement, que lorsqu'un tracteur agricole d'occasion a été vendu démuni de portières, l'acheteur ne saurait exiger la délivrance de celles-ci au prétexte que les portières constitueraient les accessoires de la chose vendue (Cass. 1 re civ. 7 mars 2000, Contrats, conc., consom. 2000, comm. 109, obs. L. Leveneur). 259. Ces remarques préalables ayant été faites, il convient d'inventorier les accessoires de la chose vendue dans les ventes immobilières et dans les ventes mobilières. 1° - Accessoires dans les ventes immobilières 260. La formule de l'article 1615 du code civil englobe tous les éléments qui sont inséparables de l'immeuble, et qui sont indispensables pour procurer à l'acquéreur l'utilité qu'il attend de son bien. La détermination de ces éléments n'est pas toujours aisée. L'examen du droit positif conduit à opposer, d'un côté, ceux dont le caractère accessoire est acquis, et qui, pour cette raison, sont compris de plein droit dans la vente, sauf clause contraire, et, d'un autre côté, les éléments qui, à l'inverse, parce que leur rapport accessoire à l'immeuble n'est pas établi, sont, à moins d'une stipulation contraire, exclus de la vente et donc ne donnent pas lieu à délivrance. a. - Accessoires compris de plein droit dans la vente 261. Les accessoires de l'immeuble qui sont compris de plein droit dans la vente sont, d'abord, les accessoires matériels : immeubles par destination (C. civ., art. 524 et 525), meubles meublants lorsque la vente porte sur une maison meublée (C. civ., art. 535, al. 2), jardins clos de murs ayant leur entrée par la maison, lorsque l'immeuble vendu est une maison entourée d'un jardin… De même, la délivrance de lots immobiliers vendus et destinés à l'habitation individuelle implique la mise en place de compteurs électriques individuels, qui sont les accessoires destinés à l'usage de ces lots (Cass. 3 e civ. 6 oct. 2004, n o 02-20.755 , préc. supra, n o 228). 262. Les fruits font partie des accessoires compris dans la vente : l'article 1614 du code civil dispose en ce sens que, du jour de la vente, « tous les fruits appartiennent à l'acquéreur ». Lire la mise à jour 262. Naissance du droit aux fruits et obligation de délivrance de la chose. - Sauf convention contraire, tous les fruits de l'immeuble appartiennent à l'acquéreur depuis le jour de la vente, peu important que celle-ci ait fait l'objet d'une régularisation postérieure (Civ. 3 e , 26 mars 2014, n o 13-10.984 , Dalloz actualité, 10 avr. 2014, obs. Le Rudulier). 263. Enfin, la délivrance s'étend aux accessoires juridiques de l'immeuble. Cette catégorie englobe, en premier lieu, les droits réels destinés à l'« usage perpétuel » (C. civ., art. 1615) de l'immeuble, c'est-à-dire les servitudes. Par exemple, il a été jugé que la vente d'un moulin entraîne la vente du cours d'eau et des sources qui le mettent en mouvement (CA Dijon, 31 juill. 1868, DP 1869. 2. 105 ; rappr. CA Agen, 4 juin 1945, D. 1948. 328, note C. Blaevoët). 264. Les accessoires juridiques s'étendent, en deuxième lieu, aux actions en justice attachées à la propriété de l'immeuble, telles que les actions en garantie décennale ou en responsabilité contre les architectes et les entrepreneurs (Cass. 1 re civ. 28 nov. 1967, D. 1968. 163 ; Cass. 3 e civ. 23 mars 1968, D. 1970. 663, note P. Jestaz ; 26 mai 1992, Bull. civ. III, n o 168), les actions fondées sur un vice caché (Cass. 3 e civ. 7 mars 1990, Bull. civ. III, n o 72, D. 1990, IR 88 ; Cass. 1 re civ. 20 juin 1995, D. 1995, IR 188 ), ou encore les actions en garantie d'éviction (Cass. 3 e civ. 28 mars 1990, Bull. civ. III, n o 93, D. 1990, IR 96 ) ou les actions fondées sur une non-conformité (Cass. 1 re civ. 9 mars 1983, Bull. civ. I, n o 92, RTD civ. 1983. 753, obs. P. Rémy ; Cass. ass. plén. 7 févr. 1986, D. 1986. 293, note A. Bénabent, JCP 1986. II. 20616, 2 e esp., note P. Malinvaud). 265. Il a même été jugé, à propos de la garantie décennale, que le vendeur ne peut se prévaloir de cette garantie après la vente, sauf s'il a introduit son action avant la vente sans l'avoir cédée à l'acquéreur (Cass. 3 e civ. 18 oct. 1972, Bull. civ. III, n o 531), et sauf s'il est assigné par son acquéreur ou s'il est subrogé dans les droits de celui-ci (Cass. 3 e civ. 9 juill. 1973, Bull. civ. III, n o 472 ; 12 nov. 1974, Bull. civ. III, n o 407). 266. Cette transmission de plein droit à l'acquéreur des actions en justice attachées à la propriété de l'immeuble est assortie, cependant, d'une double limite. D'abord, elle suppose, bien entendu, que le vendeur soit lui-même titulaire des actions considérées, ce qui n'est pas le cas, par exemple, s'il n'a pas payé le prix de sa propre acquisition (Cass. 1 re civ. 4 mars 1997, Defrénois 1997. 1443, obs. D. Mazeaud, Contrats, conc., consom. 1997, comm. 93, obs. L. Leveneur). 267. Ensuite, elle commande que le défaut, ou le dommage, ou l'inexécution de la garantie due se soient révélés postérieurement à la conclusion de la vente ; lorsqu'ils se sont révélés antérieurement, les actions qui ont pour objet d'y répondre ne constituent pas de plein droit des accessoires juridiques de la chose vendue : c'est le vendeur qui a été victime des défauts ou dommages ; c'est donc lui qui est titulaire du droit d'exercer les actions se rapportant à ceux-ci. Il n'en irait autrement que si une clause spécifique du contrat de vente avait prévu la transmission des actions en cause à l'acquéreur (à propos des actions en dommages et intérêts liées à des dommages ayant affecté l'immeuble antérieurement à la vente, V. Cass. 3 e civ. 25 janv. 1983, Bull. civ. III, n o 26 ; 18 juin 1997, Bull. civ. III, n o 149, D. 1997, IR 170 , Defrénois 1997. 1008, obs. P. Delebecque, RD imm. 1997. 592, obs. P. Malinvaud et B. Boubli ; 4 déc. 2002, Bull. civ. III, n o 250, JCP 2003. II. 10058, note P. Jourdain, Defrénois 2003. 245, note R. Libchaber ; 17 nov. 2004, Bull. civ. III, n o 207, D. 2004, IR 3195 ; à propos de l'action pour défaut de délivrance, V. Cass. 3 e civ. 8 janv. 1997, JCP 1997. II. 22877, note Monsallier ; 20 juin 2001, D. 2002, somm. 1005, obs. P. Brun ). 268. Il y a lieu d'observer, par ailleurs, que la transmission des actions ci-dessus visées à l'acquéreur ne prive pas, selon la jurisprudence, le vendeur du droit de les mettre en oeuvre s'il y trouve un intérêt direct et certain (V., par ex., à propos de l'action en garantie des vices cachés : Cass. 1 re civ. 19 janv. 1988, Bull. civ. I, n o 20, D. 1988, IR 38 ; Cass. 3 e civ. 27 juin 2001, D. 2002, somm. 1004, obs. P. Brun ). La solution, dont l'opportunité pratique n'est pas douteuse, est difficilement compatible, juridiquement, avec l'idée suivant laquelle le vendeur a transféré, avec la propriété du bien, la titularité de l'action. 269. Les accessoires juridiques comprennent, en troisième lieu, les documents privés ou administratifs de nature à permettre l'utilisation de l'immeuble, telle qu'elle a été prévue par le contrat. Le vendeur est donc tenu de délivrer à l'acquéreur les titres de propriété, les certificats d'urbanisme, le permis de construire, l'état descriptif de division, le règlement de copropriété, relatifs à l'immeuble vendu (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 228). Par exemple, le vendeur d'un lot de copropriété doit délivrer à l'acheteur un état de division lui permettant d'obtenir un titre efficient et opposable aux tiers (Cass. 3 e civ. 12 janv. 1977, D. 1977, IR 164). 270. Certains avantages fiscaux, en ce qu'ils sont afférents à l'immeuble vendu, sont englobés dans l'objet de la délivrance : tel est le cas, par exemple, de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties ; l'acquéreur bénéficie de cette exonération lorsqu'il a acheté l'immeuble dans les deux années qui suivent l'achèvement (CGI, art. 1383). 271. En quatrième et dernier lieu, le cas des contrats liés à l'immeuble vendu est délicat. En principe, l'effet relatif du contrat s'oppose à leur transmission de plein droit à l'acquéreur (C. civ., art. 1165). Cependant, le fait que certains d'entre eux sont étroitement liés à l'immeuble a conduit le législateur à en faire des accessoires du bien vendu. 272. Tel est le cas, spécialement, du contrat d'assurance se rapportant à l'immeuble vendu. L'article L. 121-10 du code des assurances dispose en ce sens : « En cas […] d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit au profit de […] l'acquéreur, à charge par celui-ci d'exécuter toutes les obligations dont l'assuré était tenu vis-à-vis de l'assureur en vertu du contrat ». L'application de ce texte peut prêter à difficulté lorsqu'une partie seulement de l'immeuble est vendue. La Cour de cassation a posé à cet égard, dans le cadre d'une assurance incendie, que, pour qu'une telle assurance soit transmise à l'acquéreur, il importe que la fraction vendue de l'immeuble soit la matière d'un risque propre, couvert par une partie divisible de la prime (Cass. 1 re civ. 21 janv. 1992, JCP, éd. N, 1993. II. 214). 273. L'assurance dommages-ouvrage obligatoire n'est pas, en revanche, un accessoire indispensable de l'immeuble vendu, en sorte que son absence ne constitue pas un défaut de livraison (Cass. 3 e civ. 13 nov. 2003, Bull. civ. III, n o 201, Defrénois 2004. 451, obs. H. Périnet-Marquet). La solution est justifiée par le fait que le défaut d'une telle assurance n'a pas pour effet de rendre le bien indisponible à la vente (même arrêt). 274. S'agissant du bail, lorsque l'immeuble vendu est un immeuble loué, ce contrat est transmis de plein droit à l'acquéreur, dès lors qu'il est authentique et qu'il a date certaine, aux termes de l'article 1743 du code civil. La jurisprudence en a déduit parfois que l'acquéreur, puisqu'il est substitué au bailleur d'origine, peut agir contre le preneur pour les dégradations liées à l'inexécution des réparations locatives, même si ces dégradations sont antérieures à la vente, et nonobstant les stipulations de l'acte de vente (Cass. 3 e civ. 21 nov. 2001, Loyers et copr. 2002, chron. 57, obs. Vial-Pedroletti ; rappr. Cass. 3 e civ. 20 janv. 1981, Gaz. Pal. 1981. 2, panor. 170). Cependant, il semble que, dès lors que l'ancien bailleur conserve un intérêt à agir, les créances et actions auxquelles il pouvait prétendre contre le preneur avant la vente ne soient pas transmises de plein droit à l'acquéreur, au regard du principe de l'effet relatif du contrat, sauf cession de créance ou subrogation expresse (Cass. 3 e civ. 2 oct. 2002, Bull. civ. III, n o 189, D. 2003, somm. 731, obs. N. Damas , AJDI 2003. 25, note P. Briand , Loyers et copr. 2002, chron. 2786). 275. En revanche, il est entendu que, par l'effet de la transmission du bail à l'acquéreur, affirmée par l'article 1743 du code civil, l'acquéreur est investi pour l'avenir des droits de l'ancien bailleur, y compris des accessoires qui garantissaient les créances de ce dernier : après qu'un arrêt controversé de la chambre commerciale de la Cour de cassation ait statué en sens contraire (Cass. com. 26 oct. 1999, Bull. civ. IV, n o 184, D. 2000. 224, note L. Aynès , D. 2000. 25, obs. V. A.-R ., Defrénois 2000. 480, note S. Piedelièvre, JCP 2000. II. 10320, note J. Casey), l'Assemblée plénière de la Cour de cassation a posé que, en cas de vente de l'immeuble loué, le cautionnement est, sauf stipulation contraire, transmis de plein droit au nouveau propriétaire en tant qu'accessoire de la créance de loyers cédée à l'acquéreur, par l'effet combiné de l'article 1743 et des articles 1692, 2013 et 2015 (ces deux derniers articles étant devenus les art. 2290 et 2292 depuis l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006) du code civil (Cass. ass. plén. 6 déc. 2004, Bull. civ., n o 14, D. 2005. 227, note L. Aynès , D. 2005. 70, obs. V. Avena-Robardet , D. 2005, somm. 749, obs. N. Damas , JCP 2005. II. 10010, note S. Piedelièvre, Defrénois 2005. 316, note L. Aynès, et 634, obs. E. Savaux, AJDI 2005. 240, note F. Cohet-Cordey ). b. - Éléments non compris de plein droit dans la vente 276. Les éléments qui ne sont pas indissociablement liés à l'usage de l'immeuble vendu n'en constituent pas les accessoires. Pour cette raison, ils ne sont pas transmis de plein droit avec lui. S'agissant des éléments matériels, l'article 536 du code civil pose en ce sens : « La vente […] d'une maison, avec tout ce qui s'y trouve, ne comprend pas l'argent comptant, ni les dettes actives et autres droits dont les titres peuvent être déposés dans la maison… ». Conformément à cette règle, il a été jugé qu'au cas de vente d'un immeuble avec tout ce qu'il contient, il y a lieu d'apprécier, relativement aux papiers et documents historiques qui peuvent y être renfermés, si, étant donné leur nature, les parties ont eu la commune intention ou non de les exclure de la vente (CA Paris, 22 déc. 1911, DP 1913. 2. 221). L'arrêt donne à penser que, a priori, de tels papiers ou documents ne sont pas des accessoires compris dans la vente de l'immeuble qui les abrite. 277. Pour la raison ci-dessus évoquée, ne sont pas en principe compris de plein droit dans la vente les droits et actions de nature personnelle, acquis par le vendeur à propos de l'immeuble vendu, antérieurement à la vente. Ces droits ne sont donc pas transmis de plein droit à l'acheteur ; leur délivrance ne peut s'opérer que par une cession de créance régulière, ou par l'insertion d'une clause subrogatoire dans l'acte de vente (Cass. civ. 25 mars 1924, DP 1926. 1. 30 ; adde : supra, n os 267 et 274). Ainsi l'engagement souscrit par une société civile immobilière de réserver aux adhérents d'une association d'aide au logement la location des appartements construits à l'aide du prêt qu'elle a consenti, parce qu'il a la nature d'une obligation de faire, ne peut pas, à la différence d'un droit réel affectant les immeubles, être transmis de plein droit à l'acquéreur des logements, sauf stipulation expresse ou disposition légale particulière (Cass. 3 e civ. 16 nov. 1988, D. 1989. 157, 2 e esp., note P. Malaurie). 278. Dire que, dans les cas précédemment énumérés, la créance ou l'action indemnitaire n'est pas transmise de plein droit à l'acquéreur ne signifie pas qu'elle ne lui sera jamais accordée : simplement, il revient alors à celui-ci, s'il ne recourt pas au procédé de la cession de créance ou de la subrogation, d'établir le caractère accessoire, par rapport à l'immeuble vendu, de la créance dont il entend se prévaloir ou de l'action qu'il prétend exercer (rappr., à propos de l'action indemnitaire liée aux désordres existant dans la maison vendue, Cass. 3 e civ. 23 oct. 1991, Bull. civ. III, n o 244, D. 1991, IR 260 ; à propos de la transmission à l'acquéreur d'une prime commerciale promise par Gaz de France au vendeur, Cass. 3 e civ. 29 janv. 1997, Defrénois 1997. 747, note P. Delebecque). 2° - Accessoires dans les ventes mobilières 279. Bien qu'ils soient généralement moins nombreux dans les ventes mobilières, les accessoires de la chose vendue doivent également, en vertu de l'article 1615 du code civil, être délivrés à l'acheteur. Il peut s'agir aussi bien d'accessoires matériels que d'accessoires juridiques. 280. Au titre des accessoires matériels, il est permis de mentionner : le licou lors de la vente d'un cheval, mais non la selle et le harnais (CA Paris, 8 févr. 1883, S. 1883. 2. 420) ; la roue de secours, le cric et la manivelle dans la vente d'une automobile ; le matériel de sonorisation d'un manège forain (Cass. com. 6 oct. 1970, Bull. civ. IV, n o 259). 281. Les emballages, quant à eux, voient leur régime varier suivant l'accord des parties : Tantôt, celles-ci conviennent de transférer définitivement la propriété de l'emballage à l'acquéreur ; en ce cas, l'obligation de délivrance s'étend audit emballage. Tantôt, l'emballage est simplement prêté, et le montant de la consignation constitue la garantie de sa restitution au vendeur de la marchandise. 282. Les accessoires juridiques englobent, d'abord, l'ensemble des documents administratifs qui sont indispensables pour attester la qualité de propriétaire du vendeur, ou pour garantir les spécifications de la chose, ou pour permettre l'utilisation normale de celle-ci. Entrent dans cette catégorie : le certificat d'origine d'un cheval de course, dès lors que celui-ci est destiné à la reproduction (CA Rouen, 2 déc. 1892, DP 1893. 2. 231 ; rappr. Cass. 1 re civ. 26 nov. 1981, Bull. civ. I, n o 352, D. 1982, IR 180) ; la carte grise du véhicule automobile (Cass. 1 re civ. 26 mars 1963, Bull. civ. I, n o 187 ; 22 janv. 1991, Bull. civ. I, n o 23, D. 1991, IR 56 ; 29 mai 1996, Bull. civ. I, n o 230, Contrats, conc., consom. 1996, comm. 165, obs. L. Leveneur, ce dernier arrêt énonçant que la vente d'un véhicule volé, accompagnée de la remise d'une carte grise falsifiée, constitue un défaut de délivrance de la chose vendue) ; la vignette fiscale se rapportant au même véhicule (TI Nîmes, 3 juill. 1969, JCP 1969. II. 16013, note J.A.) ; les documents d'immatriculation d'une motocyclette (Cass. 1 re civ. 5 oct. 1994, Contrats, conc., consom. 1995, comm. 4, obs. L. Leveneur) ; le carnet d'entretien et le procès-verbal du service des mines, relatifs à un tracteur (Cass. com. 11 déc. 2001, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 58) ; l'autorisation préfectorale pour l'installation d'un système d'alarme (Cass. 1 re civ. 27 oct. 1981, Bull. civ. I, n o 315, RTD civ. 1982. 616, obs. P. Rémy) ; le certificat d'authenticité d'une oeuvre d'art (CA Paris, 11 janv. 1990, D. 1990, IR 62 , dans le cadre de la vente d'une glace d'époque révolutionnaire) ; ou les certificats de salubrité nécessaires pour que la viande vendue puisse être exportée (Cass. 1 re civ. 29 nov. 1994, Bull. civ. I, n o 355, D. 1996, somm. 13, 2 e esp., obs. G. Paisant ). 283. S'y ajoutent, comme en matière immobilière, les actions en justice attachées à la propriété, telles que, spécialement, les actions fondées sur un défaut de conformité de la chose (Cass. ass. plén. 7 févr. 1986, préc. supra, n o 264) ou sur un vice caché (Cass. 1 re civ. 4 mars 1986, Bull. civ. I, n o 57, D. 1986, IR 320 ; Cass. com. 24 nov. 1987, Bull. civ. IV, n o 250, D. 1987, IR 254), ou encore sur la garantie d'éviction, mais aussi l'action en responsabilité contractuelle contre un tiers, dès lors que le vendeur en aurait bénéficié s'il avait conservé la propriété de la chose (Cass. 1 re civ. 21 janv. 2003, D. 2003. 2993, note D. Bazin-Beust ). § 2 - Modalités d'exécution de la délivrance 284. Il convient d'examiner successivement les règles gouvernant les formes, le lieu, le moment et les frais de la délivrance. A. - Formes de la délivrance 285. La délivrance consiste à mettre le bien vendu à la disposition de l'acquéreur (V. supra, n o 202). Cette mise à disposition s'effectue de manière différente selon que le bien est un immeuble, un meuble corporel ou un bien incorporel. L'article 1605 du code civil réglemente la délivrance des immeubles ; l'article 1606, la délivrance des meubles corporels ; l'article 1607, la délivrance des meubles incorporels, étant rappelé qu'il s'agit là de textes supplétifs de volonté. 1° - Immeubles 286. Selon l'article 1605 du code civil : « L'obligation de délivrer les immeubles est remplie de la part du vendeur lorsqu'il a remis les clés, s'il s'agit d'un bâtiment, ou lorsqu'il a remis les titres de propriété ». Le texte suscite plusieurs remarques. 287. Il est notable, tout d'abord, que, lorsque la vente porte sur un immeuble construit, les deux modalités prévues ne sont pas alternatives, mais cumulatives : le propriétaire doit remettre à la fois les clés et les titres de propriété pour que l'obligation de délivrance soit exécutée (AUBRY et RAU, t. 5, § 354, n o 20 ; PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 73). 288. La remise des clés ne peut, cependant, être exigée du vendeur qu'autant qu'il les a en sa possession. L'adjudicataire d'un immeuble dépendant d'une faillite ne saurait, par conséquent, reprocher au syndic le défaut de remise des clés, alors que lesdites clés ont été déposées par le dernier occupant de l'immeuble chez un voisin, des mains duquel l'adjudicataire refuse de les recevoir (Cass. 1 re civ. 16 juin 1982, Bull. civ. I, n o 231). 289. Les titres de propriété doivent, quant à eux, être compris largement : ils englobent les plans de construction et de situation, les documents d'arpentage ou de bornage, et tous documents se rapportant directement à l'immeuble. Par exemple, le vendeur d'un lot provenant de la division de sa propriété doit fournir à l'acquéreur un état de division, de manière à lui permettre de procéder à la publicité foncière de son titre d'acquisition (Cass. 3 e civ. 12 janv. 1977, D. 1977, IR 164, Gaz. Pal. 1977. 1, somm. 97) ; le lotisseur a l'obligation de fixer nettement sur le terrain les limites des lots vendus (Cass. 3 e civ. 8 févr. 1983, Bull. civ. III, n o 37 ; adde, sur l'exécution de l'obligation de délivrer une superficie de terrain, d'un minimum déterminé, à détacher d'une parcelle précise, par la réalisation d'un plan de division convenu : Cass. 3 e civ. 2 juill. 1997, Bull. civ. I, n o 162, JCP 1997. IV. 1900). 290. Il convient d'ajouter que la jurisprudence inclut dans l'exécution de l'obligation de délivrance, à défaut de stipulation contraire, la remise de l'immeuble libre d'occupation. Le vendeur doit donc vider et évacuer l'immeuble, s'il l'occupe lui-même, ou le faire vider et évacuer s'il est occupé par un tiers dépourvu de tout titre locatif ou droit d'occupation opposable à l'acquéreur (Cass. 1 re civ. 24 avr. 1967, Bull. civ. I, n o 139 ; rappr. CA Paris, 23 févr. 1978, JCP, éd. N, 1978. II. 234). 291. Enfin, le vendeur a, sauf convention contraire, l'obligation, lors de la délivrance, d'effectuer la radiation des inscriptions des privilèges et hypothèques ayant grevé l'immeuble antérieurement à la vente (Cass. 1 re civ. 23 oct. 1963, D. 1964. 33, note P. Voirin, JCP 1964. II. 13485, note J. Mazeaud) ; la jurisprudence récente tend à rattacher cette obligation à la garantie contre l'éviction (V. infra, n o 446). 2° - Meubles corporels 292. Aux termes de l'article 1606 du code civil : « La délivrance des effets mobiliers s'opère : ou par la tradition réelle, ou par la remise des clés des bâtiments qui les contiennent, ou même par le seul consentement des parties, si le transport ne peut s'en faire au moment de la vente, ou si l'acheteur les avait déjà en son pouvoir à un autre titre ». Il convient de souligner qu'ici également, les parties sont libres de convenir d'autres modes d'exécution de l'obligation de délivrance. Sous le bénéfice de cette remarque, chacun des modes prévus par le texte peut être examiné successivement. a. - Tradition réelle 293. La « tradition réelle » consiste dans la remise matérielle de la chose entre les mains de l'acheteur. Dans la vente sur place, elle se réalise soit par l'enlèvement au domicile du vendeur, soit par la livraison au magasin de l'acquéreur ou en tout autre lieu convenu. Il a été jugé, à ce propos, dans le cadre de la vente d'un véhicule automobile, construit à l'étranger et devant être livré en France, que « la mise en entrepôt de douane ne constitue pas un acte de délivrance au sens de la loi » (Cass. 1 re civ. 25 oct. 1978, D. 1979. 20, JCP 1980. II. 19305, note J. H.). 294. Dans la vente à distance, la délivrance a lieu, en principe, par la remise de la chose vendue au transporteur (Cass. com. 8 oct. 1996, Bull. civ. IV, n o 229), et, s'il y a plusieurs transports successifs, au premier d'entre eux (rappr., à propos de la vente internationale de marchandises, Conv. Vienne 11 avr. 1980, art. 31- a ; adde : Rép. com., V o Ventes réglementées). Un arrêt a également décidé que, dès lors que le mandataire de l'acheteur a inspecté la marchandise chez le vendeur et l'a remise au transporteur, le vendeur a exécuté la délivrance (Cass. com. 17 févr. 1998, Bull. civ. IV, n o 84). b. - Tradition symbolique 295. La tradition peut se faire par « la remise à l'acquéreur de titres ou d'objets symbolisant sa mise en possession, ou [par] l'apposition sur la chose de marques valant reconnaissance du transfert de propriété » (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 676). L'article 1606 du code civil donne une illustration de ce mode de délivrance, avec la remise des clés des bâtiments qui contiennent les « effets mobiliers ». 296. Outre cet exemple, il existe bien d'autres expressions de la tradition symbolique. Ainsi, la délivrance peut résulter de l'apposition de la marque de l'acheteur sur les arbres dans une coupe de bois (Cass. civ. 15 janv. 1838, Jur. gén., V o Obligations, n o 4961-3), ou sur les animaux dans un troupeau. A fortiori, dans les coupes de bois, le commencement d'exploitation de la coupe (Cass. req. 21 juin 1820, Jur. gén., V o Biens, n o 4), la remise à l'acheteur du permis d'exploiter, suivie d'une exploitation réelle sur le parterre de la coupe (CA Besançon, 14 déc. 1864, DP 1864. 2. 231), attestent la tradition. 297. La tradition symbolique peut également consister dans la remise d'un titre représentant la propriété de la marchandise, tel qu'un connaissement, un récépissé de magasin général, ou le certificat de propriété de grands vins (M. de JUGLART, Le certificat de propriété de grands vins, D. 1958, chron. 61). c. - Consentement des parties 298. L'article 1606 du code civil prévoit deux cas dans lesquels la délivrance peut s'effectuer par le seul consentement des parties. Le premier suppose que le transport de la chose vendue ne puisse pas se faire au moment de la vente ; il en est ainsi, spécialement, en présence de la vente d'une récolte sur pied. Le second suppose que l'acheteur détienne la chose vendue à un autre titre, par exemple, en vertu d'un contrat de louage, de prêt ou de dépôt. 299. Bien qu'elle ne soit prévue qu'à propos de la délivrance des effets mobiliers, cette dernière solution est, d'ailleurs, susceptible de concerner la vente immobilière lorsque l'immeuble est vendu à un locataire ou à un usufruitier (J.-L. BERGEL, Les ventes d'immeubles existants, 1983, avec suppl. au 10 janv. 1988, Litec, n o 488 ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 677). 3° - Meubles incorporels 300. L'article 1607 du code civil dispose : « La tradition des droits incorporels se fait, ou par la remise des titres, ou par l'usage que l'acquéreur en fait du consentement du vendeur ». Ce texte a vocation à concerner la délivrance de tous les biens incorporels (créances, parts sociales, droits de brevet ou de marque…). La remise du titre est de nature à permettre, en l'occurrence, à l'acheteur de procéder aux formalités de publicité que requiert l'efficacité de la vente. B. - Lieu de la délivrance 301. Suivant l'article 1609 du code civil : « La délivrance doit se faire au lieu où était, au temps de la vente, la chose qui en a fait l'objet, s'il n'en a été autrement convenu » (comp., pour la vente internationale de marchandises, Conv. Vienne 11 avr. 1980, art. 31 et 32). Ce texte n'est qu'une application de l'article 1247 de ce code. En vérité, sa mise en oeuvre commande de distinguer selon que la vente porte sur un corps certain ou sur une chose de genre, étant observé qu'il réserve lui-même la possibilité pour les parties de stipuler conventionnellement des solutions contraires. 1° - Corps certain 302. En présence d'un corps certain, la loi présume que l'acheteur a entendu prendre livraison de la chose à l'endroit où celle- ci se trouvait au moment du contrat (PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 77). Aussi, la Cour de cassation a censuré un arrêt qui, sans invoquer soit un usage commercial, soit des circonstances particulières de la cause, avait décidé qu'en l'absence de toute convention de ce chef, la livraison devait avoir lieu au domicile de l'acheteur (Cass. com. 17 déc. 1952, Bull. civ. III, n o 400). 303. La règle énoncée doit, toutefois, être écartée lorsque la délivrance a été effectuée de manière incomplète. Dans une telle hypothèse, le vendeur ne saurait, en effet, contraindre l'acheteur à se rendre à nouveau sur le lieu de la vente pour prendre livraison des éléments manquants : ainsi, par exemple, si le vendeur d'un camion-benne d'occasion a omis de fournir, lors de la délivrance, certains éléments d'équipement (en l'espèce, la benne et la roue de secours), il ne peut exiger de l'acheteur que celui-ci se rende à nouveau dans ses établissements pour y faire installer les éléments manquants (Cass. com. 4 juin 1991, Bull. civ. IV, n o 204, D. 1992, somm. 200, obs. G. Paisant ). 2° - Chose de genre 304. Lorsque la vente porte sur des choses de genre individualisées, celles-ci doivent être traitées comme un corps certain, et la solution précédemment exposée leur est applicable (V. supra, n os 302 et s.). 305. Dans le cas contraire, la directive de l'article 1609 du code civil conduit à poser que le lieu de la délivrance est celui de leur individualisation ; il est concevable également de le fixer au domicile du vendeur, l'article 1247, alinéa 3, de ce code énonçant que le paiement d'une chose de genre doit être fait au domicile du débiteur. Souvent, les deux lieux coïncident. 3° - Stipulations conventionnelles 306. Les parties ont la possibilité de déroger à l'article 1609 du code civil. Une stipulation expresse n'est pas nécessaire. Par exemple, dans la vente à distance, la mention « gare d'arrivée » a été interprétée comme traduisant la volonté des contractants de fixer le lieu de la délivrance à cette gare (Cass. civ. 9 févr. 1926, Gaz. Pal. 1926. 1. 754, DP 1926. 1. 209, note R. Roger, S. 1926. 1. 63), contrairement à la solution déduite de l'article 1609, et suivant laquelle c'est la gare de départ qui constitue ce lieu (CA Douai, 20 nov. 1964, D. 1965. 506). 307. De même, de l'engagement d'entretien et de mise en place gratuite pris par le vendeur un jugement a déduit que le vendeur avait accepté de fixer le lieu de la délivrance à l'endroit que l'acquéreur lui désignerait (TGI Bayonne, 22 nov. 1966, Gaz. Pal. 1967. 1, somm. 19). 308. Il arrive couramment en pratique, dans les ventes à distance, qu'une clause du contrat, dite « clause franco », mette la livraison à la charge du vendeur ; en ce cas, le lieu de la délivrance est le domicile de l'acheteur. C. - Moment de la délivrance 309. La délivrance doit, en vertu de l'article 1610 du code civil, intervenir « dans le temps convenu entre les parties ». Le principe de liberté contractuelle consacré par le texte est parfois source, en pratique, de difficultés. 310. Il peut arriver, d'abord, que les contractants n'aient rien prévu à cet égard. Normalement, la délivrance est alors exigible immédiatement (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par DE JUGLART, n o 931 ; A. BÉNABENT, op. cit., n o 186). Mais il y a lieu de tenir compte de la nature du bien et des circonstances de la vente. Ainsi, un arrêt a posé que, en présence d'une vente de matériaux non encore extraits et envisagés comme meubles par anticipation, la délivrance intervient au moment où plus rien ne s'oppose, du fait du vendeur, à ce que l'acquéreur commence l'exploitation (Cass. 1 re civ. 13 juill. 1982, Bull. civ. I, n o 262) ; les juges du fond se réfèrent aussi à la notion de délai raisonnable de délivrance (Cass. 3 e civ. 10 avr. 1973, Bull. civ. III, n o 274 ; rappr., en matière de vente internationale de marchandises, Conv. Vienne 11 avr. 1980, art. 33- c). L'appréciation du caractère raisonnable du délai dépend, « de la nature de la chose, des besoins de l'acquéreur, des délais normaux de fabrication, d'approvisionnement ou d'acheminement, des usages professionnels… » (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 671). Lire la mise à jour 310. Silence des parties sur la date de la délivrance. Délai raisonnable. - À défaut de délai convenu, il appartient aux juges du fond, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation, de déterminer le délai raisonnable dans lequel le vendeur doit délivrer la chose vendue (Civ. 1 re , 26 janv. 2012, n o 10-27.338 , Dalloz actualité, 9 févr. 2012, obs. Guiomard. – Com. 12 nov. 2008, n o 07-19.676 ). 311. Ensuite, lorsqu'un délai a été convenu,la question se pose de savoir si ce délai est ou non impératif. Pour la résoudre, les juges du fond doivent rechercher la commune intention des parties ; dans la vente commerciale, ils peuvent aussi se référer aux usages (Cass. com. 4 juin 1980, Bull. civ. IV, n o 239). Si le délai convenu était un délai de rigueur,la simple échéance du terme vaut, sauf clause contraire, mise en demeure de délivrer : il a été jugé en ce sens que, lorsque le vendeur d'un immeuble s'est engagé, dans l'acte de vente, à délivrer les lieux le jour même, libres de toute occupation, il n'est pas nécessaire à l'acheteur de mettre en demeure ledit vendeur, pour faire constater, dès le jour suivant, l'inexécution de l'obligation de délivrance (Cass. 1 re civ. 14 mars 1962, Bull. civ. I, n o 161). 312. De même, l'inexécution de l'obligation de délivrance est avérée, s'il était stipulé que la chose était livrable de suite, et qu'elle ne l'a pas été (Cass. req. 21 juin 1933, DH 1933. 412). Manque, en particulier, à son obligation le vendeur qui ne délivre pas dans le délai convenu le groupe électrogène commandé par la société exploitante d'un supermarché, alors que « la commande […] était motivée par l'urgence de pallier une grève de l'EDF, et que la vente était conclue sous condition de livraison dans la journée même… » (CA Versailles, 13 oct. 1988, D. 1988, IR 280) ; il en va pareillement du vendeur qui ne délivre pas à temps les meubles qu'il s'était engagé à délivrer « dans un bref délai » (CA Versailles, 16 déc. 1983, Gaz. Pal. 1985. 1, somm. 122), ainsi que du vendeur qui délivre les meubles commandés avec un « important retard » par rapport au « terme précis » indiqué dans le bon de commande (CA Paris, 18 mai 1990, D. 1991, somm. 165, obs. G. Paisant ). 313. Si le délai est indicatif, le vendeur n'est en retard qu'au cas où son inexécution se prolonge après une mise en demeure ou une formalité équivalente de l'acheteur (Cass. com. 10 juin 1958, Bull. civ. III, n o 243 ; 15 juin 1981, Bull. civ. IV, n o 270). À défaut d'une telle mise en demeure ou formalité, la vente n'est point résolue, et le vendeur demeure tenu de délivrer la chose dans un délai raisonnable ; il peut, d'ailleurs, contraindre l'acquéreur à accepter la délivrance dans le même délai. Ce n'est qu'au cas où un trop long délai se serait écoulé depuis la survenance du terme convenu, que le contrat pourrait être considéré, de part et d'autre, comme résolu, semble-t-il (rappr. J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 673). 314. Enfin, la distinction entre les délais de rigueur et les délais indicatifs est difficile à mettre en oeuvre en présence des ventes stipulant que la délivrance devra intervenir à l'intérieur d'une période donnée : la question se pose alors de savoir si l'acquéreur peut contraindre le vendeur à délivrer la chose avant le dernier jour du délai de référence. Un arrêt de la Cour de cassation a censuré, dans une telle hypothèse, un arrêt de cour d'appel qui avait décidé, sans s'appuyer sur une raison décisive, que la délivrance devenait exigible à partir du premier jour de la deuxième moitié de la période de référence (Cass. com. 14 janv. 1958, Bull. civ. III, n o 24). Plus conforme à la volonté des parties, apparaît la solution prévue à l'article 33-b de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 et d'où il résulte que le vendeur doit livrer la marchandise « à un moment quelconque au cours de cette période, à moins qu'il ne résulte des circonstances que c'est à l'acheteur de choisir une date ». 315. Un arrêt de cour d'appel a posé une solution qui paraît inspirée par la volonté de ne s'enfermer dans aucun système, et qui participe à la recherche d'un équilibre : il énonce que « le seul fait pour le fournisseur de ne pas expédier les marchandises dans les premiers jours de la plage de temps stipulée, ne saurait permettre au cocontractant de résilier unilatéralement la convention hors tout contrôle judiciaire, même si le caractère saisonnier des articles commandés exige que ceux-ci soient livrés en temps utile avant le début de la saison, dès lors qu'il n'apparaît pas que les livraisons opérées par le fournisseur, le 14 septembre, des éléments de la partie automne d'une collection de prêt-à-porter, puissent être regardées comme suffisamment tardives pour provoquer la résolution du contrat » (CA Paris, 22 sept. 1992, D. 1992, IR 282 ). 316. De même que le vendeur est tenu de prouver la délivrance (V. infra, n o 321), c'est à lui qu'il revient, en cas de contestation, d'établir que la délivrance a eu lieu dans le délai convenu (Cass. 1 re civ. 19 mars 1996, Bull. civ. I, n o 147, D. 1997, somm. 27, obs. P. Jourdain , Defrénois 1996. 1437, obs. A. Bénabent). D. - Frais de la délivrance 317. L'article 1608 du code civil dispose : « Les frais de la délivrance sont à la charge du vendeur, et ceux de l'enlèvement à la charge de l'acheteur, s'il n'y a eu stipulation contraire ». 318. Les frais de la délivrance sont les dépenses nécessaires pour mettre la chose à la disposition de l'acheteur. Ils englobent, notamment, les frais de mesurage, de pesage et de comptage (AUBRY et RAU, t. 5, § 354, note 41), ainsi que les frais de transport de la chose au lieu de la délivrance (PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 76). 319. Les frais de l'enlèvement sont les dépenses nécessaires à la prise de possession de l'acheteur ; ils comprennent, entre autres frais, les frais d'emballage, de chargement ou de déchargement, les frais de déplacement de la chose du lieu de sa délivrance au lieu de sa destination (B. GROSS et P. BIHR, op. cit., p. 197). 320. De la lettre même du texte s'évince la possibilité pour les parties d'aménager à leur guise, selon des modalités différentes, la répartition de ces frais. § 3 - Preuve de la délivrance A. - Charge de la preuve 321. La délivrance étant l'exécution d'une obligation du vendeur, elle s'analyse juridiquement comme un paiement. C'est donc au vendeur d'en rapporter la preuve, conformément aux règles de droit commun posées par l'article 1315 du code civil. Spécialement, le vendeur ne peut exiger le paiement du prix s'il n'a pas, au préalable, établi la délivrance (Cass. com. 9 juill. 1991, Bull. civ. IV, n o 253). La solution, qui vaut pour la chose elle-même, concerne aussi la délivrance des accessoires de la chose vendue (Cass. com. 11 déc. 2001, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 58, obs. L. Leveneur). Le vendeur doit établir non seulement qu'il a mis la chose - et, éventuellement, ses accessoires - à la disposition de l'acheteur, mais que cette mise à disposition a eu lieu dans le délai convenu (Cass. 1 re civ. 19 mars 1996, préc. supra, n o 316). B. - Modes de preuve 322. La prise de possession effectuée par l'acheteur matérialise, concrètement, l'exécution de l'obligation de délivrance. Cette prise de possession, à laquelle on donne le nom de « réception » ou d'« agréage », atteste, lorsqu'elle est exempte de réserve, que l'acheteur a accepté la chose délivrée comme conforme au contrat ; la jurisprudence en déduit qu'elle « couvre les défauts de conformité apparents » (Cass. 3 e civ. 20 janv. 1982, Bull. civ. III, n o 20, à propos d'une vente immobilière après laquelle il avait fallu refaire un réseau de canalisations ; Cass. com. 12 févr. 1980, D. 1981. 278, note C. Aubertin, à propos d'une vente de bois destiné à la fabrication de meubles). 323. La solution ne vaut, évidemment, qu'autant que la réception a été faite sans réserve ; dans le cas contraire, l'exécution diligente de l'obligation de délivrance n'est pas établie, et le vendeur doit satisfaire aux réserves. Spécialement, si la délivrance a été effectuée de manière incomplète, il incombe au vendeur de fournir les éléments manquants (rappr., à propos d'un camion-benne délivré sans la benne et sans la roue de secours, Cass. com. 4 juin 1991, préc. supra, n o 303). 324. En outre, seuls les défauts apparents sont couverts par la réception faite sans réserve ; celle-ci ne libère en rien le vendeur de l'obligation de garantie contre les vices cachés, à laquelle il est tenu par ailleurs en vertu des articles 1641 et suivants du code civil (V. infra, n os 529 et s.). § 4 - Sanctions de l'inexécution de la délivrance 325. Le vendeur manque à l'obligation de délivrance chaque fois qu'il délivre un bien qui n'est pas conforme aux prévisions contractuelles ou qu'il ne respecte pas les modalités de la délivrance, telles qu'elles ont été convenues. La loi ouvre alors des droits au profit de l'acquéreur ; mais, dans la mesure où l'inexécution n'est pas forcément imputable au vendeur, celui-ci est pourvu de moyens de défense contre les recours de l'acheteur. Il convient donc d'examiner successivement, d'une part, les droits de l'acquéreur,et, d'autre part, les moyens de défense du vendeur. A. - Droits de l'acquéreur 326. La mise en oeuvre des droits de l'acquéreur suppose un préalable : il faut que l'inexécution de l'obligation de délivrance ait été constatée. Le défaut de conformité pourra être établi, par exemple, à partir du refus de l'acheteur d'agréer la chose ; le retard dans l'exécution sera caractérisé, quant à lui, par l'expiration du terme lorsque celui-ci était impératif, ou par une mise en demeure ou tout autre acte équivalent (C. civ., art. 1139) en présence d'un terme indicatif, à moins, dans ce dernier cas, que les parties ne soient convenues d'une dispense de mise en demeure. L'appréciation du point de savoir si, oui ou non, une telle dispense a été convenue relève du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. req. 16 mai 1882, DP 1883. 1. 175). 327. À supposer le défaut de délivrance établi, l'acquéreur se voit offrir divers moyens de riposte. D'abord, le manquement à l'obligation de délivrance peut coïncider avec un vice du consentement. En ce cas, l'acquéreur peut demander la nullité de la vente, si les conditions de l'action en nullité sont réunies (sur les vices du consentement en la matière et l'action en nullité qui en découle, V. Vente [2 o formation]) : la Cour de cassation a posé en ce sens, dans le cadre de la vente d'un véhicule d'occasion dont la carte grise ne correspondait pas aux caractéristiques du véhicule annoncées en raison des transformations subies par celui-ci, que sont « recevables les actions fondées, d'une part, sur la non-conformité de la chose vendue, et, d'autre part, sur l'erreur commise sur une qualité substantielle de cette chose » (Cass. 3 e civ. 25 mars 2003, JCP 2003. I. 170, n os 6 et s.). Ensuite, ce cas mis à part, l'acquéreur insatisfait de la chose délivrée est investi des droits dont tout créancier est pourvu au cas d'inexécution des contrats synallagmatiques, savoir : l'exception d'inexécution, le droit d'option entre la résolution et l'exécution forcée, et l'engagement de la responsabilité contractuelle du vendeur. 1° - Exception d'inexécution 328. Si l'obligation de délivrance n'a pas été exécutée conformément aux prévisions du contrat, l'acheteur qui n'a pas encore payé l'intégralité du prix est en droit, au regard du caractère synallagmatique de la vente, d'opposer l'exception d'inexécution et de conserver le prix (Cass. com. 27 janv. 1970, JCP 1970. II. 16554, note A. Huet, RTD civ. 1971. 136, obs. Y. Loussouarn ; Cass. com. 26 mai 1981, Bull. civ. IV, n o 248 ; rappr., dans la vente internationale de marchandises, « la contravention anticipée au contrat » prévue par l'art. 71,1, de la Convention de Vienne du 11 avr. 1980). 329. La solution a été appliquée du temps où la jurisprudence rattachait à la délivrance l'obligation, pour le vendeur, de faire radier les inscriptions de privilèges ou hypothèques grevant l'immeuble vendu, dans un cas où le vendeur n'avait pas procédé à une telle radiation (Cass. 1 re civ. 20 oct. 1963, D. 1964. 33, note P. Voirin). 330. Il convient d'en rapprocher, dans l'esprit, la pratique dite du « laissé-pour-compte », par laquelle, au cas de non- conformité, l'acheteur d'une marchandise refuse d'en prendre livraison et demande au vendeur de la lui échanger contre une marchandise conforme (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 141 ; comp. infra, n o 349). 2° - Option entre l'exécution forcée et la résolution 331. Aux termes de l'article 1610 du code civil : « Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur ». 332. Ce texte applique la sanction énoncée, de façon générale, à l'article 1184 du code civil, dans le cadre de l'inexécution des contrats synallagmatiques ; c'est pourquoi l'option prévue par lui entre l'exécution forcée et la résolution ne concerne pas seulement le retard dans la délivrance, mais aussi la délivrance d'une chose non conforme aux stipulations de la vente. 333. Le droit d'option, qui n'est ouvert qu'à l'acheteur, s'exerce, en principe, librement. Spécialement, le fait pour ledit acheteur d'avoir demandé, dans un premier temps, l'exécution ne le prive pas de la faculté de demander, par la suite, la résolution (Cass. req. 6 janv. 1932, DH 1932. 114) - et inversement (Cass. com. 31 mars 1952, Bull. civ. III, n o 155) -, sauf preuve d'une renonciation formelle à l'une ou à l'autre de ces actions. a. - Exécution forcée 334. L'option en faveur de l'exécution forcée s'exerce selon des modalités différentes suivant qu'il y a défaut de délivrance dans le délai convenu ou délivrance d'une chose non conforme. Lorsque, tout d'abord, à l'échéance convenue le vendeur n'a pas mis la chose à la disposition de l'acheteur,celui-ci, pour le contraindre à s'exécuter, doit exercer une action en délivrance. Par cette action, il demande au juge d'ordonner au vendeur de délivrer la chose promise. L'action peut d'ailleurs être exercée devant la juridiction des référés ; celui-ci a, en effet, le pouvoir d'ordonner la livraison des appareils commandés, au titre des mesures destinées à prévenir le dommage imminent qu'il constate (Cass. com. 26 févr. 1991, Bull. civ. IV, n o 87). 335. Après que le jugement a été rendu en sa faveur, l'acheteur peut, si la chose vendue est un corps certain, prendre lui- même possession de la chose, et, au cas de résistance du vendeur, recourir à la force publique ; il peut aussi obtenir une condamnation du vendeur à s'exécuter sous astreinte (Cass. req. 7 févr. 1922, Gaz. trib. 1922. 1. 214 ; T. com. Seine, 16 déc. 1919, DP 1920. 2. 33, note G. Ripert), voire pratiquer une saisie directe sur le bien à délivrer, conformément à l'article 56 de la loi n o 91-650 du 9 juillet 1991 sur les procédures civiles d'exécution (V. NCPC Dalloz). En présence d'une chose de genre, l'acheteur a le droit de se faire autoriser par justice, en vertu de l'article 1144 du code civil, à se remplacer, c'est-à-dire à racheter auprès d'un autre fournisseur, pour le compte du vendeur et aux frais avancés de celui-ci, les marchandises non délivrées (Cass. req. 6 janv. 1869, DP 1869. 1. 207). La question se pose alors de savoir si le juge peut accorder au vendeur un délai de grâce pour exécuter la délivrance. Réserve faite du cas où la vente porte sur un bien mobilier, et où elle a été conclue entre un vendeur professionnel et un consommateur (V. infra, n os 370 et s.), le tour très général de l'article 1244-1 du code civil ne paraît pas exclure une telle possibilité ; cependant, en sens contraire, il est permis de soutenir que le vendeur qui n'a pas encore délivré est un dépositaire, car il détient la chose pour le compte de l'acheteur, et qu'en conséquence, l'article 1944 exclut l'octroi d'un tel délai à son bénéfice (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par DE JUGLART, n o 946). 336. Au cas, maintenant, de délivrance d'une chose non conforme, l'acheteur peut demander en justice le remplacement de la chose qui ne convient pas - ce qui suppose que la vente porte sur une chose de genre, telle que des marchandises par exemple -, sa réparation au cas où elle a été endommagée, ou encore, si la chose a été délivrée de manière incomplète au regard des stipulations du contrat, la délivrance des éléments manquants par le vendeur. Les moyens de contrainte sont les mêmes que ceux prévus au cas de retard dans la livraison. 337. Les frais liés à la carence du vendeur, qu'il s'agisse des frais de réparation, des frais de déplacement de la chose ou des frais de remplacement, devraient être mis à la charge de l'intéressé ; l'article 1611 du code civil, qui oblige le vendeur défaillant à réparer le préjudice souffert par l'acheteur, peut être lu en ce sens (V. infra, n o 350), ainsi que certains arrêts (Cass. com. 4 juin 1991, préc. supra, n o 303, à propos du camion-benne incomplètement délivré). Mais cette solution est fréquemment écartée par les conditions générales des ventes, qui prévoient que le vendeur doit réparer ou échanger la marchandise sans aucun dédommagement d'aucune sorte. Ces clauses ne sont pas toujours valides, ni toujours efficaces (V. infra, n os 353 et s.). b. - Résolution 338. L'acheteur peut préférer à l'exécution forcée la résolution de la vente : l'article 1610 du code civil lui offre cette possibilité. La résolution emporte l'anéantissement rétroactif du contrat et la remise des choses dans leur état antérieur (V., par ex., Cass. 3 e civ. 22 juin 2005, D. 2005. 3003, note M.-A. Rakotovahiny , JCP 2005. II. 10149, note Y. Dagorne-Labbe) ; il s'ensuit que le vendeur qui, par exemple, a livré une marchandise non conforme à la commande doit la reprendre au lieu de la livraison (CA Paris, 5 mars 1954, D. 1954. 337), et qu'il est tenu de restituer le prix. Au cas où la chose a été détruite par suite d'un cas fortuit, c'est le vendeur qui doit en supporter les conséquences, puisqu'il est censé n'avoir jamais perdu la propriété et que les risques de la chose sont attachés à la propriété (V. supra, n o 6). Pour le reste, le droit commun des restitutions, tel qu'il a été exposé à propos de la nullité de la vente, trouve à s'appliquer (V. Vente [2 o formation]). Spécialement, comme au cas de nullité, le vendeur ne saurait prétendre, au titre des restitutions, à une indemnité pour l'usage de la chose dont l'acheteur a profité avant la résolution (Cass. 1 re civ. 11 mars 2003, Bull. civ. I, n o 74, D. 2003. 2522, note Y.-M. Sérinet ; rappr. Cass. ch. mixte 9 juill. 2004, D. 2004. 2175, note C. Tuaillon , JCP 2004. II. 10190, note G. François). Mais si la chose a été dépréciée en raison de l'utilisation qui en a été faite par l'acquéreur, le vendeur peut demander à être indemnisé à hauteur de cette dépréciation, pourvu qu'il rapporte la preuve de son existence et de son étendue (Cass. 1 re civ. 21 mars 2006, JCP 2006. IV. 1883 ; comp., pour la résolution consécutive à un vice caché, infra, n o 621). 339. Compte tenu de la gravité de ses effets, la résolution ne peut être décidée unilatéralement par l'acheteur insatisfait. Le principe est que, conformément à l'article 1184 du code civil, elle ne peut être décidée que judiciairement. L'acquéreur qui entend l'obtenir est donc tenu d'exercer, contre le vendeur, une action en justice à cet effet. L'action est également ouverte au sous-acquéreur contre le vendeur originaire, fabricant de la chose ; car, selon la jurisprudence, le droit de la mettre en oeuvre lui est transmis, en même temps que cette chose, à titre accessoire (V. supra, n os 264 et 283 ; adde : Cass. com. 19 mars 1991, JCP, éd. N, 1992. II. 107, obs. L. Leveneur ; Cass. 1 re civ. 22 févr. 2000, Contrats, conc., consom. 2000, comm. 91, obs. L. Leveneur ; rappr. Cass. 3 e civ. 8 janv. 1997, JCP 1997. II. 22877, note Monsallier). Il y a lieu d'observer, cependant, à ce propos que, puisque la restitution du prix reçu par le vendeur est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur, seul celui auquel la chose est rendue doit restituer le prix qu'il a reçu : spécialement, quand le sous-acquéreur a restitué la chose au vendeur intermédiaire (son cocontractant), le vendeur initial ne peut pas être condamné à lui restituer le prix (Cass. com. 3 févr. 1998, Bull. civ. IV, n o 61, D. 1999, somm. 15, obs. O. Tournafond ). Lire la mise à jour 339. Chaîne de contrats : exercice de l'action résolutoire du sous-acquéreur contre le vendeur initial. - L'action résolutoire résultant d'un même défaut de conformité se transmet avec la chose livrée, de sorte qu'elle peut être exercée par le sous- acquéreur à la fois contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire, à l'égard duquel le sous-acquéreur dispose d'une action directe contractuelle (Civ. 1 re , 20 mai 2010, n o 09-10.086 , Dalloz actualité, 28 mai 2010, obs. Delpech ; JCP 2010. Actu. 595). Cet arrêt a trait à une hypothèse bien connue en jurisprudence : celle des chaînes de contrats homogènes translatifs de propriété ou, pour faire simple, celle des ventes successives. Il est admis de longue date que les différentes actions offertes au premier acheteur contre le vendeur originaire (notamment lorsque cet acheteur a à se plaindre d'une défectuosité de la chose achetée) sont transmises aux acheteurs successifs de la chose, en tant qu'elles constituent un accessoire de celle-ci. Il s'agit d'actions contractuelles, alors même qu'il n'existe aucun lien de droit entre l'auteur (le sous- acquéreur de la chose) et le destinataire (le vendeur originaire) de celles-ci. La Cour de cassation a d'abord admis cette « action contractuelle directe », selon la terminologie employée, à propos de l'action en garantie de l'acheteur, garantie des vices cachés (Civ. 1 re , 9 oct. 1979, Bull. civ. I, n o 241 ; D. 1980. IR 222, note Larroumet. – Civ. 1 re , 20 juin 1995, Bull. civ. I, n o 275 ; D. 1995. IR 188 ), voire garantie d'éviction (Civ. 3 e , 28 mars 1990, Bull. civ. III, n o 93 ; D. 1990. IR 96 ). Puis elle l'a étendue à l'action fondée sur le manquement du vendeur initial à son obligation de délivrance, notamment pour défaut de conformité de la chose livrée (Civ. 1 re , 22 févr. 2000, CCC 2000, n o 91, note Leveneur. – V. égal. Civ. 1 re , 6 févr. 2001, Bull. civ. I, n o 22 ; D. 2001. Somm. 1135, obs. Delebecque ; RTD com. 2001. 413, obs. Loquin ; Rev. crit. DIP 2001. 522, obs. Jault-Seseke ; JCP 2001. II. 10567, note Legros ; JCP E 2001. 1238, note Mainguy et Seube ; Defrénois 2001. 708, obs. Libchaber ; CCC 2001, n o 82, note Leveneur, à propos de la transmission de la clause compromissoire insérée dans le contrat de vente initial, jugée opposable au sous-acquéreur). Le présent arrêt se situe dans la même veine et réaffirme avec une particulière netteté la transmission d'une telle action au sous-acquéreur (encore faut-il que le défaut de conformité dont se prévaut ce dernier contre le vendeur initial soit le même que celui qu'aurait pu invoquer le vendeur intermédiaire contre ce même vendeur, ce qui suppose que ledit défaut soit contemporain de la première vente), à propos de l'action résolutoire, sanction possible d'un tel manquement expressément prévue par l'article 1610 du code civil. 340. Lorsque la demande de résolution est relative à une vente immobilière, sa recevabilité postule qu'elle soit publiée à la conservation des hypothèques, et qu'il soit « justifié de cette publication par un certificat du conservateur ou la production d'une copie de la demande revêtue de la mention de publicité » (Décr. n o 55-22 du 4 janv. 1955, art. 30-5 : V. C. civ. Dalloz). 341. Le tribunal saisi de la demande en résolution n'est pas tenu d'y accéder : il lui appartient d'apprécier si le manquement à l'obligation de délivrance est suffisamment grave pour justifier une telle sanction. La solution vaut aussi bien au cas d'inobservation du délai de la délivrance qu'au cas de délivrance non conforme. 342. S'agissant de la délivrance tardive, celle-ci ne saurait justifier la résolution si le retard est motivé par les circonstances (Cass. req. 7 janv. 1846, DP 1846. 1. 13), ou s'il n'a pas causé de préjudice à l'acheteur (Cass. civ. 22 oct. 1886, DP 1887. 1. 87), ou encore s'il n'est que de faible importance (Cass. civ. 7 août 1894, DP 1895. 1. 108 ; CA Paris, 22 sept. 1992, D. 1992, IR 282 ). En revanche, lorsque les faits révèlent que, dans l'économie du contrat, la ponctualité participait de manière décisive à l'exécution de la délivrance, la résolution est prononcée (Cass. 1 re civ. 9 févr. 1977, Bull. civ. I, n o 78, D. 1977, IR 260 ; CA Versailles, 16 déc. 1983, Gaz. Pal. 1985. 1, somm. 122 ; CA Versailles, 13 oct. 1988, D. 1988, IR 280). Les juges du fond ont un pouvoir souverain pour apprécier si le retard de la délivrance est suffisamment grave pour justifier la résolution (Cass. civ. 1 er avr. 1924, DP 1926. 1. 36). 343. S'agissant de la délivrance non conforme, les solutions sont les mêmes. Ainsi, il a été jugé qu'une mention erronée quant à la version du modèle acquis et sa puissance administrative sur les documents afférents au véhicule automobile vendu est sans incidence sur l'utilisation du véhicule, et n'expose donc pas la vente à la résolution (Cass. 1 re civ. 20 févr. 1996, Bull. civ. I, n o 103). De même, la défaillance momentanée d'un élément de l'ordinateur délivré ne justifie pas une résolution (Cass. com. 8 juin 1979, Bull. civ. IV, n o 186, D. 1979, IR 540). Mais il en va différemment au cas où le matériel informatique objet de la délivrance, incompatible avec le programme, n'a jamais été opérationnel (CA Paris, 25 mars 1987, D. 1987, IR 102) ; de même encore, la résolution doit être prononcée au cas de livraison d'un système monoposte, alors que la commande stipulait un système multiposte (CA Versailles, 3 juin 1987, D. 1987, IR 174) : dans le dernier exemple, il n'y a pas identité entre la chose vendue et la chose délivrée ; et, dans le précédent, la chose délivrée ne présente pas la qualité que l'acheteur est en droit d'en attendre (pour beaucoup d'autres exemples, V. supra, n os 215 et s.). Ici encore, les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain d'appréciation pour prononcer ou non la résolution (V., à propos de la non-conformité de la chose aux normes en vigueur, Cass. com. 6 mai 1991, Bull. civ. IV, n o 159 ; adde, à propos d'une vente d'immeuble à construire : Cass. 3 e civ. 8 mars 2000, Bull. civ. III, n o 50). Lire la mise à jour 343 s. Vente : relaxe du délit de délaissement et résolution du contrat pour inexécution. - Le délit de délaissement supposant la volonté d'abandonner définitivement la victime, la relaxe n'empêche pas que les manquements contractuels puissent être constatés au plan civil (Civ. 3 e , 10 avr. 2010, n o 08-21.346, Dalloz actualité, 10 mai 2010, obs. Chenu). Si la question de la distinction entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale a nourri les discussions notamment autour de la dualité des fautes civiles et pénales (V., sur ce point, le TOURNEAU, Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz Action, 2008/2009, n os 564 s.), il faut avouer que la distinction entre l'infraction pénale et l'inexécution contractuelle a plus modestement retenu l'attention de la doctrine. L'arrêt rapporté vient rappeler que l'autorité sur le civil de la chose jugée au criminel peut aussi être invoquée en matière contractuelle lorsque les circonstances sont favorables. Une vente avec charge avait été conclue moyennant l'obligation pour l'acquéreur de s'occuper du vendeur, c'est-à-dire de lui fournir tous les soins et services nécessaires à son confort. Venant aux droits de son auteur, la fille du vendeur assigna l'acheteur en résolution de la vente, en raison de diverses inexécutions, alors même que l'acquéreur avait été relaxé du délit de délaissement prévu aux articles 223-3 et 223-4 du code pénal. La cour d'appel avait pourtant prononcé la résolution du contrat aux torts de l'acquéreur, qui forma un pourvoi en cassation. Au soutien de son pourvoi, l'acquéreur arguait de sa relaxe et de l'autorité de la chose jugée au criminel. Cette règle « oblige le juge civil à ne pas méconnaître ce que le juge criminel aura décidé quant à l'existence du fait, sa qualification légale, la participation matérielle du défendeur » (Civ. 30 déc. 1929, DP 1930. 41, note Savatier. – V. TERRÉ, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, 10 e éd., 2009, Dalloz, n o 879). Pourtant, les fautes pénales et civiles sont différentes, ce qui permet donc une condamnation au civil après une relaxe au pénal. En l'occurrence, la Cour de cassation relève que le délit de délaissement est volontaire (sur ce point, V. Rép. pén., v o Abandon d'enfant ou de personne hors d'état de se protéger, spéc. n os 13-14), contrairement à ce que pourrait laisser entendre son classement parmi les infractions de mise en danger. Le délit de délaissement doit donc être entendu comme une action délibérée commise en connaissance de cause. Là repose, en l'espèce, la distinction entre l'infraction pénale et l'inexécution contractuelle. En effet, que l'obligation contractée par le débiteur soit qualifiée de moyens ou de résultat, son intention n'est jamais exigée pour obtenir la résolution du contrat (le TOURNEAU, op. cit., n os 6026 s.). Dès lors, la relaxe du débiteur du chef de délaissement ne présuppose pas du sort de l'action civile en résolution. La Cour de cassation approuve dès lors les juges du fond d'avoir prononcé la résolution au regard des inexécutions du débiteur, et nonobstant sa relaxe. 344. Le souci de sanctionner d'une manière équilibrée l'inexécution de l'obligation de délivrance s'exprime pareillement en présence d'une délivrance seulement partielle de la chose : on sait alors que le défaut de conformité réside dans ce que la quantité convenue n'a pas été délivrée (V. supra, n os 230 et s.). De la même manière qu'au cas de retard ou de livraison d'une chose de qualité non conforme, il revient aux juges du fond d'apprécier si la partie de la chose qui n'a pas été délivrée est assez importante pour qu'il y ait lieu de résoudre complètement le contrat (Cass. civ. 10 juin 1856, DP 1856. 1. 254). 345. Lorsque le marché comporte des livraisons échelonnées, le défaut d'exécution d'une des livraisons ne peut donner lieu à la résolution de l'ensemble du contrat que si le contrat était indivisible, ce qui est le cas, notamment, lorsqu'il y a eu vente de plusieurs biens pour un prix global (Cass. 3 e civ. 16 avr. 1986, Bull. civ. III, n o 45) ; en revanche, lorsqu'il y a divisibilité de la vente, la résolution ne saurait être que partielle (Cass. 1 re civ. 13 janv. 1987, Bull. civ. I, n o 11). 346. Si le tribunal décide de ne pas résoudre intégralement la vente, il peut, suivant l'importance du manquement à l'obligation de délivrance, se contenter d'allouer des dommages et intérêts à l'acheteur (Cass. 3 e civ. 27 nov. 1991, JCP 1992. IV. 410). Mais il ne peut pas, dans les ventes civiles, ordonner une diminution du prix appelée « réfaction » : ainsi a été censuré un arrêt d'appel qui avait réduit le prix de cession d'immeubles au motif que le vendeur avait failli à son obligation de résultat de délivrer les locaux libres de toute occupation, alors que le juge ne peut pas modifier le prix de vente déterminé par les parties et que le préjudice résultant de l'inexécution partielle par le vendeur de son obligation de délivrance ne peut être réparé que par l'allocation de dommages et intérêts (Cass. 3 e civ. 29 janv. 2003, Bull. civ. III, n o 23, Defrénois 2003. 844, obs. E. Savaux). 347. L'orthodoxie de la solution n'est pas douteuse. Mais la solution contraire ne serait pas forcément infondée. Outre que la réfaction peut apparaître, en l'espèce, opportune, elle peut s'autoriser d'arguments de textes : l'article 1644 du code civil la prévoit expressément dans le cadre de l'action estimatoire pour vice caché, tout comme l'article L. 514-20, alinéa 3, du code de l'environnement, dans le cadre de l'action en résolution ouverte à l'acquéreur d'un terrain pollué par une installation antérieure de stockage de substances chimiques ou radioactives (V. M.-P. CAMPROUX-DUFFRÈNE, La prise en charge par le vendeur de la réhabilitation d'un terrain pollué sur le fondement de l'article L. 514-20 du code de l'environnement, JCP 2006. I. 156). La jurisprudence commerciale est d'ailleurs favorable à la réfaction (V. Cass. com. 23 mars 1971, Bull. civ. IV, n o 89, D. 1974. 40, note M. Alter ; 15 déc. 1992, Bull. civ. IV, n o 421). 348. Le principe selon lequel la résolution ne peut être prononcée que judiciairement souffre deux ordres d'exceptions : la première tient à ce que les parties ont la possibilité de stipuler une clause résolutoire de plein droit. Si les termes de celle-ci sont clairs et précis, et si elle est mise en oeuvre de bonne foi, le juge n'a d'autre solution, au cas où une contestation est portée devant lui, que de constater la résolution pour inexécution de l'obligation de délivrance (Cass. 3 e civ. 9 janv. 1980, Bull. civ. III, n o 12). 349. La seconde est d'ordre jurisprudentiel : la Cour de cassation pose aujourd'hui de manière ferme que la gravité du manquement d'une partie à ses obligations peut justifier que l'autre partie mette fin au contrat, de façon unilatérale, à ses risques et périls (Cass. 1 re civ. 13 oct. 1998, Bull. civ. I, n o 300, D. 1999. 197, note C. Jamin , D. 1999, somm. 115, obs. P. Delebecque , JCP 1999. II. 10133, note Rzepecki, Defrénois 1999. 374, obs. D. Mazeaud ; 20 févr. 2001, Bull. civ. I, n o 40, D. 2001. 1568, note C. Jamin , D. 2001, somm. 3239, obs. D. Mazeaud , Defrénois 2001. 705, obs. E. Savaux ; 28 oct. 2003, Bull. civ. I, n o 211, JCP 2004. II. 10108, note Lachièze, Defrénois 2004. 378, obs. R. Libchaber, et 381, obs. J.-L. Aubert). Bien que les décisions rendues ne portent pas sur la vente, la solution a vocation à concerner ce contrat. Elle est consacrée par l'article 49 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980, relative à la vente internationale de marchandises, aux termes duquel la résolution peut être déclarée unilatéralement par l'acheteur, sans qu'un recours judiciaire soit nécessaire, lorsque l'inexécution par le vendeur de l'une de ses obligations constitue une contravention essentielle au contrat, ce qui peut assurément être le cas en présence d'une délivrance non conforme ou tardive. Et il est permis d'en rapprocher la pratique du « laissé-pour-compte », par laquelle l'acheteur refuse de prendre livraison de la marchandise dans les ventes commerciales : cette pratique, si elle peut parfois être rapprochée de l'exception d'inexécution, peut aussi, dans d'autres cas, équivaloir à une résolution unilatérale de la part de l'acheteur ; il en est ainsi lorsque celui-ci refuse la marchandise pour délivrance tardive, ou encore, lorsque, la refusant pour défaut de conformité, il n'accepte pas l'échange qui lui est proposé par le vendeur (rappr. F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 241, note 5). 3° - Responsabilité contractuelle Bibliographie. - L. LEVENEUR, Vente entre professionnels et clause limitative de responsabilité, Contrats, conc., consom. mars 1994, p. 1 et s. 350. Conformément au droit commun de la responsabilité contractuelle, l'article 1611 du code civil dispose : « Dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu ». Il trouve à s'appliquer aussi bien lorsque l'acheteur a exercé l'option en faveur de la résolution, que lorsque le même acheteur sollicite l'exécution forcée de l'obligation de délivrance, ou même de manière autonome. L'intéressé doit établir que la défaillance du vendeur a été la cause, pour lui, d'un préjudice résidant dans une perte subie ou dans un manque à gagner, pourvu que ces chefs de dommage aient été prévisibles lors de la conclusion de la vente (V. Cass. com. 19 déc. 2000, D. 2002, somm. 1007, obs. G. Pignarre ). 351. En application de ce texte, il a été jugé, par exemple, que l'acheteur d'un fonds de commerce est en droit de demander au vendeur le paiement du coût des travaux de mise en conformité d'une installation électrique dont ledit vendeur avait faussement affirmé la conformité aux normes de sécurité, peu important que l'acheteur ait revendu le fonds à un prix supérieur à son acquisition sans avoir effectué ces travaux (Cass. com. 21 janv. 1992, Bull. civ. IV, n o 33). De même, le vendeur qui, à la suite d'une erreur d'étiquetage, délivre un débroussaillant au lieu du produit « mouillant » qu'avait entendu se procurer l'acheteur, à l'effet de fixer sur les plantes les insecticides et les fongicides, doit indemniser ledit acheteur de la destruction de sa récolte, consécutive à l'emploi du produit référencé de manière inexacte (Cass. 1 re civ. 24 nov. 1981, D. 1982, IR 533, obs. C. Larroumet). De même encore, le vendeur de tuiles gélives est tenu, en vertu de l'article 1611 du code civil, d'indemniser les acheteurs du coût des travaux de reprise de la couverture qui s'en sont suivis (CA Paris, 15 oct. 1986, D. 1987. 334, concl. G. Paire). 352. La règle de l'article 1611 est susceptible de s'appliquer aussi dans la vente immobilière : par exemple, le défaut de délivrance de l'immeuble dans le délai convenu, s'il contraint l'acheteur à prendre en location un appartement, lui fait subir une perte consistant dans le montant des loyers que celui-ci devra verser au bailleur ; le vendeur sera alors tenu d'indemniser l'acheteur, dans la mesure de cette perte immédiatement liée au retard dans l'exécution de la délivrance (rappr. supra, n o 346). 353. Bien souvent, le vendeur s'efforce de limiter, voire d'exclure, les conséquences indemnitaires de l'inexécution de l'obligation de délivrance. La validité et l'efficacité des clauses limitatives ou exclusives de responsabilité est variable : dans les ventes entre particuliers, de telles clauses sont assurément valables ; il y a lieu simplement de rappeler que, conformément au droit commun des contrats, elles sont privées d'efficacité au cas de faute lourde ou de dol de la part du vendeur. Dans les ventes entre vendeurs professionnels et acheteurs consommateurs, les mêmes clauses sont réputées non écrites, car elles contreviennent à la prohibition des clauses abusives, plus spécialement à l'article R. 132-1 du code de la consommation (V., à propos de la vente de pellicules, Cass. 1 re civ. 25 janv. 1989, D. 1989. 253, note P. Malaurie ; adde : infra, n os 392 et s.). Dans les ventes entre professionnels, la jurisprudence a affirmé la validité de ces clauses, sans qu'il y ait lieu de distinguer, comme elle le fait en matière de garantie des vices cachés (V. infra, n os 655 et 656), suivant que l'acheteur professionnel est ou non de la même spécialité que le vendeur (Cass. 1 re civ. 20 déc. 1988, Bull. civ. I, n o 373, JCP 1989. II. 21354, note G. Virassamy, Defrénois 1989. 1418, obs. G. Vermelle ; 14 nov. 1993, Contrats, conc., consom. mars 1994, p. 1, JCP 1994. II. 22334, note L. Leveneur, Defrénois 1994. 818, obs. D. Mazeaud). Bien entendu, il convient de réserver l'hypothèse de la faute lourde ou du dol du vendeur, hypothèse dans laquelle la clause est privée d'efficacité. B. - Moyens de défense du vendeur 354. L'article 1610 du code civil subordonne les sanctions du défaut de la délivrance à la condition que « le retard ne [vienne] que du fait du vendeur ». L'obligation de délivrance étant une obligation de résultat, il appartient au vendeur qui souhaite échapper aux sanctions prévues par les articles 1610 et 1611 de prouver que le défaut de la délivrance, ou le retard dans l'exécution de celle-ci, est dû à une circonstance extérieure (Cass. com. 19 mars 1963, D. 1963. 345, RTD civ. 1963. 566, obs. crit. G. Cornu). La preuve de l'absence de faute du vendeur est impuissante à l'exonérer de son devoir de réparation (Cass. 1 re civ. 10 juill. 1996, Bull. civ. I, n o 317, Defrénois 1997. 337, obs. P. Delebecque). La circonstance extérieure - ou, plus juridiquement, la cause étrangère - peut résider dans la force majeure, dans le fait de l'acheteur ou dans une disposition légale particulière. 1° - Force majeure 355. Lorsqu'un événement imprévisible au moment de la formation de la vente et irrésistible lors de son exécution rend la délivrance impossible pour le vendeur, celui-ci ne saurait être tenu de l'effectuer : telle est, en effet, la définition de la force majeure retenue par la Cour de cassation en matière contractuelle (Cass. ass. plén. 14 avr. 2006, D. 2006. 1577, 2 e esp., note P. Jourdain ). Il en serait ainsi, par exemple, au cas où le vendeur serait un importateur, et où l'importation du bien commandé serait brutalement interdite (comp. Cass. com. 1 er oct. 1991, BRDA 22/1991, p. 19, où le vendeur n'a pu être libéré car il ne rapportait pas la preuve du caractère imprévisible de l'interdiction). 356. Au regard des critères précédemment énumérés, ne sauraient être constitutifs de la force majeure les problèmes de santé dont le vendeur d'un immeuble était atteint avant la vente : ils sont dépourvus du caractère d'imprévisibilité. En conséquence, si le même vendeur n'a pas libéré l'immeuble au moment convenu, il ne peut les invoquer pour se dégager de l'obligation de délivrance et échapper à l'application de la clause pénale dont cette obligation était assortie (CA Paris, 27 janv. 1993, D. 1993, IR 132 ). 357. Il a été jugé, pour les mêmes raisons, qu'une grève du personnel du vendeur entraînant un retard dans la livraison d'une marchandise ne peut, en principe, être considérée comme un cas de force majeure (T. paix Paris, 7 août 1936, Gaz. Pal. 1936. 2. 781). Cette solution ne saurait revêtir une portée absolue : dès lors que le vendeur établit, d'une part, que la grève était imprévisible lors de la conclusion du contrat, et d'autre part, qu'il en est résulté une impossibilité absolue pour lui d'exécuter la délivrance, il est permis de poser que celui-ci est libéré de son obligation (rappr. Cass. ch. mixte 4 févr. 1983, Bull. civ., n os 1 et 2, RTD civ. 1983. 549, obs. G. Durry). 358. Lorsque le vendeur a promis une livraison par chemin de fer dans un délai déterminé, sans établir qu'il a imparti au transporteur un délai de rigueur, le retard du transporteur n'est pas un cas de force majeure (CA Versailles, 16 déc. 1983, Gaz. Pal. 1985. 1, somm. 122). 359. De même, lorsque l'acquéreur a pu se faire livrer par un autre fournisseur, le vendeur ne saurait prétendre que le caractère incomplet de la délivrance est dû à la pénurie des produits sur le marché (Cass. com. 4 janv. 1980, Bull. civ. IV, n o 6). 360. La perte de la chose vendue entre la conclusion de la vente et le moment de la délivrance n'est pas un cas de force majeure si la vente porte sur une chose de genre ; dans cette hypothèse, en effet, l'exécution n'est pas devenue impossible ; le vendeur devra se libérer en livrant des choses de même genre, autres que celles sur lesquelles il comptait pour se libérer (sur la question de la charge des risques de la chose, au cas de vente de corps certain, V. supra, n os 15 et s.). 361. En revanche, il a été jugé, en matière de vente à la mesure, que la taxation des prix, survenue après le contrat mais avant le mesurage, et à des prix inférieurs à ceux convenus, constitue un cas de force majeure rendant impossible l'exécution de la vente (CA Lyon, 23 mars 1943, Gaz. Pal. 1943. 1. 209, S. 1943. 2. 39). Lire la mise à jour 361 s. Remise en état de la chose par le vendeur. Exclusion de l'action en garantie. - L'acheteur d'une chose comportant un vice caché qui accepte que le vendeur procède à la remise en état de ce bien ne peut plus invoquer l'action en garantie dès lors que le vice originaire a disparu mais peut solliciter l'indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait de ce vice (Com. 1 er févr. 2011, n o 10-11.269 , Dalloz actualité, 17 févr. 2011, obs. Delpech). 362. Pour libérer définitivement le vendeur, il faut que l'événement qui présente les caractères de la force majeure rende l'exécution de l'obligation de délivrance définitivement impossible ; au cas où la force majeure vient à cesser et où l'exécution de la vente devient à nouveau possible, l'acheteur peut exiger du vendeur la délivrance (Cass. req. 19 nov. 1872, DP 1873. 1. 215 ; 12 déc. 1922, DP 1924. 1. 186). 2° - Fait de l'acheteur 363. Lorsque l'acheteur n'exécute pas les obligations auxquelles il s'est engagé, le vendeur est en droit de lui opposer l'exception d'inexécution, et, en conséquence, de refuser de délivrer l'immeuble. L'article 1612 du code civil offre une illustration particulière de cette règle générale au cas de vente au comptant ; il énonce : « Le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose, si l'acheteur n'en paie pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le paiement ». Sur le fondement de ce texte, il a été jugé que, dans une vente immobilière dont le prix est exigible, le vendeur est en droit de refuser l'accès des lieux à l'acheteur qui n'a pas payé le prix dans le délai imparti (Cass. 2 e civ. 23 mai 1973, Bull. civ. II, n o 175). 364. Cependant, pour refuser la délivrance, le vendeur ne saurait invoquer le caractère lésionnaire de la vente, alors même que, par la suite, la vente serait rescindée (Cass. 3 e civ. 25 mai 1976, Bull. civ. III, n o 231, D. 1976, IR 256) : pour être lésionnaire, le prix n'en a pas moins été payé ; l'acheteur a exécuté son obligation. L'exception d'inexécution serait donc illégitimement invoquée par le vendeur. 365. Quand le prix est payable à terme, l'article 1612 n'est, évidemment, pas applicable. Mais l'article 1613 libère alors le vendeur de l'obligation de délivrance « si, depuis la vente, l'acheteur est tombé en faillite ou en état de déconfiture, en sorte que le vendeur se trouve en danger imminent de perdre le prix ; à moins que l'acheteur ne lui donne caution de payer au terme ». Une jurisprudence ancienne considère que le vendeur peut se prévaloir de ce texte dès lors que les circonstances caractéristiques d'une cessation des paiements sont réunies (Cass. req. 20 déc. 1939, DH 1940. 114). En vérité, dès lors qu'une procédure collective de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte, la vente dont le prix est payable à terme et dont l'objet n'a pas été délivré est un « contrat en cours », soumis à l'article L. 622-13 du code de commerce au cas de procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, et à l'article L. 641-10, alinéa 2, du même code, au cas de procédure de liquidation judiciaire ; l'administrateur, dans les deux premiers cas, le liquidateur pour les besoins de la liquidation, dans le troisième, ont donc la faculté d'en exiger l'exécution en fournissant la prestation promise - c'est-à-dire en payant le prix suivant les modalités convenues - au vendeur (V. Rép. com., V o Entreprises en difficulté [Période d'observation]). Au débiteur en déconfiture, il y a lieu d'assimiler l'acquéreur en situation de surendettement (C. consom., art. L. 330-1 et s.). 366. Par ailleurs, lorsque l'acheteur, par son comportement lors de l'entrée en possession de la chose, a manifesté sans ambiguïté, même de manière tacite, sa renonciation à demander la résolution de la vente, le vendeur peut opposer l'irrecevabilité de la demande formée ultérieurement. Il a été jugé en ce sens que l'acheteur n'est plus en droit de demander la résolution s'il a laissé s'écouler un an après l'échéance fixée pour la livraison sans réclamer l'exécution de celle-ci, en raison de la progression ascendante des cours (Cass. com. 23 mars 1949, Bull. civ. II, n o 150). De même, l'acheteur qui n'a pas émis de réserve lors de la réception, et qui, après avoir eu la chose à sa disposition, se plaint du défaut des qualités de celle-ci, pourra voir l'action en résolution déclarée irrecevable ; il sera censé avoir accepté implicitement la chose (Cass. com. 1 er mars 2005, D. 2005, IR 799 , à propos de la vente d'un élément de jardinage industriel ; Cass. 1 re civ. 12 juill. 2005, D. 2005, IR 2179 , à propos de la vente d'un matériel informatique). L'acheteur doit être traité pareillement s'il ne s'est pas comporté avec diligence au moment de la livraison de la chose, spécialement s'il s'est abstenu de vérifier l'état et la qualité de la marchandise achetée, alors que celle-ci était particulièrement fragile (pour des langoustes, V. Cass. com. 10 févr. 1981, Bull. civ. IV, n o 78, RTD com. 1982. 292, obs. J. Hémard et B. Bouloc). 367. Cependant, les solutions ci-dessus exposées supposent que la renonciation de l'acheteur à se prévaloir de la résolution résulte d'une manifestation claire de volonté : par eux-mêmes, la réception et l'usage des marchandises vendues ne suffisent pas à engendrer une fin de non-recevoir contre l'action en résolution fondée sur ce que la marchandise livrée ne serait pas de la nature stipulée au contrat (Cass. req. 10 janv. 1870, DP 1870. 1. 423 ; 1 er avr. 1873, DP 1873. 1. 28). Les juges du fond interprètent souverainement le sens de la réception et de l'usage de la chose par l'acheteur (Cass. req. 13 mars 1878, DP 1878. 1. 471). 3° - Disposition légale 368. Parfois, le législateur dispense le vendeur d'exécuter la délivrance pendant une période donnée : ainsi, l'article L. 311-24 du code de la consommation dispose, à propos des crédits affectés : « Tant que le prêteur ne l'a pas avisé de l'octroi du crédit, et tant que l'emprunteur peut exercer sa faculté de rétractation, le vendeur n'est pas tenu d'accomplir son obligation de livraison et de fourniture ». Il est aisément compréhensible que, dans cette occurrence, le vendeur ne délivre pas la chose, car le même texte précise in fine : « Toute livraison ou fourniture anticipée est à la charge du vendeur qui en supporte les frais et risques ». Art. 2 - Droit de la consommation Bibliographie. - J. CALAIS-AULOY, Une nouvelle garantie pour l'acheteur : la garantie de conformité, RTD civ. 2005. 701 . - R. FABRE et D. MAINGUY, Les nouvelles dispositions gouvernant les contrats et la publicité depuis la loi du 18 janvier 1992, Cah. dr. entr. 3/1992, p. 20 et s. - A.-M. LEROYER, Conformité des biens. Transposition de la directive 99/44, RTD civ. 2005. 4 8 3 . - G. PAISANT, La transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties de la vente des biens de consommation, JCP 2005. I. 146. - J.-P. PIZZIO, La loi n o 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant la protection des consommateurs, ALD 1992. 181. - G. RAYMOND, Commentaire de la loi n o 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant la protection des consommateurs, JCP, éd. E, 1992. I. 144. - P. RÉMY-CORLAY, La transposition de la directive 99/44 CE dans le code de la consommation, RTD civ. 2005. 345 . - C. RONDEY, Garantie de la conformité d'un bien au contrat : la directive du 25 mai 1999 enfin transposée !, D. 2005, chron. 562 . - O. TOURNAFOND, La nouvelle « garantie de conformité » des consommateurs. Commentaire de l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 transposant en droit français la directive du 25 mai 1999, D. 2005, chron. 1557 . 369. À l'effet de renforcer la protection de l'acheteur consommateur d'un bien mobilier, le législateur français a aménagé de manière spécifique l'obligation de délivrance du vendeur professionnel. Le particularisme du droit de la consommation ne tient pas tant dans la disposition générale, contenue à l'article L. 212-1 du code de la consommation, et suivant laquelle : « Dès la première mise sur le marché, les produits doivent répondre aux prescriptions en vigueur relatives à la sécurité et à la santé des personnes, à la loyauté des transactions commerciales et à la protection des consommateurs » - cette disposition, dans l'esprit, prolonge en l'élargissant la solution du droit commun imposant au vendeur de délivrer une chose conforme aux normes administratives (V. supra, n o 216) -, que dans les règles relatives, d'une part, au délai de la délivrance, et, d'autre part, à la « garantie de conformité » introduite dans le code de la consommation à la suite de la transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties de la vente des biens de consommation. § 1 - Délai de la délivrance 370. Depuis la loi n o 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant la protection des consommateurs, une disposition aujourd'hui incluse à l'article L. 114-1, alinéa 1 er , du code de la consommation prévoit que, dans tout contrat ayant pour objet la vente d'un bien meuble à un consommateur, le professionnel doit, lorsque la livraison du bien n'est pas immédiate et si le prix convenu est supérieur à un montant aujourd'hui fixé par l'article R. 114-1 du code de la consommation à la somme de 500 €, indiquer la date limite à laquelle il s'engage à livrer le bien. Le vendeur professionnel se trouve ainsi tenu de prévoir un délai, dont le terme est impératif, pour l'exécution de l'obligation de délivrance (comp., pour les solutions du droit commun de la vente, supra, n os 309 et s.). 371. La sanction de la méconnaissance de cette disposition est rigoureuse, puisque, si le délai prévu est dépassé de plus de sept jours, et sauf si le retard est dû à la force majeure (sur cette notion, V. supra, n o 355), « le consommateur peut dénoncer le contrat » (C. consom., art. L. 114-1, al. 2), autrement dit en obtenir la résolution de plein droit. Cependant, dans la vente à crédit à un consommateur, le vendeur désireux d'échapper à une telle sanction pourrait éventuellement invoquer, outre la force majeure, l'article L. 311-24 du code de la consommation, qui suspend l'exécution de l'obligation de délivrance tant que le prêteur n'a pas avisé ledit vendeur de l'octroi du crédit et tant que l'emprunteur peut exercer sa faculté de rétractation (V. supra, n o 368). 372. Les modalités d'exercice du droit de résolution ont été précisément aménagées par le législateur : le consommateur dispose d'un délai de soixante jours ouvrés, à compter de la date indiquée pour la livraison du bien, pour faire connaître, par lettre recommandée avec avis de réception, sa décision au vendeur. Le contrat est rompu à la réception de cette lettre par le vendeur, sauf si la livraison est intervenue entre-temps (C. consom., art. L. 114-1, al. 2 et 3). 373. Enfin, toute clause par laquelle le vendeur professionnel entendrait limiter ou supprimer sa responsabilité pour retard dans l'exécution de la délivrance apparaîtrait comme abusive au regard de l'article R. 132-1 du code de la consommation (Cass. 1 re civ. 16 juill. 1987, D. 1988. 49, note J. Calais-Auloy, JCP 1988. II. 21001, note G. Paisant). § 2 - Garantie de conformité 374. La transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties dans la vente des biens de consommation, telle qu'elle a été effectuée par l'ordonnance du 17 février 2005 ratifiée par la loi du 5 avril 2006, offre à l'acheteur consommateur insatisfait du bien mobilier qui lui a été délivré par le vendeur professionnel, en plus des recours fondés sur le défaut de conformité ou sur la garantie des vices cachés prévus par le code civil, des recours spécifiques, fondés sur une nouvelle « garantie de conformité » dérivée des principes communautaires et intégrée aux articles L. 211-1 à L. 211-18 du code de la consommation. Il convient de délimiter le domaine de cette nouvelle garantie, avant d'en préciser le contenu, d'en examiner la mise en oeuvre et d'en mesurer la portée. Lire la mise à jour 374 s. Loi Hamon. Information relative à la garantie. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) introduit dans le code de la consommation un article L. 133-3 ainsi rédigé : « Les conditions générales de vente applicables aux contrats de consommation mentionnent : 1 o Selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie, l'existence, les conditions de mise en œuvre et le contenu de la garantie légale de conformité et de la garantie relative aux défauts de la chose vendue, dues par le vendeur ; 2 o Le cas échéant, l'existence d'une garantie commerciale et d'un service après-vente ». Garantie légale de conformité. Prise en charge par le vendeur des frais d'enlèvement du bien non conforme. - Lorsqu'un bien de consommation non conforme, qui a été installé, de bonne foi, par le consommateur conformément à sa nature et à l'usage recherché, est mis dans un état conforme par remplacement, le vendeur est tenu soit de procéder lui-même à l'enlèvement de ce bien du lieu où il a été installé et d'y installer le bien de remplacement, soit de supporter les frais nécessaires à cet enlèvementt (CJUE 16 juin 2011, aff. C-65/09 et C-87/09, Dalloz actualité, 4 juill. 2011, obs. Delpech). A. - Domaine de la garantie 375. Quant aux contrats, la garantie de conformité du code de la consommation concerne les contrats de vente, mais pas tous les contrats de vente : l'article L. 211-2 exclut de son champ d'application les ventes par autorité de justice et les ventes tous les contrats de vente : l'article L. 211-2 exclut de son champ d'application les ventes par autorité de justice et les ventes aux enchères publiques. En revanche, sont assimilés aux ventes « les contrats de fourniture de biens meubles à fabriquer ou à produire » (C. consom., art. L. 211-1, al. 1 er ). La précision est utile, car elle permet de soumettre à la garantie les contrats de fourniture visés, indépendamment de la difficulté de qualification - contrat d'entreprise ou contrat de vente ? - qu'ils sont de nature à susciter (sur les critères de distinction du contrat de vente et du contrat d'entreprise, V. Vente [1 o structure]). 376. Quant aux biens, la garantie ne concerne que les ventes portant sur des « biens meubles corporels » (C. consom., art. L. 211-1, al. 1 er ). Ces derniers englobent les animaux domestiques, selon le nouveau tour de l'article L. 213-1 du code rural (adde : infra, n o 663). L'article L. 211-1, alinéa 2, du code de la consommation comprend, par ailleurs, parmi les meubles corporels, l'eau et le gaz « lorsqu'ils sont conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée ». D'où l'on a déduit que « le gaz dit “de ville” restera hors champ d'application des textes nouveaux, à la différence du gaz “en bonbonne” » (G. PAISANT, La transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties dans la vente des biens de consommation, JCP 2005. I. 146, spéc. n o 22). L'électricité, pour sa part, est expressément écartée de l'aire de la garantie (C. consom., art. L. 211-2, al. 2). 377. Quant aux personnes, la garantie ne joue que dans les « relations contractuelles entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale et l'acheteur agissant en qualité de consommateur ». (C. consom., art. L. 211-3, al. 1 er ). Le consommateur n'étant pas défini et l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 participant à la transposition d'une directive européenne du 25 mai 1999, il paraît légitime de retenir la définition donnée par l'article 1 er , 2 a, de la directive (préc. supra, n o 204) ; aux termes de ce texte, est consommateur « toute personne physique qui […] agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale » - ce qui exclut qu'une personne morale, telle qu'une association par exemple, puisse se prévaloir de cette qualité, et donc que les articles L. 211-1 et suivants du code de la consommation lui soient applicables (en ce sens, V. G. PAISANT, article préc., spéc. n os 24 et 25 ; comp. O. TOURNAFOND, La nouvelle « garantie de conformité » des consommateurs. Commentaire de l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 transposant en droit français la directive du 25 mai 1999, D. 2005, chron. 1557 , n o 9, pour qui la notion est abandonnée à l'appréciation jurisprudentielle). Lire la mise à jour 377. Loi Hamon. Définition du consommateur. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) marque l'introduction dans la loi française d'une définition du consommateur, transposition de celle retenue par la directive n o 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs (art. 2). Le code de la consommation s'ouvre désormais sur un article préliminaire selon lequel « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » (V. PAISANT, Vers une définition générale du consommateur dans le code de la consommation, JCP 2013, n o 589). B. - Contenu de la garantie 378. Aux termes de l'article L. 211-4 du code de la consommation : « Le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance ». Cette disposition, créatrice d'une « garantie légale de conformité » selon l'intitulé de la section de ce code qui l'annonce, est inspirée par la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale des marchandises. Elle englobe à la fois la conformité aux spécifications contractuelles et la conformité à l'usage auquel la chose est destinée, comme le montre le vocabulaire utilisé par les textes suivants. Spécialement, l'article L. 211-5 précise : « Pour être conforme au contrat, le bien doit : 1 o être propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable… ; 2 o ou présenter les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties… ». La première acception de la conformité, par la référence opérée à « l'usage », évoque la conformité « fonctionnelle » et porte au rapprochement avec la garantie du vice caché (V. supra, n o 223). La seconde, par la référence aux « caractéristiques définies d'un commun accord », invite à l'analogie avec la conformité au sens du droit commun (V. supra, n o 217). De sorte que le « défaut de conformité » visé par le code de la consommation ne correspond pas seulement au même défaut en droit commun, mais s'étend aussi au vice caché du code civil. 379. Sous le bénéfice de cette observation, l'appréciation de la délivrance conforme, au sens du code de la consommation, s'opère de manière différente suivant que la vente est issue d'un contrat d'adhésion ou qu'elle a été négociée : au premier cas, réglementé par l'article L. 211-5, 1 o , pour que la délivrance soit conforme, il faut que le bien soit « propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable ». Le même texte exige « le cas échéant », qu'en outre, le même bien corresponde à la description donnée par le vendeur et possède les qualités que celui-ci a présentées à l'acheteur sous forme d'échantillon ou de modèle, et qu'il présente les qualités qu'un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, par le producteur ou par son représentant, notamment dans la publicité ou l'étiquetage. Sur ce dernier point, cependant, l'article L. 211-6 réserve le cas où le vendeur établit qu'il ignorait légitimement, lors de la vente, les déclarations publiques du producteur ou de son représentant, en énonçant qu'alors le vendeur n'est pas tenu par lesdites déclarations. 3 8 0 . Au second cas, prévu par l'article L. 211-5, 2 o , le bien, pour être conforme au contrat, doit « présenter les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties ou être propre à tout usage spécial recherché par l'acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté ». Autrement dit, la conformité s'entend alors de l'adéquation aux spécifications du contrat, qui sont susceptibles d'englober l'usage spécialement convenu (rappr., pour le droit commun, supra, n o 222). 381. La délivrance conforme ainsi définie ne se limite pas à la chose vendue ; elle s'étend à l'emballage, aux instructions de montage ou à l'installation lorsque celle-ci a été mise à la charge du vendeur par le contrat ou lorsqu'elle a été réalisée sous sa responsabilité (C. consom., art. L. 211-4, al. 2) : la solution tient, pour ce qui est de l'emballage, au caractère accessoire de celui-ci - l'obligation de la délivrance s'étendant aux accessoires de la chose (V. supra, n os 258 et s.) -, et pour ce qui est des instructions de montage et de l'installation, à ce qu'il s'agit alors de suites naturelles du contrat, au sens de l'article 1135 du code civil. C. - Mise en oeuvre de la garantie 1° - Preuve de la délivrance non conforme 382. Afin de faciliter la mise en oeuvre par l'acheteur de la garantie légale de conformité, l'article L. 211-7 du code de la consommation dispose : « Les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire ». Le texte pose ainsi une « présomption d'antériorité du défaut ». La présomption est simple, mais la possibilité pour le vendeur de la combattre est étroitement encadrée, puisqu'elle suppose, aux termes de l'alinéa 2 du même texte, que ladite présomption ne soit « pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité invoqué », ce qui serait le cas, par exemple, en présence de vente de denrées périssables. Autant dire que la présomption joue pratiquement toujours. Lire la mise à jour 382, 584. Loi Hamon. Allongement du délai d'apparition des défauts de conformité. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) a allongé le délai de la présomption d'antériorité du défaut qui passe de six à vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, sauf pour les biens vendus d'occasion (C. consom., art. L. 211-7 ; l'entrée en vigueur de cette modification étant repoussée au 18 mars 2016). 2° - Délai de mise en oeuvre de la garantie 383. Aux termes de l'article L. 211-12 du code de la consommation : « L'action résultant du défaut de conformité se prescrit par deux ans à compter de la délivrance du bien ». Quant à sa nature, le délai ainsi prévu est un délai de prescription ; il est donc susceptible de suspension ou d'interruption. Quant à son point de départ, il court à compter de la délivrance, non à partir de la découverte du défaut de conformité. 384. La brièveté du délai de l'article L. 211-12 apparaît excessive lorsque le défaut de conformité est un vice caché (G. PAISANT, article préc. supra, n o 376, spéc. n o 32). Dans ce dernier cas, le recours au droit commun de la vente se révèle plus avantageux pour l'acquéreur, car le « bref délai » de l'action en garantie des vices cachés, d'une durée de deux ans depuis la modification apportée à l'article 1648 du code civil par l'ordonnance du 17 février 2005, ne court qu'à compter de la découverte du vice (V. infra, n o 600) ; et celui de l'action pour défaut de conformité, dès lors qu'une telle action est engagée par l'acheteur consommateur contre un vendeur commerçant, est de dix ans (C. com., art. L. 110-4). Il est prévisible, dès lors, qu'en pratique, la « garantie légale de conformité » ne sera mise en oeuvre qu'à l'occasion des litiges portant sur des biens de grande consommation, dont les défauts apparaîtront dans les premiers mois de l'acquisition ; pour les litiges portant sur des biens de consommation de valeur et d'utilisation durable, l'acheteur consommateur préférera recourir aux actions en défaut de conformité et en garantie des vices cachés qui lui sont ouvertes par le droit commun de la vente (V. O. TOURNAFOND, chron. préc. [supra, n o 377], n o 18). 3° - Sanctions de la garantie 385. Hormis lorsqu'une solution amiable aura été trouvée entre le vendeur et l'acheteur, c'est par une action en justice que le second mettra en oeuvre la garantie légale de conformité. Il est remarquable, à ce propos, que l'acheteur consommateur ne se voit pas reconnaître d'action directe contre le fabricant ou les vendeurs intermédiaires (comp., dans le droit commun de la vente, supra, n o 264), tandis qu'une « action récursoire » est accordée au « vendeur final à l'encontre des vendeurs ou intermédiaires successifs et du producteur du bien meuble corporel, selon les principes du code civil » (C. consom., art. L. 211- 14). 386. Quant à l'objet de l'action exercée par l'acheteur consommateur contre le vendeur professionnel, l'article L. 211-9, alinéa 1 er , du code de la consommation ouvre au premier nommé une option principale, dont les deux branches tendent à assurer l'exécution en nature de la délivrance conforme. Il dispose, en effet : « En cas de défaut de conformité, l'acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien ». Il est notable que seul l'acheteur est investi de l'option ; le vendeur ne peut donc pas lui imposer la branche de l'alternative qui aurait sa faveur. 387. Du moins, telle est la solution de principe, que l'alinéa 2 du même texte assortit d'une dérogation, puisqu'il énonce : « Toutefois, le vendeur peut ne pas procéder selon le choix de l'acheteur si ce choix entraîne un coût manifestement disproportionné au regard de l'autre modalité, compte tenu de la valeur du bien ou de l'importance du défaut ». En ce cas, le texte impose au vendeur « de procéder, sauf impossibilité, selon la modalité non choisie de l'acheteur ». 388. Cette dernière disposition s'explique par la volonté de privilégier, ainsi qu'il a été dit, la satisfaction en nature du consommateur. Ce n'est que lorsque cette satisfaction est impossible que l'inexécution de la vente est aménagée. Puisque l'option précédemment décrite ne peut pas, dans cette dernière éventualité, être exercée par l'acheteur, celui-ci s'en voit ouvrir une autre par l'article L. 211-10 entre, d'un côté, la restitution du bien contre la restitution du prix et, d'un autre côté, la conservation du bien contre la restitution d'une partie du prix. 389. Cette option subsidiaire appelle deux remarques : La première est pour dire que l'acheteur est en droit de s'en prévaloir, selon le même texte, non seulement lorsque la réparation et le remplacement du bien sont impossibles, mais encore dans deux cas particuliers : « 1 o si la solution demandée, proposée ou convenue en application de l'article L. 211-9 ne peut être mise en oeuvre dans le délai d'un mois suivant la réclamation de l'acheteur » ; 2 o ou si cette solution ne peut l'être sans inconvénient majeur pour celui-ci compte tenu de la nature du bien et de l'usage qu'il recherche ». C'est que, dans ce dernier cas, le vendeur n'est finalement pas en mesure de donner à l'acheteur la satisfaction attendue de la chose objet du contrat, et, dans le cas précédent, qu'il ne le peut pas dans un délai « raisonnable », pour reprendre l'expression utilisée par la directive du 25 mai 1999 (art. 3, 3). 390. La seconde remarque suggérée par l'option subsidiaire offerte à l'acheteur, tient dans ce que celle-ci disparaît lorsque le défaut de conformité est mineur : en ce cas, selon l'article L. 211-10, in fine : « La résolution de la vente ne peut toutefois être prononcée ». Il s'ensuit que la restitution du bien contre la restitution du prix est exclue, au profit de la conservation du bien contre une restitution partielle du prix. La solution est proche du droit commun, où le juge n'est jamais tenu de prononcer la résolution, et où il refuse généralement de la prononcer si le manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme n'est pas suffisamment grave (V. supra, n os 341 et s.). 391. Quelle que soit la sanction retenue, l'article L. 211-11 précise que son application « a lieu sans aucun frais pour l'acheteur ». L'article 3 de la directive du 25 mai 1999 prévoyait que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la garantie, l'acquéreur était exonéré des « frais nécessaires exposés pour la mise des biens dans un état conforme, notamment [des] frais d'envoi du bien et [des] frais associés au travail et au matériel » (art. 3, 4). La formule plus large du code de la consommation invite à dispenser l'acheteur de tous les frais liés à la mauvaise exécution de la délivrance du vendeur (en ce sens, V. G. PAISANT, article préc. supra, n o 376, spéc. n o 30). Au surplus, le même article L. 211-11 réserve la possibilité pour l'acquéreur déçu de solliciter des dommages et intérêts, aux conditions de la responsabilité civile contractuelle. Le délai d'exercice de l'action indemnitaire, dans la mesure où celle-ci prend appui sur le défaut de conformité, paraît soumis au délai de prescription de deux ans de l'article L. 211-12 (V. supra, n o 383). D. - Portée de la garantie 392. La nouvelle « garantie légale de conformité » est d'ordre public, en ce que, selon l'article L. 211-17 du code de la consommation, les conventions qui écartent ou limitent, directement ou indirectement, les droits découlant pour l'acheteur consommateur de cette garantie sont réputées non écrites, dès lors qu'elles ont été conclues avant la réclamation du même acheteur. La règle ainsi posée appelle plusieurs observations. 393. En premier lieu, il est permis de penser qu'elle doublonne avec l'article R. 132-1 du code de la consommation prohibant, comme abusive, « la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non- professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations » (G. PAISANT, article préc., spéc. n o 35 ; O. TOURNAFOND, chron. préc. [supra, n o 377], n o 21). En revanche, le silence des dispositions relatives à la garantie légale de conformité sur la possibilité réservée par l'article R. 132-2, alinéa 2, de stipuler que « … le professionnel peut apporter des modifications liées à l'évolution technique, à condition qu'il n'en résulte ni augmentation des prix ni altération de la qualité et que la clause réserve au non-professionnel ou consommateur la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement » ne paraît pas condamner cette clause pour le cas où le professionnel déciderait d'y recourir (rappr. O. TOURNAFOND, loc. cit.). 394. En deuxième lieu, il s'évince directement de l'article L. 211-17 que les conventions exclusives ou limitatives de la garantie conclues postérieurement à la réclamation de l'acheteur consommateur sont valables. De fait, elle s'analysent en une renonciation, de la part de l'acheteur, à une prérogative d'ordre public, ce qui est toujours possible dès lors que, d'une part, la renonciation est dépourvue d'ambiguïté, et que, d'autre part, elle intervient une fois que le droit qui en est l'objet est entré dans le patrimoine du renonçant. Or, le droit de mettre en oeuvre la garantie naît lors de la réclamation. Il n'est pas de raison, par conséquent, de priver d'effet la renonciation postérieure à ladite réclamation. 395. En troisième lieu, l'article L. 211-17 n'interdit nullement au vendeur professionnel de renforcer la garantie de conformité offerte à l'acheteur consommateur - en étendant sa durée, par exemple - : l'ordonnance du 17 février 2005 prévoit elle-même ce type d'aménagement, qu'elle réglemente sous l'appellation de « garantie commerciale » à un double point de vue. D'une part, quant à la forme, l'article L. 211-15 du code de la consommation soumet « la garantie commerciale » à l'exigence d'un écrit qui doit être mis à la disposition de l'acquéreur et qui doit comporter diverses mentions obligatoires énoncées par le texte. Ces mentions ont trait, d'abord, au contenu de la garantie, aux conditions de sa mise en oeuvre, à sa durée, à son étendue territoriale, ainsi qu'aux éléments d'identification (nom et adresse) du garant ; l'écrit doit, en outre, porter rappel de l'existence, indépendamment de la garantie commerciale, de la « garantie légale » et des garanties de droit commun pour défaut de conformité et vice caché dont le vendeur demeure tenu vis-à-vis de l'acquéreur ; il doit, enfin, reproduire « intégralement et de façon apparente » les articles L. 211-4, L. 211-5 et L. 211-12 du code de la consommation, ainsi que les article 1641 et 1648, alinéa 1 er , du code civil. La méconnaissance de ces dispositions ne porte pas atteinte à la validité de la garantie, dont l'acquéreur peut toujours se prévaloir (C. consom., art. L. 211-15, dern. al.). Le texte ne dit rien de la sanction à laquelle s'expose le vendeur. Lire la mise à jour 395 s. Loi Hamon. Garantie commerciale. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) a apporté quelques modifications à la garantie commerciale. L'article L. 211-15 est désormais rédigé ainsi : « La garantie commerciale s'entend de tout engagement contractuel d'un professionnel à l'égard du consommateur en vue du remboursement du prix d'achat, du remplacement ou de la réparation du bien, en sus de ses obligations légales visant à garantir la conformité du bien. – La garantie commerciale fait l'objet d'un contrat écrit, dont un exemplaire est remis à l'acheteur. – Le contrat précise le contenu de la garantie, les modalités de sa mise en œuvre, son prix, sa durée, son étendue territoriale ainsi que le nom et l'adresse du garant et reproduit l'article L. 211-16. – En outre, il mentionne de façon claire et précise que, indépendamment de la garantie commerciale, le vendeur reste tenu de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 211-4 à L. 211-13 du présent code et de celle relative aux défauts de la chose vendue, dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil. Les articles L. 211-4, L. 211-5 et L. 211-12 du présent code ainsi que l'article 1641 et le premier alinéa de l'article 1648 du code civil sont intégralement reproduits. – En cas de non- respect de ces dispositions, la garantie demeure valable. L'acheteur est en droit de s'en prévaloir ». 396. D'autre part, quant à l'exécution de la « garantie commerciale », l'article L. 211-16 du code de la consommation dispose que, lorsque l'acheteur demande, pendant la période de garantie contractuelle, la remise en état du bien, « toute période d'immobilisation d'au moins sept jours vient s'ajouter à la durée de la garantie qui restait à courir ». Cette période commence à courir à compter de la mise à disposition du bien par l'acheteur pour la réparation. Le vendeur se voit de la sorte fermement invité à se montrer diligent dans l'exécution de la remise en état qui lui a été confiée. 397. En quatrième lieu, il n'est pas possible à l'acheteur de mettre en oeuvre la garantie légale de conformité « en invoquant un défaut qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu'il a contracté […] ou lorsque le défaut a son origine dans les matériaux qu'il a lui-même fournis » (C. consom., art. L. 211-8). C'est que, dans le dernier cas, le défaut de conformité ne peut pas être imputé au vendeur pour un matériau qu'il n'a pas fourni, et, dans les cas précédents, l'acheteur consommateur est censé avoir accepté le défaut dès l'origine. L'analogie avec la réception sans réserve des défauts apparents, qui vaut délivrance conforme (V. supra, n o 366), peut être alors établie, sauf à observer que la renonciation réputée de l'acquéreur à se prévaloir du défaut est déduite par l'article L. 211-8 à partir de l'attitude dudit acquéreur lors de la conclusion de la vente, non - comme en droit commun -, lors de la réception de la chose, c'est-à-dire lors de l'exécution du contrat. 398. En cinquième et dernier lieu, la « garantie légale de conformité » ne permet pas de répondre à toutes les insatisfactions de l'acquéreur. Ainsi, spécialement, il est remarquable que les dispositions gouvernant la nouvelle garantie légale de conformité ne concernent que la conformité « qualitative », non la conformité « quantitative » (sur cette dernière, V. supra, n o 230). En outre, la garantie légale est parfois moins protectrice des intérêts de l'acheteur consommateur que les garanties offertes par le droit commun de la vente : quant à la prescription, par exemple, l'action visant à mettre en oeuvre première est enfermée dans un délai de deux ans, plus court que les délais auxquels obéissent les actions ayant trait aux secondes (V. supra, n o 384) ; et, quant aux sanctions, alors que l'acquéreur a la maîtrise du choix de ces dernières lorsqu'il agit en défaut de conformité ou en garantie des vices cachés sur le fondement du droit commun (pour le défaut de conformité, V. supra, n os 327 et s. ; pour la garantie des vices cachés, V. infra, n os 611 et s.), les « options » que lui ouvre le droit de la consommation ne sont pas abandonnées à sa maîtrise (V. supra, n os 386 et s.). Aussi, afin d'assurer une protection optimale des intérêts de l'acheteur consommateur, le législateur français a souhaité lui laisser le libre choix entre le recours aux règles du droit commun et la mise en oeuvre des règles du droit de la consommation : tel est le sens de l'article L. 211-13 du code de la consommation, aux termes duquel : « Les dispositions [du code de la consommation] ne privent pas l'acheteur du droit d'exercer l'action résultant des vices rédhibitoires telle qu'elle résulte des articles 1641 à 1649 du code civil ou toute autre action de nature contractuelle ou extracontractuelle qui lui est reconnue par la loi ». Il s'ensuit que selon son intérêt, l'acheteur consommateur pourra choisir de se placer, au cas où la chose qui lui aura été délivrée ne l'aura pas satisfait, indifféremment sur le terrain du droit commun de la vente ou sur celui du droit spécial de la consommation, en l'espèce de la garantie dite « légale » ou, éventuellement, « commerciale » de conformité. Section 2 - Garantie d'éviction Bibliographie. - C. BLOND, La protection de l'acheteur insatisfait de l'état de l'immeuble, 1999, PU Aix-Marseille. - C. HOCHART, La garantie d'éviction dans la vente, 1993, LGDJ. Bibliographie. - CHALVIGNAC, Garantie légale d'éviction et clause de non-concurrence, Petites affiches 20 déc. 2002. - M.- A. COUDERT, La garantie d'éviction dans les ventes commerciales, D. 1973, chron. 113. 399. La garantie d'éviction - qui concerne, à l'exception des ventes sur saisie (Cass. 2 e civ. 22 nov. 2001, Bull. civ. II, n o 174, D. 2002, IR 140 , Contrats, conc., consom. 2002, comm. 44, obs. L. Leveneur), toutes les ventes, y compris les cessions de droits incorporels (Cass. 1 re civ. 7 avr. 1998, Bull. civ. I, n o 145, D. 1999, somm. 123, obs. T. Hassler et V. Lapp ; adde, pour une cession de bail commercial : Cass. 3 e civ. 24 juin 1998, Bull. civ. III, n o 130, Dalloz Affaires 1998. 1481, obs. J. F. ; pour une cession de droits de propriété intellectuelle : Cass. 1 re civ. 19 juin 1990, Bull. civ. I, n o 177) - est définie aux articles 1625 et 1626 du code civil. Le premier de ces textes dispose que le vendeur doit garantir à l'acquéreur « la possession paisible de la chose vendue » ; le second précise : « Quoique lors de la vente il n'ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente ». 400. Les articles 1625 et 1626 font ainsi peser sur le vendeur une obligation qui comporte deux aspects : d'une part, ledit vendeur est tenu de ne pas porter lui-même atteinte à la propriété, à la possession ou à la détention de l'acheteur ; d'autre part, il s'oblige à empêcher qu'un tiers, invoquant un droit sur la chose, ne vienne contester le droit que lui-même a cédé à l'acheteur. Par quoi il apparaît que la garantie contre l'éviction dont le vendeur est débiteur est non seulement une garantie du fait personnel, mais aussi une garantie de fait des tiers. Art. 1 - Garantie du fait personnel 401. « Qui doit garantir ne peut évincer » : le vendeur doit s'abstenir de tout acte qui porterait une atteinte quelconque aux prérogatives dont l'acheteur est investi en sa qualité de propriétaire. Il convient de mesurer l'étendue de la garantie, avant d'en présenter les caractères et les sanctions. § 1 - Étendue de la garantie du fait personnel 402. La garantie du fait personnel du vendeur s'étend aux troubles de fait comme aux troubles de droit, étant précisé que, pour que soit établi le manquement à l'obligation de garantie, le trouble doit survenir postérieurement au transfert de la propriété du bien vendu : ainsi a été cassé un arrêt qui avait retenu la garantie du vendeur au motif que celui-ci avait troublé la possession de l'acheteur en effectuant des travaux, sans rechercher si ceux-ci étaient antérieurs ou postérieurs au transfert entre les parties du lot concerné (Cass. 3 e civ. 5 oct. 1994, Bull. civ. III, n o 168, Defrénois 1995. 409, obs. C. Atias). A. - Troubles de fait 403. La garantie du fait personnel couvre d'abord les troubles de fait ; le vendeur s'interdit d'accomplir tous actes matériels de nature à compromettre la possession paisible de l'acheteur. Il ne saurait, par exemple, sans méconnaître son obligation de garantie, détourner les sources qui alimentaient l'immeuble vendu (Cass. civ. 21 mars 1853, DP 1854. 1. 435), ou édifier sur le terrain contigu de la villa qu'il a vendue et qui est située en bordure de mer, un édifice privant cette maison de l'ensoleillement et de la vue qu'elle offrait (Cass. 1 re civ. 29 nov. 1955, JCP 1956. II. 9216, note J. Becqué). En revanche, il lui est loisible d'accomplir sur le terrain contigu du terrain vendu tous actes légitimes qu'autorise le droit de propriété, pourvu que ne s'ensuive pas un trouble anormal de voisinage ; par exemple, le vendeur peut planter des peupliers en bordure du terrain vendu qui porte des vignes (Cass. req. 3 juin 1891, S. 1892. 1. 257). 404. L'obligation de non-concurrence contractée par le cédant d'un fonds de commerce à l'égard du cessionnaire, et en vertu de laquelle le vendeur est tenu de s'abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé, participe également à la garantie du fait personnel (Cass. req. 29 juill. 1908, DP 1909. 1. 281, note L. Lacour ; Cass. com. 16 juin 1969, D. 1970. 37) ; et il a été jugé que, dans le cas où les parties ont stipulé que le vendeur ne pourrait se rétablir dans une activité déterminée pendant un certain délai, l'expiration de ce délai n'a pas pour effet de le libérer de l'obligation légale de garantie de son fait personnel (Cass. com. 14 avr. 1992, Bull. civ. IV, n o 160, D. 1993, somm. 239, obs. G. Paisant ). B. - Troubles de droit 405. Par la garantie du fait personnel, le vendeur s'oblige aussi à ne pas apporter, ni directement, ni indirectement, de trouble de droit à la maîtrise de l'acquéreur sur le bien vendu ; on entend par là qu'il s'interdit de contester le droit qu'il a transmis à l'acquéreur. 406. Le trouble est direct lorsque le vendeur invoque à son profit un droit sur le bien. Tel est le cas, par exemple, si le vendeur prétend avoir acquis à nouveau le bien vendu par l'effet de l'usucapion, au motif qu'il en aurait conservé la possession depuis la vente (Cass. 3 e civ. 20 oct. 1981, Bull. civ. III, n o 168, D. 1982, IR 531, obs. B. Audit), ou s'il entend se prévaloir d'un droit d'usufruit ou d'une servitude sur le bien vendu, ou encore d'un droit de jouissance. 407. Il faut, cependant, réserver le cas où, dans l'acte de vente, l'acheteur a consenti au vendeur un tel droit ; en ce cas, bien sûr, il ne saurait être reproché au vendeur qui exerce le droit ainsi reçu, de ne pas exécuter l'obligation de garantie (Cass. 3 e civ. 8 déc. 1969, Bull. civ. III, n o 805). 408. De même, la garantie d'éviction ne s'étend pas aux contestations portant sur la vente elle-même, telles qu'elles pourraient émaner du vendeur (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 249) : celui-ci demeure en droit de demander la nullité, la rescision ou la résolution de la vente. Sans doute, si cette demande est satisfaite, le droit de l'acheteur sur le bien s'en trouvera anéanti ; mais il s'agira là d'une conséquence de la disparition du contrat lui-même et, partant, de l'obligation de garantie créée par ce contrat. 409. Le trouble est indirect lorsque le vendeur concède à un tiers, sur le bien vendu, une prérogative de nature à réduire ou à ruiner la propriété transférée à l'acquéreur : il en est ainsi, par exemple, si le vendeur revend l'immeuble avant que la première vente ait été publiée ; dans une telle situation, ledit vendeur manque à son obligation de garantie vis-à-vis du premier acquéreur (Cass. 3 e civ. 29 avr. 1981, Bull. civ. III, n o 88). De même, l'auteur d'une pièce de théâtre, qui a cédé les droits d'adaptation cinématographique de l'oeuvre à un premier producteur, mais s'est réservé le droit dérivé de création d'une comédie musicale à partir de la pièce, enfreint la garantie d'éviction dont il est débiteur vis-à-vis de ce producteur, s'il autorise un second producteur à tirer de la comédie musicale un film concurrent (Cass. 1 re civ. 27 mai 1986, Bull. civ. I, n o 144, D. 1987. 209, note P.-Y. Gautier, D. 1987, somm. 368, obs. T. Hassler). Lire la mise à jour 409 s. Bonne foi. Garantie d'éviction due par le cédant d'un produit contrefait. - La garantie d'éviction est due par tout cédant d'un droit de propriété, corporel ou incorporel, sauf à établir que le cessionnaire a participé aux actes de contrefaçon en mettant en vente un produit qu'il savait contrefait (Civ. 1 re , 13 mars 2008, n o 06-20.152 ). § 2 - Caractères de la garantie du fait personnel 410. L'obligation de garantie du fait personnel est, d'abord, perpétuelle. Le vendeur et ses héritiers ne sont jamais libérés, même trente ans après la vente (Cass. civ. 13 mai 1912, DP 1913. 1. 143, S. 1914. 1. 209, note G. Appert ; rappr. Cass. 3 e civ. 20 oct. 1981, Bull. civ. III, n o 168). 411. Cette obligation est, par nature, indivisible, du fait qu'elle ne peut être exécutée qu'en entier. Par conséquent, si le vendeur décède en laissant plusieurs héritiers, chacun d'entre eux est tenu pour le tout de la garantie due par son auteur (Cass. 3 e civ. 4 juill. 1973, Bull. civ. III, n o 465). Cependant, l'obligation d'indemniser l'acquéreur pour violation de l'obligation de garantie est, quant à elle, divisible puisqu'il s'agit là d'une obligation de somme d'argent ; de sorte que chaque covendeur n'en est tenu qu'à proportion de la part qu'il avait dans le bien hérité (Cass. civ. 28 déc. 1926, DP 1930. 1. 73, note H. Lalou). 412. La garantie du fait personnel du vendeur est, de plus, transmissible ; elle profite, outre à l'acheteur, à toute personne qui serait amenée à tenir de celui-ci des droits sur la chose. C'est que la garantie contre l'éviction est un accessoire du bien vendu (V. supra, n o 264). Il s'ensuit, par exemple, qu'au cas de revente d'un immeuble ou d'un fonds de commerce, le vendeur ne saurait évincer le sous-acquéreur sans s'exposer aux poursuites de celui-ci, qui pourrait agir directement contre lui (rappr. Cass. 3 e civ. 28 mars 1990, Bull. civ. III, n o 93, D. 1990, IR 96 ). 413. Enfin, la garantie du fait personnel présente un caractère impératif. En effet, selon l'article 1628 du code civil : « Quoiqu'il soit dit que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie, il demeure cependant tenu de celle qui résulte d'un fait qui lui est personnel » ; et le même texte ajoute que « toute convention contraire est nulle ». De la règle ainsi posée, il ressort que les parties ne peuvent valablement insérer dans le contrat une clause qui supprimerait, ou même simplement limiterait, la garantie du fait personnel du vendeur. La prohibition d'une telle clause s'explique par l'idée que celle-ci, en ce qu'elle permettrait au vendeur d'évincer lui-même l'acheteur, ôterait à ce dernier toute sécurité. 414. La jurisprudence enserre donc très étroitement les aménagements conventionnels auxquels peut prêter la garantie du fait personnel. Spécialement, elle a posé que, dans le cas où les parties ont stipulé que le vendeur ne pourrait se rétablir dans une activité déterminée pendant un certain délai, l'expiration de ce délai « n'a pas pour effet de le libérer de l'obligation légale de garantie de son fait personnel, qui est d'ordre public » (Cass. com. 14 avr. 1992, préc. supra, n o 404 ; adde : Cass. com. 16 janv. 2001, Bull. civ. IV, n o 16, D. 2002. 712, note F. Archer , D. 2001, somm. 1312, obs. Y. Serra ). 415. La seule dérogation admise par elle à la prohibition de l'article 1628 concerne le cas où « l'acheteur qui a été pleinement renseigné sur une circonstance particulière, antérieure à la vente, susceptible de provoquer éventuellement son éviction, a accepté d'en supporter le risque, sans pouvoir former de recours contre le vendeur » (Cass. 1 re civ. 17 juill. 1962, D. 1962. 534, Gaz. Pal. 1962. 2. 260, à propos d'une vente de camion ; rappr., à propos de l'adjudication d'un fonds de commerce, Cass. com. 2 déc. 1965, Bull. civ. III, n o 623, Gaz. Pal. 1966. 1. 185) : c'est qu'alors l'acheteur a décidé d'acquérir à ses risques et périls en pleine connaissance de cause, et que, de la sorte, il a renoncé délibérément à la protection légale ; la vente a acquis, de ce fait, un caractère aléatoire qui « chasse la garantie » (A. BÉNABENT, op. cit., n o 215). 416. Il n'est aucun inconvénient, en revanche, à admettre la validité de la clause par laquelle le vendeur s'engagerait à augmenter cette garantie ; aussi, l'article 1627 du code civil dispose que les parties peuvent, par des conventions particulières, ajouter à l' « obligation de droit » consistant à garantir l'acquéreur contre l'éviction. § 3 - Sanctions de la garantie du fait personnel 417. Pour répondre au trouble de droit qui lui est causé directement par le vendeur, l'acheteur dispose d'un moyen procédural simple et d'une efficacité absolue : à la demande en justice formée par le vendeur, et visant à faire reconnaître le droit de celui-ci sur la chose, il opposera l'exception de garantie, qui peut être invoquée perpétuellement car elle est imprescriptible (Cass. 3 e civ. 20 oct. 1981, Bull. civ. III, n o 168, D. 1982, IR 531, obs. B. Audit). 418. Contre les troubles de droit indirects, l'acheteur peut mettre en oeuvre les sanctions prévues au cas d'éviction du fait des tiers, dans la mesure où les droits accordés par le vendeur sur la chose ont conduit leurs titulaires à contester les droits de l'acheteur (V. infra, n os 467, 489 et s.). 419. Contre les troubles de fait, l'acheteur peut utiliser les sanctions prévues par la loi au cas d'inexécution d'une obligation de ne pas faire (C. civ., art. 1143 et 1145) ; il peut aussi demander en justice la résolution du contrat en vertu de l'article 1184 du code civil. Au cas où la vente portait sur un immeuble, sa demande doit être publiée à la conservation des hypothèques, à peine d'irrecevabilité (Décr. n o 55-22 du 4 janv. 1955, art. 30, 5 : V. C. civ. Dalloz). Art. 2 - Garantie du fait des tiers 420. Puisque le vendeur s'engage à garantir « la possession paisible de la chose » (C. civ., art. 1625), il est tenu de répondre des troubles émanant des tiers, et qui sont de nature à remettre en cause la maîtrise de l'acheteur sur le bien vendu. Mais la garantie du fait des tiers a un domaine plus étroit que la garantie du fait personnel en ce que, à la différence de celle-ci, elle porte uniquement sur les troubles de droit : le vendeur étant, par hypothèse, totalement étranger au trouble de fait causé par un tiers, n'a pas le pouvoir de l'empêcher ; c'est à l'acheteur d'utiliser tous les moyens dont il est doté en tant que propriétaire, pour assurer la défense de son droit et de son bien contre les dégradations ou détournements qui sont l'oeuvre des tiers. 421. En présence d'un trouble de droit causé par un tiers - c'est-à-dire en présence d'une contestation portant sur l'existence, la nature ou l'étendue du droit de l'acheteur sur la chose -, il est logique de mettre à la charge du vendeur une obligation de garantie contre l'éviction, ou contre le risque d'éviction que la prétention du tiers fait peser sur l'acheteur. Le vendeur est, en effet, réputé connaître la situation juridique de la chose vendue ; et, à défaut de clause contraire dans l'acte de vente, il est censé avoir cédé la chose libre de tous droits. Si, dès lors, un tiers prétend tenir un droit sur celle-ci, c'est au vendeur qu'il appartient de combattre cette prétention et de rendre compte à l'acheteur. 422. L'obligation, contractée par le vendeur, de garantir l'acheteur contre les troubles de droit provenant des tiers et de nature à emporter l'éviction de celui-ci, présente les mêmes caractères que l'obligation de garantie du fait personnel (V. supra, n os 410 et s.). Mais elle obéit à un régime spécifique en ce qui concerne ses conditions et sa mise en oeuvre ; de surcroît, elle laisse place, davantage que la garantie du fait personnel, à des aménagements conventionnels. § 1 - Conditions de la garantie du fait des tiers 423. Pour que le trouble de droit causé à l'acheteur par un tiers mette en jeu la garantie du vendeur, trois conditions doivent être réunies : il faut, d'abord, qu'il y ait éviction, ou risque d'éviction, par le tiers ; il faut, ensuite, que l'acheteur soit de bonne foi ; il faut, enfin, que l'origine du trouble soit imputable au vendeur. A. - Éviction ou risque d'éviction 424. L'éviction, au sens précis du terme, suppose que l'acheteur soit privé de la propriété du bien acquis. Le droit positif retient cependant une conception beaucoup plus souple de cette notion, dans le cadre de la garantie étudiée : celle-ci est appelée à jouer chaque fois qu'une contestation est dirigée par un tiers contre l'acheteur, qui peut avoir pour résultat de priver celui-ci de tout ou partie de la propriété de la chose vendue. En outre, la loi elle-même rapproche de l'éviction les charges non déclarées lors de la vente, qui sont également garanties par le vendeur. Il convient donc d'étudier successivement l'éviction proprement dite, et les charges non déclarées. 1° - Éviction proprement dite 425. L'éviction proprement dite englobe toutes les contestations provenant des tiers, et qui sont de nature à priver l'acquéreur, en tout ou en partie, de la propriété de la chose. Une telle approche de l'éviction concourt à faciliter, dans la vente immobilière, la distinction de l'éviction et du défaut de contenance ; elle doit être complétée, cependant, par des précisions relatives à la nature, ainsi qu'à l'importance du trouble de droit impliqué par l'éviction, et qui intéressent tant les ventes mobilières que les ventes immobilières. a. - Éviction et défaut de contenance 426. La délimitation des sphères respectives de la garantie d'éviction et de la garantie de contenance est source de difficultés lorsque la vente porte sur un immeuble dont la superficie se révèle différente de celle mentionnée à l'acte ; il arrive alors qu'en présence d'une clause de non-garantie de contenance, l'acheteur, afin de mettre en échec cette clause, agisse en garantie d'éviction contre le vendeur (V. O. SALVAT, Une question irritante : la portée des clauses de non-garantie de contenance dans les ventes d'immeubles, JCP, éd. N, 1987. I. 143 ; sur la garantie de contenance, V. supra, n os 233 et s.). Pour apprécier le bien-fondé d'une telle démarche, il importe de définir un critère de distinction entre l'éviction et le défaut de contenance. 427. L'éviction, telle qu'elle a été ci-dessus approchée, se distingue du défaut de contenance en ce que, alors qu'un tel défaut révèle l'absence de conformité matérielle du bien vendu au regard des prévisions contractuelles, l'éviction implique une remise en cause de la qualité de propriétaire du vendeur, et partant de l'acheteur, relativement au bien vendu. Le critère de distinction ainsi énoncé est exprimé suivant des formules diverses : on dit que l'éviction implique un défaut dans le droit de propriété du vendeur, tandis que le défaut de contenance suppose un défaut dans les qualités matérielles de la chose (J. CARBONNIER, obs. RTD civ. 1948. 347), ou encore que le défaut de contenance vise une qualité matérielle tandis que l'éviction vise une qualité juridique (B. AUDIT, obs. sous Cass. 3 e civ. 31 mars 1981 et 12 janv. 1982, D. 1982, IR 530). 428. Du critère de distinction ainsi dégagé, il découle, par exemple, qu'il n'y a pas d'éviction lorsque la parcelle achetée est décrite en nature de terre alors qu'elle est en nature de bois et d'une contenance inférieure à celle que mentionne l'acte (Cass. 3 e civ. 3 juill. 1974, Bull. civ. III, n o 292, D. 1974, somm. 116), mais qu'il y a, au contraire, éviction et non défaut de contenance, lorsque l'acheteur n'a pas acquis la parcelle décrite dans l'acte (Cass. req. 10 mars 1880, DP 1881. 1. 210 ; Cass. 3 e civ. 28 nov. 1972, Bull. civ. III, n o 637). 429. La délimitation des domaines respectifs des deux garanties conduit à poser que, même si une clause de non-garantie de contenance a été stipulée, celle-ci ne dispense pas le vendeur d'un immeuble de garantir l'acheteur contre l'éviction d'une partie de la chose vendue (Cass. 3 e civ. 12 janv. 1982, Bull. civ. III, n o 12, D. 1982, IR 530, obs. B. Audit). b. - Nature du trouble de droit 430. L'éviction suppose un trouble actuel, et non simplement éventuel. La simple connaissance par l'acheteur de l'existence d'un droit au profit d'un tiers susceptible de l'évincer ne suffit pas à lui permettre d'agir en garantie ; l'acheteur peut seulement, en pareil cas, suspendre le paiement du prix en vertu de l'article 1653 du code civil (V. infra, n os 490 et s.). Il a été jugé en ce sens que lorsque l'acheteur d'un immeuble découvre des inscriptions hypothécaires sur celui-ci, il ne peut agir en garantie contre le vendeur qu'après avoir été troublé par les créanciers hypothécaires, autrement dit, après avoir reçu la sommation de payer ou de délaisser (CA Douai, 8 mai 1891, DP 1892. 2. 541 ; CA Paris, 24 déc. 1897, DP 1898. 2. 471). 431. Pour que le trouble de droit soit actuel, il faut donc que le tiers ait manifesté clairement son intention de faire valoir son droit sur la chose, et, du même coup, de contester celui de l'acheteur. La révélation d'une telle intention ne prend pas forcément la forme d'un acte judiciaire ; et il a été jugé qu'au cas où le droit du tiers sur le bien vendu est incontestable, le délaissement volontaire de celui-ci par l'acheteur, afin d'éviter un procès, n'empêche pas ledit acheteur d'invoquer la garantie contre son vendeur (Cass. req. 5 avr. 1881, DP 1883. 1. 63). 432. Cependant, c'est à l'occasion des actions en justice exercées par les tiers que la garantie d'éviction trouve, le plus souvent, à être mise en oeuvre ; car ces actions contribuent à révéler de manière indiscutable le trouble de droit souffert par l'acquéreur. 433. Au premier rang d'entre elles, figure évidemment l'action en revendication, par laquelle le demandeur conteste la propriété de l'acheteur en prétendant que celui-ci a acquis a non domino. Lorsque cette action est exercée avec succès, l'acquéreur pourrait aussi bien invoquer contre le vendeur la nullité de la vente de la chose d'autrui, en vertu de l'article 1599 du code civil (V. Vente [2 o formation]) ; mais, s'il préfère mettre en jeu la garantie d'éviction, qui est souvent plus avantageuse car elle lui permet d'obtenir une indemnisation supérieure à la restitution du prix (V. infra, n os 504 et s., 508 et s.), il en a la possibilité (V., par ex., au cas d'une action en revendication exercée par le propriétaire d'une voiture volée contre l'acheteur du même véhicule, Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, Bull. civ. I, n o 148, D. 1976. 464, note C. Gaury, RTD civ. 1976. 792, obs. G. Cornu ; CA Paris, 16 mai 1990, D. 1991, somm. 21, obs. A. Robert ). 434. Il existe bien d'autres actions qui, parce qu'elles peuvent avoir pour effet de priver l'acheteur de tout ou partie de son droit sur le bien, entrent dans le champ de la garantie contre l'éviction : ainsi, par exemple, lorsque le premier vendeur d'un immeuble exerce, contre le second vendeur, une action en rescision pour lésion, cette action menace immédiatement les droits que l'acquéreur tient de la seconde vente ; aussi, ce dernier peut agir en garantie contre son vendeur, sur le fondement des articles 1626 et suivants du code civil (Cass. req. 29 nov. 1939, DH 1940. 52 ; Cass. 3 e civ. 26 mai 1992, Bull. civ. III, n o 176, Defrénois 1992. 1546, obs. G. Vermelle) ; la solution a vocation à déborder l'hypothèse de l'action en rescision, pour s'appliquer en présence de toutes les actions en nullité, quel qu'en soit le fondement. 435. L'action résolutoire, parce qu'elle est susceptible de menacer tout autant les droits de l'acheteur sur la chose, met en jeu également la garantie d'éviction. Spécialement, il a été jugé que l'exercice d'une action résolutoire, dont l'immeuble vendu ne peut être dégrevé par le paiement ou par la consignation du prix, autorise l'acheteur à mettre en oeuvre immédiatement la garantie d'éviction et à solliciter la résolution de la vente (Cass. req. 28 janv. 1862, DP 1862. 1. 159). 436. Enfin, il convient de raisonner pareillement en présence des actions exercées par les créanciers du vendeur munis d'une hypothèque (V. supra, n o 430), ou d'un gage (Cass. 1 re civ. 20 mars 1990, Bull. civ. I, n o 70, à propos d'un véhicule gagé) sur le bien vendu ; car, par l'exercice du droit de suite dont sont assorties ces sûretés, le créancier peut ruiner ou diminuer sensiblement le droit de l'acheteur sur le bien grevé. 437. L'exigence de l'actualité du trouble est comprise, au demeurant, avec souplesse par la jurisprudence : celle-ci admet l'acheteur à agir en garantie dès lors qu'il a un juste sujet de craindre une éviction (Cass. req. 26 juin 1900, DP 1901. 1. 212) ; selon la formule d'un arrêt de la Cour de cassation, « la découverte d'un droit invoqué en justice par un tiers sur la chose vendue, existant au moment de la vente, non déclaré et ignoré de l'acheteur, constitue un trouble actuel, et obligeant de ce seul fait le vendeur à en garantir l'acquéreur ; ce trouble existe avant même qu'intervienne un jugement le constatant » (Cass. 3 e civ. 4 juill. 1968, Bull. civ. III, n o 323, D. 1969, somm. 22, Gaz. Pal. 1968. 2. 285 ; rappr. Cass. 3 e civ. 13 nov. 2003, Bull. civ. III, n o 200, à propos de la découverte d'une prorogation de bail rural consentie par le vendeur avant la vente). Une telle formule contribue, à vrai dire, à rapprocher l'éviction proprement dite des charges non déclarées (V. infra, n os 441 et s.). c. - Importance du trouble de droit 438. L'article 1626 du code civil précise que le vendeur est obligé à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre « dans la totalité ou partie de l'objet vendu ». La garantie est donc due aussi bien lorsque l'éviction est partielle que lorsqu'elle est totale. Seul, le régime des sanctions de la garantie d'éviction diffère dans l'un et l'autre cas (V. infra, n os 495 et s., 512 et s.). 439. L'éviction est totale lorsque l'acheteur se trouve privé de l'intégralité de son droit sur la totalité du bien acquis par lui : tel est le cas, spécialement, s'il est contraint de délaisser entièrement le bien à la suite de la revendication du véritable propriétaire ou par l'effet d'une action hypothécaire. 440. L'éviction est partielle si elle ne porte que sur une fraction de la chose vendue, ou que sur une fraction du droit cédé. Par exemple, si le tiers ne prétend qu'à un droit démembré de la propriété (usufruit ou nue-propriété), alors que la vente a porté sur la pleine propriété, il y a éviction partielle. 2° - Charges non déclarées 441. L'article 1626 du code civil étend l'obligation de garantie du vendeur aux « charges prétendues » sur le bien vendu, « et non déclarées lors de la vente ». Cette disposition est complétée par celle de l'article 1638 de ce code, aux termes de laquelle : « Si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait de déclaration, de servitudes non apparentes, et qu'elles soient de telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas été acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité ». 442. À la différence de l'éviction proprement dite, les charges visées par les deux textes précités n'ont pas pour objet ni pour effet de remettre en cause la propriété de l'acheteur ; elles affectent seulement la jouissance de la chose. Pour cette raison, la mise en jeu de la garantie du vendeur n'exige pas, comme au cas précédent, la constatation d'une menace pour le droit de propriété de l'acheteur ; elle peut intervenir dès la découverte de la charge non déclarée, la diminution de la jouissance étant immédiate (J. CARBONNIER, obs. RTD civ. 1959. 337 ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 796). 443. La charge non déclarée ne doit pas être confondue avec le vice caché : de la définition qui en a été donnée, il ressort qu'elle prend sa source dans l'existence d'un droit appartenant à un tiers, tandis que le vice caché consiste en un défaut dans les qualités matérielles de la chose (sur la garantie des vices cachés, V. infra, n os 529 et s.). Lire la mise à jour 443, 448 et 546. Vente immobilière. Servitude non apparente et vice caché. - Une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , D. 2013. 705 ; Dalloz actualité, 12 mars 2013, obs. Le Rudulier). 444. Cela posé, la jurisprudence comprend les charges non déclarées dans un sens large : concernant surtout la vente immobilière, celles-ci englobent, selon elle, des charges réelles grevant le bien vendu, mais aussi certains droits personnels concédés par le vendeur relativement au même bien, dès lors que ces derniers sont de nature à altérer la jouissance de l'acheteur. a. - Charges réelles 445. Chaque fois que le bien vendu est grevé d'une charge qui a pour effet de restreindre la jouissance de l'acheteur, les articles 1626 et 1638 du code civil sont susceptibles de s'appliquer. Ainsi en est-il, par exemple, en présence d'un usufruit grevant le bien vendu (Cass. 1 re civ. 11 juin 1954, JCP 1954. II. 8288, note É. Becqué), du droit d'usage appartenant à une commune dans une forêt (Cass. req. 17 janv. 1842, Jur. gén., V o Vente, n o 1068-1), d'un droit d'emphythéose (CA Colmar, 26 déc. 1821, Jur. gén., V o Vente, n o 1963). 446. Il en est de même à propos de l'hypothèque. La jurisprudence en déduit que le vendeur qui n'a pas déclaré celle-ci laisse supposer à l'acheteur qu'il prendra lui-même des arrangements pour la faire disparaître (Cass. req. 11 mai 1898, DP 1899. 1. 223) ; spécialement, elle oblige le vendeur, dans le silence du contrat, à requérir la radiation des inscriptions hypothécaires (Cass. 3 e civ. 7 nov. 1978, Bull. civ. III, n o 337). 447. Le cas des servitudes suscite davantage de difficultés au regard de l'article 1626. Une remarque liminaire s'impose, relativement à ces dernières : c'est que le vendeur qui affirme faussement, dans l'acte de vente, qu'il n'a constitué sur le bien aucune servitude et qu'il n'en existe pas à sa connaissance, commet une faute contractuelle dont l'acquéreur est en droit de aucune servitude et qu'il n'en existe pas à sa connaissance, commet une faute contractuelle dont l'acquéreur est en droit de lui demander réparation (Cass. 3 e civ. 5 févr. 1974, Bull. civ. III, n o 57, Defrénois 1974. 959, note E. Franck ; 21 mars 2001, Bull. civ. III, n o 38, D. 2001, IR 1220 ). Ce préalable posé, une distinction doit être faite, quant à l'obligation de déclaration des servitudes, selon que celles-ci sont apparentes ou occultes : si elles sont apparentes, leur existence étant révélée par la seule situation des lieux, il n'est pas nécessaire de les mentionner dans l'acte de vente concernant le bien auquel elles se rapportent : la solution a été posée, notamment, à propos des servitudes d'égout et de pompage d'eau (CA Paris, 15 déc. 1967, D. 1968. 402), d'une servitude d'écoulement des eaux révélée par la configuration du terrain vendu (Cass. 3 e civ. 3 nov. 1981, D. 1983, IR 18, obs. A. Robert), de l'existence d'arbres plantés à moins de deux mètres de la ligne séparative (Cass. 3 e civ. 20 déc. 1977, Bull. civ. III, n o 461, D. 1978, IR 382). La servitude apparente n'entre donc pas dans le champ de la garantie des charges prévue par les articles 1626 et 1638 du code civil (V., par ex., J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 800) ; l'article 1638 ne vise, d'ailleurs, que les « servitudes non apparentes ». 448. S'agissant des servitudes occultes, il y a lieu de procéder à une sous-distinction : si, en premier lieu, la servitude occulte a une source conventionnelle, elle doit impérativement être déclarée dans l'acte de vente ; sans quoi l'acheteur pourra agir en garantie contre le vendeur. La règle s'applique même si la servitude a fait l'objet d'une publication antérieure à la vente, la publicité foncière étant faite pour protéger l'acquéreur contre les actes de disposition du vendeur, et non pour protéger le vendeur contre le recours en garantie de l'acquéreur (Cass. req. 30 déc. 1940, DC 1941. 107, note J. Carbonnier, JCP 1941. II. 1622, note É. Becqué). Elle requiert une désignation précise et explicite de la servitude dans l'acte, de manière à assurer une véritable information de l'acheteur. Aussi, la rédaction d'une clause de style ne saurait y satisfaire, et, par là, écarter la garantie du vendeur (Cass. 1 re civ. 8 mai 1963, Bull. civ. I, n o 255 ; Cass. 3 e civ. 5 oct. 1971, D. 1972. 77). Lire la mise à jour 443, 448 et 546. Vente immobilière. Servitude non apparente et vice caché. - Une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , D. 2013. 705 ; Dalloz actualité, 12 mars 2013, obs. Le Rudulier). 449. En vertu de cette règle, il a été jugé que la constitution de servitudes entre divers fonds d'un ensemble immobilier et la création d'une association syndicale pour gérer les équipements communs et services d'intérêt collectif engagent la garantie du vendeur d'un des immeubles vendus par appartements après avoir été placés sous le régime de la copropriété, dès lors que les acquéreurs ont été dans l'ignorance de ces actes au moment de leur acquisition (Cass. 3 e civ. 9 févr. 1982, Bull. civ. III, n o 39). La même solution a été retenue au cas où le vendeur n'avait pas informé l'acquéreur d'une clause du cahier des charges d'un lotissement, portant interdiction d'exercer toute activité commerciale, alors que cette destination avait présidé à l'opération (Cass. 3 e civ. 21 juin 1978, Bull. civ. III, n o 262, RD imm. 1979. 35, obs. J.-L. Bergel ; rappr., pour des servitudes grevant l'immeuble dans lequel est exploité le fonds de commerce vendu, Cass. com. 21 oct. 1974 et Cass. 3 e civ. 3 déc. 1974, JCP 1975. II. 18176, note D. Randoux). 450. Si, en second lieu, la servitude non apparente est une servitude légale ou administrative, c'est-à-dire si elle dérive de la situation de l'immeuble vendu, ou si elle a été imposée par une décision de l'autorité publique, la jurisprudence tend à distinguer depuis 1956, à la suite de la proposition d'un auteur (H. BLIN, note sous Cass. 1 re civ. 21 févr. 1956, JCP 1956. II. 9200), entre les charges normales et les charges exceptionnelles. 451. Font partie de la première catégorie les servitudes qui apparaissent comme « une conséquence normale de la nature et de la situation de l'immeuble » (Cass. 1 re civ. 16 mai 1961, D. 1961. 545, S. 1961. 332), ou qui dérivent du régime ordinaire de la propriété : les unes et les autres, dans la mesure où elles sont réputées connues de l'acquéreur, n'ont pas à être déclarées dans l'acte. Il en a été jugé ainsi, notamment, pour une servitude de passage en cas d'enclave (Cass. 1 re civ. 15 oct. 1963, D. 1963. 715), et pour des servitudes non aedificandi situées en bordure de routes nationales, et que la situation des lieux permettait de connaître sans difficulté (TGI Nancy, 14 mai 1968, Gaz. Pal. 1968. 2, somm. 20 ; mais contra : CA Rouen, 3 mars 1970, D. 1971. 715, note P. Bihr). 452. Entrent dans la seconde catégorie les servitudes qui, parce qu'elles ne découlent pas de la nature et de la situation de l'immeuble, ne peuvent être réputées connues de l'acheteur au moment de la vente (Cass. 3 e civ. 26 avr. 1978, Bull. civ. III, n o 164, D. 1978, IR 490) ; ces servitudes doivent, au contraire des précédentes, être déclarées lors de la vente. Des décisions ont été rendues en ce sens à propos, notamment, de servitudes d'urbanisme interdisant l'exploitation d'une industrie (Cass. 1 re civ. 16 mai 1961, préc.), d'une servitude non aedificandi à proximité d'un terrain militaire, que l'état des lieux ne permettait pas de soupçonner (Cass. 1 re civ. 21 févr. 1956, D. 1956. 285, JCP 1956. II. 9200, note H. Blin), d'une servitude non aedificandi résultant d'un plan d'aménagement et d'alignement (Cass. civ. 13 juill. 1954, JCP, éd. N, 1955. II. 8784, note Espagno), ou encore de l'obligation, figurant dans le permis de construire, de respecter les prescriptions et sujétions particulièrement imposées par le service des affaissements miniers (Cass. 3 e civ. 29 janv. 1992, Bull. civ. III, n o 33, Defrénois 1992. 841, obs. G. Vermelle). 453. Ainsi qu'on l'a souligné en doctrine, la distinction entre les charges normales et les charges exceptionnelles se fait au cas par cas ; et une même servitude peut entrer dans l'une ou l'autre des deux catégories, suivant qu'au regard de la situation de fait, l'acheteur était censé ou non connaître les charges que le vendeur s'est abstenu de déclarer (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 803). b. - Droits personnels 454. Certains droits personnels concédés relativement au bien vendu, dans la mesure où ils sont susceptibles d'affecter la jouissance de l'acheteur, peuvent ressortir aux charges visées par l'article 1626 du code civil. Ils doivent donc être déclarés par le vendeur lors de la vente, sans quoi celui-ci s'expose à une action en garantie de la part de l'acheteur. 455. Tel est le cas, spécialement, du bail ou de la prorogation de bail consenti préalablement à la vente sur l'immeuble vendu (Cass. req. 6 juin 1887, DP 1888. 1. 216 ; Cass. 1 re civ. 16 déc. 1958, Bull. civ. I, n o 566, D. 1959. 34 ; Cass. 3 e civ. 27 nov. 1979, Gaz. Pal. 1980. 1, panor. 161), encore que la solution ne soit pas systématique (Cass. 3 e civ. 18 janv. 1977, Bull. civ. III, n o 27). En vérité, la jurisprudence s'attache à rechercher si le droit ainsi accordé par le vendeur contribue à limiter sensiblement ou non l'étendue du droit de jouissance de l'acquéreur. 456. Peuvent également constituer une charge, au sens de l'article 1626, certains engagements propter rem contractés par le vendeur, tels que, par exemple, celui de verser une redevance d'arrosage, pris dans le cadre d'une convention conclue avec une société propriétaire d'un canal d'irrigation (CA Toulouse, 7 nov. 1899, S. 1901. 2. 102), ou celui de conserver la sépulture d'un précédent propriétaire (CA Poitiers, 7 déc. 1864, S. 1865. 2. 235). B. - Bonne foi de l'acheteur 457. Dire que l'acheteur doit être de bonne foi lors de la vente, pour bénéficier de la protection aménagée par les articles 1626 et suivants du code civil, signifie qu'il doit avoir ignoré, à ce moment, le risque d'éviction auquel il était exposé, ou la charge qui aurait dû être déclarée. Mais le rôle de la bonne foi de l'acheteur, dans l'ouverture du droit à la garantie d'éviction, est discuté : si la bonne foi de l'acquéreur apparaît sans conteste comme une condition de mise en jeu de la garantie des charges non déclarées,tel ne paraît pas être le cas dans le cadre de la garantie d'éviction proprement dite. 1° - Garantie des charges non déclarées 458. Pour que l'existence d'une charge grevant le bien vendu autorise l'acquéreur à agir en garantie contre le vendeur, il faut non seulement que la charge en question fasse partie de celles qui doivent être déclarées (V. supra, n os 441 et s.), mais encore que l'acquéreur n'en ait pas eu connaissance au moment de la vente (Cass. req. 2 mai 1864, S. 1865. 1. 381) : si, lors de la conclusion de celle-ci, l'acquéreur savait que le bien était grevé de la charge non déclarée, et si, malgré cela, il a contracté, il ne mérite pas d'être protégé et serait malvenu à invoquer la garantie du vendeur (Cass. 3 e civ. 1 er juill. 1980, Bull. civ. III, n o 131). Il a été jugé en ce sens que, lorsqu'un acquéreur a eu connaissance d'un bail rural avant la vente, bien que celui-ci n'ait pas été mentionné dans l'acte, la garantie des charges n'est pas due (Cass. soc. 10 juill. 1962, Bull. civ. IV, n o 640). La solution s'autorise, d'ailleurs, d'un argument de texte, l'article 1638 du code civil subordonnant le jeu de cette garantie à ce qu' « il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit ». 459. La preuve de la connaissance de la charge par l'acquéreur incombe au vendeur, puisque la bonne foi est présumée. Une telle preuve peut être rapportée par tous moyens, notamment à l'aide de documents extérieurs à l'acte de vente (Cass. req. 20 mars 1850, DP 1852. 1. 339 ; Cass. 1 re civ. 11 juin 1954, JCP 1954. II. 8288, note É. Becqué). Encore faut-il que ces documents aient été de nature à informer pleinement l'acquéreur non seulement sur l'existence, mais aussi sur l'étendue de la charge. Tel n'est pas le cas des documents qui, tout en faisant état de l'existence d'une servitude d'égout grevant le pavillon objet de la vente, n'indiquent pas que cette servitude interdit aux acheteurs de clôturer leur lot, et qu'elle leur impose la présence dans le jardin d'une bouche d'ouverture destinée à permettre des dégagements périodiques (Cass. 3 e civ. 19 oct. 1982, Gaz. Pal. 1983, 1, panor. 36). 2° - Garantie d'éviction proprement dite 460. Selon certains auteurs, « si l'acquéreur est présumé avoir accepté le bien avec les charges qu'il connaît, il n'est pas possible d'admettre, sauf stipulation contraire, que l'acquéreur ait accepté d'avance un risque d'éviction même s'il le connaissait » (PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 99) ; et les mêmes auteurs d'en déduire que la mauvaise foi de l'acheteur, si elle peut supprimer la garantie des charges, ne peut pas supprimer la garantie d'éviction proprement dite. 461. Cette opinion, qui est partagée par une partie de la doctrine (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 811), ne fait pas l'unanimité : selon d'autres auteurs, il n'est pas de raison de traiter différemment l'acheteur de mauvaise foi au regard des deux garanties évoquées (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par DE JUGLART, n o 962 ; F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 256) ; leur position peut se recommander de l'article 1629 du code civil, qui subordonne le droit à restitution du prix, en cas d'éviction proprement dite, à la condition « que l'acquéreur n'ait [pas] connu lors de la vente le danger de l'éviction ». 462. La Cour de cassation a consacré pourtant la première opinion : elle a posé qu'à défaut de stipulation expresse de non- garantie, la connaissance par l'acquéreur du risque d'éviction ne libère pas le vendeur de l'obligation de garantie, même au cas où il serait établi que l'acheteur aurait eu, lors de la vente, connaissance du risque auquel il était exposé, à moins qu'il n'ait été expressément stipulé que celui-ci achetait à ses risques et périls (Cass. civ. 9 mars 1937, DH 1937. 253 ; adde : Cass. 3 e civ. 24 juin 1998, Bull. civ. III, n o 130, Dalloz Affaires 1998. 1481, obs. J. F.). C. - Imputabilité de l'origine du trouble au vendeur 463. Le vendeur n'est tenu de garantir l'acheteur contre le trouble de droit émanant d'un tiers que si ce trouble lui est imputable ; dans l'hypothèse où l'inexécution de l'obligation de garantie provient d'une cause étrangère, il n'a pas à en répondre. Si le trouble émanant du tiers doit être imputable au vendeur, c'est a priori que son origine doit être antérieure à la vente pour que la garantie puisse jouer. Il découle, en outre, de cette proposition que la garantie ne joue pas si l'origine du trouble tient dans le fait du prince ou dans le fait de l'acheteur. 1° - Origine du trouble antérieure à la vente 464. Il est parfois affirmé que, pour que la garantie du vendeur soit engagée à la suite de l'éviction (largement comprise) du fait d'un tiers, il faut que la cause de l'éviction soit antérieure à la vente. Cela revient à exiger que le tiers tienne son droit sur la chose d'un acte antérieur à la vente. En vérité, une telle affirmation ne suscite l'adhésion que si elle est nuancée. 465. Il y a lieu de l'admettre sans réserve à propos de la garantie des charges non déclarées : les articles 1626 et 1638 du code civil visent expressément les seules charges grevant la chose lors de la vente ; ce qui suppose que ces charges aient été constituées en vertu d'actes administratifs ou de conventions établis antérieurement. 466. En ce qui concerne l'éviction proprement dite, la condition d'antériorité ne s'applique, en vérité, qu'à propos des troubles trouvant leur source dans un fait autre que celui du vendeur. Ainsi, le vendeur n'a pas à garantir l'éviction postérieure à la vente, et qui a lieu par le fait du prince : si, par exemple, l'acheteur est dépossédé du bien à la suite d'un changement de législation ou d'un acte de l'autorité administrative intervenu après la vente, il n'a aucun recours contre le vendeur (Cass. civ. 17 févr. 1863, DP 1863. 1. 93 ; Cass. req. 24 juill. 1866, DP 1866. 1. 429). 467. En revanche, le vendeur est garant des évictions, même postérieures à la vente, dès lors qu'il est à l'origine de celles-ci : il en est ainsi, par exemple, quand, après avoir vendu son immeuble à un premier acheteur, il le vend à un second acheteur qui, publiant son titre avant le premier, évince celui-ci. À vrai dire, dans cette hypothèse, ainsi qu'on l'a relevé en doctrine, « c'est en réalité plus la garantie du fait personnel du vendeur qui est en cause, le droit […] du tiers procédant de ce fait du vendeur » (A. BÉNABENT, op. cit., n o 215 ; rappr. supra, n o 409). Il a été jugé également que le vendeur doit garantir l'acquéreur contre l'éviction, subie par celui-ci, du fait de l'inscription hypothécaire prise par un créancier du vendeur entre la conclusion et la publication de la vente, si le vendeur ne s'est pas préoccupé du sort que l'administration fiscale avait réservé à sa déclaration, ce qui avait contribué aux retards de la publication (Cass. 1 re civ. 9 déc. 1975, Bull. civ. I, n o 364). 468. Sous réserve des cas où l'origine du trouble est due au fait du vendeur, l'antériorité de la cause du trouble par rapport à la vente conditionne donc la mise en jeu de la garantie d'éviction. L'appréciation de cette antériorité peut s'avérer délicate. Un arrêt ancien énonce que celle-ci suppose que le droit dont le tiers se prévaut doit avoir été acquis au jour de vente, et non exister seulement à l'état de germe à ce moment (Cass. req. 13 mars 1912, S. 1914. 1. 78). Mais il ressort d'un autre arrêt que, si le droit du tiers, bien que né après la vente, trouve sa source dans un événement antérieur, la garantie doit jouer (Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, Bull. civ. I, n o 148, D. 1976. 464, note C. Gaury, RTD civ. 1976. 792, obs. G. Cornu). 2° - Fait du prince 469. Le fait du prince consiste généralement dans une expropriation, une réquisition ou une confiscation du bien de l'acheteur. C'est dire que, s'agissant d'un trouble postérieur à la vente, il ne relève pas, en principe, de la garantie d'éviction (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 794). En application de ce principe, la responsabilité du vendeur d'un immeuble n'est normalement pas retenue lorsque le permis de construire, accordé avant la vente et transmis avec le bien, est retiré ultérieurement par l'Administration (Cass. 3 e civ. 29 avr. 1975, Bull. civ. III, n o 144, Gaz. Pal. 1975. 2. 604, note M. Cornuey). 470. Cependant, la solution ci-dessus énoncée est écartée chaque fois que le fait du prince a été provoqué par le vendeur (Cass. civ. 8 janv. 1851, DP 1851. 1. 7), ou lorsqu'elle est la suite d'agissements de celui-ci antérieurs à la vente (Cass. req. 14 avr. 1830, S. 1830. 1. 280 ; Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, Bull. civ. I, n o 148, D. 1976. 464, note C. Gaury, RTD civ. 1976. 792, obs. G. Cornu). C'est que, dans un cas comme dans l'autre, l'origine du trouble est, en vérité, imputable au vendeur ; celui-ci doit donc en rendre compte à l'acheteur. Ainsi, par exemple, le vendeur d'un véhicule automobile volé doit dédommager l'acquéreur du préjudice subi du fait de la procédure pénale engagée et de la saisie des plaques d'immatriculation falsifiées qui étaient apposées sur le véhicule (Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, préc.) ; le vendeur d'un hôtel doit garantir l'acheteur contre l'éviction tenant à la fermeture de cet établissement, et consécutive à une condamnation antérieure pour utilisation des chambres par des prostituées (Cass. com. 12 déc. 1972, Bull. civ. IV, n o 332 ; rappr. Cass. 3 e civ. 30 oct. 1984, Bull. civ. III, n o 183 ; CA Paris, 20 janv. 1993, D. 1993, IR 124 ). 471. De même, le caractère prévisible de l'injonction de démolir des constructions édifiées sans l'autorisation administrative requise interdit de trouver dans une telle injonction les éléments de la force majeure permettant de dégager le vendeur desdites constructions de l'obligation de garantie (Cass. com. 17 juin 1952, D. 1952. 616). 3° - Fait de l'acheteur 472. La garantie n'est pas due par le vendeur lorsque l'éviction, bien que procédant d'une cause antérieure à la vente, trouve son origine dans le seul fait de l'acheteur. Le domaine d'application de cette règle s'étend, d'abord, aux cas où l'éviction de l'acheteur est due à sa propre imprudence ou à sa propre négligence. Par exemple, celui-ci a laissé s'écouler un délai de prescription au profit d'un tiers : même si ce délai a commencé à courir avant la vente, l'acheteur ne peut demander la garantie du vendeur, dès lors qu'il n'a pas fait le nécessaire pour interrompre la prescription (TGI Strasbourg, 13 juin 1969, JCP 1970. IV. 216). Il faut, bien entendu, réserver le cas où la prescription se serait achevée à un moment si proche de la vente que l'acheteur n'aurait pas eu la possibilité de l'interrompre. 473. Par exemple encore, l'acheteur qui s'est obligé à dénoncer au vendeur l'état des hypothèques grevant l'immeuble, et dont le vendeur avait promis la mainlevée dans les quarante jours qui suivraient la dénonciation, a perdu le droit d'exiger cette mainlevée s'il a omis de faire la dénonciation et a notifié son contrat à fin de purge, de telle sorte qu'une surenchère a été formée avant la mise en demeure du vendeur ; aussi, il ne saurait demander la garantie du vendeur pour le supplément de prix qu'il a dû payer en se portant adjudicataire sur surenchère (Cass. req. 30 déc. 1891, DP 1892. 1. 511). 474. Dans l'appréciation de l'imprudence ou de la négligence de l'acheteur, la jurisprudence prend en considération la qualité professionnelle de celui-ci : en ce sens, il a été jugé que ne peut invoquer la garantie d'éviction, le garagiste acheteur d'un véhicule volé qui s'est abstenu « de procéder aux vérifications les plus élémentaires » (CA Paris, 16 mai 1990, D. 1991, somm. 21, obs. A. Robert ) ; la même solution a été retenue à l'égard d'un promoteur immobilier qui, lors de l'acquisition d'un terrain, s'était contenté de la remise d'un titre de propriété réduit à quelques pages, alors que la communication du titre complet l'aurait informé de l'existence de la servitude de vue qu'il avait découverte après la vente (CA Paris, 21 avr. 1988, D. 1988, IR 144). 475. L e fait de l'acheteur lui interdit également d'invoquer la garantie du vendeur s'il a contribué lui-même, par ses agissements, à la réalisation de l'éviction : tel est le cas de l'acheteur d'un objet contrefait, qui est coupable du délit (Cass. req. 11 déc. 1940, Gaz. Pal. 1941. 1. 58 ; rappr. Cass. 1 re civ. 10 mai 1995, Bull. civ. I, n o 203 ; 15 oct. 1996, Bull. civ. I, n o 355), ou du vendeur intermédiaire d'un véhicule qu'il sait volé (Cass. 1 re civ. 21 mars 2000, Defrénois 2000. 1176, obs. A. Bénabent). 476. Enfin, lorsque l'acheteur défend insuffisamment à l'instance dirigée contre lui par le tiers invoquant un droit sur la chose, il n'est pas fondé à se prévaloir, auprès du vendeur, de la garantie contre l'éviction : c'est l'article 1640 du code civil qui l'énonce (V. infra, n o 485). § 2 - Mise en oeuvre de la garantie du fait des tiers 477. La mise en oeuvre de la garantie d'éviction du fait des tiers s'opère, de manière spécifique, lors de la procédure à laquelle l'acheteur est attrait par le tiers. Une fois consommée l'éviction de l'acheteur, le vendeur qui a manqué à l'obligation de garantie est exposé à des sanctions. A. - Procédure 478. Le tiers qui souhaite évincer l'acheteur va devoir, à cet effet, l'assigner en justice. Deux solutions s'offrent alors à l'acheteur : il peut, en premier lieu, appeler son vendeur à la cause ; on parle alors de garantie incidente. Il peut, en second lieu, préférer défendre lui-même à l'instance ; si, à l'issue de celle-ci, il est évincé, il agira à titre principal contre le vendeur ; on parle alors de garantie principale. 1° - Garantie incidente 479. L'acheteur met en oeuvre, par voie incidente, la garantie en opposant une exception dilatoire au demandeur ; celui-ci, par l'effet de l'exception ainsi soulevée, voit son action suspendue jusqu'à l'intervention du vendeur, lequel prend la place de l'acheteur dans l'instance. Si, au terme de cette instance, le tiers obtient gain de cause, le jugement condamne le vendeur à indemniser l'acheteur qui, du même coup, fait l'économie du procès contre le vendeur (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 er partie, par M. DE JUGLART, n o 964). Il y a là un avantage de nature à inciter l'acheteur à mettre en oeuvre la garantie d'éviction (largement comprise) par voie incidente plutôt que par voie principale ; d'autant que l'action en garantie par voie principale n'est pas sans risque pour l'acquéreur (V. infra, n os 483 et s.). 2° - Garantie principale 480. L'action en garantie exercée par voie principale suppose, réserve faite du cas où l'atteinte au droit de l'acheteur résulte d'une charge non déclarée (V. supra, n o 442), que celui-ci, après avoir été attrait par le tiers en justice, ait défendu seul à la procédure et ait succombé ; de sorte qu'il a été évincé du bien acquis. 481. L'action qui lui est alors ouverte contre le vendeur ne présente, de façon générale, pas d'originalité particulière : ainsi, elle est soumise à la prescription trentenaire,conformément à l'article 2262 du code civil, le délai courant à compter du jour de l'éviction. 482. De même, elle ne doit pas avoir été l'objet d'une renonciation de la part de l'acheteur : on sait qu'une telle renonciation est une cause d'irrecevabilité des demandes en justice, dès lors qu'elle est dépourvue d'ambiguïté. Il a été jugé, à cet égard, que la renonciation à l'action en garantie ne saurait s'inférer du seul fait que l'acquéreur a accepté la cession du prix de vente, consentie par le vendeur au profit d'un tiers (Cass. req. 20 avr. 1874, DP 1874. 1. 343). 483. Si, pour l'essentiel, le régime procédural de l'action en garantie d'éviction exercée par l'acheteur contre le vendeur est celui du droit commun, il importe, cependant, de souligner la fin de non-recevoir spécifiquement prévue par l'article 1640 du code civil, et qui concerne le cas où l'acheteur a insuffisamment défendu à l'instance l'opposant au tiers qui l'a évincé. L'article 1640 dispose en effet : « La garantie pour cause d'éviction cesse lorsque l'acquéreur s'est laissé condamner par un jugement en dernier ressort, ou dont l'appel n'est plus recevable, sans appeler son vendeur, si celui-ci prouve qu'il existait des moyens suffisants pour faire rejeter la demande ». L'application de ce texte requiert plusieurs conditions. 484. Il faut, en premier lieu, que la décision ayant condamné l'acquéreur soit définitive. La garantie du vendeur n'est donc pas exclue en présence d'un jugement avant dire droit ou d'une décision interlocutoire (Cass. 1 re civ. 10 mars 1953, JCP 1953. II. 7842, note A. Weill). 485. Il faut, en deuxième lieu, qu'il existe « des moyens suffisants pour faire rejeter la demande ». La preuve de l'existence de tels moyens, qui incombe évidemment au vendeur, est laissée à l'appréciation souveraine des juges du fond (Cass. civ. 14 avr. 1885, DP 1885. 1. 401), étant observé que les « moyens suffisants » doivent consister dans des moyens propres à faire rejeter la demande au fond, et non dans des exceptions étrangères au fond de la demande. L'exception tirée de la nullité de l'exploit introductif d'instance parce qu'elle relève de la seconde catégorie ne ressortit pas à l'article 1640 du code civil (Cass. req. 14 févr. 1826, Jur. gén., V o Vente, n o 964). 486. Il faut, en troisième et dernier lieu, que le vendeur n'ait pas eu lui-même la possibilité de faire valoir les moyens de défense. Par exemple, lorsque l'immeuble vendu a été saisi entre les mains du vendeur parce que la vente n'avait pas encore été publiée, et que celui-ci a été ainsi présent à la procédure, le vendeur doit s'imputer à lui-même de n'avoir pas invoqué les moyens qui auraient pu empêcher l'éviction (Cass. civ. 11 janv. 1893, DP 1895. 1. 179). 487. Si, à l'inverse, le vendeur parvient à établir que, s'il avait été mis en cause, il aurait eu des moyens suffisants pour faire rejeter la demande, et que ces moyens n'ont pas été présentés, il peut écarter l'obligation de garantie : il en a été jugé ainsi dans un cas où l'acheteur troublé dans sa possession, après avoir dénoncé le trouble dont il était l'objet et avoir assigné le vendeur en restitution du prix, avait négligé de suivre la procédure dirigée contre l'auteur du trouble, n'y avait pas appelé le vendeur, et avait été condamné par un jugement définitif (Cass. req. 11 janv. 1899, DP 1899. 1. 538). 488. Il ressort également d'un arrêt plus récent qu'au cas où un tiers a obtenu une décision d'éviction contre l'acquéreur, fondée sur une possession qui, en réalité, était entachée d'équivoque, il existait là un moyen suffisant pour faire écarter la revendication, et qu'en n'invoquant pas ce moyen, l'acheteur s'est privé de la garantie pour cause d'éviction (Cass. 1 re civ. 5 nov. 1991, Bull. civ. I, n o 300, RTD civ. 1992. 576, obs. P.-Y. Gautier ). À la vue de telles solutions, l'acquéreur a tout intérêt à agir en garantie contre le vendeur par voie incidente plutôt que par voie principale. B. - Sanctions 489. Si le vendeur n'exécute pas l'obligation de garantie contre l'éviction du fait des tiers, diverses sanctions spécifiquement prévues par la loi sont applicables : Il est envisageable, tout d'abord, que l'acheteur n'ait pas encore payé le prix ; dans cette éventualité, la loi lui reconnaît, à certaines conditions, la possibilité d'opposer l'exception d'inexécution en retenant le prix. Si l'acheteur a payé le prix, il n'est pas pour autant démuni, étant observé que les sanctions prévues diffèrent suivant que l'éviction est totale ou qu'elle est partielle. 1° - Exception d'inexécution 490. Aux termes de l'article 1653 du code civil : « Si l'acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d'être troublé par une action, soit hypothécaire, soit en revendication, il peut suspendre le payement du prix jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble, si mieux n'aime celui-ci donner caution, ou à moins qu'il n'ait été stipulé que, nonobstant le trouble, l'acheteur payera ». Ce texte appelle des précisions quant à sa portée et quant à son domaine. 491. Quant à sa portée, l'article 1653 n'est pas d'ordre public ; il réserve expressément l'hypothèse où les parties ont « stipulé que, nonobstant le trouble, l'acheteur payera ». En ce cas, ce dernier ne peut pas, à bon droit, se fonder sur le risque d'éviction pour suspendre le paiement. Et, par exemple, l'acquéreur d'un immeuble qui, bien que n'ignorant la situation particulièrement obérée du vendeur, a délibérément pris l'engagement de payer une partie du prix entre les mains des créanciers de celui-ci ne peut invoquer l'article 1653 pour justifier la suspension de ses paiements, dès lors qu'il était informé de la menace d'éviction lors de la signature de la vente (Cass. 1 re civ. 27 janv. 1960, Bull. civ. I, n o 61). 492. Quant à son domaine, il est notable, d'abord, que l'article 1653 ne concerne, parmi les troubles de droit, que les actions en justice qui peuvent avoir pour effet de faire perdre à l'acheteur tout ou partie de la propriété de l'immeuble, non les troubles liés à des charges non déclarées lors de la vente (V. Cass. 3 e civ. 30 janv. 1970, Bull. civ. III, n o 84, à propos des demandes de renouvellement de sous-locations se rapportant au bien vendu). Mais, dès lors que l'action exercée emporte un risque d'éviction de l'acquéreur, le texte est applicable : la référence opérée par lui aux seules actions hypothécaires et en revendication est purement énonciative ; et une action en rescision pour lésion, par exemple, peut relever de l'article 1653 (Cass. req. 29 nov. 1939, DH 1940. 52 ; Cass. 3 e civ. 26 mai 1992, Bull. civ. III, n o 176, Defrénois 1992. 1546, obs. G. Vermelle) ; de même, l'adjudication du bien ayant fait l'objet d'une vente forcée à la suite d'un recours formé contre le jugement qui a refusé la conversion de la saisie en vente volontaire justifie la rétention du prix par l'acheteur (Cass. 3 e civ. 18 janv. 1983, Bull. civ. III, n o 17). 493. En outre, l'article 1653 suppose non seulement que le prix n'ait pas encore été payé, mais aussi que l'éviction ne soit pas consommée : s'il n'est plus au pouvoir du vendeur de faire cesser le trouble, il y a lieu d'appliquer les sanctions retenues au cas d'éviction. 494. Enfin, pour pouvoir bénéficier du texte, l'acquéreur doit mettre le vendeur en mesure d'exercer la faculté que lui reconnaît l'article 1653 de faire cesser le trouble ou de fournir caution (Cass. 3 e civ. 26 mai 1992, préc. supra, n o 492). À cet égard, il a été jugé qu'on ne saurait admettre que la nomination d'un séquestre, pour encaisser les sommes exigibles sur le montant du prix de la vente, donne à l'acquéreur une garantie équivalente à la caution prévue par l'article 1653 (Cass. req. 29 nov. 1939, DH 1940. 52). 2° - Sanctions au cas d'éviction totale 495. L'article 1630 du code civil - auquel, il est vrai, les parties peuvent convenir de déroger (V. infra, n os 521 et s.) - dispose : « Lorsque la garantie a été promise, ou qu'il n'a rien été stipulé à ce sujet, si l'acquéreur est évincé, il a droit de demander contre le vendeur : 1 o la restitution du prix ; 2 o celle des fruits, lorsqu'il est obligé de les rendre au propriétaire qui l'évince ; 3 o les frais faits sur la demande en garantie de l'acheteur, et ceux faits par le demandeur originaire ; 4 o enfin les dommages et intérêts, ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat ». a. - Restitution du prix 496. L'inexécution de l'obligation de garantie du vendeur emporte la résolution de la vente, c'est-à-dire l'anéantissement rétroactif du contrat. En conséquence, le vendeur doit restituer le prix que l'acheteur a versé. Simple dans son énoncé, la solution peut s'avérer délicate à mettre en oeuvre, au plan pratique, dans trois situations particulières : au cas où l'action en garantie est exercée par un sous-acquéreur du bien contre le vendeur originaire ; au cas où le prix consistait dans une rente viagère ; au cas, enfin, où le bien a connu une plus-value ou une moins-value depuis la vente. 497. Lorsque l'acheteur évincé est un sous-acquéreur, tout d'abord, celui-ci a la possibilité de recourir directement contre le premier vendeur, dans la mesure où l'action en garantie est un accessoire juridique du bien vendu, avec lequel elle est transmise (V. supra, n os 264 et 283). La difficulté peut tenir alors à ce que le prix payé par le sous-acquéreur ne correspond pas forcément au prix de la première vente. La question se pose de savoir si, en pareil cas, le vendeur initial doit restituer au sous-acquéreur évincé le prix de la première ou le prix de la seconde vente. Pour la résoudre, on doit poser, d'une part, que le sous-acquéreur ne saurait recevoir plus que ce qu'il a payé, et, d'autre part, que le premier vendeur ne saurait restituer plus que ce qu'il a reçu. Il s'ensuit, en particulier, que si le prix de la seconde vente est supérieur à celui de la première, le sous- acquéreur ne peut prétendre obtenir du vendeur qu'une restitution à hauteur du prix de la première vente (Cass. req. 5 févr. 1845, DP 1845. 1. 455). La restitution du prix payé par lui n'est donc pas intégrale dans ce cas. 498. La méthode ci-dessus exposée doit être également appliquée au cas où, ensuite, le prix de la vente résolue consiste dans une rente viagère : l'acheteur ne peut alors reprendre que les arrérages qu'il a payés, et non la valeur du capital représentatif de la rente ; cela, même si le prix avait été fixé à une somme d'argent, convertie en une rente viagère (Cass. civ. 4 juin 1851, DP 1851. 1. 193). 499. Les articles 1631 et 1633 du code civil s'attachent à résoudre, par des dispositions particulières, les difficultés suscitées, enfin, par la plus ou moins-value intervenue entre la vente et l'éviction. S'il y a plus-value, l'article 1633 accorde à l'acheteur le droit de se la faire payer par le vendeur ; la valeur de la chose s'apprécie alors au jour de l'éviction. Après avoir fait coïncider cette date avec la demande en justice formée par le tiers (Cass. 3 e civ. 17 oct. 1973, D. 1974. 556, note P. Malaurie), la Cour de cassation, empruntant au mécanisme de la dette de valeur, l'a située à la date de la décision constatant l'éviction (Cass. 3 e civ. 16 janv. 1991, Bull. civ. III, n o 26, D. 1992. 109, note F.-X. Testu ). 500. Quant à la moins-value, l'article 1631 oblige le vendeur à en indemniser l'acheteur quand bien même elle serait la conséquence de la négligence de celui-ci. La portée de cette solution est, cependant, tempérée par la disposition de l'article 1632 du code civil, suivant laquelle « si l'acquéreur a tiré profit des dégradations par lui faites, le vendeur a droit de retenir sur le prix une somme égale à ce profit ». Ce dernier texte s'attache de la sorte à éviter un enrichissement injuste de l'acheteur qui, par exemple, aurait abattu des arbres ou vendu des matériaux de démolition faisant partie du fonds dont il a été évincé. b. - Restitution des fruits 501. L'article 1630-2 o du code civil autorise l'acquéreur évincé à demander au vendeur la restitution « des fruits, lorsqu'il est obligé de les rendre au propriétaire qui l'évince ». Il y a lieu de combiner ce texte avec l'article 549 de ce code, suivant lequel le possesseur de bonne foi « fait les fruits siens ». On est alors conduit à poser que l'acquéreur évincé n'est tenu de reverser les fruits au véritable propriétaire qu'à partir du moment où il a su que le vendeur n'était pas le véritable propriétaire. 502. Les fruits ainsi rendus par l'acquéreur évincé au véritable propriétaire peuvent être répétés contre le vendeur, pourvu que l'acquéreur ait été de bonne foi lors de la vente. En effet, au cas où, dès ce moment, l'acquéreur évincé savait que le vendeur n'était pas le véritable propriétaire, la doctrine et la jurisprudence s'accordent pour écarter l'application de l'article 1630-2 o du code civil : c'est qu'alors l'intéressé a acquis, de mauvaise foi, la chose d'autrui ; l'article 1599 de ce code le prive, en conséquence, du droit de demander toute indemnité au vendeur (pour la doctrine, par ex., V. MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par M. DE JUGLART, n o 967 ; PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 116 ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 824 ; pour la jurisprudence, V. Cass. req. 14 déc. 1898, DP 1899. 1. 137). 503. Le droit, pour l'acquéreur de bonne foi au moment de la vente, de répéter auprès du vendeur les fruits qu'il a dû reverser au véritable propriétaire est compris largement par la jurisprudence : celle-ci reconnaît également à l'acquéreur, par analogie, le droit de demander le remboursement de l'indemnité d'occupation versée par lui au véritable propriétaire pour la période d'occupation durant laquelle il a ignoré les droits du tiers sur l'immeuble (Cass. 3 e civ. 10 mai 1972, Bull. civ. III, n o 301, D. 1972, somm. 168 ; 8 oct. 1974, D. 1975. 431, note R. Fabre, JCP 1975. II. 17930, note H. Thuillier ; 10 févr. 1976, Bull. civ. III, n o 54). c. - Frais 504. Les articles 1630-3 o et 1630-4 o vise deux catégories de frais : il y a, d'une part, « les frais faits sur la demande en garantie de l'acheteur, et ceux faits par le demandeur originaire », c'est-à-dire les frais d'instance, et, d'autre part, « les frais et loyaux coûts du contrat ». 505. En ce qui concerne les premiers, ils supposent, par hypothèse, que le tiers ait triomphé dans sa prétention : dans le cas contraire, c'est bien évidemment au tiers qu'il reviendrait de supporter les frais du procès. Si donc l'action du tiers a été accueillie, l'article 1630-3 o met à la charge du vendeur tenu à garantie aussi bien le coût de l'instance en éviction conduite par le tiers que celui de l'instance en garantie menée, à la suite, par l'acheteur évincé contre le vendeur. 506. En ce qui concerne les seconds, ils englobent les dépenses afférentes à la conclusion de la vente, spécialement, les frais de notaire ou de rédacteur d'acte, les commissions des intermédiaires, les droits d'enregistrement et de publicité foncière, les frais de purge des hypothèques. 507. L'ensemble des frais visés par l'article 1630 du code civil ne peuvent donner lieu à remboursement qu'autant que l'acquéreur évincé était de bonne foi lors de la vente ; car, dans le cas contraire, l'article 1599 du code civil prive ledit acquéreur du droit à toute indemnité (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 825 ; rappr. supra, n o 502). d. - Dommages et intérêts 508. L'article 1630-4 o vise enfin les « dommages et intérêts » dus par le vendeur à l'acheteur évincé. Celui-ci ne peut les réclamer, toujours au regard de l'article 1599 du code civil, que s'il était de bonne foi au moment de la vente. 509. Les indemnités couvertes par l'article 1630 englobent tous les chefs de préjudice subis par l'acquéreur du fait de l'éviction : elles ont vocation à réparer, par exemple, « le préjudice matériel […] résultant du paiement des frais notariés, d'enregistrement, ainsi que de factures liées au déménagement et des travaux d'installation, ainsi que le préjudice moral résultant de l'obligation de quitter la maison et de se défendre devant les tribunaux, ainsi que la privation de jouissance » (CA Paris, 2 mars 1987, D. 1987, IR 72) ; elles peuvent aussi dédommager l'acheteur des dépenses liées au paiement des impôts fonciers, acquittés relativement à l'immeuble d'où il est évincé (Cass. 3 e civ. 16 janv. 1991, Bull. civ. III, n o 26). 510. Les articles 1634 et 1635 du code civil s'emploient à régler, de manière particulière, le remboursement des impenses effectuées par l'acheteur de bonne foi, et dont celui-ci n'a pu obtenir le remboursement par le tiers. Ils invitent à distinguer sur ce point, selon que le vendeur était de mauvaise ou de bonne foi : dans le premier cas, et par dérogation à la théorie générale des impenses, l'acheteur a le droit au remboursement de toutes les dépenses effectuées sur le bien, que celles-ci aient été nécessaires, utiles ou même voluptuaires ; dans le second, le vendeur ne doit à l'acheteur évincé que le remboursement des impenses nécessaires et des impenses utiles, et il est en droit, quant à ces dernières, de s'en tenir au seul remboursement de la plus-value qu'elles ont procurée à la chose. 511. Les constructions neuves édifiées par l'acquéreur sur le terrain d'où il est évincé ne relèvent pas de la théorie des impenses, mais de l'article 555 du code civil (Cass. 3 e civ. 10 juill. 1970, Bull. civ. III, n o 484, D. 1971, somm. 24). 3° - Sanctions au cas d'éviction partielle a. - Résolution ou indemnité 512. Au plan des sanctions de la garantie, l'éviction partielle et les charges non déclarées obéissent au même régime : sans doute, des textes distincts leur sont consacrés - les articles 1636 et 1637 du code civil pour l'éviction partielle, l'article 1638 de ce code pour les charges non déclarées -, mais l'application de ces textes aboutit aux mêmes résultats dans l'un et l'autre cas. 513. Il en ressort, d'une part, qu'en présence d'une éviction ou d'une charge dont l'importance est telle qu'elle fait présumer que l'acquéreur n'aurait pas contracté s'il en avait été instruit, celui-ci a le choix entre demander la résolution de la vente ou demander une indemnité : la solution est énoncée par les articles 1636 et 1637 à propos de l'éviction partielle, et par l'article 1638 relativement à la charge non déclarée ; les textes prévoient qu'en pareil cas, l'acquéreur peut faire résoudre - et non résilier comme ils le disent improprement - la vente (pour une application jurisprudentielle au cas de servitude non déclarée, V. CA Versailles, 16 nov. 1989, D. 1991, somm. 24, obs. A. Robert ). 514. Il ressort des articles 1637 et 1638 interprétés a contrario, d'autre part, que, lorsque l'éviction partielle ou la charge non déclarée n'est pas d'une telle importance que, si l'acquéreur l'avait connue, il se serait abstenu de contracter, celui-ci ne peut solliciter qu'une indemnité du vendeur. 515. Le point de savoir si la charge peut être considérée comme déterminante ou non relève de l'appréciation souveraine du juge du fond (Cass. req. 26 mai 1868, DP 1869. 1. 365), lequel décide, par conséquent, s'il y a lieu ou non de prononcer la résolution de la vente. 516. Au cas où la résolution est prononcée, l'acheteur doit restituer la fraction de la chose dont il n'a pas été dépossédé ; et il peut faire valoir les mêmes prétentions contre le vendeur qu'au cas d'éviction totale (V. supra, n os 495 et s.). b. - Calcul des indemnités 517. Si la vente est maintenue, l'article 1637 précise, à propos de la seule éviction partielle, que « la valeur de la partie dont l'acquéreur se trouve évincé lui est remboursée suivant l'estimation à l'époque de l'éviction, et non proportionnellement au prix total de la vente, soit que la chose vendue ait augmenté ou diminué de valeur ». La modalité de calcul de l'indemnité est donc différente du cas d'éviction totale : l'acheteur, au lieu d'avoir droit à la restitution d'une part proportionnelle du prix qu'il a payé, n'a droit qu'à la valeur actuelle de la partie dont il est privé, et il doit supporter les conséquences, positives ou négatives, des changements de valeur du bien depuis la vente (Cass. req. 10 nov. 1868, DP 1869. 1. 123 ; CA Paris, 6 févr. 1964, Gaz. Pal. 1964. 2. 43 ; Cass 3 e civ. 21 mars 2001, Bull. civ. III, n o 37, Defrénois 2001. 1064, obs. R. Libchaber, Contrats, conc., consom. 2001, comm. 121, obs. L. Leveneur, RTD civ. 2001. 614, obs. P.-Y. Gautier ; comp. supra, n os 499 et 500). 518. L'acquéreur est également admis, toujours au cas d'éviction partielle, à demander au vendeur le remboursement des fruits reversés au tiers, des frais d'instance et des dommages et intérêts éventuels (J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 830) ; une décision a même condamné le vendeur au remboursement d'une part proportionnelle des frais et loyaux coûts du contrat (CA Agen, 19 avr. 1867, Jur. gén., V o Vente, n o 307). 519. Il a été jugé enfin, à propos de l'article 1637 du code civil, que, pour que ce texte s'applique, il faut que le paiement du prix de la vente ait été effectué avant l'éviction (Cass. 3 e civ. 4 mai 1988, Bull. civ. III, n o 88) ; à défaut, il appartient aux juges du fond de fixer souverainement l'indemnité revenant à l'acquéreur en réparation de son préjudice (même arrêt). 520. Telle est également la solution retenue au cas de maintien du contrat malgré la présence d'une charge non déclarée, étant observé que la limite prévue par l'article 1150 du code civil et relative au caractère prévisible du dommage réparable doit alors être respectée, sauf dol ou faute lourde du vendeur (Cass. 1 re civ. 21 juin 1967, Bull. civ. I, n o 231, 2 e esp., sol. impl.). § 3 - Aménagements conventionnels de la garantie du fait des tiers 5 2 1 . Si la garantie du fait personnel du vendeur contre l'éviction ne laisse guère de place à des aménagements conventionnels (V. supra, n os 413 et s.), il en va différemment en matière de garantie du fait des tiers : la disposition de l'article 1627 du code civil, qui prévoit : « Les parties peuvent, par des conventions particulières, ajouter à cette obligation de droit ou en diminuer l'effet ; elles peuvent même convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie », reçoit largement application. Cependant, l'accueil réservé par le droit positif aux clauses relatives à la garantie du fait des tiers n'est, à vrai dire, pas le même suivant que de telles clauses sont extensives de la garantie, ou qu'elles sont restrictives, voire exclusives de la garantie. A. - Clauses extensives de la garantie 522. L'article 1627 disposant, de façon très générale, que les parties peuvent « ajouter à [l']obligation de droit » concernant la garantie d'éviction, il est sûr que les clauses par lesquelles la garantie du fait des tiers est augmentée sont valables. Ces clauses peuvent être de deux ordres. 523. Il en est, tout d'abord, dont l'objet est d'affecter l'étendue de la garantie, en l'élargissant à des troubles de fait, ou aux troubles de droit découlant d'un cas fortuit, ou encore aux charges ou servitudes apparentes. 524. Il en est d'autres, ensuite, qui ont trait aux conséquences de la garantie ; elles prévoient alors une meilleure indemnisation de l'acheteur. Il en serait ainsi, par exemple, de la clause par laquelle le vendeur s'engagerait à supporter la moins-value affectant la fraction du bien qui devrait être restituée au cas d'éviction partielle. B. - Clauses restrictives ou exclusives de la garantie 1° - Validité 525. L'article 1627 consacre expressément la validité des clauses qui tendent à « diminuer l'effet » de la garantie contre l'éviction du fait des tiers ; il offre même aux parties la possibilité de convenir, à ce propos, « que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie ». Il découle de ce texte que les contractants sont libres d'insérer dans la vente une clause excluant une éviction particulière, telle que celle liée à l'existence d'une hypothèque (Cass. 3 e civ. 7 nov. 1978, Bull. civ. III, n o 337) ou à l'existence d'une servitude non apparente lors de la vente (CA Paris, 31 oct. 1929, Gaz. Pal. 1930. 1. 154). De même, il leur est loisible d'inclure une clause de non-garantie englobant l'ensemble des risques d'éviction. 526. Cependant, le principe de validité de ces clauses comporte deux exceptions importantes : La première concerne les clauses de style, que la jurisprudence condamne dès lors qu'elles n'expriment pas la volonté véritable des cocontractants (Cass. req. 16 juin 1925, DP 1926. 1. 181 ; Cass. 1 re civ. 21 juin 1967, Bull. civ. I, n o 231, 1 re esp. ; 13 nov. 1967, D. 1968. 257, note R. Saint-Alary ; comp. Cass. 3 e civ. 3 mai 1968, Bull. civ. III, n o 184). La seconde a trait aux clauses insérées dans un contrat qui met en présence, d'un côté, un vendeur professionnel, et, d'un autre côté, un acheteur non professionnel ou consommateur ; il s'agit là, en effet, de clauses abusives, qu'il y a lieu de réputer comme telles non écrites, en vertu de l'article R. 132-1 du code de la consommation. Dans les deux cas ci-dessus visés, l'acheteur conserve donc, en dépit de la clause restrictive ou exclusive de la garantie d'éviction, le droit de mettre en oeuvre cette garantie. 2° - Portée 527. Alors même que les clauses étudiées sont valables, elles sont privées d'efficacité au cas de faute lourde ou de dol du vendeur qui a sciemment dissimulé à l'acheteur le risque d'éviction (Cass. 1 re civ. 21 juin 1967, préc. ; adde, à propos de la dissimulation par le vendeur d'un terrain à bâtir de l'existence d'une canalisation d'eaux pluviales, dont la découverte avait obligé l'acquéreur à modifier le projet pour lequel il avait obtenu le permis de construire : Cass. 3 e civ. 4 juill. 1979, D. 1980, IR 221, obs. C. Larroumet). 528. En toute hypothèse, sauf s'il a été expressément stipulé que l'acheteur, connaissant le risque d'éviction, a acheté à ses risques et périls - et s'est donc engagé dans un contrat aléatoire -, le vendeur est tenu de restituer le prix, malgré la clause de non-garantie du fait des tiers : l'article 1629 du code civil énonce expressément cette solution. Il découle de là que la clause de non-garantie ne soustrait, en principe, le vendeur qu'aux sanctions autres que la restitution du prix (Cass. civ. 9 mars 1937, DH 1937. 253 ; Cass. 3 e civ. 24 juin 1998, Bull. civ. III, n o 130, Dalloz Affaires 1998. 1481, obs. J. F.). Section 3 - Garantie contre les vices cachés Bibliographie. - C. BLOND, La protection de l'acheteur insatisfait de l'immeuble, 1999, PU Aix-Marseille. - J. GHESTIN, Garantie et conformité dans la vente, 1983, LGDJ. - J. HUET, Responsabilité du vendeur et garantie contre les vices cachés, 1987, Litec. - G.-J. NANA, La réparation des dommages causés par les vices de la chose, 1982, LGDJ. Bibliographie. - A. HERVIO-LELONG, Le bref délai de l'article 1648 : chronique d'une mort annoncée, D. 2002, chron. 2069 . - M.-L. IZORCHE, Le vendeur professionnel entre vices cachés et jurisprudence hermétique (à propos d'un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation du 8 juin 1999), D. 2000, chron. 407 . -G. PAISANT, La transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties de la vente des biens de consommation, JCP 2005. I. 146. - D. PLANTAMP, Le particularisme du remplacement dans la vente commerciale, Dalloz Affaires 2000. 243. - C. RADÉ, L'autonomie de l'action en garantie des vices cachés (à propos de Cass. 1 re civ. 14 mai 1996), JCP 1997. I. 4009. - Y.-M. SÉRINET, Erreur et vice caché : variations sur le même thème…, Mélanges Ghestin, 2001, LGDJ, p. 789 et s. - O. TOURNAFOND, Les prétendus concours d'actions et le contrat de vente (erreur sur la substance, défaut de conformité, vice caché), D. 1989, chron. 237 ; La nouvelle « garantie de conformité » des consommateurs. Commentaire de l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 transposant en droit français la directive du 25 mai 1999, D. 2005, chron. 1557 . 529. La garantie contre les vices cachés, si elle se rencontre dans d'autres contrats que la vente tels que le bail (V. Bail) ou le prêt à usage (V. Prêt), concerne au premier chef cette dernière, où elle est prévue et réglementée - quant au régime de droit commun - par les articles 1641 à 1649) du code civil, sous un paragraphe intitulé « De la garantie des défauts de la chose vendue ». Elle découle, comme la garantie contre l'éviction, de l'obligation de délivrance : puisque le vendeur est tenu de délivrer la chose convenue, il doit livrer un bien qui n'est atteint d'aucun défaut susceptible de compromettre l'utilisation que l'acheteur souhaite en faire. 530. Jusqu'à la fin du XIX e siècle, le rôle tenu par la garantie des vices cachés était limité. L'existence d'un vice indécelable lors de la réception suppose que la chose vendue soit relativement complexe, de sorte que l'usage de celle-ci soit difficile à maîtriser (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 265). Aussi, traditionnellement, le domaine de prédilection de la garantie étudiée résidait dans les ventes d'animaux atteints de maladie. Mais, depuis quelques décennies, à la faveur des évolutions technologiques et des développements de la société industrielle et de consommation, la production et la mise en circulation de biens complexes (machines, ordinateurs, véhicules…) se sont considérablement accrues. Ce phénomène s'est accompagné d'une multiplication des difficultés liées à l'utilisation de tels biens, qui ne répondent pas toujours aux attentes des acheteurs. La mise en oeuvre de la garantie des vices cachés est apparue comme un moyen de protéger les acheteurs déçus, notamment les consommateurs. Le domaine d'application des articles 1641 à 1648 du code civil s'en est trouvé très largement étendu. 531. Il n'est cependant pas illimité, et sa délimitation commande d'apporter plusieurs précisions. En premier lieu, il est des ventes où la garantie des vices cachés est en soi exclue : c'est le cas, d'abord, des « ventes faites par autorité de justice » visées par l'article 1649 du code civil. L'expression légale a vocation à englober l'ensemble des ventes faites aux enchères publiques, mais l'article 1649 intéresse uniquement les rapports entre l'acquéreur et son vendeur immédiat, de sorte que l'acquéreur demeure recevable à agir en garantie pour défaut de la chose vendue contre un vendeur antérieur, spécialement contre le fabricant (Cass. 1 re civ. 3 mars 1992, Contrats, conc., consom. 1992, comm. 112, obs. L. Leveneur). 532. La garantie des vices cachés est exclue, ensuite, dans les ventes aléatoires, où l'acheteur achète la chose à ses risques et périls, dès lors que l'aléa est réel ; « l'aléa chasse, en effet, la garantie » (A. BÉNABENT, op. cit., n o 223). Ainsi, ne bénéficie pas de la garantie des vices cachés celui qui achète à ses risques et périls une chose d'occasion (Cass. 1 re civ. 16 déc. 1963, Bull. civ. I, n o 557), ou qui acquiert suivant les mêmes modalités une créance (Cass. com. 16 janv. 1968, Bull. civ. IV, n o 23) ou des droits litigieux (PLANIOL et RIPERT, t. 10, n o 322). 533. Il n'y a pas davantage place pour la garantie des vices cachés, enfin, au cas de cession de mitoyenneté, car pareille cession est régie par les seules dispositions particulières du statut de la mitoyenneté (Cass. 3 e civ. 2 oct. 1980, Bull. civ. III, n o 143). 534. Les règles générales relatives à « la garantie des défauts de la chose vendue », telles qu'elles sont exposées aux articles 1641 et suivants du code civil, sont écartées, en deuxième lieu, par des textes qui, sans soustraire les ventes qu'elles gouvernent à cette garantie, les soumettent à un régime particulier : ainsi, tout d'abord, la vente d'un immeuble à construire, ou d'un immeuble que le vendeur a construit ou a fait construire, relève du régime particulier de la garantie des constructeurs aménagé par les articles 1642-1 et 1646-1 de ce code (V. Vente d'immeuble à construire). De même, la vente des animaux domestiques ressortit à un régime spécifique de garantie pour les défauts ayant trait à certaines maladies contagieuses (V. infra, n os 662 et s.). 5 3 5 . Dans Ies cas qui viennent d'être évoqués, la garantie de droit commun contre les vices cachés se trouve systématiquement évincée au profit des règles d'exception. En regard, le système de garantie mis en place par l'ordonnance du 17 février 2005 (préc. supra, n o 204), qui a transposé en droit interne la directive du 25 mai 1999 « sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation » (préc. supra, n o 204), présente une originalité qu'il y a lieu de souligner : cette ordonnance, applicable aux seules ventes de biens mobiliers conclues entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur, a créé une nouvelle « garantie de conformité » qui, à l'instar de celle aménagée par l'article 36, 1, de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises, englobe la garantie des vices cachés, et qui est offerte à l'acheteur en option avec les régimes de droit commun de l'obligation de délivrance conforme et de la garantie des vices cachés. Il en résulte qu'en l'espèce, le régime de droit commun de la garantie des vices cachés n'est pas exclu au profit du nouveau dispositif, mais se trouve mis en concurrence avec lui. En présence d'un défaut de la chose, l'acheteur consommateur peut aujourd'hui, selon son intérêt, mettre en oeuvre contre le vendeur professionnel la nouvelle « garantie de conformité » ou la garantie des vices cachés consacrée par les articles 1641 à 1648 du code civil (sur la garantie de conformité issue de l'ordonnance du 17 févr. 2005, V. supra, n os 374 et s.). 536. La garantie légale des vices cachés, telle qu'elle est organisée par les articles 1641 à 1648 du code civil, peut être écartée, en troisième et dernier lieu, à certaines conditions rigoureusement encadrées, par la volonté des parties, ce que prévoit expressément l'article 1643. 537. À la lumière des précédents développements, l'étude de la garantie des vices cachés commande de présenter successivement : la garantie légale de droit commun,puis la garantie conventionnelle, enfin, la garantie dans les ventes d'animaux domestiques. Art. 1 - Garantie légale 538. On examinera, d'une part, les conditions et, d'autre part, la mise en oeuvre de la garantie légale contre les vices cachés. § 1 - Conditions de la garantie légale 539. Selon l'article 1641 du code civil : « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, on n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ». 540. Il ressort de ce texte que, pour que le vendeur se trouve tenu à garantie, il faut que quatre conditions soient réunies : en premier lieu, la chose doit avoir un défaut ; en deuxième lieu, ce défaut doit la rendre impropre à l'usage auquel elle était destinée, et donc revêtir une certaine gravité ; en troisième lieu, il doit être caché ; en quatrième et dernier lieu, il doit être antérieur ou concomitant à la vente. A. - Défaut de la chose 541. L'acheteur ne saurait prétendre engager la garantie du vendeur au seul motif que le bien dont il a fait l'acquisition ne lui procure pas les utilités qu'il en attendait ; car son insatisfaction peut tenir à d'autres facteurs qu'à un vice inhérent à la chose, et alors les articles 1641 et suivants du code civil n'ont pas lieu d'être appliqués. 542. Tel est le cas, tout d'abord, lorsque le trouble souffert par l'acheteur tient à l'usure normale ou à l'utilisation prolongée de la chose (Cass. 1 re civ. 4 déc. 1973, Bull. civ. I, n o 337, à propos d'une bouteille de gaz qui avait explosé dix-huit ans après la vente ; comp. CA Lyon, 26 févr. 1962, Gaz. Pal. 1962. 1. 401). 543. La garantie est pareillement écartée, ensuite, si le trouble provient d'une mauvaise utilisation de la chose, sans que celle-ci présente un défaut : il a été jugé, par exemple, que les troubles apparus à la suite de l'association de deux médicaments incompatibles, dans la mesure où ils ne procédaient pas d'un défaut de l'un ou l'autre des médicaments, n'autorisaient pas la victime à agir sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil contre le laboratoire qui avait fabriqué ces derniers (Cass. 1 re civ. 8 avr. 1986, Bull. civ. I, n o 82, JCP 1987. II. 20721, note G. Viala et A. Viandier, RTD civ. 1986. 779, obs. J. Huet ; comp. cependant, retenant le vice caché en présence de l'incompatibilité d'un matériau avec un autre, contrairement à l'affirmation du fabricant, Cass. 3 e civ. 31 janv. 1990, Bull. civ. III, n o 39, Defrénois 1990. 1357, obs. G. Vermelle). 544. La même solution a été posée à propos de désordres liés à la mauvaise utilisation du matériau litigieux et à un phénomène de corrosion, non à un défaut du matériau lui-même (Cass. 1 re civ. 15 nov. 1988, Bull. civ. I, n o 322 ; comp. Cass. 3 e civ. 31 janv. 1990, préc.). Elle s'applique encore au cas de montage maladroit effectué par l'acquéreur (à propos d'une machine à laver, V. CA Rouen, 17 avr. 1969, Gaz. Pal. 1969. 2, somm. 31) ou de non-respect du mode d'emploi de la chose (Cass. 2 e civ. 15 juin 1972, Gaz. Pal. 1973. 1. 20, à propos d'un produit pharmaceutique). 545. La jurisprudence rappelle régulièrement qu'il appartient à l'acheteur de prouver que son insatisfaction est immédiatement liée à un défaut de la chose (Cass. 1 re civ. 15 janv. 1976, Bull. civ. I, n o 22 ; Cass. com. 24 mars 1980, Bull. civ. IV, n o 144). Cette preuve peut être rapportée par tous moyens. L'acheteur recourt fréquemment, pour la faire, à l'expertise. Mais, ainsi que le relèvent certains auteurs (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 268), lorsque la causalité entre le trouble et le défaut de la chose apparaît évidente, la jurisprudence facilite la tâche de l'acquéreur : elle tend à se contenter d'une simple présomption de fait, et exige alors du vendeur désireux de se libérer de la garantie, qu'il rapporte la preuve que le trouble souffert par l'acheteur est dû à une cause étrangère ou à une mauvaise utilisation de la chose (V. spéc., à propos de l'incendie spontané d'une automobile neuve : Cass. 1 re civ. 21 juill. 1987, Bull. civ. I, n o 250 ; 5 nov. 1996, Bull. civ. I, n o 386, D. 1997, somm. 348, obs. O. Tournafond ; de l'incendie d'une ensileuse : Cass. 1 re civ. 2 déc. 1992, Bull. civ. I, n o 303 ; de l'explosion d'une bouteille : Cass. 1 re civ. 18 janv. 1978, Bull. civ. I, n o 27 ; de l'incendie d'une machine, dès lors qu'elle était peu ancienne, bien entretenue et récemment révisée, et qu'une imprudence ou un sabotage n'étaient pas allégués : Cass. 1 re civ. 16 oct. 2001, Bull. civ. I, n o 303). De cette manière, un déplacement du risque de la preuve est opéré de l'acheteur vers le vendeur. 546. Une fois leur existence établie, nombreux sont les défauts de la chose vendue qui sont susceptibles de ressortir à la garantie des vices cachés. Il en est ainsi, dans les ventes immobilières, des fondations défectueuses (Cass. 1 re civ. 31 janv. 1966, D. 1966, somm. 102), de l'insuffisante solidité de poutres maîtresses d'un appartement (Cass. 3 e civ. 23 juin 1971, Bull. civ. III, n o 403, D. 1971, somm. 136), de la présence de termites (Cass. 1 re civ. 31 mars 1954, D. 1954. 417), de l'absence de vide sanitaire sous le plancher, d'où est résultée une humidité qui rend l'immeuble impropre à l'habitation (Cass. 3 e civ. 7 févr. 1973, D. 1973, IR 80), de la construction d'un hôtel de cinq étages, d'où il résulte des vues plongeantes sur des pavillons dont la vente avait été précédée d'une publicité attirant spécialement l'intérêt des acquéreurs sur la sauvegarde de leur intimité (Cass. 3 e civ. 23 janv. 1979, JCP 1979. II. 19241, note B. Stemmer), de l'humidité excessive d'un terrain à bâtir, empêchant l'édification d'une construction sans travaux de confortation inhabituels (Cass. 3 e civ. 17 janv. 1990, Bull. civ. III, n o 26, D. 1991, somm. 168, obs. O. Tournafond ; rappr., à propos de l'inconstructibilité d'un terrain : Cass. 3 e civ. 1 er oct. 1997, Defrénois 1998. 944, note Y. Dagorne-Labbe ; 24 févr. 1999, D. 2000. 288, obs. O. Tournafond ; à propos de l'absence d'étanchéité d'une toiture terrasse, Cass. 3 e civ. 6 oct. 2004, Bull. civ. III, n o 167, 1 re esp., D. 2004, IR 2766 ), ou encore de l'absence d'eau courante dans une maison d'habitation équipée de canalisations et de robinetterie (CA Versailles, 13 janv. 2000, D. 2000, IR 94 ). Lire la mise à jour 443, 448 et 546. Vente immobilière. Servitude non apparente et vice caché. - Une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , D. 2013. 705 ; Dalloz actualité, 12 mars 2013, obs. Le Rudulier). 546. Vente immobilière : déclaration de servitude non apparente. - L'absence de référence lors de la vente d'un bien immobilier à l'existence d'une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , Dalloz actualité, obs. Le Rudulier). 547. Dans les ventes mobilières, il a été jugé que constituent un défaut inhérent à la chose : l'état de putréfaction de légumes (Cass. req. 15 févr. 1897, DP 1897. 1. 247) ; les bactéries renfermées par un fromage, et qui rendent celui-ci impropre à la consommation (Cass. com. 1 er juill. 1969, Bull. civ. IV, n o 255) ; l'inaptitude d'un bateau à prendre la mer (Cass. com. 11 mai 1965, Bull. civ. III, n o 306) ; les pièces métalliques contenues dans des grumes de bois (Cass. com. 18 juin 1974, Bull. civ. IV, n o 200) ; l'importante corrosion du soubassement d'un véhicule, rendant celui-ci dangereux (CA Versailles, 3 févr. 1989, D. 1989, IR 92) ; les pannes répétées affectant un photocopieur (CA Versailles, 16 déc. 1987, D. 1988, IR 44) ; la défectuosité d'appareils téléphoniques à prépaiement permettant aux utilisateurs, par simple fraude au crochet, de téléphoner gratuitement (Cass. com. 14 nov. 1989, D. 1990, somm. 321, obs. J. Huet ) ; la défectuosité de structure empêchant la végétation de boutures de chrysanthèmes (Cass. com. 15 nov. 1971, D. 1972. 211) ; la nuisance sonore dans le rapport de démultiplication le plus élevé d'un véhicule « haut de gamme et d'une marque de prestige » (Cass. 1 re civ. 7 mars 2000, D. 2000, IR 102 ) ; le défaut de conception d'un moteur (Cass. 1 re civ. 23 mai 1995, Bull. civ. I, n o 217, D. 1996, somm. 15, obs. O. Tournafond ). 548. Le défaut peut aussi bien porter sur la chose elle-même que sur un élément d'équipement. Ainsi, a été cassé pour violation de l'article 1641 un arrêt qui, pour rejeter la demande en garantie des vices cachés suite au constat de bruits assourdissants provenant des chaudières à usage collectif de la copropriété, avait retenu que le vice caché ne saurait résulter d'un trouble ayant son origine dans un élément d'équipement de l'immeuble, extérieur à l'appartement, ajoutant ainsi à la loi une restriction qu'elle ne comporte pas (Cass. 3 e civ. 6 oct. 2004, D. 2004, IR 2694 ). Le défaut peut, plus généralement, porter aussi sur un élément accessoire de la chose vendue (V., à propos du virus infectant la disquette informatique, insérée dans un journal sans pouvoir en être dissociée avant l'achat de celui-ci, Cass. com. 25 nov. 1997, Bull. civ. IV, n o 308, D. 1999, somm. 16, obs. O. Tournafond , Dalloz Affaires 1998. 65, obs. J.F.). B. - Gravité du défaut 549. Les vices évoqués par l'article 1641 du code civil doivent s'entendre des défauts qui rendent la chose « impropre à l'usage auquel on la destine » ou, du moins, « qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ». De ce texte, la jurisprudence déduit que seul un défaut de nature à affecter gravement l'usage de la chose peut justifier la mise en jeu de la garantie. 550. Il faut donc, tout d'abord, que le défaut affecte l'usage de la chose, sans quoi, quelle que soit son importance, il ne relève pas de la garantie des vices cachés. Ainsi, par exemple, en matière de cession de droits sociaux, la jurisprudence décide qu'à défaut de clause de garantie du passif ou de la clause de révision du prix, la révélation du passif fiscal de la société ignoré lors de la conclusion du contrat ne constitue pas un vice caché des droits sociaux cédés, dès lors que ce passif n'affecte pas l'usage des parts sociales elles-mêmes, mais seulement leur valeur (Cass. com. 23 janv. 1990, Bull. civ. IV, n o 23, D. 1991. 333, note G. Virassamy , D. 1991, somm. 167, obs. O. Tournafond ; 4 juin 1996, Bull. civ. IV, n o 154). De même encore, il a été jugé que la non-conformité des locaux d'un hôtel aux normes de sécurité ne constitue pas un vice affectant les actions cédées, dès lors que la société ayant pour objet l'exploitation de l'hôtel a pu, en engageant des dépenses supplémentaires, continuer à exercer l'activité économique constituant son objet social (Cass. com. 12 déc. 1995, D. 1996. 277, note J. Paillusseau , JCP, éd. N, 1996. II. 1513, note Y. Guyon ; adde : Cass. 3 e civ. 12 janv. 2000, Bull. civ. III, n o 7, D. 2000, IR 46 , RD imm. 2000. 188, obs. J.-C. Groslière ). 551. Il faut, ensuite, que le trouble apporté à l'usage de la chose soit grave. Si le trouble est insignifiant, ou s'il est aisé d'y mettre fin, l'acheteur n'est pas admis à invoquer l'article 1641 du code civil. Il a été jugé en ce sens, par exemple, que les vibrations du plancher d'un véhicule acheté d'occasion, auxquelles il a pu être facilement remédié, ainsi que les turbulences d'air se produisant lors de l'ouverture de l'une des vitres arrière, en ce qu'elles ont affecté uniquement l'agrément et le confort de la voiture, ne rendaient pas celle-ci impropre à l'usage auquel elle était destinée (CA Nîmes, 18 déc. 1980, D. 1983. 29, note C. Larroumet). La même solution a été rendue à propos du trouble d'exploitation ayant diminué temporairement l'usage de l'immeuble vendu (Cass. 3 e civ. 25 janv. 1989, Bull. civ. III, n o 23, D. 1990. 100, note Y. Dagorne-Labbe ) et à propos des difficultés de fonctionnement liées aux mises au point d'un matériel électronique de bureau (CA Paris, 8 juin 1976, pour une machine comptable électronique ; CA Paris, 3 déc. 1976, JCP 1977. II. 18579, note M. Boitard et J.-C. Dubarry, pour un petit ordinateur de bureau). Lire la mise à jour 551 s. Garantie contre les vices cachés. Conditions. Atteinte à l'usage du bien. - MONACHON-DUCHÊNE, Le vice extrinsèque de la chose n'est pas un vice caché, JCP 2007. I. 199. - Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui retient que le défaut de raccordement d'un immeuble au réseau d'assainissement collectif constitue, en raison de sa non-conformité aux règlements d'urbanisme, un vice caché de la chose vendue, sans caractériser une atteinte à l'usage du bien (Civ. 3 e , 28 mars 2007, n o 06-12.461 , Bull. civ. III, n o 50). 552. La gravité du défaut s'apprécie, en principe, au regard de la destination normale de la chose. Par exemple, lorsqu'un véhicule a été vendu comme « véhicule de collection », l'usage restreint auquel il était, par définition, destiné interdit à l'acheteur qui a voulu en modifier, par la suite, la destination de qualifier de vice caché l'inaptitude du véhicule à remplir ce nouvel usage (Cass. 1 re civ. 24 nov. 1993, Bull. civ. I, n o 347). En revanche, lorsqu'un terrain a été vendu comme terrain à bâtir, et que des travaux de confortation inhabituels se révèlent nécessaires pour édifier une construction dessus, il y a là une impropriété de ce terrain à répondre à sa destination (Cass. 3 e civ. 17 janv. 1990, préc. supra, n o 546). 553. Le point de savoir si la chose vendue est impropre à sa destination relève de l'appréciation souveraine des juges du fond (Cass. 3 e civ. 22 janv. 1997, Bull. civ. III, n o 23, JCP, éd. N, 1997. II. 778 ; Cass. 1 re civ. 22 avr. 1997, Bull. civ. I, n o 129, D. 1998. 272, note R. Martin , D. 1999, somm. 15, obs. O. Tournafond , JCP 1997. II. 22944, note G. Bolard). 554. Lorsque l'acheteur a entendu donner à la chose un usage particulier, différent de l'usage normal, il lui appartient d'établir que cet usage avait été convenu, étant précisé que, s'il y parvient, le manquement du vendeur relève du défaut de délivrance conforme plutôt que de la garantie des vices cachés (V. supra, n o 222). C. - Caractère occulte du défaut 555. Pour ouvrir le droit à la garantie, le vice doit présenter un caractère occulte : l'article 1641 met à la charge du vendeur la seule garantie « à raison des défauts cachés de la chose vendue » ; et l'article 1642 ajoute : « Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ». 556. L'exigence du caractère occulte du vice se comprend aisément : en présence des défauts apparents, l'acheteur a la possibilité de refuser la délivrance ; s'il accepte la délivrance, c'est qu'il renonce à se plaindre des défauts ; il ne saurait, dès lors, venir les dénoncer ultérieurement (V. Cass. com. 5 févr. 1974, Bull. civ. IV, n o 50, pour un manteau jauni par le soleil lors de son exposition à l'étalage d'un magasin ; Cass. 1 re civ. 7 janv. 1982, Bull. civ. I, n o 8, pour un navire prenant l'eau). Encore faut-il que le vice puisse être qualifié d'apparent, ce qui n'est pas le cas lorsque seule une expertise a permis d'en constater l'existence, l'étendue et la gravité (Cass. 1 re civ. 7 juin 1995, Bull. civ. I, n o 150, D. 1995, IR 188 ). 557. Le vice caché peut être défini comme « le défaut que l'acheteur ne pouvait pas déceler, compte tenu de la nature de la chose vendue, et dont il n'a pas eu connaissance au moment de la vente » (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 274). Tel est le cas, par exemple, lorsque la fissure d'un mur extérieur est masquée par une vigne vierge, et que la fente d'un sol disparaît sous l'épaisse moquette d'une pièce garnie de meubles (Cass. 3 e civ. 21 juill. 1998, Contrats, conc., consom. 1998, comm. 144, obs. L. Leveneur). 558. C'est à l'acheteur qu'il revient d'établir, par tous moyens, le caractère occulte du vice. L'appréciation de la pertinence des éléments de preuve apportés par lui relève du pouvoir souverain des juges du fond, car c'est une question de fait (Cass. com. 8 oct. 1991, RJDA 1991, n o 1009, p. 852). Il est permis, néanmoins, d'observer que trois paramètres sont de nature à influencer les décisions prétoriennes : la qualité de l'acheteur ; la bonne foi de celui-ci ; et la nature de la chose vendue. 1° - Qualité de l'acheteur 559. La qualité de professionnel ou de profane revêtue par l'acheteur n'est pas indifférente pour savoir si le vice était ou non susceptible d'être décelé par lui. Certes, la distinction entre le professionnel et le profane n'est pas ici aussi nette et aussi systématique que lorsqu'elle est faite, à propos du vendeur, à l'effet de déterminer l'étendue du droit à réparation de l'acheteur victime du vice (V. infra, n os 636 et s.). Il n'empêche que la jurisprudence se montre, semble-t-il, davantage encline à admettre le caractère occulte du vice lorsque celui-ci est invoqué par un acheteur profane que lorsqu'il est invoqué par un acheteur professionnel. Cela tient au fait qu'elle combine, pour savoir si l'acheteur était ou non en mesure de découvrir le défaut invoqué, l'appréciation in abstracto et l'appréciation in concreto. Elle se réfère, en effet, au comportement standard du bon père de famille, tout en prenant en considération les connaissances techniques dont l'acheteur était, au moment de la vente, éventuellement pourvu. De là, il découle forcément une plus grande indulgence à l'égard de l'acheteur profane qu'à l'égard de l'acheteur professionnel. a. - Acheteur profane 560. De l'acheteur profane, la jurisprudence ne paraît exiger, lors de la délivrance, que l'examen et les vérifications auxquels procéderait tout homme de diligence moyenne, c'est-à-dire tout acheteur sérieux. Elle ne lui impose pas de se livrer à des vérifications approfondies, ni, au cas d'achat de bien complexe, de se faire assister par un expert. Spécialement, il a été jugé que le caractère caché du défaut affectant la toiture de l'immeuble vendu ne peut être contesté aux motifs que ce défaut était visible par un homme de l'art et que l'acheteur profane doit normalement s'entourer de l'avis d'hommes de métier afin de connaître l'état réel de vétusté et d'entretien de l'immeuble (Cass. 3 e civ. 3 mai 1989, D. 1990. 117, note O. Tournafond . Rappr., à propos du vice décelable au prix d'un « examen acrobatique », Cass. 3 e civ. 4 févr. 2004, Bull. civ. III, n o 23, JCP, éd. N, 2004. 1296, note Vignon-Barrault, Contrats, conc., consom. 2004, comm. 57, obs. L. Leveneur, et, sur second pourvoi dans la même affaire : Cass. ass. plén. 27 oct. 2006, D. 2006, IR 2812, obs. I. Gallmeister, cassant, pour violation des art. 1641 et 1642 c. civ., l'arrêt qui, pour rejeter la demande de dommages-intérêts des acquéreurs, avait retenu, ajoutant ainsi à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, qu'il appartenait à ces derniers de faire constater par un homme de l'art l'état de la charpente et de la couverture, et qu'en ne faisant pas effectuer de telles constatations les acheteurs avaient été négligents, de sorte que le vendeur ne pouvait être tenu de ces désordres). De la même manière, est atteint d'un vice caché le cheval borgne, bien que son infirmité eût pu être décelée si l'acheteur s'était fait assister, lors de la vente, par un vétérinaire (Cass. 1 re civ. 24 févr. 1964, Bull. civ. I, n o 105). Et est encore un vice caché le défaut d'un véhicule automobile dont l'acheteur n'aurait pu s'apercevoir qu'après des essais sur des terrains variés, avec un moteur froid, et dont la découverte supposait des connaissances techniques supérieures à celles d'un automobiliste moyen (CA Versailles, 25 mars 1988, D. 1988, IR 136)… Lire la mise à jour 560 s. Garantie contre les vices cachés. Caractère occulte du défaut. Acheteur profane. - Il ne peut être exigé d'un acheteur profane qu'il recoure aux services d'un homme de l'art pour se convaincre de l'absence de vice de l'immeuble (Civ. 3 e , 9 nov. 2011, n o 10-21.052, Dalloz actualité, 28 nov. 2011, obs. Forest. – V., déjà, Cass., ass. plén., 27 oct. 2006, D. 2006. AJ 2812, obs. Gallmeister ; RDI 2007. 256, obs. Trébulle ; JCP N 2007. II. 1101, note Leveneur. 561. Ces solutions sont conformes à la disposition de l'article 1642 du code civil, qui exclut de la garantie les seuls « vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même » : si des compétences techniques particulières ou l'assistance d'un spécialiste étaient nécessaires pour découvrir le vice, c'est que l'acheteur ne pouvait s'en convaincre lui-même. 562. Inversement, si le défaut était observable à l'examen superficiel ou au terme de vérifications élémentaires, et si l'acheteur n'a pas accompli les diligences minimales qui lui auraient permis de le découvrir, il n'y a pas de vice caché ; et l'acquéreur ne saurait s'abriter derrière sa qualité de profane pour prétendre bénéficier de l'article 1641 du code civil. Cela a été jugé, notamment, à propos du défaut d'étanchéité du compartiment moteur d'un navire de plaisance, « particulièrement évident » (Cass. 1 re civ. 7 janv. 1982, préc. supra, n o 556), des défauts d'isolation phonique et de la résistance insuffisante du plancher, qu'un acquéreur de diligence moyenne aurait dû découvrir (CA Paris, 3 févr. 1987, D. 1987, IR 52). Pareillement, ne prouve pas le vice caché l'acheteur d'une maison dont l'acte de vente précisait qu'un traitement antiparasitaire avait été effectué, car son attention ne pouvait normalement qu'être attirée sur le risque d'un retour des termites (Cass. 3 e civ. 22 nov. 1995, Bull. civ. III, n o 242). Il en est de même de l'acheteur qui invoque la présence non révélée de termites, dès lors qu'il avait été informé par l'agent immobilier de l'infestation par des capricornes, qui sont également des insectes xylophages, dans la charpente, et qu'il avait reçu le conseil de prendre l'avis d'un spécialiste (Cass. 3 e civ. 26 févr. 2003, Bull. civ. III, n o 53, Defrénois 2003. 914, note Y. Dagorne-Labbe, AJDI 2003. 609, note M. Thioye ). b. - Acheteur professionnel 563. L'acheteur professionnel est celui qui fait l'acquisition de la chose dans et pour l'exercice de sa profession. En soi, sa qualité de professionnel ne le prive pas du droit à la garantie des vices cachés, car elle n'autorise pas à réputer qu'il les connaît. Cependant, la jurisprudence tend à se montrer plus exigeante à son égard que vis-à-vis de l'acheteur profane, sous le bénéfice des remarques qui suivent. Lire la mise à jour 563 s. Acquéreur titulaire d'un droit de préemption. Vice caché (non). - Ayant relevé que l'acquéreur initial avait été informé de la pollution du terrain par un rapport annexé à l'acte sous seing privé de vente et qu'aucune obligation n'imposait aux venderesses d'annexer ce « compromis » à la déclaration d'intention d'aliéner et que la commune disposait de services spécialisés et de l'assistance des services de l'État, une cour d'appel a pu retenir que la commune qui s'était contentée des documents transmis ne pouvait se prévaloir d'une réticence dolosive ni de l'existence d'un vice caché (Civ. 3 e , 7 nov. 2012, n o 11-22.907 ). 564. Tout d'abord, l'acheteur professionnel ne paraît soumis à un régime plus rigoureux que l'acheteur profane qu'autant que sa profession autorise à présumer qu'il avait, lors de la vente, les compétences techniques lui permettant de déceler le vice. Il a été jugé en ce sens, par exemple, à propos de la vente d'un camion d'occasion à un entrepreneur de travaux publics, que les juges du fond devaient « s'expliquer sur le point de savoir si l'acquéreur possédait une qualification professionnelle permettant de supposer de sa part une réelle capacité de contrôle de la chose vendue » (Cass. 1 re civ. 20 déc. 1983, Bull. civ. I, n o 308 ; rappr., à propos de la vente de tuiles à un entrepreneur en bâtiments, Cass. com. 20 juill. 1973, Bull. civ. IV, n o 264). La jurisprudence se montre, logiquement, d'une sévérité renforcée lorsque l'acheteur professionnel est de la même spécialité que le vendeur : par exemple, au cas de vente de camion, si l'acheteur est un chauffeur professionnel (Cass. com. 5 oct. 1965, Bull. civ. III, n o 481) ; au cas de vente de tracteur, s'il est un garagiste (Cass. 1 re civ. 18 déc. 1962, D. 1963. 114) ; au cas de vente de matériel de travaux publics, si l'acheteur est un négociateur de cette spécialité (Cass. com. 16 déc. 1981, Bull. civ. IV, n o 448 ; 8 déc. 1980, Bull. civ. IV, n o 415 ; pour d'autres exemples, V. Cass. com. 24 janv. 1984, Bull. civ. IV, n o 34 ; 5 févr. 1985, Bull. civ. IV, n o 48). 565. Ensuite, la tendance à traiter plus sévèrement l'acquéreur professionnel qualifié, ou de la même spécialité que le vendeur, n'est pas absolue. Sans doute, il existe des décisions pour l'illustrer : ainsi, de l'arrêt reprochant à des juges du fond de ne pas avoir « recherché si la qualité d'esthéticienne professionnelle de l'acheteuse n'était pas de nature à lui permettre de se rendre compte des défauts » (Cass. com. 26 févr. 1979, Bull. civ. IV, n o 82) ; de celui retenant que l'acheteur négociant en matériel de travaux publics « se devait de découvrir lors de ses essais les anomalies de fonctionnement de la machine dont il se rendait acquéreur » (Cass. com. 16 déc. 1981, préc.) ; ou encore de l'arrêt ayant posé que les juges du fond peuvent décider souverainement, au cas d'achat de fruits tachés, qu'il y avait là la « manifestation alarmante », pour l'acheteur professionnel, du vice ayant entraîné la perte de la marchandise et dont « seul le rythme d'évolution n'était pas prévisible » (Cass. com. 15 févr. 1982, Bull. civ. IV, n o 59 ; adde : les arrêts préc. supra, n o 564). 566. Mais il existe aussi des décisions plus favorables à l'acheteur professionnel : ainsi, de celle ayant censuré un arrêt de cour d'appel pour avoir jugé que la gélivité des tuiles ne constituait pas un vice caché pour l'acheteur « qui, entrepreneur de bâtiments et travaux publics de son état, fait profession de les acheter afin de les mettre en oeuvre… », sans avoir recherché « si, au moment de la livraison, l'entrepreneur pouvait déceler le vice du matériau litigieux » (Cass. 3 e civ. 7 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 109, JCP 1975. II. 17918, note J. Ghestin ; adde, pour une motivation identique : Cass. com. 25 mai 1982, Bull. civ. IV, n o 201, D. 1982, IR 422) ; ce qui revient à écarter toute présomption suivant laquelle le vice est décelable par l'acheteur professionnel. De même encore, de l'arrêt censurant un arrêt d'appel « qui, pour décider qu'[un acheteur] doit supporter à concurrence de moitié le préjudice découlant de la livraison de cames en fonte défectueuses, [retient que celui-ci], bien que professionnel de la vente de machines automatiques, n'a pas fait effectuer un contrôle rigoureux des cames livrées, après traitement thermique et trempe, par [le fabricant], tout en sachant que ces pièces constituaient un élément essentiel au bon fonctionnement des machines qu'il livrait à ses utilisateurs français ou étrangers… », alors que la cour d'appel retient en même temps « l'existence d'un vice caché des marchandises vendues » (Cass. com. 24 avr. 1990, Bull. civ. IV, n o 126, D. 1991, somm. 169, obs. O. Tournafond ). Ou de l'arrêt, rendu au visa de l'article 1642, qui, après avoir énoncé qu'« en tant qu'acheteur, le revendeur professionnel n'est pas tenu, en droit, de connaître les vices de la chose au jour de son acquisition et seul le caractère apparent du vice allégué le priverait de l'action rédhibitoire transmissible au sous-acquéreur », censure un arrêt d'appel qui, pour rejeter l'action rédhibitoire engagée par le sous-acquéreur d'un véhicule, énonce que « si celui-ci peut exercer une telle action contre le vendeur originaire, c'est à la condition que le vendeur intermédiaire n'ait pas lui- même connu le vice et, qu'en l'espèce, celui-ci, professionnel de l'automobile, doit être considéré comme ayant eu connaissance du vice allégué » (Cass. 1 re civ. 20 juin 1995, Bull. civ. I, n o 275, D. 1995, IR 188 ). 567. Enfin, au-delà des hésitations suscitées par la lecture de certains arrêts, il est entendu que l'acquéreur, fût-il de la même spécialité que le vendeur, ne saurait être privé de la garantie des vices cachés dans deux cas particuliers : d'une part, lorsque le vice a été dissimulé par le dol du vendeur, et, d'autre part, lorsque le vice est indécelable. 568. Quant au dol, si le vendeur connaît le vice de la chose lors de la vente, il doit en informer l'acheteur, même si ce dernier est un professionnel ; la dissimulation du vice ouvre à l'acheteur le droit à la garantie des vices cachés (Cass. com. 11 avr. 1975, Bull. civ. IV, n o 96 ; 15 avr. 1975, Bull. civ. IV, n o 106) ou à l'action en nullité pour vice de consentement (Cass. 1 re civ. 27 juin 1973, Bull. civ. I, n o 221 ; V. Vente [2 o formation]). Il est notable à ce propos que l'action en garantie des vices cachés n'est pas exclusive de l'action en nullité pour dol (Cass. 1 re civ. 6 nov. 2002, Bull. civ. I, n o 260, D. 2002, IR 3190 ), qui trouvera utilement à être exercée, spécialement, lorsque le délai de deux ans dans lequel l'action en garantie des vices cachés est enfermé aura été dépassé (V. infra, n os 597 et s.). 569. Quant au vice indécelable, la jurisprudence admet que, lorsqu'il n'était pas possible à l'acheteur professionnel de découvrir le défaut de la chose lors de la livraison, la garantie des vices cachés doit jouer. Le caractère indécelable du vice, lors de la vente, peut tenir à divers facteurs : tantôt, au fait que seul un usage prolongé de la chose était de nature à le révéler (Cass. com. 21 févr. 1966, Bull. civ. III, n o 109, à propos d'une{colle qui adhère mal), tantôt, au fait que le défaut ne pouvait être découvert qu'après avoir démonté certaines pièces (Cass. com. 20 avr. 1970, Bull. civ. IV, n o 125) ou après les avoir cassées (Cass. com. 15 nov. 1983, Bull. civ. IV, n o 311, à propos de la défectuosité affectant des purgeurs automatiques), ou tantôt encore, au fait que le vice ne pouvait être décelé qu'au terme d'une expertise spécialisée (Cass. com. 14 mars 1972, JCP 1972. IV. 112, à propos de boîtes métalliques dont les vices ne pouvaient être décelés par l'acheteur à la réception, et dont la découverte n'a pu être faite que par des experts hautement qualifiés ; Cass. com. 3 juin 1981, Bull. civ. IV, n o 263, à propos de maïs avarié dont le taux anormal d'humidité n'a pu être décelé qu'après une « expertise spécialisée »). 570. Dans la mesure où il ressort des décisions plus haut citées, qu'il n'existe pas de présomption de connaissance du vice à la charge de l'acquéreur professionnel de même spécialité que le vendeur (V. supra, n o 566), on ne saurait mettre à la charge du même acquéreur la preuve du caractère indécelable du défaut caché. 2° - Bonne foi de l'acheteur 571. Il ne suffit pas que le vice soit objectivement caché, pour qu'il ouvre droit à la garantie au profit de l'acheteur ; il faut, en outre, que l'acheteur ne l'ait pas découvert, ou que connaissance ne lui en ait pas été donnée lors de la vente ; car autrement, ayant acheté en connaissance de cause, l'acquéreur serait mal fondé à venir se plaindre. 572. L'ignorance du vice de la part de l'acheteur participe à l'exigence de bonne foi. À ce titre, elle est présumée. Mais la preuve contraire peut être rapportée par le vendeur : si celui-ci parvient à démontrer, par tous moyens, que l'acheteur a été informé de l'existence du défaut, la garantie est écartée (Cass. 1 re civ. 13 mai 1981, Bull. civ. I, n o 165 ; Cass. 3 e civ. 16 nov. 1988, Bull. civ. III, n o 164). Une telle preuve pourra découler, par exemple, du fort écart entre le prix d'achat et le prix de revente (Cass. 1 re civ. 13 mai 1981, préc.), des circonstances du contrat (Cass. req. 26 avr. 1906, S. 1906. 1. 180), ou encore des indications figurant sur le mode d'emploi de l'appareil (Cass. 1 re civ. 24 janv. 1968, D. 1968, somm. 122, JCP 1968. II. 15429), à moins que le vice n'ait eu des conséquences imprévisibles (Cass. req. 15 nov. 1927, S. 1928. 1. 52). Lire la mise à jour 572 s. Garantie contre les vices cachés. Connaissance du vice par l'acquéreur. Présence de termites. - Les acheteurs informés de la présence de termites ne peuvent invoquer la garantie des vices cachés (Civ. 3 e , 30 janv. 2008, n o 07-10.133 , Defrénois 2008. Actu. 485). 573. Mais, pour que la garantie soit écartée, il faut que l'information donnée à l'acquéreur lui ait permis de mesurer avec exactitude l'étendue du vice : si, par exemple, un piano a été vendu hors d'usage, mais présenté à l'acheteur comme réparable alors qu'en fait il ne l'était pas, il y a bien défaut caché ouvrant droit à la garantie du vendeur (Cass. 1 re civ. 16 févr. 1983, Bull. civ. I, n o 65). En outre, une clause générale par laquelle l'acheteur prend le bien en l'état ne peut établir la connaissance du défaut caché de la part de l'acheteur (Cass. 3 e civ. 28 juin 2000, Gaz. Pal. 2001. 2. 101, note Teillais). 574. Enfin, il est notable que, si la mauvaise foi de l'acheteur intervient dans l'appréciation du caractère caché ou non du vice, la bonne foi du vendeur est, quant à elle, indifférente ; l'article 1643 du code civil dispose que le vendeur « est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus… ». Il ressort de ce texte que le vendeur ne peut pas invoquer l'ignorance dans laquelle lui-même était, lors de la vente, du défaut affectant la chose, pour échapper à son obligation de garantie. Lire la mise à jour 574. Vice caché : la clause de non-garantie est réservée au vendeur de bonne foi. - Au visa de l'article 1643 du code civil, la Cour de cassation rappelle que le vendeur qui, ayant connaissance d'un vice lors de la conclusion du contrat, stipule qu'il ne le garantira pas, est tenu à garantie nonobstant cette clause (Civ. 3 e , 16 déc. 2009, n o 09-10.540 , Dalloz actualité, 13 janv. 2010, obs. Forest). La solution, bien établie, se déduit d'une interprétation a contrario de cette disposition (Civ. 3 e , 28 mars 2007, Bull. civ. III, n o 49 ; D. 2007. AJ 1139 ; RDI 2007. 330, obs. Trébulle . – Civ. 3 e , 19 nov. 2008, D. 2009. AJ 297, obs. Prigent . – Civ. 3 e , 8 avr. 2009, D. 2009. AJ 1206 ; CCC 2009, n o 186, obs. Leveneur ; RLDC 2009/61, n o 3452, obs. Maugéri) : la clause élusive des vices cachés ne joue que si le vendeur est de bonne foi. En l'espèce, le fait que le vendeur ait transmis l'état mentionnant la présence de parasites à son notaire n'était pas de nature à remettre en cause sa mauvaise foi, dès lors que cette simple transmission prouvait sa connaissance du vice. 3° - Nature de la chose Bibliographie. - HENRY, Contrôle technique et garantie des vices cachés, Contrats, conc., consom., déc. 1992, p. 1. - G. LÉVY, Recherches sur quelques aspects de la garantie des vices cachés dans la vente des véhicules neufs et d'occasion, RTD civ. 1970. 1. - H. ROLAND, Observations sur la vente des véhicules d'occasion, D. 1959, chron. 161. - A. SUDAKA, Où en est la théorie des vices cachés dans la vente des véhicules d'occasion ?, Gaz. Pal. 1966. 1, doctr. 61. 575. Quelle que soit la nature de la chose, le défaut qui affecte celle-ci, pourvu qu'il réponde aux conditions de l'article 1641 du code civil, engage la garantie du vendeur. Celle-ci concerne donc toutes les choses, et spécialement les produits naturels aussi bien que les produits industriels (V., par ex., à propos de graines de salade, Cass. 1 re civ. 11 mars 1980, Bull. civ. I, n o 84). L'appréciation du caractère occulte du vice donne lieu, cependant, à des solutions spécifiques en présence des choses dangereuses et des choses d'occasion. 576. S'agissant des choses dangereuses, la jurisprudence l'a souvent rattachée à la garantie des vices cachés, les défauts de nature à créer un danger pour les personnes et pour les biens, contraignant en la matière le vendeur à une obligation particulière d'information (V., par ex., à propos d'une lotion capillaire, Cass. 2 e civ. 5 mai 1959, Bull. civ. II, n o 350, JCP 1959. II. 11159). La vocation du vendeur professionnel à relever, aujourd'hui, du régime de la responsabilité civile du fait des produits défectueux, invite à poser que ledit vendeur est tenu d'une véritable obligation de sécurité, distincte de la garantie des vices, et obéissant, de ce fait, à un régime qui lui est propre (V. infra, n os 748 et s.). 577. S'agissant des choses d'occasion, la mise en jeu de la garantie des vices cachés est tout aussi concevable qu'en présence des choses neuves (Cass. com. 11 juin 1954, D. 1954. 697, Gaz. Pal. 1954. 2. 285 ; Cass. 1 re civ. 20 déc. 1983, Bull. civ. I, n o 308). La jurisprudence a même posé qu'au cas de ventes successives d'un véhicule d'occasion, la garantie du vendeur initial peut être retenue si les vices cachés, constatés alors que la chose vendue était la propriété du dernier acquéreur, existaient lors de la première vente (Cass. 1 re civ. 5 janv. 1972, JCP 1973. II. 17340, note P. Malinvaud). 578. Mais l'acheteur ne doit pas s'attendre à ce que la qualité de la chose soit identique à celle d'une chose neuve. Aussi, il ne saurait mettre en oeuvre la garantie évoquée pour des défauts qui ne sont dus qu'à l'usure ou à la vétusté. Par exemple, à propos de la vente d'un véhicule d'occasion, il a été jugé que, « en raison du kilométrage parcouru, [l'acheteur] pouvait normalement prévoir qu'il courait le risque d'avoir à effectuer des réparations au cours des mois à venir [et que] cette vétusté ne saurait, en l'état, être considérée comme un vice caché » (CA Versailles, 28 sept. 1990, D. 1991, somm. 168, obs. O. Tournafond ; adde : CA Paris, 25 mai 1990, D. 1991, somm. 168, obs. O. Tournafond ). 579. En outre, la diligence de l'acheteur d'une chose d'occasion doit être, semble-t-il, accrue lors de la délivrance ; car, la modicité du prix, l'ancienneté de la date de fabrication sont autant de facteurs qui sont de nature à susciter l'attention, voire la méfiance de celui qui se propose d'acquérir. Ainsi, le bénéfice de la garantie contre les vices cachés a été refusé à un acheteur qui, bien que profane, « pouvait à la seule vue du véhicule se convaincre de son mauvais état ou de son usure importante qui rendait prévisible pour tout acheteur normalement avisé le défaut de compression du moteur », et cela alors que « les défauts du véhicule le rendaient impropre à tout usage » (Cass. 1 re civ. 10 mars 1993, Bull. civ. I, n o 111). Lire la mise à jour 579. Exigence de diligence accrue de l'acquéreur. Navire d'occasion. Condition non prévue par la loi. - Cassation, pour violation des article 1641 et 1642 du code civil, de l'arrêt d'appel qui ajoute à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas en énonçant, pour débouter l'acquéreur de ses demandes, qu'il appartenait à ce dernier, quel que soit son niveau de qualification, de faire procéder aux essais nécessaires et de prendre toute initiative utile pour s'assurer de l'absence de vice affectant les moteurs, seule une sortie en mer, en présence de techniciens, étant de nature à établir ces vices, ce qui, compte tenu du prix du navire, constituait une précaution élémentaire ; que les vendeurs étaient donc fondés à prétendre que les vices affectant le moteur babord n'étaient pas cachés, mais apparents, dès lors qu'il appartenait à l'acquéreur d'essayer le navire acheté (Civ. 1 re , 26 sept. 2012, n o 11-22.399 , Dalloz actualité, 17 oct. 2012, obs. Kilgus). D. - Antériorité du défaut 580. Bien que les textes ne fassent pas mention de cette condition, il est sûr que le vice, pour donner lieu à la garantie, doit être antérieur, ou au moins concomitant au transfert des risques, c'est-à-dire dans la plupart des cas, au transfert de la propriété : une fois ce transfert intervenu, le vendeur ne saurait être tenu de répondre de la chose, puisqu'il n'en a plus la maîtrise. En conséquence, lorsque le transfert de la propriété a été différé, la jurisprudence se place, pour apprécier si la condition d'antériorité est ou non satisfaite, au moment où il a eu lieu et non au moment où la vente a été conclue (Cass. com. 9 févr. 1965, Bull. civ. III, n o 103). Du fait que, dans les ventes commerciales, ce transfert s'opère généralement lors de la livraison, elle exige que le vice soit alors « antérieur à la livraison » (Cass. com. 10 déc. 1973, D. 1975. 122, note J. Ghestin, JCP 1975. II. 17950, note P. Malinvaud ; 8 juill. 1981, Bull. civ. IV, n o 316). 581. L a charge de la preuve de l'antériorité incombe à l'acheteur. Souvent, la tâche de celui-ci est simplifiée du fait que l'antériorité est établie par la nature même du vice : il en est ainsi lorsque le vice atteint le sol de l'immeuble vendu ou réside dans un défaut de fabrication de la chose. En cas de difficulté, les juges du fond apprécient souverainement si le vice avait ou non une origine antérieure à la vente (Cass. com. 27 nov. 1973, Bull. civ. IV, n o 345 ; Cass. 1 re civ. 12 janv. 1977, Bull. civ. I, n o 28). 582. La jurisprudence se montre alors favorable à l'acheteur à un double point de vue. D'une part, elle admet largement le recours aux présomptions de fait, en déduisant notamment l'antériorité de la seule importance du trouble (V., par ex., pour la présence de termites dans la charpente d'une maison, Cass. 1 re civ. 31 mars 1954, D. 1954. 417 ; rappr., à propos de l'incendie spontané d'une voiture neuve, Cass. 1 re civ. 21 juill. 1987, Bull. civ. I, n o 250). D'autre part, elle pose que l'antériorité ne doit pas s'apprécier au regard de la date d'apparition du trouble, mais au regard du moment où celui-ci a pris naissance. Et elle en déduit qu'il suffit que l'acheteur établisse que le trouble existait en germe lors du transfert des risques, pour que la vente donne lieu à garantie (V., par ex., pour des charançons dans le blé : Cass. req. 8 mars 1892, DP 1892. 1. 204 ; pour le germe des pourritures dans les pommes de terre : Cass. req. 15 févr. 1897, DP 1897. 1. 247 ; pour un concentré de tomates : Cass. com. 10 déc. 1973, D. 1974, IR 64). 583. Il reste que, s'il s'avère impossible de déterminer le moment de la naissance du trouble, c'est l'acheteur qui supporte le risque de la preuve : la solution a été posée, relativement à la vente d'une cuve, dans un cas où l'expert avait estimé que la fissure de celle-ci était consécutive à un choc, sans qu'il eût été possible de savoir quand et pourquoi ce choc s'était produit (Cass. com. 18 janv. 1984, Bull. civ. IV, n o 26). La même solution a été retenue, dans une vente de tracteur, à propos d'une défaillance du système de freinage provoquée par la pénétration de poussière à l'intérieur du maître-cylindre, à un moment qu'il avait été impossible de situer (Cass. 1 re civ. 16 mai 1984, D. 1985. 485, note J. Huet). 584. Il est notable que la solution retenue dans le cadre de la « garantie légale de conformité », issue de l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005, est nettement plus favorable à l'acheteur consommateur, puisque l'article L. 211-7 du code de la consommation dispose : « Les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire ». Le texte pose là une présomption d'antériorité, qui incitera parfois le même acheteur à recourir au droit spécial de la consommation plutôt qu'au droit commun de la vente (sur ce texte, V. supra, n o 382). Lire la mise à jour 382, 584. Loi Hamon. Allongement du délai d'apparition des défauts de conformité. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) a allongé le délai de la présomption d'antériorité du défaut qui passe de six à vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, sauf pour les biens vendus d'occasion (C. consom., art. L. 211-7 ; l'entrée en vigueur de cette modification étant repoussée au 18 mars 2016). § 2 - Mise en oeuvre de la garantie légale 585. Lorsque les conditions de l'article 1641 du code civil sont réunies, la loi ouvre à l'acheteur une action spécifique dont l'objet est de le garantir contre les vices cachés. Cependant, cette action est soumise à un régime procédural rigoureux (V. infra, n os 597 et s.) ; et l'acheteur ne peut pas l'exercer au cas où une clause de non-garantie a été régulièrement stipulée (V. infra, n os 645 et s.). C'est pourquoi, lorsque le vice caché coïncide avec un vice du consentement ou avec un défaut de conformité, l'acheteur est enclin à exercer, plutôt que l'action en garantie des vices, l'action en nullité pour vice de consentement, ou l'action en résolution ou en responsabilité pour défaut de conformité ; de la sorte, il espère échapper à la cause d'irrecevabilité qui, éventuellement, lui serait opposée s'il agissait en vertu de l'article 1641. Un tel procédé est condamné par la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation, lorsqu'il y a à la fois erreur et vice caché : dans cette éventualité, en effet, le seul recours offert à l'acquéreur est l'action en garantie des vices cachés (V. Vente [2 o formation], et les décisions citées). En revanche, l'action en garantie des vices cachés n'est pas exclusive de l'action en nullité pour dol (V. Vente [2 o formation] ; adde : supra, n o 568), solution qui paraît reposer sur une considération d'ordre moral. Enfin, la récusation, par la Cour de cassation, de la conception « fonctionnelle » de la conformité conduit à distinguer nettement - au moins en principe - les sphères respectives de l'action en délivrance non conforme et de l'action en garantie des vices cachés (V. supra, n os 224 et s.). 586. Ainsi, se dégage, en droit positif, la volonté que les règles spécifiques qui gouvernent l'action en garantie des vices cachés soient respectées. Il convient de présenter le régime de cette action avant d'étudier les effets de la garantie. A. - Régime de l'action en garantie 587. Les aspects particuliers du régime de l'action en garantie concernent la transmission de cette action, ainsi que le délai dans lequel elle doit être exercée. 1° - Transmission de l'action en garantie 588. Si l'action en garantie est exercée, le plus souvent, par l'acheteur contre le vendeur, il n'en va pas forcément ainsi lorsque la chose a fait l'objet de ventes successives, ou lorsqu'elle a été vendue à un entrepreneur qui l'a utilisée pour édifier la construction qu'il s'était engagé à réaliser. Il convient d'étudier les solutions particulières retenues dans ces deux derniers cas. a. - Ventes successives 589. Au cas de ventes successives, le sous-acquéreur peut agir, au choix, contre son vendeur ou contre les vendeurs antérieurs. S'il agit contre son vendeur, les stipulations propres au contrat qui le lie à celui-ci et qui ont trait aux conditions de mise en oeuvre ou aux limites de la garantie (V. spéc. infra, n os 645 et s.) lui sont évidemment opposables. Et, de son côté, le vendeur est investi d'une action récursoire contre son propre vendeur. La jurisprudence pose, en effet, que la revente de la chose ne prive pas le vendeur intermédiaire de la faculté d'exercer l'action en garantie des vices cachés ; il peut le faire, en vérité, dès lors qu'il y trouve un intérêt direct et certain : ainsi, spécialement, lorsque lui-même est attrait en garantie (Cass. 3 e civ. 21 mars 1979, Bull. civ. III, n o 73 ; Cass. 1 re civ. 19 janv. 1988, Bull. civ. I, n o 20, D. 1988, IR 38, RTD civ. 1988. 549, obs. P. Rémy). 590. Cette dernière solution, qu'on explique tantôt par le mécanisme de la subrogation légale (C. LARROUMET, note sous Cass. 1 re civ. 20 mars 1979, D. 1980. 29), tantôt par la créance que le vendeur intermédiaire tient directement de l'acquisition que lui-même a faite auprès du vendeur initial (P. RÉMY, obs. préc.), a le mérite d'éviter que le vendeur intermédiaire ne supporte le poids définitif de la garantie. Elle est, cependant, soumise à la condition que le vendeur intermédiaire soit de bonne foi. Celui-ci est, en effet, privé de l'action récursoire si, ayant découvert le vice après la livraison, il revend la chose sans avertir le sous-acquéreur de cette découverte : « L'acquéreur, également vendeur professionnel, qui a effectivement décelé ce vice après la livraison, ne peut se faire garantir par son propre vendeur des conséquences de la faute qu'il a commise en revendant le produit en connaissance de cause » (Cass. 1 re civ. 3 juill. 1985, Bull. civ. I, n o 210 ; adde , à propos de la revente, en connaissance de cause, d'une voiture d'occasion atteinte d'un vice caché : CA Versailles, 29 juin 1989, D. 1989, IR 258). L'exigence de bonne foi s'applique aussi bien au vendeur intermédiaire qui n'est pas un professionnel qu'au vendeur professionnel V., à propos de la revente, en connaissance de cause, d'une maison envahie par les termites, Cass. 3 e civ. 16 nov. 1988, Bull. civ. III, n o 164)… 591. Plutôt que d'agir contre son vendeur, le sous-acquéreur peut préférer attraire en garantie un vendeur antérieur, ou même le fabricant de la chose. La garantie des vices cachés est, en effet, un accessoire juridique de la chose vendue et, à ce titre, sa transmissibilité aux sous-acquéreurs a été consacrée par la jurisprudence (V. supra, n os 264 et 283). 592. Ainsi, dans le cas des ventes successives de véhicules d'occasion, le dernier acquéreur est en droit d'agir contre le vendeur initial, dès lors que le vice caché existait lors de la première vente (Cass. 1 re civ. 5 janv. 1972, JCP 1973. II. 17340, note P. Malinvaud, Gaz. Pal. 1973. 2. 773). Il a été jugé pareillement que, dès lors qu'un moteur, affecté dès sa fabrication d'un vice caché, était venu entre les mains de son propriétaire actuel par l'effet d'une suite ininterrompue de cessions régulières, ledit propriétaire avait le droit d'agir directement contre le fabricant en réparation du préjudice que le vice lui avait causé (Cass. com. 3 févr. 1976, D. 1976, IR 124). De même encore, lorsqu'un véhicule atteint de vices cachés imputables au constructeur a été importé par une société qui l'a vendu à un garagiste, lequel l'a lui-même revendu à un client, c'est à bon droit que les juges du fond décident que le client dispose contre l'importateur d'une action directe contractuelle (Cass. com. 24 nov. 1987, Bull. civ. IV, n o 250, D. 1987, IR 254). La solution concerne aussi, bien entendu, les ventes immobilières (Cass. 3 e civ. 7 juin 1989, Bull. civ. III, n o 133, D. 1989, IR 194 ; 7 mars 1990, Bull. civ. III, n o 72). 593. Il est aujourd'hui acquis que l'action exercée directement par le sous-acquéreur contre le fabricant, contre l'importateur ou contre un vendeur antérieur « est nécessairement de nature contractuelle », ce qu'on peut justifier par le fait que c'est l'action même de l'acquéreur contre le vendeur initial qui est transmise au sous-acquéreur (Cass. 1 re civ. 9 oct. 1979, Bull. civ. I, n o 241, D. 1980, IR 222, obs. C. Larroumet ; Cass. 2 e civ. 30 nov. 1988, Bull. civ. II, n o 240, RTD civ. 1989. 323, obs. P. Jourdain ; Cass. com. 17 mai 1982, Bull. civ. IV, n o 182, D. 1983, IR 479, obs. C. Larroumet ; 10 déc. 1991, Contrats, conc., consom. 1992, comm. 47, obs. L. Leveneur ; Cass. 1 re civ. 27 janv. 1993, Bull. civ. I, n o 45). Il est vrai que la Cour de cassation écarte cette analyse lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre les règles de compétence internationale prévues par la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 (Cass. 1 re civ. 27 janv. 1993, Sté Jakob Handte, Contrats, conc., consom., mai 1993, chron. 5, obs. L. Leveneur) ; mais sa position lui a été dictée, dans ce domaine, par la réponse de la Cour de justice des Communautés européennes à une question préjudicielle dont elle l'avait saisie (CJCE 17 juin 1992, JCP 1992. II. 21927, note C. Larroumet, JCP 1993. I. 3664, obs. G. Viney) et ne paraît pas valoir au-delà (en ce sens, V. F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 329). 594. Du fait tant de sa nature contractuelle que de ce qu'il s'agit là d'une action transmise avec la propriété de la chose, l'action directe du sous-acquéreur contre le vendeur originaire ou contre le fabricant obéit aux mêmes conditions de recevabilité et au même régime que celle de l'acquéreur originaire. Il s'ensuit, tout d'abord, que le sous-acquéreur ne saurait agir en réparation du préjudice que lui a causé le défaut de la chose en invoquant une responsabilité délictuelle (Cass. 1 re civ. 9 oct. 1979, préc.). Il en découle également que l'action en garantie du sous-acquéreur est soumise au délai de deux ans de l'article 1648 du code civil. Il s'ensuit, enfin et surtout, que l'acquéreur final, s'il peut se voir opposer, lors de l'exercice de l'action en garantie formée directement contre le vendeur originaire, les moyens de défense que ledit vendeur pourrait faire valoir contre l'acquéreur originaire (Cass. 1 re civ. 7 juin 1995, D. 1996. 395, note D. Mazeaud , D. 1996, somm. 14, obs. O. Tournafond ), ne peut pas, en revanche, se voir opposer les objections attachées aux ventes intermédiaires : en ce sens, il a été jugé, spécialement, que le fait que le défaut de la chose n'ait pas présenté un caractère occulte pour le vendeur intermédiaire ne prive pas, pour autant, le sous-acquéreur du droit d'agir directement contre le vendeur originaire (Cass. com. 24 nov. 1987, Bull. civ. IV, n o 250). De même, un arrêt a décidé qu'« une clause de non-garantie opposable par un vendeur intermédiaire à son propre acquéreur ne peut faire obstacle à l'action directe de l'acquéreur final contre le vendeur originaire, dès lors qu'aucune clause de non-garantie n'a été stipulée lors de la première vente » (Cass. 3 e civ. 16 nov. 2005, D. 2006. 971, note R. Cabrillac , JCP 2006. II. 10069, note F.-G. Trébulle). b. - Contrat d'entreprise 595. La jurisprudence a été longtemps divisée sur le point de savoir si une action directe en garantie devait être reconnue au maître de l'ouvrage, contre le vendeur ou contre le fabricant des matériaux défectueux utilisés par l'entrepreneur pour l'édification d'une construction et achetés par ce dernier. Elle a été fixée par un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, en date du 7 février 1986, qui énonce : « Le maître de l'ouvrage, comme le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur… ; il dispose donc à cet effet contre le fabricant d'une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée » (D. 1986. 293, note A. Bénabent, JCP 1986. II. 20616, note P. Malinvaud). 596. Bien que cet arrêt ait été rendu à propos d'une action fondée sur un défaut de conformité, la généralité des termes en lesquels il est rédigé autorise à poser qu'il concerne aussi l'action en garantie des vices cachés. Il y a lieu d'en déduire que le régime du contrat d'entreprise est, à cet égard, identique à celui des ventes successives. La solution est d'autant mieux établie que la troisième chambre civile, qui, jusqu'alors, refusait de voir dans l'action du maître de l'ouvrage une action contractuelle, s'est, depuis, alignée sur la position de l'Assemblée plénière (Cass. 3 e civ. 10 mai 1990, Bull. civ. III, n o 116 ; 14 nov. 1991, Bull. civ. III, n o 271 ; 8 févr. 1995, Bull. civ. III, n o 39 ; 28 mars 2001, Contrats, conc., consom. 2001, comm. 118, obs. L. Leveneur). 2° - Délai d'exercice de l'action 597. L'article 1648 du code civil dispose, depuis la modification qui lui a été apportée par l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 relative à la garantie de la conformité du bien au contrat due par le vendeur au consommateur : « L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur, dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ». Le délai de deux ans est donc substitué au « bref délai » visé par l'ancien texte. Il s'agit là d'un délai plus long que celui considéré comme « bref » auparavant par la jurisprudence - trois mois à un an, en général (V. O. TOURNAFOND, chron. préc. [supra, n o 377], spéc. n o 6) -, mais plus court que celui, quinquennal, de l'action en nullité pour vice du consentement, et que le délai de la prescription trentenaire ou décennale applicable à l'action pour défaut de conformité. Voilà pourquoi l'inclination de certains acheteurs à délaisser l'action en garantie des vices cachés au profit des actions fondées sur un vice du consentement ou sur un défaut de conformité (V. supra, n o 585) devrait perdurer. 598. Le nouveau texte précise également que le point de départ du délai qu'il édicte est « la découverte du vice ». Ce faisant, il consacre la jurisprudence antérieure (Cass. 3 e civ. 14 juin 1989, Bull. civ. III, n o 140 ; Cass. com. 18 févr. 1992, Bull. civ. IV, n o 82 ; 21 janv. 1992, Bull. civ. IV, n o 32), mais n'épuise pas toutes les difficultés attachées à cette question. De façon générale, il est permis de poser que les solutions prétoriennes dégagées à propos des difficultés suscitées par la détermination du point de départ et par le calcul de la durée du « bref délai », sous l'empire du texte antérieur, valent toujours, et que la nature du nouveau délai de deux ans est identique à celle de l'ancien « bref délai ». 599. Avant d'aborder chacun de ces points, il convient de rappeler qu'il revient au vendeur d'opposer à la demande en garantie de l'acquéreur l'expiration du délai ouvert à celui-ci pour dénoncer le vice. Il s'agit là d'une fin de non-recevoir, qui peut être invoquée en tout état de cause (Cass. 1 re civ. 11 janv. 1984, D. 1984, IR 248), mais qui, n'étant pas d'ordre public, ne peut pas, en vertu de l'article 125 du nouveau code de procédure civile, être soulevée d'office par le juge (Cass. 1 re civ. 26 oct. 1983, Bull. civ. I, n o 249). De même, il incombe au vendeur de prouver le dépassement du bref délai (Cass. 3 e civ. 31 mai 1989, Bull. civ. III, n o 121). a. - Point de départ du délai 600. Ainsi qu'il a été dit (supra, n o 598), l'article 1648 du code civil modifié consacre la jurisprudence antérieure, en posant que le délai dans lequel l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée court « … à compter de la découverte du vice ». Le moment de cette découverte par l'acheteur demeure une question de fait (Cass. 1 re civ. 11 mars 1986, Bull. civ. I, n o 66). Dans la mesure où, le plus souvent, c'est le dépôt du rapport d'expertise qui porte, de manière certaine, à la connaissance de l'acheteur la nature exacte et le degré de gravité du vice, les juges du fond sont enclins à poser que le point de départ du bref délai se situe au jour du dépôt dudit rapport (Cass. 3 e civ. 26 févr. 1986, Bull. civ. III, n o 18 ; Cass. 1 re civ. 11 janv. 1989, Bull. civ. I, n o 12, Defrénois 1989. 1137, obs. G. Vermelle ; 19 mars 1991, Bull. civ. I, n o 101, D. 1991, IR 104 ; Cass. 1 re civ. 15 nov. 1996, JCP 1997. II. 22872, note C. Radé). 601. Il a été jugé qu'en matière de commerce de produits surgelés, il n'est pas possible d'admettre que le point de départ du délai d'exercice de l'action rédhibitoire puisse se situer à tout moment de la période de conservation jusqu'à une opération de décongélation qui révélerait l'existence du vice, et qu'il appartient donc à l'acheteur de s'assurer de la qualité de la marchandise à la livraison (CA Paris, 9 mai 1986, D. 1986, IR 320). La décision est contestable dans la mesure où, par hypothèse, le vice caché est indécelable lors de la livraison. 602. La jurisprudence admet que, bien que le vice ait été découvert par l'acheteur, le point de départ du bref délai puisse être repoussé dans trois cas, qui ont vocation à concerner pareillement le nouveau déIai biennal. Il en est ainsi, en premier lieu, lorsqu'à la suite de la découverte du défaut par l'acheteur, une tentative de règlement amiable a été faite, qui a finalement échoué ; alors, le bref délai ne commence à courir que du jour où l'échec de la négociation a été consommé (Cass. 1 re civ. 16 juill. 1987, Bull. civ. I, n o 230, D. 1987, IR 182 ; Cass. com. 2 févr. 1971, Bull. civ. IV, n o 34). 603. Le point de départ du bref délai peut pareillement être repoussé, en deuxième lieu, lorsque le vendeur n'a pas demandé tout de suite le prix, et a formé une demande principale en paiement ; en ce cas, l'acheteur est admis à former, pourvu que ce soit à bref délai à compter de la demande principale, une demande reconventionnelle en garantie (Cass. com. 11 mai 1981, Bull. civ. IV, n o 219). 604. Il y a également report du point de départ du bref délai, en troisième lieu, lorsque l'acquéreur n'agit contre son vendeur que parce que lui-même a été attrait en garantie par le sous-acquéreur ; le bref délai court alors à compter de l'assignation qui lui est délivrée (Cass. 1 re civ. 24 oct. 2000, Contrats, conc., consom. 2001, comm. 6, obs. L. Leveneur ; Cass. 3 e civ. 20 oct. 2004, RDC 2005. 345). b. - Durée du délai 605. L'article 1648 du code civil, tel qu'il a été modifié par l'ordonnance du 17 février 2005, fixe à « deux ans à compter de la découverte du vice » le délai d'exercice de l'action en garantie des vices cachés. Par la précision ainsi apportée, il contribue à sécuriser le régime de cette action en regard du droit antérieur. Mais les causes d'interruption de l'ancien « bref délai » devraient continuer de valoir à propos du nouveau délai biennal. 606. Ainsi, il n'est pas douteux que, depuis l'entrée en vigueur du texte modifié comme auparavant, une assignation en référé - spécialement, une assignation en référé-expertise - est de nature à interrompre le délai de l'article 1648 (Cass.1 re civ. 21 nov. 1995, Bull. civ. I, n o 428, D. 1996, IR 28 , Contrats, conc., consom. 1996, comm. 20, obs. L. Leveneur ; Cass. 3 e civ. 5 nov. 1997, Bull. civ. III, n o 199 ; Cass. com. 6 mars 2001, Bull. civ. IV, n o 52, D. 2001, IR 983 ; 5 mars 2002, Bull. civ. IV, n o 50 ; Cass. 1 re civ. 25 juin 2002, Bull. civ. I, n o 176, Defrénois 2003. 406, note Y. Dagorne-Labbe). 607. De la même manière, ne devrait pas être remise en cause la solution suivant laquelle, lorsque l'acheteur a satisfait à l'article 1648 en assignant en référé son vendeur dans un bref délai, ce texte n'a plus lieu de trouver application, et c'est la prescription de droit commun qui commence à courir (Cass. 1 re civ. 21 oct. 1997, Bull. civ. I, n o 292, D. 1998. 409, note M. Bruschi , D. 1999, somm. 17, obs. O. Tournafond , Dalloz Affaires 1997. 1418, JCP 1998. II. 10063, note Mouloungui ; Cass. 1 re civ. 19 oct. 1999, Bull. civ. I, n o 288, D. 2000, somm. 290, obs. O. Tournafond , D. 2001. 413, note I. Bufflier ; Cass. com. 6 mars 2001, Bull. civ. IV, n o 52, D. 2001, IR 983 ; 25 juin 2002, préc. ; Cass. com. 3 déc. 2003, Bull. civ. IV, n o 197, D. 2004, IR 190 ). La détermination du point de départ de ladite prescription suscite l'hésitation en jurisprudence : après l'avoir fixé à la date de l'ordonnance de référé (Cass. 1 re civ. 21 oct. 1997, préc.), puis à la date de la conclusion de la vente (Cass. 1 re civ. 19 oct. 1999, préc. ; 5 oct. 2000, Bull. civ. I, n o 241, D. 2001, IR 750 ; 12 déc. 2000, Bull. civ. I, n o 324, D. 2001, IR 358 ), la Cour de cassation paraît le situer aujourd'hui à la date de la livraison (Cass. 1 re civ. 25 juin 2002, préc.). 608. La jurisprudence admet qu'outre l'assignation en référé, une assignation délivrée devant une juridiction matériellement incompétente pour connaître du recours en garantie interrompt la prescription (Cass. com. 16 févr. 1977, D. 1977, IR 248). 609. Un arrêt a même censuré pour manque de base légale la décision d'une cour d'appel qui reprochait à un particulier d'avoir introduit l'action pour vice caché quatre mois après avoir obtenu l'aide judiciaire, sans rechercher si la demande d'aide judiciaire n'avait pas été adressée dans un bref délai et si la demande en justice n'avait pas elle-même été introduite dans un bref délai, à compter de la notification de la décision d'admission de l'aide judiciaire (Cass. 1 re civ. 22 mai 1991, Bull. civ. I, n o 165). Il paraît transposable dans le cadre du régime de l'aide juridictionnelle, qui a été substituée à l'aide judiciaire depuis l'entrée en vigueur du décret n o 91-1266 du 19 décembre 1991 (V. NCPC Dalloz), portant application de la loi n o 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (V. NCPC Dalloz). 610. La nouvelle règle de délai posée par l'article 1648 du code civil est plus souple que celle qui préside à la mise en oeuvre de la « garantie légale de conformité » consacrée par le droit de la consommation, puisque l'action prévue par l'article L. 211- 12 du code de la consommation doit être engagée dans les deux ans de la délivrance du bien (V. supra, n o 383). Il s'ensuit que l'acheteur consommateur qui découvre le défaut du bien mobilier dont il a fait l'acquisition plus de deux ans après ladite délivrance doit recourir à la garantie des vices cachés du droit commun. B. - Effets de la garantie 611. L'article 1644 du code civil donne à l'acheteur « le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts ». Dans le premier cas, l'acheteur exerce l'action rédhibitoire ; dans le second, il exerce l'action estimatoire. Ce texte ouvre donc une option à l'acheteur entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire. 612. Toutefois, ces deux actions ne sont pas les seuls recours dont l'acheteur victime d'un vice caché dispose contre le vendeur : à certaines conditions, le premier peut exercer contre le second une action en réparation ou en remplacement de la chose ; il peut aussi exercer, de manière indépendante ou non, une action indemnitaire. 613. L'étude des effets de la garantie des vices cachés postule qu'après avoir présenté l'option de l'acheteur entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire,puis, tour à tour, chacune de ces deux actions, soient évoquées l' action en réparation ou en remplacement de la chose, et l'action indemnitaire. 1° - Option de l'acheteur 614. L'article 1644 disposant expressément que « l'acheteur a le choix » entre les actions rédhibitoire et estimatoire, c'est à l'acheteur seul qu'il revient d'effectuer ce choix. La jurisprudence précise que le choix s'exerce sans que l'acheteur ait à le justifier (Cass. 1 re civ. 5 mai 1982, Bull. civ. I, n o 163, D. 1983, IR 478, obs. C. Larroumet), et sans que le juge ait à prendre en considération les interventions effectuées par le même acheteur sur la chose. Par exemple, dans un cas où un immeuble avait été atteint par la mérule, il a été jugé que l'acheteur était en droit de demander la résolution, bien que le vice eût disparu à la suite des travaux qu'il avait fait exécuter (Cass. 3 e civ. 17 févr. 1988, Bull. civ. III, n o 38, Defrénois 1988. 1242, obs. G. Vermelle). De la même manière, le fait que le vendeur ait offert de réparer ne prive aucunement l'acheteur de l'option (Cass.1 re civ. 23 mai 1995, Bull. civ. I, n o 216, D. 1996, somm. 14, obs. O. Tournafond ; 6 oct. 1998, D. 2000, somm. 290, obs. G. Pignarre ; contra : Cass. 1 re civ. 2 déc. 1997, D. 1997, somm. 17, obs. P. Brun ). 615. Du fait que l'action rédhibitoire et l'action estimatoire ont la même cause, l'acheteur peut, après avoir intenté l'une d'entre elles, exercer l'autre aussi longtemps qu'il n'a pas été statué sur sa demande par une décision passée en force jugée, ou tant que le vendeur n'a pas acquiescé (Cass. civ. 20 juin 1917, DP 1917. 1. 140 ; Cass. 2 e civ. 11 juill. 1974, Bull. civ. II, n o 231). Pour la même raison, l'acheteur peut, après avoir demandé en première instance une réduction de prix, engager en appel une action rédhibitoire sans que celle-ci constitue une demande nouvelle (Cass. com. 22 juill. 1953, D. 1953. 587). 616. Le principe du libre choix de l'acquéreur souffre, cependant, deux restrictions : La première concerne le cas où l'acheteur n'est pas en mesure de restituer la chose parce qu'il l'a revendue (Cass. com. 17 mai 1982, Bull. civ. IV, n o 182, D. 1983, IR 479, obs. C. Larroumet), ou parce qu'il l'a dépréciée par son fait (Cass. 1 re civ. 23 oct. 1974, D. 1975. 424), ou parce que celle-ci a été perdue par cas fortuit (Cass. 1 re civ. 3 déc. 1996, Bull. civ. I, n o 441), ou encore parce qu'il en a perdu la propriété (Cass. com. 6 juill. 1999, Bull. civ. IV, n o 155, pour un cas où l'acheteur bailleur a été définitivement débouté de l'action en revendication de la chose dans le cadre de la liquidation judiciaire du locataire) ; en tous ces cas, seule l'action estimatoire est ouverte à l'acheteur. 617. Il est notable, à ce propos, que, si la chose a péri par cas fortuit, l'article 1647, alinéa 2, du code civil énonce que la perte est « pour le compte de l'acheteur », c'est-à-dire qu'elle doit être supportée par celui-ci. Il en va à plus forte raison de la sorte si la chose a péri par le fait de l'acheteur (Cass. 1 re civ. 12 janv. 1994, Gaz. Pal. 1994. 1, panor. 128, Bull. civ. I, n o 23), ce dernier conservant toutefois un recours indemnitaire contre le vendeur qui connaissait le vice lors de la vente (même arrêt). Si, en revanche, la perte de la chose est la conséquence du vice caché - ce qui serait le cas, par exemple, si l'insuffisante solidité des poutres maîtresses avait provoqué l'effondrement du pavillon vendu, ou si le véhicule vendu avait été totalement détruit par un incendie spontané -, l'article 1647, alinéa 1 er , énonce que c'est au vendeur de supporter la perte. L'acheteur peut, en conséquence, obtenir alors le remboursement du prix sans rendre la chose ou en rendant celle-ci détruite. 618. La seconde restriction au droit d'option de l'acquéreur a trait à l'hypothèse où le vice n'apparaît pas d'une gravité suffisante pour entraîner la résolution de la vente ; il semble que le juge ait alors le pouvoir de limiter les droits de l'acheteur à une réduction du prix (MAZEAUD et CHABAS, t. 3, 2 e vol., 1 re partie, par M. DE JUGLART, n o 987) : la Cour de cassation a posé que les juges du fond qui ont été saisis, à la suite d'une vente de fonds de commerce, d'une action rédhibitoire à titre principal et estimatoire à titre subsidiaire, « peuvent, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation de la gravité du vice caché, retenir que celui-ci n'est pas de nature à justifier la demande en résolution de la vente, mais est suffisamment grave pour justifier une diminution du prix » (Cass. com. 6 mars 1990, Bull. civ. IV, n o 75). 2° - Action rédhibitoire 619. L'action rédhibitoire est une action en résolution de la vente. Elle présente, en regard de l'action résolutoire du droit commun aménagée par l'article 1184 du code civil, la double particularité de devoir être intentée dans un délai limité (V. supra, n os 597 et s.), et, en principe, de conférer à l'acquéreur,non au juge, le pouvoir de décider de l'anéantissement du contrat. La destruction rétroactive du contrat qui s'ensuit oblige respectivement l'acheteur et le vendeur à restituer la chose et le prix ; le vendeur doit, en outre, rembourser les frais de la vente. a. - Restitutions de la chose et du prix 620. Il y a lieu de renvoyer aux développements précédents concernant les restitutions liées à l'action en résolution pour défaut de conformité (V. supra, n o 338), sous le bénéfice des solutions particulières suivantes. 621. Quant à la restitution de la chose par l'acquéreur, tout d'abord, elle ne saurait ouvrir droit, au profit du vendeur, à aucune indemnité liée à l'utilisation de cette chose ou à l'usure résultant d'une telle utilisation : la solution a été énoncée par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 21 mars 2006 (n o 03-16.075 , D. 2006, IR 950, obs. I. Gallmeister, D. 2006. 1869, note C. Montfort ). Elle invite à souligner le particularisme du régime des restitutions consécutives à l'exercice de l'action rédhibitoire, en comparaison du régime des restitutions attachées à la résolution pour défaut de conformité : dans ce dernier cas en effet, si le vendeur ne peut pas prétendre à une indemnité pour l'usage de la chose dont l'acheteur a profité avant la résolution, il est fondé à demander réparation de la dépréciation de la chose liée à l'utilisation qui en a été faite par l'acquéreur (V. supra, n o 338). La solution différente retenue en matière de vices cachés - rigoureuse pour le vendeur - tient à la lettre de l'article 1644 du code civil, qui, comme première branche de l'option qu'il ouvre à l'acheteur, prévoit la restitution de la chose contre la restitution du prix, sans aménagement ni précision particuliers. 622. Quant à la restitution du prix par le vendeur, ensuite, l'article 1646 du code civil dispose : « Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente ». En vérité, il semble qu'outre le prix, le vendeur doive restituer à l'acheteur les intérêts de ce prix, qui sont dus à compter de l'assignation en garantie s'il était de bonne foi, et à compter du paiement dans le cas contraire (Cass. 1 re civ. 4 avr. 1991, Contrats, conc., consom. 1991, comm. 137, obs. L. Leveneur). 623. Au cas particulier où il y a eu des ventes successives,et où le sous-acquéreur exerce une action directe contre le vendeur originaire (V. supra, n os 591 et s.), le demandeur ne peut prétendre au remboursement du prix que dans la mesure où il a restitué la chose entre les mains dudit vendeur (Cass. com. 17 mai 1982, Bull. civ. IV, n o 182) ; de surcroît, il ne peut réclamer alors au vendeur originaire plus que le prix perçu par celui-ci, puisque l'action exercée par lui n'est pas sa propre action contre le vendeur intermédiaire, mais l'action du vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire (Cass. 1 re civ. 27 janv. 1993, Bull. civ. I, n o 45). b. - Frais de la vente 624. Quant aux « frais occasionnés par la vente », l'article 1646 prévoit que le vendeur doit les rembourser à l'acquéreur. À une époque, la jurisprudence avait donné à l'expression légale un sens large ; elle englobait dans les frais de l'article 1646 les frais occasionnés par le procès (Cass. req. 26 avr. 1870, DP 1871. 1. 11 ; Cass. 1 re civ. 4 janv. 1965, D. 1965, somm. 78), ainsi que les dommages et intérêts que l'acheteur avait dû payer aux tiers victimes du fait de la chose atteinte du vice caché (V., pour les dommages et intérêts versés par l'acheteur aux victimes d'un accident d'automobile, Cass. req. 21 oct. 1925, DP 1926. 1. 9, rapp. Célice, note L. Josserand). Mais cette jurisprudence a été abandonnée, car elle revenait à confondre dans un même régime les frais de la vente proprement dits et les dommages et intérêts, dont seul, selon l'article 1645 du code civil, le vendeur de mauvaise foi doit réparation à l'acheteur. 625. Aujourd'hui, le vendeur de bonne foi n'est donc pas tenu d'indemniser l'acheteur des effets dommageables causés par la chose atteinte d'un vice caché (Cass. 1 re civ. 24 nov. 1954, JCP 1955. II. 8565, note H.B. ; 10 févr. 1959, D. 1959. 117 ; 4 févr. 1963, JCP 1963. II. 13159, note R. Savatier). Par exemple, il n'est pas tenu d'indemniser l'acheteur du préjudice commercial souffert par celui-ci (Cass. 1 re civ. 24 mai 1967, Bull. civ. I, n o 183), ni du coût des réparations effectuées sur le véhicule et imputables au vice caché (Cass. com. 12 déc. 1984, Bull. civ. IV, n o 349 ; contra : CA Versailles, 6 juin 1986, D. 1986, IR 312), ni des frais de pension et de maréchalerie engagés postérieurement à la vente d'une jument atteinte d'un vice caché (Cass. 1 re civ. 16 juill. 1998, Bull. civ. I, n o 266, D. 1998, IR 210 , Gaz. Pal. 1999. 2, somm. 457, obs. D. Guével ; 21 mars 2006, n o 03- 16.407 , Defrénois 2006. 1134, note Y. Dagorne-Labbe, JCP 2006. IV. 1884). 626. Les frais de l'article 1646 doivent donc se limiter aux seules « dépenses directement liées à la conclusion du contrat » (Cass. 1 re civ. 16 juill. 1998, préc.) qui ont été faites en vue de conclure le contrat, et qui sont liées, par exemple, aux frais d'acte, aux honoraires, aux frais de déplacement, de transport de la marchandise. 3° - Action estimatoire 627. L'action estimatoire est l'action par laquelle l'acheteur, tout en conservant la chose affectée du vice caché, entend obtenir, du fait de ce vice, une diminution du prix qui sera fixée par expert. 628. Bien évidemment, pour être recevable l'action estimatoire suppose que les conditions de mise en oeuvre de la garantie soient réunies. La gravité insuffisante du vice caché peut donc la mettre en échec. Il a été jugé, par exemple, dans un cas où l'acheteur invoquait un trouble d'exploitation lié à un vice caché qui avait diminué temporairement l'usage de l'immeuble, que ce trouble était insuffisamment grave pour justifier la demande en réduction de prix (Cass. 3 e civ. 25 janv. 1989, Bull. civ. III, n o 23). 629. Si l'exercice de l'action est fondé, la réduction du prix doit, conformément à l'exigence posée par l'article 1644 du code civil, être arbitrée par expert (Cass. 3 e civ. 10 nov. 1999, Bull. civ. III, n o 217, D. 1999, IR 274 ; Cass. 1 re civ. 3 mai 2006, D. 2006, IR 1405 ). En outre, dès lors que l'acquéreur conserve la chose vendue, il n'a droit de se faire rendre qu'une partie du prix, non l'intégralité de celui-ci, énonce expressément le même texte. C'est, dans ces conditions, fort logiquement qu'avait été censuré un arrêt d'appel qui, pour fixer la réduction du prix de vente d'un immeuble affecté de nuisances sonores anormales, après avoir retenu que le coût des travaux préconisés par l'expert était supérieur à la valeur du bien déclaré dans l'acte et que, l'acquéreur ayant choisi l'action estimatoire, il ne pouvait obtenir au titre de la réduction du prix une indemnité supérieure à ce prix, avait décidé d'évaluer la réduction à une somme correspondant au prix de vente (Cass. 3 e civ. 19 avr. 2000, Bull. civ. III, n o 87, Defrénois 2000. 1175, obs. A. Bénabent). Pourtant la Cour de cassation a modifié sa jurisprudence depuis : au motif que « l'action estimatoire permet de replacer l'acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n'avait pas été atteinte de vices cachés », un arrêt plus récent approuve les juges du fond qui ont retenu que les acquéreurs « étaient fondés à demander la restitution du prix correspondant au coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices leur permettant d'être en possession d'un immeuble conforme à celui qu'ils avaient souhaité acquérir » (Cass. 3 e civ. 1 er févr. 2006, D. 2006. 1213, note L. Eyrignac , JCP 2006. II. 10070, note F. Rouvière, Defrénois 2006. 651, note E. Savaux). L'arrêt précise qu'il est indifférent que la valeur du bien fixée par l'expert soit supérieure au prix. La solution ne convainc pas : d'une part, elle méconnaît la lettre de l'article 1644 qui ne prévoit que la restitution d'une partie du prix au cas de conservation de la chose par l'acquéreur ; d'autre part, elle paraît méconnaître l'esprit du même texte : le sens de l'option ouverte à l'acquéreur entre l'action estimatoire et l'action rédhibitoire n'est-il pas, au cas où le coût de la conservation de la chose s'avère trop élevé pour l'acquéreur, de permettre à ce dernier de recourir à l'action rédhibitoire, par l'effet de laquelle il obtiendra restitution du prix en restituant la chose ? Lire la mise à jour 629. Action estimatoire et préjudice indemnisable. - La restitution consécutive à l'action estimatoire ne constitue pas par elle- même un préjudice indemnisable ouvrant droit à réparation contre le notaire rédacteur de l'acte (Civ. 3 e , 8 avr. 2009, n o 07- 19.690 , D. 2009. 1356, obs. Forest ). 630. Dans la mesure où l'acheteur entend conserver la chose, il paraît, a priori, logique de lui maintenir la charge des frais occasionnés par la vente. Mais, en sens contraire, on peut opposer que l'article 1646 ne distingue pas, au cas où le vendeur est de bonne foi, selon que l'acheteur a exercé l'action rédhibitoire ou l'action estimatoire. 4° - Action en réparation ou en remplacement de la chose 631. Lorsque la vente a été conclue avec un vendeur professionnel ou avec un vendeur qui connaissait le vice de la chose lors du contrat, la jurisprudence admet l'acheteur qui y trouve intérêt à solliciter la remise en état ou le remplacement de la chose défectueuse (Cass. civ. 11 avr. 1933, DH 1933. 331 ; Cass. com. 17 mai 1971, Bull. civ. IV, n o 134). 632. Il s'agit là d'une faculté réservée au seul acheteur, qui ne pourrait donc pas se voir imposer par le vendeur professionnel la remise en état ou le remplacement de la chose pour faire échec à sa demande en résolution du contrat ou en diminution du prix (Cass. 1 re civ. 11 juin 1980, Bull. civ. I, n o 185, RTD com. 1981. 351, obs. J. Hémard ; Cass. 1 re civ. 23 mai 1995, 6 oct. 1998, préc. supra, n o 614 ; comp. Cass. 1 re civ. 2 déc. 1997, préc. supra, n o 614, décidant que, au cas où la réparation a été faite et les défauts supprimés avec l'accord de l'acheteur, celui-ci perd le droit d'agir en garantie). 633. Cette forme d'exécution forcée en nature (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 288, note 5) est consacrée et organisée, dans le cadre de la « garantie légale de conformité », lorsque la vente porte sur un bien mobilier et a été conclue entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur, depuis l'ordonnance n o 2005-136 du 17 février 2005 (C. consom., art. L. 211-9 ; V. supra, n os 386 et 387). 5° - Action indemnitaire 634. L'action en garantie n'est pas une action en responsabilité. Cependant, lorsque les conditions de la responsabilité civile contractuelle du vendeur sont réunies, l'acheteur est en droit de demander que son cocontractant soit condamné à lui verser des dommages et intérêts. 635. Cette demande peut accompagner la demande en résolution du contrat ou en réduction du prix. Mais l'action indemnitaire peut, tout aussi bien, être exercée de manière indépendante par l'acheteur. Ainsi, alors même qu'il n'exerce ni l'action rédhibitoire, ni l'action estimatoire, l'acheteur victime des conséquences dommageables du défaut de la chose est en droit d'intenter contre le vendeur une action indemnitaire (Cass. com. 1 er déc. 1964, Bull. civ. III, n o 532 ; 25 févr. 1981, Bull. civ. IV, n o 111, D. 1981, IR 445, obs. C. Larroumet). Lire la mise à jour 635. Autonomie de l'action en réparation du préjudice. - La recevabilité de l'action en réparation du préjudice éventuellement subi du fait d'un vice caché n'est pas subordonnée à l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire de sorte que cette action peut être engagée de manière autonome (Com. 19 juin 2012, n o 11-13.176 , Dalloz actualité, 10 juill. 2012, obs. Fleuriot). 636. Encore faut-il que l'acheteur établisse la responsabilité du vendeur. À cet égard, sa situation est nettement plus favorable si le vendeur est un professionnel. Dans le cas contraire, en effet, il appartient à l'acheteur d'établir la mauvaise foi de son cocontractant, c'est-à-dire de prouver que le vendeur connaissait le vice caché au moment de la vente. Une telle preuve est souvent malaisée à rapporter. Si l'acheteur ne parvient pas à la faire, la lecture combinée des articles 1646 et 1645 a contrario lui interdit de demander des dommages et intérêts au vendeur. 637. Si, en revanche, le vendeur est un professionnel, la jurisprudence pose, à son encontre, une présomption de connaissance du vice, et donc de mauvaise foi, qui est particulièrement sévère. D'abord, elle pèse sur tout vendeur professionnel, que celui-ci soit fabricant ou simple revendeur (Cass. 1 re civ. 19 janv. 1965, D. 1965. 389, pour un boulanger ; 9 oct. 1979, Bull. civ. I, n o 241, pour un garagiste ; Cass. com. 27 nov. 1991, Bull. civ. IV, n o 367, pour un fabricant de tuiles gélives). Ensuite, elle s'applique même si l'acheteur est également un professionnel (Cass. com. 23 nov. 1982, Bull. civ. IV, n o 367), étant observé que certaines décisions, cependant, paraissent écarter la présomption lorsque l'acheteur est de la même spécialité que le vendeur (CA Versailles, 31 mars 1989, D. 1989, IR 186). Enfin, la présomption revêt un caractère irréfragable, et joue même en présence d'un vice indécelable (Cass. com. 15 nov. 1971, D. 1972. 211 ; 20 janv. 1970, JCP 1972. II. 17280, note M. Boitard et A. Robert). Il avait été soutenu, devant la Cour de justice des Communautés européennes, que cette présomption était contraire aux principes communautaires, mais cette allégation a été rejetée (CJCE 24 janv. 1991, D. 1991. 273, note C.-J. Berr ). Lire la mise à jour 637 s. Qualification de professionnel. - Celui qui se livre de façon habituelle à des opérations d'achat et de revente de véhicules d'occasion dont il tire profit acquiert la qualité de vendeur professionnel (Civ. 1 re , 30 sept. 2008, n o 07-16.876 ). 638. La mauvaise foi du vendeur, présumée ou non, ne saurait engager la responsabilité contractuelle de l'intéressé que s'il existe un lien de causalité direct et immédiat entre le vice caché et le dommage invoqué (Cass. com. 15 mars 1976, JCP 1977. II. 18632, note J. Ghestin ; Cass. 1 re civ. 18 mars 1986, Bull. civ. I, n o 75). Tel n'est pas le cas du préjudice allégué par l'acheteur, à la suite de la résolution de la vente d'un immeuble aux torts du vendeur, et tenant prétendument à la perte patrimoniale fondée sur l'évolution des prix dans le domaine immobilier (Cass. 3 e civ. 20 déc. 1995, Bull. civ. III, n o 267, D. 1996, IR 44 ). 639. Lorsque ces conditions sont réunies, c'est l'intégralité des dommages soufferts par l'acheteur que le vendeur doit réparer, l'article 1645 disposant : « Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur ». Ces derniers s'étendent à la réparation de l'ensemble des chefs de préjudice que l'acheteur peut avoir soufferts : ainsi, par exemple, au cas de défaut caché des ardoises de couverture, le vendeur professionnel peut être condamné à indemniser l'acheteur à concurrence du coût de réfection de la toiture (Cass.1 re civ. 6 juill. 1999, Contrats, conc., consom. 2000, comm. 23) ; et au cas de défectuosité d'un système d'alarme, il peut être condamné à réparer le préjudice attaché à la perte subie ou au gain manqué (Cass. com. 20 janv. 1998, Bull. civ. IV, n o 35). Art. 2 - Garantie conventionnelle 640. Trois types de clause sont susceptibles d'être stipulés dans les ventes, relativement à la garantie des vices cachés : il peut s'agir, d'une part, de clauses qui étendent le champ de la garantie, en regard des dispositions légales ; il peut s'agir, d'autre part, de clauses qui, à l'inverse, suppriment ou limitent la garantie de droit commun ; il peut s'agir, enfin, de clauses qui combinent l'extension et la restriction, et qui, pour cette raison, sont dénommées « clauses mixtes ». § 1 - Clauses extensives de la garantie 641. Bien qu'aucun texte du code civil n'envisage la stipulation de la clause par laquelle le vendeur augmenterait la garantie contre les vices cachés, la validité d'une telle clause n'est pas douteuse ; elle peut se réclamer de l'autonomie de la volonté. Les parties sont donc libres de déroger à l'article 1646 du code civil en prévoyant, par exemple, que le vendeur de bonne foi répondra de tous les chefs de préjudice qui découleraient de l'apparition d'un défaut de la chose après la vente. 642. Encore faut-il, pour que la clause produise effet, qu'elle soit dépourvue d'ambiguïté : il a été jugé, notamment, que la clause garantissant une automobile d'occasion « en bon état de marche » n'est pas une clause aggravante de la garantie légale (Cass. 1 re civ. 18 déc. 1962, D. 1963. 114 ; comp. CA Douai, 14 mars 1961, D. 1961. 673). Lire la mise à jour 642 s. Vente de véhicule : recherche du vice apparent dans le contrôle technique. - Une voiture tombe en panne le lendemain de son acquisition, bien que les essais réalisés la veille se soient correctement déroulés. L'acheteur sollicite « l'annulation » de la vente pour vices cachés, demande accueillie par la juridiction de proximité, mais rejetée pas le Cour de cassation, pour qui « le rapport établi à la suite d'un tel contrôle [technique] peut révéler, par des énonciations claires et compréhensibles pour tout acquéreur, l'existence de vices rendus de la sorte apparents » (Civ. 1 re , 19 nov. 2009, n o 08-14.460 , Dalloz actualité, 27 nov. 2009, obs. Guiomard). Il en résulte que le vendeur n'a pas à garantir les vices qui sont déjà relevés dans le contrôle technique. Il convient alors de rechercher si les vices relevés dans le rapport d'expertise réalisé après la panne, et établissant que le véhicule était impropre à sa destination, n'étaient pas également révélés par les défauts mentionnés par le contrôle technique (et alors non pris en charge par le vendeur ainsi dédouané par le caractère apparent du vice). 643. En revanche, la clause aux termes de laquelle le vendeur d'un véhicule d'occasion accorde, outre la garantie légale, une garantie contractuelle « pièces et main-d'oeuvre » durant une certaine période, a donné lieu à une interprétation extensive en jurisprudence : selon la Cour de cassation, les juges du fond peuvent déduire d'une telle clause, d'une part, qu'elle ouvre droit au profit de l'acheteur à l'échange gratuit des pièces défectueuses et qu'elle couvre les conséquences de ces défectuosités, et, d'autre part, qu'elle met à la charge du vendeur une obligation de résultat contraignant ce dernier, s'il veut s'exonérer de la garantie, à rapporter la preuve de l'intervention d'une cause étrangère dans la réalisation du dommage subi par la chose (Cass. 1 re civ. 13 oct. 1993, Contrats, conc., consom. février 1994, p. 14, obs. G. Raymond ; rappr. Cass. com. 16 oct. 1972, D. 1973. 290, note J. Hémard, ayant admis qu'une telle clause pouvait impliquer la réparation du préjudice subi par l'acheteur en raison de l'indisponibilité du matériel garanti). 644. Les clauses extensives de la garantie se rencontrent, outre dans les ventes de véhicules d'occasion, dans les ventes de produits de luxe : spécialement, les produits de la haute joaillerie sont souvent garantis à vie par le fabricant. De telles clauses sont aussi stipulées dans les ventes d'appareils ménagers (V. J. HUET, Responsabilité du vendeur et garantie contre les vices cachés, 1987, Litec, n o 652). Elles ont été prises en compte et réglementées, sous l'appellation de « garantie commerciale » dans le cadre de l'ordonnance du 17 février 2005 relative à la garantie de la conformité du bien au contrat, due par le vendeur professionnel au consommateur (V. C. consom., art. L. 211-15 ; adde : supra, n os 395 et 396). § 2 - Clauses exclusives ou limitatives de la garantie Bibliographie. - P. ANCEL, La garantie conventionnelle des vices cachés dans les conditions générales de vente en matière mobilière, RTD com. 1979. 203. - J. BIGOT, Plaidoyer pour les clauses limitatives de garantie et de responsabilité dans les contrats de vente et de fourniture entre professionnels, JCP 1976. I. 2755. - P. MALINVAUD, Pour ou contre la validité des clauses limitatives de la garantie des vices cachés dans la vente, JCP 1975. I. 2690. - B. STARCK, Observations sur le régime juridique des clauses de non-responsabilité ou limitatives de responsabilité, D. 1974, chron. 157. 645. Les clauses exclusives ou limitatives de garantie ont pour objet de supprimer la garantie des vices cachés, ou bien de rendre ses conditions de mise en oeuvre plus rigoureuses, ou bien encore de limiter ses effets pour le vendeur. Ainsi, par exemple, la stipulation mettant à la charge de l'acheteur le soin de contrôler la chose, ou l'obligeant à dénoncer le vice dans un délai très bref après la livraison, alors que la découverte du vice supposait une analyse effectuée par un laboratoire spécialisé, a été comprise comme une clause limitative de la garantie (Cass. com. 28 janv. 1974, JCP 1974. II. 17852, note H.T.). La loi admet la validité de principe de telles clauses ; ce principe est cependant assorti d'importantes exceptions. A. - Principe : validité 646. L'article 1643 du code civil autorise la clause prévoyant que le vendeur « ne sera obligé à aucune garantie ». Il pose, du même coup, en principe la validité des clauses exclusives, et, à plus forte raison, des clauses restrictives de la garantie contre les vices cachés. En vertu de ce principe, il a été jugé, en matière de vente immobilière, que, dès lors que la mauvaise foi des vendeurs n'était pas établie, les juges du fond devaient appliquer une clause de non-garantie stipulant que l'acquéreur prendrait l'immeuble dans son état actuel, avec tous ses vices ou défauts, apparents ou cachés, ce qui aurait dû les conduire à maintenir la vente en dépit de la découverte de termites dans l'immeuble vendu (Cass. 3 e civ. 12 nov. 1975, Bull. civ. III, n o 330 ; rappr. Cass. 3 e civ. 19 oct. 1971, Bull. civ. III, n o 498, D. 1972. 77 ; comp. infra, n o 651) ; la même solution a été retenue à propos de la clause de non-garantie concernant la présence d'insectes xylophages (CA Bordeaux, 1 er juill. 1991, JCP, éd. N, 1993. II. 172). 647. Pour recevoir application, la clause de non-garantie, ou la clause limitative de garantie, doit avoir été acceptée par l'acquéreur. Lorsque acquéreur et vendeur sont en relations d'affaires suivies, la preuve d'une telle acceptation ne paraît pas pouvoir résulter de la seule poursuite de ces relations : il faut que chaque contrat se réfère à la clause, de façon directe ou indirecte (Cass. 1 re civ. 18 oct. 2005, RLDC, janv. 2006, n o 945). De plus, la clause doit révéler clairement son objet, car la jurisprudence tend à priver d'effet les clauses ambiguës. Par exemple, la stipulation suivant laquelle un transporteur vend un camion d'occasion « dans l'état où il se trouve » n'implique pas la non-garantie, par le vendeur, des vices cachés (Cass. com. 9 déc. 1975, D. 1976, somm. 28). B. - Exceptions 648. Deux ordres d'exceptions sont apportés au principe de validité des clauses restrictives ou exclusives de la garantie contre les vices cachés : ces clauses sont privées d'efficacité lorsque le vendeur profane est de mauvaise foi, ainsi que lorsque le vendeur est un professionnel. Elles le sont aussi lorsqu'elles sont incompatibles avec une obligation de police administrative. Lire la mise à jour 648 s. Mérule : la mauvaise foi du vendeur n'est pas divisible. - La connaissance de la présence de mérule dans l'immeuble oblige le vendeur de mauvaise foi à réparer tous les désordres imputables à ce vice. La mauvaise foi est donc indivisible… L'acheteur doit savoir qu'il achète un bien touché par le mérule, à défaut il doit être garanti de tous les désordres qui procèdent du mérule dissimulé en un endroit. Sur ce point, au vu des articles 1643 et 1645 du code civil, l'arrêt de la cour de Douai qui limitait la condamnation du vendeur est cassé (Civ. 3 e , 19 nov. 2008, n o 07-16.746 , D. 2009. 297, obs. Prigent ). Insecte xylophage : la mauvaise foi du vendeur n'est pas divisible. - La connaissance de la présence d'insectes xylophages dans l'immeuble oblige le vendeur de mauvaise foi à réparer tous les désordres imputables à ce vice (Civ. 3 e , 14 avr. 2010, n o 09- 14.455 , Dalloz actualité, 7 mai 2010, obs. Prigent). 1° - Vendeur profane de mauvaise foi 649. Pour que la clause étudiée soit applicable, il faut que le vendeur soit de bonne foi. Cette exigence est énoncée implicitement par l'article 1643 du code civil, qui n'envisage la clause de non-garantie que dans le cas où le vendeur « n'aurait pas connu » les vices lors de la vente ; elle s'autorise du bon sens : la clause de non-garantie ne saurait permettre au vendeur d'échapper aux conséquences de l'inexécution dolosive de son obligation. 650. Il a été jugé que la clause de non-garantie doit être privée d'efficacité, dans une vente immobilière, lorsque l'immeuble comportait des défectuosités techniques dans sa charpente et dans sa toiture, qui étaient parfaitement connues du vendeur au jour du contrat (Cass. 3 e civ. 18 avr. 1974, D. 1974, IR 152 ; adde, dans un cas de ventes successives : Cass. 3 e civ. 16 nov. 1988, Bull. civ. III, n o 164). 651. Il est permis d'assimiler au vendeur de mauvaise foi celui qui méconnaît les obligations légales d'information mises à sa charge vis-à-vis de l'acquéreur. Il en est ainsi, spécialement, lorsque le vendeur ne satisfait pas au formalisme informatif prévu, en matière de vente immobilière, relativement au risque d'exposition au plomb ou à l'amiante, relativement à la présence des termites dans l'immeuble vendu, relativement à l'installation de gaz et à l'installation intérieure d'électricité (sur ce formalisme, V. Vente [2 o formation]). Aussi, l'article L. 271-4, II, du code de la construction et de l'habitation énonce qu'à défaut, lors de la signature de l'acte authentique de vente, des états en cours de validité relatifs au plomb, à l'amiante, aux termites, à l'installation du gaz et à l'installation électrique, le vendeur ne peut pas se prévaloir de la clause d'exonération de garantie des vices cachés correspondante. La solution vaut à l'égard du vendeur non professionnel comme à l'égard du vendeur professionnel. Il est notable que la clause de non-garantie n'est alors écartée que si se révèle, par la suite, un défaut affectant un élément à propos duquel la fourniture d'un état était requise. 2° - Vendeur professionnel 652. Le vendeur professionnel est irréfragablement présumé avoir connu, lors de la vente, les vices cachés ; ce qui revient à l'assimiler au vendeur de mauvaise foi. Il en est ainsi, même au cas où le bien est livré directement par le fournisseur au client final (Cass. 1 re civ. 8 juin 1999, Bull. civ. I, n o 198). En conséquence, les clauses restrictives ou exclusives de garantie stipulées par lui sont sans valeur. Lire la mise à jour 652. Vente d'immeuble : notion de « vendeur professionnel ». - Doit être assimilé à un professionnel, présumé connaître les vices de construction affectant le bien, le vendeur profane ayant lui-même conçu et installé l'objet affecté du vice. Par conséquent, il ne peut bénéficier de l'application d'une clause d'exclusion de garantie des vices cachés contenue dans l'acte de vente (Civ. 3 e , 10 juill. 2013, n o 12-17.149 , Dalloz actualité, 6 sept. 2013, obs. Kebir). 653. La solution a été consacrée à partir de 1965 dans les rapports entre vendeurs professionnels et acheteurs profanes (Cass. 1 re civ. 19 janv. 1965, D. 1965. 389 ; 17 mai 1965, Bull. civ. I, n o 324 ; Cass. com. 4 juin 1969, D. 1970. 51). Elle est applicable aussi bien au fabricant (Cass. com. 17 oct. 1977, Gaz. Pal. 1978. 1. 221, note A. Plancqueel) qu'au revendeur intermédiaire (Cass. 1 re civ. 27 oct. 1982, Bull. civ. I, n o 308), ou au vendeur que ses compétences techniques autorisent à assimiler à un vendeur professionnel (V., par ex., pour le contremaître dans une entreprise de maçonnerie, qui a édifié la maison litigieuse en vue de la vendre, Cass. 3 e civ. 5 avr. 1978, Bull. civ. III, n o 155, D. 1978, IR 490). Et elle vaut tout autant pour les clauses qui aménagent ou limitent la garantie que pour celles qui la suppriment (Cass. com. 4 juin 1969, préc. ; Cass. 1 re civ. 5 mai 1982, Bull. civ. I, n o 163, à propos d'une clause imposant à l'acheteur le remplacement du bien). 654. Cette jurisprudence a été consacrée, dans les rapports entre les vendeurs professionnels et les consommateurs, par la législation sur les clauses abusives (C. consom., art. L. 132-1, combiné avec l'art. R. 131-2), qui interdit purement et simplement au vendeur professionnel d'éluder la garantie légale, et par les dispositions du code de la consommation issues de l'ordonnance de transposition du 17 février 2005, relatives à la nouvelle « garantie légale de conformité » (V. supra, n os 392 et s.). 655. La rigueur du régime applicable, en l'occurrence, au vendeur professionnel se trouve accentuée par le fait que la prohibition des clauses limitatives ou exclusives de garantie s'étend, selon la jurisprudence, au cas où l'acheteur est lui-même un professionnel ; au soutien de cette solution, les arrêts font valoir que « le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue, même à un professionnel » (Cass. com. 27 nov. 1991, Bull. civ. IV, n o 367). 656. Ce n'est que dans l'éventualité où l'acheteur professionnel est de la même spécialité que le vendeur, c'est-à-dire au cas où il est en mesure d'apprécier les vices de la chose achetée, que la clause restrictive ou exclusive de garantie peut être valablement stipulée (Cass. com. 8 oct. 1973, JCP 1975. II. 17927, note J. Ghestin ; 8 juill. 1975, JCP 1976. II. 18332 ; Cass. 3 e civ. 30 oct. 1978 et Cass. com. 6 nov. 1978, JCP 1979. II. 19178, note J. Ghestin ; 3 déc. 1985, Bull. civ. IV, n o 287 ; 22 juin 1993, Bull. civ. IV, n o 267 ; Cass. 1 re civ. 20 févr. 1996, Bull. civ. I, n o 86 ; Cass. com. 3 févr. 1998, Bull. civ. IV, n o 60, D. 1998. 455, note J. Revel ; Cass. 3 e civ. 27 sept. 2000, D. 2001. 2628, note Storck). Mais, même dans ce cas, le jeu de la clause serait écarté si la mauvaise foi du vendeur était établie (Cass. 1 re civ. 22 nov. 1978, JCP 1979. II. 19139, note G. Viney), ou si le vice se révélait indécelable (V. supra, n o 637). 3° - Clause contrevenant à une obligation de police administrative 657. La clause d'un acte de vente immobilière stipulant que l'acquéreur prendra le bien dans son état actuel est impuissante à mettre en échec une obligation de police administrative, dont se réclame l'acquéreur, et qui impose, nonobstant tout rapport de droit privé, au dernier exploitant d'une installation classée, aux droits duquel se trouve le vendeur, de remettre en état les lieux sous peine de sanction pénale. En conséquence, le même vendeur qui, par son inaction, a contraint l'acquéreur à la remise en état, commet une faute au sens de l'article 1382 du code civil, dont il doit réparation à hauteur du préjudice causé à l'acquéreur (Cass. 3 e civ. 16 mars 2005, D. 2006. 50, note M. Boutonnet ). § 3 - Clauses mixtes 658. Il arrive fréquemment que, sous l'effet de la concurrence, des garanties soient insérées, dans les contrats de vente établis par les vendeurs professionnels, qui, à certains égards, sont plus favorables à l'acheteur que la garantie légale - en ce que, par exemple, la condition d'antériorité du vice est écartée, ou en ce que les caractères du vice garanti sont indifférents, ou encore en ce que le fabricant ou le vendeur s'engage à assurer le remplacement ou la réparation de la chose -, mais, à d'autres égards - spécialement, quant à la durée de la garantie -, moins avantageuses (V. P. ANCEL, La garantie conventionnelle des vices cachés dans les conditions générales de vente en matière mobilière, RTD com. 1979. 203 ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n os 158 et s. ; F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 294). 659. En présence de telles clauses, les tribunaux paraissent refuser d'appréhender globalement la garantie contractuelle ainsi conçue : les stipulations favorables à l'acheteur sont regardées par eux comme licites ; les autres se voient appliquer le régime général des clauses limitatives ou restrictives de la garantie (V. supra, n os 652 et s.). La position jurisprudentielle s'explique par le fait que les tribunaux considèrent que les garanties contractuelles ne se substituent pas, mais s'ajoutent à la garantie légale (Cass. com. 30 mai 1967, Gaz. Pal. 1967. 2. 79). 660. Il en découle que l'acheteur est libre d'invoquer celle des deux garanties qui lui est la plus favorable (Cass. com. 8 nov. 1976, Gaz. Pal. 1977. 2. 433, note A. Plancqueel ; Cass. 1 re civ. 5 mai 1982, Bull. civ. I, n o 163) ; spécialement, s'il refuse le remplacement des pièces défectueuses dans le cadre de la garantie contractuelle, il peut toujours demander la résolution du contrat en application de la garantie légale (Cass. com. 28 juin 1994, Bull. civ. IV, n o 248). Il s'ensuit aussi que, si l'acheteur choisit d'exercer l'action fondée sur la garantie contractuelle, cette action n'est pas soumise à la règle du bref délai, mais à la prescription de droit commun (Cass. com. 2 mai 1990, Bull. civ. IV, n o 132, RTD civ. 1991. 136, obs. P. Rémy ; Cass. 1 re civ. 6 juill. 1999, Contrats, conc., consom. 1999, comm. 174, obs. L. Leveneur). 6 6 1 . Au demeurant la stipulation des garanties contractuelles incluses dans les ventes entre professionnels et consommateurs est, depuis l'ordonnance de transposition de la directive du 25 mai 1999, réglementée par les articles L. 211- 15 et L. 211-16 du code de la consommation (V. supra, n os 395 et 396). Art. 3 - Garantie dans les ventes d'animaux domestiques Bibliographie. - J. LACHAUD, Feu les vices rédhibitoires. Gaz. Pal. 1990. 1, doctr. 250. 662. Les rédacteurs du code civil n'avaient pas prévu de dispositions spécifiques intéressant la garantie des vices cachés dans les ventes d'animaux. Les premiers éléments d'un régime particulier concernant celle-ci se trouvaient dans une loi du 20 juin 1838. Le siège de la matière réside aujourd'hui dans les articles L. 213-1 et suivants du code rural pour la partie législative, et dans les articles R. 213-1 et suivants du même code pour la partie réglementaire. Ce dispositif particulier s'explique par le souci de faciliter l'exécution des obligations du vendeur, en rendant plus strictes les conditions de la garantie, compte tenu de la complexité de la structure animale. Mais il ne concerne pas tous les animaux, ni tous les défauts qui peuvent les affecter. Il importe d'étudier successivement le domaine, la mise en oeuvre et les effets de la garantie spécifique des vices rédhibitoires en la matière. § 1 - Domaine de la garantie spécifique 663. Le domaine de la garantie des vices rédhibitoires dans les ventes d'animaux est strictement délimité par les articles L. 213-1 à L. 213-4 du code rural. Il convient d'indiquer d'emblée que, lorsque la vente d'un animal concerné par ces textes est conclue entre un vendeur professionnel et un acheteur consommateur, ce dernier, s'il le préfère, peut mettre en oeuvre la « garantie de conformité » prévue et réglementée par le code de la consommation depuis l'ordonnance de transposition du 17 février 2005 (sur cette garantie, V. supra, n os 374 et s.) : l'article L. 213-1 du code rural dispose, en effet, que les règles spécifiques relatives aux vices rédhibitoires dans les ventes d'animaux s'appliquent « sans préjudice […] de l'application des articles L. 211-1 à L. 211-15, L. 211-17 et L. 211-18 du code de la consommation… ». L'absence de référence à l'article L. 211-16 s'explique par le fait que la règle dont ce texte est porteur - qui a trait à la garantie commerciale portant sur « la remise en état » de la chose - n'est pas transposable à la vente d'animaux. Lire la mise à jour 663. Vente d'animaux domestiques. Option du consommateur entre les règles du code rural et celles du code de la consommation. - Il résulte de l'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime que les dispositions qui régissent la garantie légale de conformité sont applicables aux ventes d'animaux conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur, sans préjudice de l'application des articles L. 211-1 à L. 211-15, L. 211-17 et L. 211-18 du code de la consommation (Civ. 1 re , 12 juin 2012, n o 11-19.104 , Dalloz actualité, 10 juill. 2012, obs. Fleuriot). 664. Cela posé, comme dans le cadre des ventes portant sur d'autres biens mobiliers, la nouvelle « garantie de conformité » offerte à l'acheteur consommateur, lorsqu'elle a vocation à s'appliquer, n'a pas pour effet d'écarter systématiquement la garantie des vices rédhibitoires, telle qu'elle est aménagée par les articles L. 213-1 et suivants du code rural ; les deux garanties entrent simplement en concurrence, et l'acheteur consommateur est libre de choisir celle qui lui apparaît la plus avantageuse (rappr. supra, n o 535). 665. L'article L. 213-1 précise aussi que la garantie des vices rédhibitoires est organisée par lui et par les textes suivants « sans préjudice […] des dommages et intérêts qui peuvent être dus, s'il y a dol ». Ce disant, le texte consacre la solution prétorienne, aujourd'hui acquise, et suivant laquelle l'action en garantie des vices cachés n'est pas exclusive de l'action pour dol (V. supra, n o 568 ; adde : Vente [2 o formation]). Au surplus, en ne visant que les seuls « dommages et intérêts » pour dol, le texte admet expressément que, en présence d'un dol incident, l'acquéreur insatisfait est en droit de solliciter l'application cumulée de la responsabilité civile délictuelle, ouvrant droit à une indemnisation spécifique suivant les conditions de l'article 1382 du code civil, et de la garantie des défauts cachés, avec les sanctions attachées à cette dernière. 666. Enfin, l'article L. 213-1 énonce le caractère supplétif du régime spécifique de la garantie des vices cachés, tel qu'il est organisé par les textes suivants, puisqu'il précise que ceux-ci s'appliquent « à défaut de conventions contraires… ». La délimitation légale du domaine de cette garantie peut donc se trouver affectée par les exclusions conventionnelles dont celle-ci est susceptible de faire l'objet. A. - Délimitation légale 667. Des articles L. 213-1 à L. 213-4 du code rural, combinés avec les articles R. 213-1 et R. 213-2 du même code, il ressort que les cas où la garantie spécifique s'applique sont moins nombreux que les cas où elle est exclue. 1° - Cas où la garantie spécifique s'applique 668. Les textes qui gouvernent la garantie des vices rédhibitoires dans la vente (ou l'échange) d'animaux ne s'appliquent qu'aux animaux domestiques, qui sont répartis en deux catégories, savoir, d'une part, « les animaux d'élevage ou de rente », et, d'autre part, « les animaux de compagnie ». La première catégorie englobe le cheval, l'âne et le mulet, l'espèce porcine, et les espèces ovine, bovine et caprine (C. rur., art. R. 213-1) ; la seconde, les espèces canine et féline, autrement dit les chiens et les chats (C. rur., art. R. 213-2). Les ventes portant sur les autres animaux ne relèvent donc pas de la garantie spécifique présentement étudiée (infra, n os 671 et s.). 669. En outre, ne sont « réputés » vices rédhibitoires susceptibles, pour chacune des catégories d'animaux visées, de relever de la garantie spécifique, que les maladies énoncées de manière limitative par le législateur (mêmes textes), étant précisé que cette liste peut être modifiée par décret en Conseil d'État (C. rur., art. L. 213-4). En l'état des textes, il est permis de citer, à titre d'exemples, parmi les maladies permettant à l'acheteur d'invoquer la garantie régissant les ventes d'animaux domestiques : l'immobilité, l'emphysème pulmonaire et le cornage chronique pour le cheval, l'âne et le mulet ; la ladrerie pour l'espèce porcine ; la brucellose pour les espèces bovine, ovine et caprine (C. rur., art. R. 213-1) ; la maladie de Carré et l'hépatite contagieuse pour l'espèce canine ; la péritonite infectieuse féline pour l'espèce féline (C. rur., art. R. 213-2). 670. À partir du moment où les conditions d'application du régime spécifique sont réunies, et dès lors que n'est établie l'existence d'aucune convention contraire, il incombe au juge de relever d'office que l'action en garantie est régie par les articles L. 213-1 et suivants du code rural (Cass. 1 re civ. 29 janv. 2002, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 74, obs. L. Leveneur ; 25 janv. 2005, RD rur. 2005. 15, obs. Gimonprez). 2° - Cas où la garantie spécifique est exclue a. - Animaux sauvages 671. Les textes précités ne concernant que les ventes (et échanges) d'animaux domestiques, tels que ceux-ci ont été définis, la vente des animaux sauvages ne relève pas des dispositions du code rural, mais obéit au régime de droit commun de la garantie des vices cachés. b. - Animaux non sauvages et maladies exclus par les articles R. 213-1 et R. 213-2 du code rural 672. Il ressort d'une lecture a contrario des textes que la garantie aménagée spécifiquement par le code rural est écartée lorsque la vente porte sur un animal qui, bien que non sauvage, n'est pas compris dans la liste légale des animaux domestiques, et qu'il en est de même au cas où un animal compris dans cette liste est atteint d'une maladie ou d'un défaut de nature à en compromettre la destination, mais qui ne fait pas partie de la liste des maladies recensées par ces deux textes. 673. Cette solution présente l'inconvénient de priver, en principe, l'acheteur de tout droit à garantie. En effet, la garantie instaurée spécifiquement par le code rural pour les ventes d'animaux domestiques revêt, dit-on, un caractère exclusif. De sorte que, lorsqu'elle est écartée, les articles 1641 et suivants du code civil n'ont pas lieu de s'appliquer. Par exemple, le prognathisme du chiot, parce qu'il ne figure pas parmi les maladies ou défauts réputés « vices rédhibitoires » par l'article R. 213-2 du code rural, n'est pas davantage un vice caché ouvrant droit à application de l'article 1641 du code civil (CA Versailles, 24 févr. 2004, RD rur. 2005. 334). 674. Pour améliorer la condition de l'acheteur, la jurisprudence admet que, par convention, les parties soumettent la vente d'animaux non sauvages à la garantie légale de droit commun, c'est-à-dire aux articles 1641 et suivants du code civil. Une telle convention peut même être implicite et résulter de la nature de la chose vendue (Cass. req. 10 nov. 1885, DP 1885. 1. 396), ou « de la destination des animaux vendus et du but que les parties s'étaient proposé et qui constituait la condition essentielle de leur engagement » (Cass. 1 re civ. 11 janv. 1989, Bull. civ. I, n o 1, D. 1989, IR 34). 675. Cela a été jugé, par exemple, à propos d'une vente portant sur « une génisse pleine », et dont les conditions générales démontraient l'existence certaine d'une garantie donnée sur les qualités à la lactation et à la reproduction de la génisse vendue (CA Paris, 14 janv. 1977, Gaz. Pal. 1977. 2. 393 ; Cass. 1 re civ. 12 juill. 1978, D. 1978, IR 454), de la vente d'un animal mort par la suite d'une hypertrophie du foie, vice caché rendant incontestablement la bête impropre à la consommation à laquelle elle était destinée (Cass. 1 re civ. 17 févr. 1982, D. 1982, IR 284), ou encore d'une vente de truites qui avaient contaminé l'élevage d'un acquéreur pisciculteur (Cass. 1 re civ. 26 nov. 1981, Bull. civ. I, n o 353, D. 1982, IR 228). 676. Il a été souvent jugé, également, qu'en vendant à un boucher un animal qu'il sait être destiné à l'abattage pour le commerce, le vendeur s'engage à livrer un animal propre à la consommation et répond du vice qui l'y rend impropre, hors énumération, et suivant les règles du code civil (Cass. req. 23 mars 1887, DP 1888. 1. 28 ; Cass. 1 re civ. 11 mai 1971, Gaz. Pal. 1971. 2. 440, note F.-G. Bertrand, D. 1971, somm. 204). c. - Animaux atteints de maladies contagieuses 677. Dans un souci de police sanitaire, le législateur a entendu lutter avec énergie contre les maladies contagieuses chez les animaux, spécialement en empêchant la propagation de ces maladies. La garantie des vices est apparue comme insuffisante au regard de cet objectif. Aussi, le législateur l'a écartée au profit de la nullité des ventes d'animaux atteints de maladies contagieuses (C. rur., art. L. 223-7). 678. La jurisprudence paraît admettre, cependant, qu'en présence d'une maladie qui est à la fois une maladie contagieuse et un vice rédhibitoire au sens des articles R. 213-1 et R. 213-2 du code rural, l'acheteur fonde indifféremment son action sur l'une ou l'autre des deux causes (CA Dijon, 7 mai 1975, D. 1976. 527, note B. Vigneron, à propos de la brucellose ; Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, Bull. civ. I, n o 147). 679. Sous le bénéfice de cette remarque, l'interdiction des ventes d'animaux infectés de maladies contagieuses concerne les animaux « atteints ou soupçonnés d'être atteints… » d'une telle maladie. Les maladies réputées contagieuses sont énumérées à l'article D. 223-21 du code rural. 680. C'est évidemment à l'acheteur qu'il revient de prouver, par tous moyens, que l'animal était, lors de la vente, atteint d'une maladie contagieuse. L'action en nullité est enfermée dans des délais étroits : l'acheteur doit, en principe, agir dans les quarante-cinq jours de la livraison s'il n'y a poursuite du ministère public ; et, au cas où l'animal a été abattu, le délai est réduit à dix jours à partir du jour de l'abattage, sans que l'action puisse jamais être introduite après le délai de quarante-cinq jours ou, au cas où le ministère public a poursuivi, après le délai de prescription triennale gouvernant la matière correctionnelle (C. rur., art. L. 223-7). 681. Ces délais constituent des délais de déchéance, non de prescription ; de caractère préfix, ils ne sont susceptibles ni de suspension, ni d'interruption, car ils répondent à la nécessité d'agir vite en raison de la fragilité, croissante avec le temps, de la preuve de la nature de la maladie (CA Aix-en-Provence, 23 mars 1977, Gaz. Pal. 1978. 2. 634, note J. Mégret ; adde : Cass. 1 re civ. 30 mai 1962, D. 1962. 697). Une réclamation constituée par une lettre recommandée avec accusé de réception n'est pas de nature à interrompre le délai de l'action en nullité (Cass. 1 re civ. 17 mars 1992, Bull. civ. I, n o 81). 682. La nullité de la vente, qui est d'ordre public, oblige le vendeur à restituer à l'acheteur, outre le prix, les frais que la vente lui a causés, en particulier les frais de soins et de nourriture donnés à l'animal litigieux. 683. Si l'animal est atteint d'une maladie qui nécessite l'abattage, il est abattu chez l'acheteur, aux frais du vendeur. 684. Au cas où la mauvaise foi du vendeur est établie, celui-ci doit, en outre, indemniser l'acheteur de tous les chefs de préjudice. Le vendeur professionnel étant assimilé au vendeur de mauvaise foi, il a été jugé que le vendeur professionnel qui avait vendu des bêtes atteintes d'une maladie contagieuse devait indemniser l'acquéreur, contraint d'abattre son troupeau contaminé, à hauteur de la valeur des animaux abattus, diminuée des sommes versées pour prix de ceux retenus pour la boucherie, ainsi que du dommage résultant de la perte de lait, des prêts contractés pour la reconstitution du troupeau et du trouble commercial (CA Lyon, 18 oct. 1979, Gaz. Pal. 1980. 1, somm. 304). B. - Exclusions conventionnelles 685. Alors même que sont réunies les conditions posées par la loi, pour que le régime de la garantie des vices rédhibitoires propre aux ventes d'animaux domestiques s'applique, les parties peuvent convenir expressément d'écarter ce régime, puisque l'article L. 213-1 du code rural dispose que c'est « à défaut de conventions contraires » qu'il y a lieu de le mettre en oeuvre (V. supra, n o 666). 686. Ainsi, tout d'abord, il est reconnu aux contractants le droit de se placer sous l'empire des articles 1641 et suivants du code civil, plutôt que sous l'empire des textes du code rural (Cass. 1 re civ. 25 mai 1976, D. 1976, IR 268 ; 5 mai 1987, Bull. civ. I, n o 136). Mais l'existence d'une convention en ce sens doit être établie (Cass. 1 re civ. 6 mars 2001, Bull. civ. I, n o 65, D. 2001, IR 1073 ). 687. De même, il est en principe possible de stipuler une clause limitative ou exclusive de la garantie, sous le bénéfice des remarques suivantes. En premier lieu, une telle clause doit être réputée non écrite, en raison de son caractère abusif, si elle est stipulée dans une vente conclue entre un vendeur professionnel et un consommateur. En deuxième lieu, la clause de non- garantie ou restrictive de la garantie, même régulièrement stipulée, ne permet pas, en application des principes du droit commun des contrats, de libérer le vendeur de son dol ou de sa mauvaise foi. Par exemple, le vendeur qui enivre le cheval, avant la vente, pour dissimuler la méchanceté de l'animal (CA Caen, 6 nov. 1872, Rec. médecine vétérinaire 1873. 500), ou qui dissimule simplement un vice qu'il connaît à l'acheteur (T. civ. Bordeaux, 9 mai 1910, DP 1912. 2. 97, note L. Thomas), ne peut pas se prévaloir de ladite clause. En troisième et dernier lieu, le vendeur professionnel doit être assimilé au vendeur de mauvaise foi, dès lors que l'acheteur n'est pas un professionnel de la même spécialité que lui : il n'y a pas lieu d'écarter ici les solutions dégagées dans le cadre de la garantie de droit commun (V. supra, n os 655 et 656). § 2 - Mise en oeuvre de la garantie spécifique 688. Comme dans le cadre de la garantie de droit commun (V. supra, n o 585), l'acheteur d'un animal domestique atteint d'une maladie visée par les articles R. 213-1 et R. 213-2 du code rural bénéficie parfois d'une option entre l'action en garantie des vices cachés et une autre action : tel est, semble-t-il, le cas lorsque la maladie de l'animal, bien que visée par l'un ou l'autre de ces deux textes, est aussi une maladie contagieuse susceptible d'ouvrir à l'acheteur l'action en nullité de l'article L. 223-7 du code rural (V. supra, n o 678) ; Il en va de même lorsque l'acheteur, après avoir établi que, du fait de la dissimulation par le vendeur de la maladie infectant l'animal, son consentement a été vicié, entend exercer l'action en nullité de l'article 1117 du code civil pour dol (Cass. 1 re civ. 17 mars 1992, Bull. civ. I, n o 81). L'acheteur a été pareillement admis à exercer l'action en nullité pour erreur sur les qualités substantielles de l'animal (Cass. 1 re civ. 24 avr. 1985, Bull. civ. I, n o 127). Mais cette dernière solution ne paraît pas compatible avec la jurisprudence plus récente de la Cour de cassation écartant, dans la vente de droit commun, la possibilité d'agir sur le fondement d'une telle erreur en présence d'un vice caché (V. Vente [2 o formation], et les arrêts cités). 689. Dans les cas où l'acheteur opte pour une autre action que celle fondée sur la garantie spécifique des vices cachés, la mise en oeuvre de cette action obéit à ses règles propres, non au régime de l'action en garantie des vices rédhibitoires (V. les arrêts cités au n o précédent, et se rapportant au dol et à l'erreur). En revanche, si l'acheteur choisit d'exercer l'action en garantie spécifique, ou si celle-ci lui est seule ouverte, il doit respecter les règles de délai et les modalités d'exercice auxquelles elle est soumise. A. - Délai 690. La durée des délais impartis à l'acheteur pour introduire l'une des actions ouvertes par l'existence d'un vice rédhibitoire est extrêmement courte. Le délai normal, tel qu'il est fixé par l'article R. 213-5 du code rural, est de dix jours. Le même texte prévoit que le délai est porté à quinze jours pour la tuberculose bovine, et à trente jours pour l'uvéité isolée et l'anémie infectieuse dans l'espèce équine, pour la brucellose, la leucose enzootique et la rhinotrachéite infectieuse dans l'espèce bovine, pour la brucellose dans l'espèce caprine, ainsi que pour les maladies ou défauts des espèces canine ou féline mentionnés à l'article L. 213-3. 691. Dans les cas de maladies transmissibles des espèces canine ou féline, l'action en garantie ne peut être exercée que si un diagnostic de suspicion, signé par un vétérinaire, a été établi auparavant, selon les critères définis par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, et dans des délais variables suivant les maladies (sur ces délais, V. C. rur., art. R. 213-6). 692. Le point de départ des délais ci-dessus visés se situe à la date de la livraison de l'animal (C. rur., art. R. 213-7), non de la découverte du vice ; il est compté conformément aux principes posés aux articles 640 à 642 du nouveau code de procédure civile. La mention de la date susvisée doit être portée sur la facture ou sur l'avis de livraison remis à l'acheteur (même texte). 693. Un certain nombre de solutions auxquelles les textes antérieurs à ceux actuellement en vigueur avaient donné lieu paraissent devoir conserver leur empire. Ainsi, il avait été jugé que le délai légal n'est pas un délai préfix, et qu'il peut donc être interrompu ou suspendu (Cass. com. 14 mars 1950, D. 1950. 417) ; de même, la renonciation du vendeur à se prévaloir du délai légal était possible : elle pouvait résulter de l'acceptation par le vendeur, après expiration de ce délai, de régler par voie d'arbitrage le litige qui l'avait opposé à l'acheteur (Cass. 1 re civ. 7 mars 1962, D. 1962, somm. 114). B. - Modalités d'exercice de l'action 694. La recevabilité de l'action commande que, dans les délais impartis pour exercer celle-ci, l'acheteur provoque la nomination d'experts chargés de dresser procès-verbal (C. rur., art. R. 213-3). 695. À cet effet, il adresse une requête verbalement ou par écrit au juge d'instance du lieu où se trouve l'animal. Le juge rend alors une ordonnance portant désignation d'un ou trois experts qui doivent opérer dans le plus bref délai. Les experts désignés par le juge vérifient l'état de l'animal, donnent leur avis et établissent le procès-verbal (C. rur., art. R. 213-3). 696. La demande en garantie proprement dite doit être « portée devant les tribunaux compétents suivant les règles ordinaires du droit » (C. rur., art. R. 213-4). Il y a lieu d'en déduire, spécialement, que si la vente est de nature commerciale, c'est le tribunal de commerce qui doit en connaître (Cass. req. 21 juill. 1915, DP 1916. 1. 207). § 3 - Effets de la garantie spécifique 697. Comme dans le cadre de la garantie légale de droit commun, l'acheteur se voit reconnaître l'option entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire : l'article L. 213-2 du code rural fait référence « aux actions résultant des articles 1641 à 1649 du code civil ». Pour l'essentiel, il suffit donc de renvoyer aux développements antérieurs (V. supra, n os 611 et s.), sous le bénéfice de quelques particularismes, ci-dessous développés, et ayant trait à l'action rédhibitoire, puis à l'action estimatoire. A. - Action rédhibitoire 698. L'action rédhibitoire étant une action en résolution, la vente doit donner lieu aux restitutions de la chose et du prix. Mais le mécanisme est perturbé au cas de mort de l'animal. À ce point de vue, l'article L. 213-9 du code rural fait application des principes dégagés par l'article 1647 du code civil (V. supra, n o 617). Il dispose : « Si l'animal vient à périr, le vendeur n'est pas tenu de la garantie, à moins que l'acheteur n'ait intenté une action régulière dans le délai légal et ne prouve que la perte de l'animal provient de l'une des maladies spécifiées dans l'article L. 213-2 ». Le principe de solution posé par le texte s'autorise de la règle suivant laquelle la perte de la chose est aux risques du propriétaire - en l'espèce, de l'acheteur. La dérogation (« à moins que… ») tient à ce que le vendeur doit garantir les vices cachés. Encore faut-il, pour qu'elle joue, que l'acheteur rapporte la preuve que l'animal est décédé des suites du vice caché dont il était atteint. 699. L'abattage des animaux, auquel l'acheteur a été obligé de procéder en raison de la maladie particulièrement contagieuse dont ces animaux étaient atteints, peut être assimilé à la perte de la chose vendue, dès lors que cette maladie avait la nature d'un vice caché (Cass. 1 re civ. 28 avr. 1976, Bull. civ. I, n o 147). 700. L'article L. 213-6 du code rural prévoit, quant aux animaux vendus pour la boucherie et reconnus tuberculeux après abattage, que le vendeur n'est tenu de rembourser que la valeur des viandes saisies (Cass. 1 re civ. 17 juin 1953, D. 1953. 643). Le même texte précise qu'au cas de saisie totale, le remboursement est égal au prix de la vente diminué de la valeur de la dépouille, et qu'au cas de saisie partielle portant sur la viande, le remboursement mis à la charge du vendeur est égal à la valeur de la partie saisie, calculée sur le prix effectivement reçu par le vendeur et compte tenu de la catégorie de la viande saisie. 701. Le vendeur professionnel, parce qu'il est présumé connaître les vices de l'animal vendu, doit réparer la totalité du préjudice que le vice de l'animal a causé à l'acquéreur (V. supra, n o 639). La solution a été appliquée au vendeur exerçant la profession d'éleveur de taureaux reproducteurs (Cass. 1 re civ. 30 janv. 1967, JCP 1967. II. 15025), ainsi qu'à un éleveur de volailles (Cass. 1 re civ. 8 nov. 1972, D. 1973, somm. 52). B. - Action estimatoire 702. L'action estimatoire prévue par l'article L. 213-7 du code rural présente, en regard de l'action du droit commun aménagée par l'article 1644 du code civil, la particularité de pouvoir être paralysée par le vendeur, qui est en droit d'offrir de reprendre l'animal vendu en restituant le prix et en remboursant à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente. Cette offre a la nature d'une fin de non-recevoir ; le vendeur peut donc l'opposer à l'acheteur en tout état de cause. Section 4 - Obligation d'information et de conseil Bibliographie. - CHRISTIANOS, L'obligation d'information dans la vente de produits mobiliers, thèse, Paris II, 1987. - M. FABRE- MAGNAN, Essai d'une théorie générale de l'information dans les contrats, 1992, LGDJ. - P. JOURDAIN, Le devoir de « se » renseigner (Contribution à l'étude de l'obligation de renseignement), D. 1983, chron. 139. 703. Il a été indiqué que la loi et la jurisprudence soumettent le vendeur, dans un certain nombre de cas, à une obligation d'information relativement au bien objet du contrat, qui participe immédiatement à la protection préventive du consentement de l'acheteur et qui tend à se développer considérablement (V. Vente [2 o formation]). Il a été dit également que cette obligation n'intervient pas seulement lors de la phase précontractuelle, mais peut participer aussi à l'exécution de la vente, où elle vient compléter les obligations de délivrance et de garantie (V. Vente [2 o formation]). C'est à ce dernier point de vue qu'elle retiendra ici l'attention. 704. Lorsque le vendeur est un professionnel, cette obligation est susceptible de s'étendre au conseil. Au plan théorique, l'obligation d'information et l'obligation de conseil sont nettement distinctes. En effet, l'information se borne à « énoncer des faits », tandis que le conseil suppose « une appréciation qui oriente la décision de l'autre partie » (J. GHESTIN, La formation du contrat, 3 e éd., 1993, LGDJ, n o 594). Autrement dit, alors que l'information porte sur des qualités descriptives du bien, ses caractéristiques techniques, sa situation juridique, de telle sorte que l'acheteur puisse s'engager en pleine connaissance de cause, le conseil porte sur les préconisations d'emploi, les précautions d'utilisation, la recherche de l'adéquation de la chose au besoin de l'acheteur. Au plan pratique, la distinction est d'importance, car s'il est possible d'affirmer que tout vendeur est tenu d'une obligation d'information, l'obligation de conseil ne saurait être mise à la charge que du vendeur professionnel. Art. 1 - Obligation d'information de tout vendeur 705. L'existence d'une obligation d'information sur le bien vendu, à la charge de tout vendeur, est aujourd'hui acquise : elle traduit le devoir de loyauté qui doit inspirer les parties tant lors de la formation du contrat que dans le cours de son exécution. Sans doute, le manquement à cette l'obligation, lorsqu'il procède d'une réticence dolosive, peut être sanctionné à l'aide de la théorie des vices du consentement (V. Vente [2 o formation]) ; mais, pour éviter à l'acheteur d'avoir à rapporter la preuve, souvent difficile, de l'intention de tromper qui animait le vendeur lors de la conclusion du contrat, et pour prendre en compte, aussi, le comportement du vendeur postérieur au contrat, la jurisprudence n'hésite pas à consacrer l'autonomie de l'obligation, qu'elle fonde sur d'autres textes, issus tant du droit de la vente que du droit commun des contrats. Lire la mise à jour 705 s. Obligation d'information du vendeur. Installation classée. - L'acquéreur qui sollicite la restitution d'une partie du prix sur le fondement de l'article L. 514-20 du code de l'environnement doit rapporter la preuve que les installations qui se trouvent sur son terrain étaient bien soumises à autorisation et non seulement à déclaration (Civ. 3 e , 20 juin 2007, n o 06-15.663 ). 706. S'agissant du droit de la vente, elle recourt fréquemment à l'article 1602, alinéa 1 er , du code civil, aux termes duquel : « Le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige ». Bien qu'il ne soit porteur que d'une directive d'interprétation du contrat - comme le montre la disposition de l'alinéa 2, suivant laquelle : « Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur » -, la jurisprudence et la doctrine tendent à voir dans ce texte une règle de fond qui consacre l'obligation d'information du vendeur : c'est au visa de l'article 1602 que la Cour de cassation affirme, par exemple, qu'« il appartient au vendeur d'informer l'acquéreur, quelle que soit l'utilisation envisagée pour l'immeuble, de la situation juridique de la propriété vis-à-vis du droit de chasse » (Cass. 3 e civ. 21 févr. 2001, Bull. civ. III, n o 22, D. 2002, somm. 932, obs. G. Pignarre , AJDI 2002. 412, obs. F. Cohet-Cordey ; V. déjà, à propos du droit de chasse, Cass. 3 e civ. 20 mars 1996, Bull. civ. III, n o 84, RD imm. 1997. 90, obs. J.-C. Groslière et C. Saint-Alary Houin ; adde : Cass. 3 e civ. 7 déc. 1988, Gaz. Pal. 1989. 1, somm. 31 ; Cass. 1 re civ. 13 oct. 1993, Bull. civ. I, n o 287, D. 1994, somm. 237 , à propos d'une vente d'ordinateur de capacité insuffisante). C'est encore en s'appuyant sur le même texte que la Cour de cassation a posé que le vendeur concessionnaire doit informer ses clients qu'il ne participe pas aux offres promotionnelles d'équipements proposées par l'importateur sur le plan national (Cass. 1 re civ. 13 avr. 1999, Bull. civ. I, n o 131, D. 1999, IR 146 ). 707. S'agissant du droit commun des contrats, certaines décisions, comme d'ailleurs une fraction importante de la doctrine, fondent l'obligation d'information du vendeur sur le principe de bonne foi, posé à l'article 1134, alinéa 3, du code civil et qui gouverne l'exécution des contrats en général (V. Cass. 3 e civ. 30 juin 1992, Bull. civ. III, n o 238), ainsi que sur la règle énoncée à l'article 1135 du code civil, suivant laquelle : « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature » (V., par ex., A. BÉNABENT, op. cit., n o 197 ; F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 211 ; Cass. 1 re civ. 6 oct. 1982, Bull. civ. I, n o 279 ; 14 déc. 1982, Bull. civ. I, n o 361, RTD civ. 1983. 544, obs. G. Durry). 708. L'obligation d'information pèse sur le vendeur aussi bien au cas de vente mobilière qu'au cas de vente immobilière. Mais la détermination concrète de son contenu est évidemment fonction des caractéristiques du bien objet de la vente. Lorsque celui-ci est un immeuble, la clause de désignation figurant dans l'acte de vente fournit déjà diverses indications à l'acheteur, relatives à la contenance de l'immeuble, à sa composition, aux charges qui le grèvent, éventuellement aux matériaux de construction utilisés… Mais, ainsi que le relèvent des auteurs, « l'information doit surtout porter sur ce qui ne se voit pas : servitudes administratives ou privées restreignant l'usage de l'immeuble, décision de révision du plan d'occupation des sols, procédures en cours, risques d'utilisation et d'éboulement… » (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 216). Ainsi, par exemple, le vendeur de deux lots de copropriété doit informer l'acheteur des restrictions d'usage affectant les terrasses comprises dans ces lots (Cass. 3 e civ. 7 déc. 1988, préc. supra, n o 706) ; le vendeur d'un terrain est tenu de porter à la connaissance de l'acheteur les risques d'éboulement liés à l'utilisation dudit terrain (Cass. 3 e civ. 4 janv. 1991, Bull. civ. III, n o 9, D. 1992, somm. 196, obs. O. Tournafond ) ; le vendeur d'un terrain à bâtir doit informer l'acheteur de l'existence d'une procédure en cours, et mettant en cause la constructibilité du même terrain (Cass. 3 e civ. 30 juin 1992, préc. supra, n o 707) ; et il doit signaler le non-raccordement de l'immeuble vendu au réseau potable, nonobstant la clause de l'acte stipulant que l'acquéreur prend l'immeuble vendu dans son état actuel, sans garantie des vices cachés, et fait son affaire personnelle de la continuation ou de la résiliation de tous contrats d'abonnement à l'eau, au gaz et à l'électricité (Cass. 3 e civ. 28 juin 2000, Gaz. Pal. 2001. 101, note Teillais). 709. Relativement aux biens mobiliers, l'obligation d'information du vendeur existe pareillement. Spécialement, lorsque l'utilisation du bien prévue par l'acheteur est prohibée, ou soumise à une autorisation administrative, le vendeur est tenu d'en aviser l'acheteur (V., à propos d'une maison mobile, Cass. 1 re civ. 6 oct. 1982, Bull. civ. I, n o 279 ; à propos d'un système d'alarme, CA Paris, 13 mai 1987, D. 1987, IR 158). 710. Hormis lorsqu'il a pour effet de provoquer un vice du consentement - exposant du même coup la vente à la nullité -, le manquement à l'obligation d'information du vendeur permet à l'acheteur de solliciter, conformément au droit commun des contrats, la résolution de la vente (C. civ., art. 1184), ou/et d'engager la responsabilité civile de son cocontractant, aux conditions de l'article 1147 du code civil. Ainsi, par exemple, il a été jugé que le vendeur professionnel qui ne pouvait ignorer l'interdiction de construire sur un terrain, et qui ne l'a pas indiqué à l'acquéreur, a manqué à son obligation de renseignement, et que la vente s'en est trouvée résolue (Cass. 3 e civ. 2 déc. 1992, JCP, éd. N, 1993. II. 195, obs. L. Leveneur). Art. 2 - Obligation de conseil du vendeur professionnel 711. Outre l'obligation d'information qui pèse sur tout vendeur, le vendeur professionnel est tenu d'une obligation de conseil dont il convient de préciser le fondement, avant d'examiner le contenu et le régime. Lire la mise à jour 711 s. Obligation de conseil du vendeur professionnel. Obligation de se renseigner pour informer. - Il incombe à la société commerciale Citroën, vendeur professionnel, de prouver qu'elle s'est acquittée de son obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de l'acquéreur du véhicule afin d'être en mesure de l'informer, au regard de la nature et de l'importance des réparations effectuées sur ce véhicule, de l'adéquation de celui-ci à l'utilisation qu'il projetait et aux qualités qu'il en attendait (Civ. 1 re , 11 déc. 2013, n o 12-23.372 ). § 1 - Fondement de l'obligation 712. Ce sont, d'abord, les textes du droit de la consommation qui, dans les rapports entre vendeurs professionnels et consommateurs, instaurent l'obligation de conseil à la charge des premiers nommés, lorsque la vente porte sur un bien mobilier. Il a déjà été indiqué que le contenu des offres de vente est strictement réglementé, à l'effet d'assurer la pleine information du consommateur sur les qualités et caractéristiques du produit vendu ainsi que sur les prix (V. Vente [2 o formation]). Mais l'article L. 211-4 du code de la consommation, issu de l'ordonnance du 17 février 2005, concourt à révéler le devoir spécifique de conseil du vendeur professionnel en ce qu'il assimile les carences accusées par celui-ci dans les instructions de montage ou d'installation « lorsque celle-ci a été mise à sa charge par le contrat ou a été réalisée sous sa responsabilité », à un défaut de conformité. 713. Au-delà des textes du droit de la consommation, la jurisprudence a consacré l'obligation de conseil du vendeur professionnel, en la situant dans le prolongement de l'obligation de délivrance, et en l'asseyant tantôt sur l'article 1604, tantôt sur l'article 1615 du code civil. Ainsi, un arrêt énonce que l'obligation de délivrance d'un matériel s'étend à sa mise au point, et comporte une obligation accessoire d'information et de conseil du client (Cass. 1 re civ. 25 juin 1996, Bull. civ. I, n o 274, Dalloz Affaires 1996. 1028 ; rappr. Cass. com. 1 er déc. 1992, Bull. civ. IV, n o 391, D. 1993, somm. 237, obs. O. Tournafond , visant l'art. 1604 c. civ. ; Cass. 1 re civ. 30 mai 2006, D. 2006, IR 1639 , visant les art. 1147 et 1615 c. civ.). § 2 - Contenu de l'obligation 714. L'obligation de conseil mise à la charge du vendeur professionnel porte à la fois sur le choix du bien, dont le vendeur doit s'assurer de l'aptitude à répondre au besoin de l'acheteur, et, éventuellement, sur les précautions d'emploi qu'appelle le même bien pour que son utilisation soit conforme à sa destination (Cass. 1 re civ. 30 mai 2006, D. 2006, IR 1639 ). Mais son intensité varie tant selon la nature de la chose vendue que selon les qualités respectives des cocontractants. A. - Nature de la chose vendue 715. L'obligation d'information du vendeur revêt une coloration particulière en présence, d'une part, des choses complexes ou nouvelles,et, d'autre part, des choses dangereuses. 1° - Choses complexes ou nouvelles 716. Lorsque la vente porte sur des biens qui revêtent une certaine technicité, le contenu de l'obligation d'information et de conseil du vendeur professionnel est particulièrement étendu : il porte non seulement sur les caractéristiques, mais aussi sur « les contraintes techniques » de la chose vendue ainsi que sur « l'aptitude [de celle-ci] à atteindre le but recherché » (Cass. com. 1 er déc. 1992, préc. supra, n o 713, rendu à propos d'une vente de matériel informatique ; rappr., toujours en matière de vente d'ordinateurs : Cass. com. 17 mars 1981, Bull. civ. IV, n o 150 ; 28 oct. 1986, Bull. civ. IV, n o 195 ; 25 oct. 1994, Contrats, conc., consom. 1995, comm. 3, obs. L. Leveneur ; Cass. 1 re civ. 13 oct. 1993, D. 1994. 211 ; adde, à propos de la vente d'une machine pourvue d'un détecteur de proximité : Cass. com. 15 juin 1976, Bull. civ. IV, n o 207). Pour exécuter convenablement son obligation, le vendeur doit s'informer des besoins de son acheteur (Cass. com. 1 er déc. 1992, préc. ; Cass. 1 re civ. 3 avr. 2002, Comm. com. électr. 2002, n o 131, note L. Grynbaum). 717. L'obligation de conseil est parfois relative à la seule utilisation de la chose : par exemple, le vendeur d'un système de télé-sécurité est tenu de conseiller l'acheteur à l'occasion de l'implantation du système dans le magasin, afin d'éviter qu'il n'existe des zones d'ombre non protégées (Cass. 1 re civ. 18 mai 1989, Bull. civ. I, n o 206) ; le vendeur d'un système informatique doit fournir à l'acheteur l'assistance indispensable à la mise en route du système (Cass. com. 25 oct. 1994, préc. supra, n o 716). 718. Mais l'obligation de conseil peut aller jusqu'à porter sur l'opportunité ou non d'acheter. Spécialement, la jurisprudence a souvent condamné pour manquement au devoir de conseil le vendeur qui n'avait pas dissuadé l'acheteur de faire l'acquisition d'un produit contre-indiqué (V., à propos de matériaux de toiture inappropriés au regard de la région où se situait la construction ou au regard de la construction elle-même, Cass. 1 re civ. 4 oct. 1977, Bull. civ. I, n o 351, Gaz. Pal. 1978. 1. 262, note A. Plancqueel ; Cass. com. 4 déc. 1978, Bull. civ. IV, n o 292, D. 1979, IR 136 ; Cass. 1 re civ. 3 juill. 1985, Bull. civ. I, n o 211, RTD civ. 1986. 368, obs. J. Huet ; à propos d'un produit dénommé « blanc relief » utilisé par l'artiste peintre acheteur et ayant détérioré les toiles réalisées par celui-ci, Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, Bull. civ. I, n o 125, D. 1985. 558, note S. Dion, RTD civ. 1986. 367, obs. J. Huet ; à propos d'une peinture totalement inadaptée alors qu'elle avait été présentée comme « spécialement appropriée » à la destination recherchée, Cass. com. 25 juin 1980, Bull. civ. IV, n o 276, RTD civ. 1981. 157, obs. G. Durry ; rappr., à propos d'un produit chimique mis en vente sans indication quant aux précautions d'emploi, et dont l'utilisation avait détruit une partie de la production de l'acheteur pépiniériste, Cass. 1 re civ. 22 nov. 1978, JCP 1979. II. 19139, note G. Viney). 719. Certaines décisions complètent l'obligation de dissuader l'acheteur de faire l'acquisition du produit inadapté par celle de proposer un produit de remplacement correspondant à l'utilisation recherchée par le même acheteur (Cass. com. 16 juill. 1982, Bull. civ. IV, n o 276 ; 11 juill. 1988, Bull. civ. IV, n o 250). 720. L'obligation d'information et de conseil pèse pareillement sur le vendeur professionnel de biens ou produits nouveaux, qui doivent, à cet égard, être assimilés aux choses complexes (Cass. com. 11 juill. 1988, préc., à propos d'un produit nouveau d'étanchéité ; 2 mai 1990, Bull. civ. IV, n o 133, à propos d'un nouveau revêtement de réservoirs de stockage de gaz de pétrole liquéfiés ; Cass. 1 re civ. 4 mai 1994, n o 92-13.377 , Bull. civ. I, n o 163, D. 1994, IR 166, à propos de graines de cerfeuil tubéreux ; 5 déc. 1995, Bull. civ. I, n o 453, Defrénois 1996. 746, obs. P. Delebecque, à propos de la vente d'un équipement téléphonique pour une clinique vétérinaire ; Cass. 3 e civ. 18 févr. 2004, Bull. civ. III, n o 32, RD imm. 2004. 202, obs. P. Malinvaud , pour un enduit de façade d'un type nouveau) : c'est que le vendeur de tels biens est pourvu de connaissances dont l'acheteur, en raison de la nouveauté de ces derniers, est démuni ; il est dès lors logique de poser que le premier est tenu d'indiquer au second, outre les caractéristiques du produit, la manière d'en user, et qu'il doit dissuader l'acheteur de se procurer un bien qui ne serait pas adapté à ses besoins. 2° - Choses dangereuses Bibliographie. - D. NGUYEN-THANH-BOURGEAIS et J. REVEL, La responsabilité du fabricant en cas de violation de l'obligation de renseigner le consommateur sur les dangers de la chose vendue (à propos d'un arrêt de la Cour de cassation, 1 re chambre civile, du 31 janvier 1973), JCP 1975. I. 2679. 721. Lorsque la chose vendue présente des dangers, le vendeur professionnel est tenu d'indiquer à l'acheteur comment l'utiliser et de le mettre en garde contre les risques liés à l'utilisation de cette chose. Il en est ainsi, par exemple, lorsque la chose présente un caractère inflammable (V. Cass. 1 re civ. 31 janv. 1973, Bull. civ. I, n o 40, à propos d'une colle pour sol en matière plastique ; 13 mai 1986, Bull. civ. I, n o 128, à propos d'un revêtement à base de mousse synthétique), ou lorsque son utilisation peut être la source de blessures ou de lésions (Cass. 1 re civ. 14 déc. 1982, Bull. civ. I, n o 361, D. 1983, IR 131, RTD civ. 1983. 544, obs. G. Durry, à propos d'un produit antiparasitaire dangereux pour les yeux), ou encore lorsque son emploi fait l'objet de contre-indications (Cass. 1 re civ. 7 juin 1989, Bull. civ. I, n o 232, à propos de médicaments vétérinaires). 722. L'obligation d'information et de conseil est renforcée lorsque le vendeur, par ses agissements, a contribué à augmenter la dangerosité de la chose : ainsi, par exemple, le vendeur professionnel d'une bouteille de gaz qui ôte l'organe de sécurité nécessaire dont l'avait munie le fabricant, outre qu'il commet une imprudence en aggravant les risques que l'utilisation de la chose vendue faisait normalement courir à l'acheteur, est tenu d'appeler l'attention de ce dernier sur les précautions particulières que requiert la manipulation d'une bouteille privée de sa poignée (Cass. 1 re civ. 11 déc. 1990, Bull. civ. I, n o 289). 723. En revanche, l'obligation d'information du vendeur ne semble pas s'étendre au-delà des risques prévisibles, en l'état des connaissances scientifiques et techniques lors de la vente : il a été jugé en ce sens que « l'obligation de renseignement des laboratoires ne peut s'appliquer qu'à ce qui est connu lors de l'introduction du médicament sur le marché et à ce qui a été porté à leur connaissance depuis cette date » (Cass. 1 re civ. 8 avr. 1986, Bull. civ. I, n o 82, RTD civ. 1986. 779, obs. J. Huet). L'obligation d'information du vendeur n'englobe donc pas, en la matière, ce qu'on appelle le risque de développement (rappr., à propos de la responsabilité civile du fait des produits défectueux, infra, n o 760). 724. Sous réserve de la solution particulière concernant le risque de développement, l'obligation d'information et de conseil pesant sur le vendeur est largement entendue en présence des choses dangereuses, ou complexes ou nouvelles. Cela tient à ce que, par hypothèse, ces choses sont, le plus souvent, vendues par un professionnel à un acheteur profane. Les qualités respectives des parties sont, en effet, un paramètre important dans la détermination du contenu de l'obligation étudiée. B. - Qualités respectives des cocontractants 1° - Vendeur 725. Il paraît entendu que le vendeur profane est aujourd'hui tenu d'une obligation d'information à l'égard de l'acheteur (V. supra, n os 705 et s.). Cependant, cette obligation, en ce qu'elle porte uniquement, semble-t-il, sur les caractéristiques essentielles de la chose et ne s'étend pas au conseil, participe à la seule protection préventive du consentement de l'acheteur, même si, pour la sanctionner, la jurisprudence s'appuie souvent sur les articles 1602 et 1134 du code civil. Certains auteurs écrivent en ce sens que, pour le vendeur profane, « l'obligation se limite à la loyauté et la bonne foi, telles que les contours en sont donnés dans le cadre du dol par réticence » (F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 219) ; selon un autre auteur, la sanction de l'obligation d'information du vendeur profane « n'est qu'un avatar de celle du dol par réticence » (J. HUET, obs. RTD civ. 1986. 367). Il se déduit de là qu'en l'état du droit positif, le vendeur occasionnel ne paraît pas tenu d'une obligation d'information renforcée, et encore moins d'une obligation de conseil au cas de vente d'une chose complexe (un matériel informatique d'occasion, par ex.) ou dangereuse. 726. En revanche, le vendeur professionnel est, quant à lui, virtuellement tenu de l'obligation d'information et de conseil au sens le plus large du terme. Le contenu de son obligation est déterminé suivant la nature plus ou moins complexe de la chose vendue, selon qu'il s'agit ou non d'un produit nouveau, que la chose est dangereuse ou non (V. supra, n os 715 et s.) ; il dépend aussi des stipulations du contrat : lorsque, par exemple, le vendeur professionnel s'engage à installer le bien vendu, il devra non seulement vérifier l'adéquation dudit bien aux besoins de l'acheteur, mais en outre l'informer sur les modalités d'installation les plus adaptées (rappr. Cass. 1 re civ. 18 mai 1989, préc. supra, n o 717, à propos de la vente d'un système de télé-sécurité ; Cass. com. 25 oct. 1994, préc. supra, n o 716, à propos de la vente d'un système informatique ; pour le fournisseur d'un système de chauffage, Cass. 1 re civ. 7 avr. 1998, Bull. civ. I, n o 150, Contrats, conc., consom. 1998, comm. 97, obs. L. Leveneur ; pour le vendeur-maître d'oeuvre d'un insert de cheminée, Cass. 1 re civ. 17 févr. 1998, Bull. civ. I, n o 61, Gaz. Pal. 1998. 1, somm. 109, obs. Peisse, JCP, éd. E, 1998. 584). 727. L'obligation d'information et de conseil du vendeur professionnel pèse aussi sur le fabricant. La jurisprudence a posé en ce sens que « l'obligation de renseignement incombe aussi bien au fabricant qu'au revendeur spécialisé » (Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, préc. supra, n o 718). La formule suggère que l'obligation d'information du vendeur intermédiaire et non spécialisé est atténuée ; cette obligation serait limitée aux seules informations qu'un tel vendeur serait censé connaître, spécialement en ce qui concerne les dangers du produit vendu (rappr. Cass. 1 re civ. 22 nov. 1978, préc. supra, n o 718 ; G. VINEY, note sous cet arrêt ; J. GHESTIN et B. DESCHÉ, op. cit., n o 869 ; F. COLLART DUTILLEUL et P. DELEBECQUE, op. cit., n o 219). 728. Par dérogation à la solution ci-dessus posée concernant le fabricant, un arrêt a énoncé que le fabricant n'est pas tenu d'une obligation d'information et de conseil lorsqu'il s'est borné à livrer au distributeur le matériel commandé par celui-ci, sans avoir « eu aucun contact » avec la clientèle dont seul le distributeur avait été en mesure d'évaluer les besoins (Cass. com. 5 déc. 1989, Bull. civ. IV, n o 306). 2° - Acheteur 729. Le contenu de l'obligation d'information et de conseil dépend aussi de la qualité de l'acheteur. Si ce dernier est un consommateur alors que le vendeur est un professionnel, il bénéficie évidemment des dispositions légales propres au droit de la consommation et destinées à assurer sa complète information sur le produit acheté (V. Vente [2 o formation] ; adde : supra, n o 712). Au demeurant, le vendeur est alors tenu à son égard, en tant que de besoin, de l'obligation de renseignement et de conseil la plus large : un arrêt a posé de manière particulièrement nette à ce propos qu'« il appartient au vendeur professionnel de matériau acquis par un acheteur profane de le conseiller et de le renseigner, et notamment d'attirer son attention sur les inconvénients inhérents à la qualité du matériau choisi […], ainsi que sur les précautions à prendre pour sa mise en oeuvre, compte tenu de l'usage auquel ce matériau est destiné » (Cass. 1 re civ. 3 juill. 1985, Bull. civ. I, n o 211, RTD civ. 1986. 368, obs. J. Huet). De même, à propos de la vente d'un système de climatisation défectueux, la Cour de cassation a précisé que « l'obligation de conseil à laquelle est tenu le vendeur lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer, fût-il accompagné de l'installateur lors de l'achat, de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui est prévue » (Cass. 1 re civ. 30 mai 2006, préc. supra, n o 713). 730. Cette obligation de renseignement et de conseil porte, en particulier, sur les précautions à prendre pour éviter les dommages susceptibles d'être causés par une chose dangereuse : par exemple, il a été jugé que le fabricant d'un lit rabattable, dont la publicité mentionnait qu'il s'agissait d'un modèle indéréglable et d'une simplicité de manoeuvre remarquable, avait manqué à ses obligations contractuelles et engagé sa responsabilité en vendant l'appareil, malgré un premier accident causé par un lit du même modèle, sans recommander à l'acquéreur de fixer au mur la partie de ce meuble devant rester verticale (Cass. 1 re civ. 15 mai 1979, D. 1979, IR 440). 731. L'obligation d'information et de conseil du vendeur professionnel ou du fabricant peut aussi être très largement entendue lorsque l'acheteur, tout en étant un professionnel, n'est pas de la même spécialité que le vendeur : la solution a été posée, par exemple, à propos de l'achat du « blanc relief » par un artiste peintre, où la Cour de cassation, après avoir relevé à la suite de la cour d'appel que « les dons et qualités manifestés par un artiste peintre n'impliquent pas sa compétence et sa technicité en matière de composition des produits mis à sa disposition », retient, pour justifier l'obligation d'information du fabricant, que « le défaut d'information sur les conditions d'emploi du produit prive l'utilisateur du moyen d'en faire un usage correct, conforme à sa destination » (Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, préc. supra, n o 718). Une solution analogue a été retenue dans un cas où une société exploitant un garage avait fait l'acquisition d'un matériel informatique qu'elle n'était pas parvenue à utiliser : les juges du fond avaient relevé que ladite société, « simple utilisateur novice », ne pouvait accomplir l'effort d'étude et de compréhension indiqué par l'expert, faute de connaissances et de formation adéquates (Cass. com. 28 oct. 1986, Bull. civ. IV, n o 195 ; rappr. Cass. com. 25 oct. 1994, préc. supra, n o 716). 732. Cependant, lorsque, par sa profession, l'acheteur est censé détenir des connaissances sur le caractère inapproprié de la chose à l'usage auquel il la destinait, ou sur la manière dont il convient d'utiliser celle-ci, l'obligation d'information et de conseil du vendeur cesse ou est allégée : la Cour de cassation a affirmé à ce propos que « l'obligation du fabricant à l'égard de l'acheteur professionnel [n'existe] que dans la mesure où la compétence de celui-ci ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés » (Cass. 1 re civ. 3 juin 1998, Bull. civ. I, n o 198 ; adde : Cass. 1 re civ. 20 juin 1995, Bull. civ. I, n o 277, D. 1995, IR 200 ; Cass. com. 28 mai 2002, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 138, obs. L. Leveneur). Par exemple, il a été jugé que « le vendeur d'un produit dont la dénomination était indiquée n'était pas tenu d'y joindre un mode d'emploi, l'acheteur devant en sa qualité de professionnel connaître la formule d'utilisation ou se renseigner sur elle » (Cass. com. 8 janv. 1973, Bull. civ. IV, n o 16). De même, si le fabricant d'un terreau industriel contenant une salinité susceptible, faute d'un important arrosage, de faire périr la végétation que ce terreau est destiné à favoriser, est tenu d'avertir les utilisateurs des précautions à prendre, il est permis d'exiger du sériculteur acheteur de ce terreau qu'il ait « quelques lumières sur la question » (Cass. 1 re civ. 9 déc. 1975, D. 1978. 205, note R. Savatier, JCP 1977. II. 18588, note P. Malinvaud). De même encore, il est légitime d'attendre du maçon qui achète un revêtement de mur qu'il sache que ce revêtement ne peut être posé que sur des murs extérieurs (Cass. com. 5 févr. 1985, Bull. civ. IV, n o 48). Et l'installateur d'une machine destinée au traitement de l'eau ne saurait reprocher au fabricant de cette machine de ne pas s'être inquiété de l'eau à traiter, « cette démarche incombant en premier lieu à l'utilisateur […] qui [en raison de sa spécialité professionnelle] ne pouvait arguer de son ignorance en la matière et à qui il appartenait de consulter la société [fabricante] en lui présentant toutes les données du problème à résoudre » (Cass. 1 re civ. 26 nov. 1981, Bull. civ. I, n o 354 ; adde : Cass. com. 4 mars 2000, JCP 2000. II. 10367, note Talon, à propos de la vente d'un progiciel à un cabinet d'expertise comptable ; Cass. 1 re civ. 28 nov. 2000, D. 2002, somm. 1003 , obs. G. Pignarre ). 733. La formule finale de ce dernier arrêt laisse clairement entendre que, corrélativement à l'obligation d'information et de conseil qui est mise à la charge du vendeur, existe pour l' acheteur un devoir de coopération : l'intéressé doit préciser les utilités attendues du bien qu'il se propose d'acheter, sans quoi il serait malvenu à soutenir, par la suite, que l'inaptitude du bien à satisfaire la destination recherchée est liée à un manquement du vendeur à son obligation d'information et de conseil. Ainsi, à propos de la vente de matériel informatique, il a souvent été jugé que l'acheteur, même profane, devait faire connaître au vendeur ses besoins et ses objectifs (CA Paris, 3 déc. 1976, JCP 1977. II. 18579, note M. Boitard et J.-C. Dubarry ; Cass. com. 9 juin 1979, Bull. civ. IV, n o 186 ; Cass. 1 re civ. 8 juill. 2003, Gaz. Pal. 21-22 avr. 2004, somm., obs. Ganilsy). De même, lorsque l'acheteur entend faire de la chose un usage spécial, il doit en informer le vendeur (V. Cass. com. 24 janv. 1968, JCP 1968. II. 15429, à propos d'une machine à laver que l'acheteur entendait faire fonctionner avec l'eau du puits particulièrement calcaire et non avec l'eau de ville, sans l'avoir dit au vendeur). Ces solutions s'autorisent d'une application symétrique du principe suivant lequel les conventions doivent être exécutées de bonne foi. 734. Au demeurant, l'acheteur, qu'il soit consommateur ou professionnel, doit se montrer diligent dans l'utilisation de la chose ; si le bien acquis subit un dommage en raison de l'imprudence de l'acquéreur, la responsabilité du vendeur s'en trouvera atténuée, voire supprimée : il a été jugé, en ce sens, à propos de la corrosion affectant le matériel d'arrosage objet de la vente et due à la salinité de l'eau, que l'obligation de conseil du vendeur ayant été exécutée, il appartenait à l'acheteur de prendre les précautions nécessaires, et que le vendeur ne pouvait être tenu pour responsable de ce dommage (Cass. 1 re civ. 10 juill. 1996, Bull. civ. I, n o 318, D. 1997, somm. 173, obs. P. Delebecque ; rappr., à propos du manquement à la prudence d'un pruniculteur dans l'utilisation d'un produit phytosanitaire, Cass. 1 re civ. 30 nov. 2004, Bull. civ. I, n o 298, D. 2005, IR 114 ; adde : les décisions citées infra, n o 739). 735. Enfin, le devoir de conseil du vendeur professionnel se limite au domaine de sa compétence technique. Aussi, l'acquéreur d'un système de vidéo-surveillance destiné à équiper une cafétéria ne saurait légitimement reprocher à la société venderesse de ne pas l'avoir averti du fait que ce matériel était inutilisable, dans un tel endroit, en raison de la législation du travail, alors que, sur celle-ci, l'acquéreur était tenu de s'informer par lui-même (Cass. 1 re civ. 25 juin 2002, Bull. civ. I, n o 177). § 3 - Régime de l'obligation 736. La Cour de cassation a consacré le caractère contractuel de l'obligation d'information et de conseil du vendeur ; cela, aussi bien lorsque l'inexécution de cette obligation est rattachable à la période précontractuelle (V. Cass. com. 25 juin 1980, Bull. civ. IV, n o 276, RTD civ. 1981. 157, obs. G. Durry ; 1 er déc. 1992, Bull. civ. IV, n o 391, D. 1993, somm. 237, obs. O. Tournafond ; Cass. 3 e civ. 30 juin 1992, Bull. civ. III, n o 238), que dans le cas contraire (Cass. 1 re civ. 31 janv. 1973, préc. supra, n o 721). 737. Cette obligation est analysée par la jurisprudence comme une obligation de moyens (Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, préc. supra, n o 718 ; Cass. com. 11 juin 1985, Bull. civ. IV, n o 188 ; 14 mars 1989, Bull. civ. IV, n o 89). La solution est logique, car les conseils ou informations donnés par le vendeur ne lient aucunement l'acheteur, qui n'est pas tenu de les suivre et conserve donc sa liberté de décision tant relativement à l'achat lui-même que relativement aux modalités d'utilisation de la chose. 738. Cependant, dans la mesure où la jurisprudence énonce qu'il incombe au vendeur professionnel de prouver qu'il a exécuté son obligation de renseignement à l'égard de l'acheteur (Cass. 1 re civ. 15 mai 2002, Bull. civ. I, n o 132, D. 2002, IR 1811 ), il y a lieu de considérer qu'il s'agit là d'une obligation de moyens renforcée. 739. La présomption de faute ainsi mise à la charge du vendeur étant alors une présomption simple, celui-ci peut s'employer à la combattre par tous moyens. Spécialement, s'il parvient à démontrer que l'acheteur n'a pas satisfait à l'obligation de coopérer loyalement avec lui (V. supra, n o 733), ou que l'acheteur a fait montre d'imprudence ou de négligence dans l'utilisation de la chose, sa responsabilité sera dégagée ou atténuée, même si l'acheteur est un profane. Il en a été ainsi jugé à propos : d'un acheteur qui n'avait pas précisé au vendeur que les bidons acquis par lui étaient destinés à contenir des liquides corrosifs (Cass. com. 15 janv. 1980, Bull. civ. IV, n o 22) ; de l'acheteur « viticulteur confirmé », blessé par sa machine à étiqueter les bouteilles, alors qu'il « ne pouvait ignorer les dangers d'une intervention dans une machine en mouvement » (Cass. 1 re civ. 11 juin 1980, Bull. civ. I, n o 186) ; de la personne qui achète un papier d'emballage pour y envelopper des fruits, en vue d'une expédition vers un pays tropical, sans se préoccuper de savoir si ce papier permet un bon conditionnement de la cargaison (Cass. com. 19 mars 1973, 2 arrêts, Bull. civ. IV, n os 124 et 125 ; adde : les décisions citées supra, n o 734). 740. Dès lors que l'obligation d'information et de conseil du vendeur professionnel est rattachée à l'exécution du contrat, la sanction encourue par le vendeur au cas d'inexécution de cette obligation est, suivant le choix de l'acheteur et la gravité de l'inexécution, la résolution de la vente (V., par ex., Cass. 1 re civ. 30 mai 2006, préc. supra, n o 713) ou une sanction indemnitaire (V., par ex., Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, préc. supra, n o 718). L'action qui tend au prononcé d'une telle sanction est, en principe, susceptible d'être exercée par l'acheteur non seulement contre le vendeur distributeur, mais aussi contre le fabricant (V., par ex., pour l'action en responsabilité civile contractuelle, Cass. 1 re civ. 23 avr. 1985, préc. ; comp. Cass. com. 5 déc. 1989, préc. supra, n o 728). Lorsque l'action est exercée contre le seul vendeur intermédiaire, celui-ci peut recourir contre le fabricant (Cass. 3 e civ. 31 mai 1989, BRDA 21/1989, p. 12). La responsabilité liée à l'inexécution de l'obligation d'information et de conseil peut, d'ailleurs, être partagée entre le vendeur et le fournisseur (même arrêt). Section 5 - Obligation de sécurité Bibliographie. - MARKOVITS, La directive CEE du 25 juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux, 1990, LGDJ. Bibliographie. - D. ARLIE, L'obligation de sécurité du vendeur professionnel, RJDA 1993. 409. - J. CALAIS-AULOY, Ne mélangeons plus conformité et sécurité, D. 1993, chron. 130 ; Le risque de développement : une exonération contestable, Mélanges M. Cabrillac, 1999, Litec, p. 81 et s. - Y. DAGORNE-LABBE, La loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, Defrénois 1998. 1265. - J. GHESTIN, La directive communautaire du 25 juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux, D. 1986, chron. 135 ; Le nouveau Titre IV du Livre III du code civil « De la responsabilité du fait des produits défectueux », JCP 1998. I. 148. - P. JOURDAIN, L'obligation de sécurité (À propos de quelques arrêts récents), Gaz. Pal. 1993. 2, doctr. 1171 ; Commentaire de la loi n o 98-389 du 19 mai 1998 sur la responsabilité du fait des produits défectueux, JCP, éd. E, 1998. 1204. - L. GRYNBAUM, Responsabilité du fait des produits défectueux : restriction de responsabilité pour les fournisseurs, JCP 2006, Actualités n o 185, p. 831. - C. LARROUMET, La responsabilité du fait des produits défectueux après la loi du 19 mai 1998, D. 1998, chron. 311 . - A. LAUDE, La responsabilité des produits de santé, D. 1999, chron. 189 . - P. MALINVAUD, La loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux et le droit de la construction, D. 1999, chron. 85 . - D. MAINGUY, L'avenir de l'obligation de sécurité dans la vente, Dr. et patrimoine, déc. 1998, p. 68 et s. ; Réflexion sur la notion de produit en droit des affaires, RTD com. 1999. 47 . - G. VINEY, L'introduction en droit français de la directive européenne du 25 juillet 1985 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, D. 1998, chron. 291 . 741. La sécurité des produits mis en circulation est une préoccupation majeure du législateur contemporain, du fait des risques inhérents à la production technique moderne. Cette préoccupation est partagée à l'échelle européenne, où, dès le 25 juillet 1985, le Conseil des Communautés européennes a élaboré une directive n o 85/374/CEE sur la responsabilité du fait des produits défectueux (JOCE, n o L 210, 7 août), dont l'objet était d'harmoniser les législations nationales en définissant un principe de responsabilité civile sans faute du producteur. Son intensité a été avivée, à propos de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, à la suite des affaires du sang contaminé et de la contamination de l'être humain par le virus dit « de la vache folle » : en témoignent, toujours au plan européen, la directive du Conseil n o 92/59/CEE du 29 juin 1992, relative à la sécurité générale des produits (D. 1992. 496), ainsi que la directive n o 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001, portant le même intitulé (JOCE, n o L 11, 15 janv.), et qui a amélioré le dispositif mis sur pied par la précédente directive. 742. Au plan interne, le législateur français n'est pas demeuré inerte. Ainsi, tout d'abord, l'article 1 er de la loi n o 83-660 du 21 juillet 1983 a consacré un véritable droit à la sécurité du consommateur : ce texte, qui est devenu l'article L. 221-1 du code de la consommation, énonce : « Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ». Dans le même esprit, ensuite, a été promulguée la loi n o 98- 535 du 1 er juillet 1998, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (D. 1998. 230). Enfin, par la loi n o 98-389 du 19 mai 1998, dont les dispositions figurent aux articles 1386- 1 et suivants du code civil, le législateur a fini par transposer la directive précédemment évoquée du 25 juillet 1985 et relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. 743. Le souci d'assurer la sécurité des personnes face aux risques générés par la défectuosité de certains biens n'a, évidemment, pas été sans répercussion sur le droit de la vente. Cependant, la question de l'obligation de sécurité mise à la charge du vendeur professionnel se pose en des termes nouveaux depuis l'entrée en vigueur de la loi du 19 mai 1998, et depuis les modifications que la Cour de justice des Communautés européennes a contraint le législateur français à apporter à cette loi. En effet, ladite obligation, quand elle n'est pas rattachable à une autre obligation du vendeur, paraît absorbée, désormais, par la responsabilité civile du fait des produits défectueux à la lumière de laquelle, dès lors, il convient de l'apprécier. Art. 1 - Spécificité de l'obligation de sécurité du vendeur professionnel avant la loi du 19 mai 1998 sur la responsabilité du fait des produits défectueux 744. Jusqu'à la loi de transposition du 19 mai 1998, à défaut de texte spécifique pouvant fonder l'obligation de sécurité du vendeur professionnel, la jurisprudence avait, dans un premier temps, rattaché cette obligation aux autres obligations du vendeur ; spécialement, elle l'englobait tantôt dans la garantie des vices cachés, la dangerosité de la chose étant alors liée à un défaut de celle-ci (V. supra, n o 576), tantôt dans l'obligation d'information et de conseil, qui s'étend aux précautions à prendre dans l'utilisation des choses dangereuses (V. supra, n os 721 et s.). Puis, un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 20 mars 1989 (D. 1989. 381, note P. Malaurie, RTD civ. 1989. 756, obs. P. Jourdain) a affirmé, sur le fondement de l'article 1135 du code civil, l'existence d'une obligation de sécurité autonome : il énonce, à propos d'un litige consécutif à l'implosion d'un appareil de télévision, que « le vendeur professionnel est […] tenu de livrer des produits exempts de tout vice ou de tout défaut de fabrication de nature à créer un danger pour les personnes et pour les biens… ». Cet arrêt a été suivi d'autres, rendus dans le même sens (Cass. 1 re civ. 22 janv. 1991, Bull. civ. I, n o 30, D. 1991, IR 56 , RTD civ. 1991. 539, obs. P. Jourdain , à propos d'une crème exfoliante achetée dans une parfumerie et ayant provoqué de graves troubles cutanés ; 4 avr. 1991, Bull. civ. I, n o 131, à propos d'un désinfectant très inflammable ; 11 juin 1991, Bull. civ. I, n o 201, JCP 1992. I. 3572, obs. G. Viney, RTD civ. 1992. 114, obs. P. Jourdain , D. 1993, somm. 241, obs. O. Tournafond , à propos de la vente d'un mobil-home dont l'habitacle était équipé d'un radiateur à gaz défectueux ; 27 janv. 1993, Bull. civ. I, n o 44, à propos de l'explosion d'un fusil due à la surpression d'une cartouche ; 15 oct. 1996, Bull. civ. I, n o 354, D. 1997, somm. 287, obs. P. Jourdain , D. 1997, somm. 348, obs. P. Brun , à propos de la destruction de lunettes de motocycliste heurtées par un oiseau et ayant entraîné la perte de l'oeil de l'acheteur). 745. La jurisprudence élaborée à partir de 1989 s'expliquait, en vérité, par la volonté d'anticiper la transposition de la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux, que le législateur français tardait à effectuer, ainsi qu'il a été dit. Le régime de l'obligation de sécurité du vendeur professionnel, tel qu'il avait été esquissé par les arrêts précédemment cités, était pleinement révélateur de la volonté prétorienne à deux points de vue. D'une part, il subordonnait - comme le font, aujourd'hui, les textes du code civil issus de la loi de transposition - l'engagement de la responsabilité civile du vendeur à la preuve, par l'acheteur, du dommage et de l'existence causale d'un défaut de la chose rendant celle-ci dangereuse (V. Cass.1 re civ. 20 mars 1989, 11 juin 1991, préc.). Et, d'autre part - à l'instar des mêmes textes - il instituait une responsabilité du vendeur susceptible d'être engagée, non seulement, sur un fondement contractuel, par l'acheteur ou par le sous-acquéreur (Cass. 1 re civ. 27 janv. 1993, préc.), mais aussi sur un fondement extracontractuel, par toute victime du défaut de la chose (Cass. 1 re civ. 17 janv. 1995, Bull. civ. I, n o 43, D. 1995. 350, note P. Jourdain ; adde : Cass. 1 re civ. 28 avr. 1998, Bull. civ. I, n o 158, qui vise les art. 1147 et 1384, al. 1 er , c. civ., « interprétés à la lumière de la directive CEE n o 85-374 du 25 juill. 1985 »). 746. Dans la mesure où la loi de transposition du 19 mai 1998 est intervenue, il est permis de douter de l'utilité du maintien d'une obligation spécifique de sécurité du vendeur professionnel : celle-ci n'a plus de raison d'être ; elle s'est trouvée absorbée par le régime de la responsabilité civile du fait des produits défectueux. On est d'autant plus enclin à le penser que, contrairement à la lettre de l'article 1386-18 du code civil, qui énonce : « Les dispositions du présent titre ne portent pas atteinte aux droits dont la victime d'un dommage peut se prévaloir au titre de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ou au titre d'un régime spécial de responsabilité », un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes a posé que « les droits conférés par la législation d'un État membre aux victimes d'un dommage causé par un produit défectueux, au titre d'un régime général de responsabilité ayant le même fondement que celui mis en place par ladite directive, peuvent se trouver limités ou restreints à la suite de la transposition de celle-ci dans l'ordre juridique interne dudit État » (CJCE 25 avr. 2002, aff. C-183/00, D. 2002. 2462, 2 e esp., note C. Larroumet , D. 2002, somm. 2937, obs. J.-P. Pizzio , D. 2003, somm. 463, obs. D. Mazeaud ). Cela signifie que le régime de la responsabilité civile encourue par le vendeur au titre d'une obligation spécifique de sécurité ne pourrait pas être différent de celui instauré par les articles 1386-1 et suivants de ce code, c'est-à-dire - concrètement - ne pourrait pas être plus favorable pour la victime. 747. En définitive, il n'y a - semble-t-il - plus place, aujourd'hui, pour une obligation spécifique de sécurité à la charge du vendeur professionnel : si l'atteinte à la sécurité de l'acheteur, qui découle de l'utilisation du produit, est due à un défaut de celui-ci, l'acquéreur peut mettre en oeuvre la garantie des vices cachés ; si elle est due à une information insuffisante sur les conditions d'emploi de la chose, l'acquéreur peut reprocher au vendeur son manquement au devoir d'information et de conseil. Dans les autres cas, l'acquéreur ou la victime (sous-acquéreur, utilisateur, tiers) ne peut mettre en oeuvre que la responsabilité du fait des produits défectueux, telle qu'elle est régie par les articles 1386-1 et suivants du code civil. Encore convient-il d'observer que cette garantie ne pourra être appelée auprès du vendeur professionnel que de manière limitée, ainsi que le révèle l'étude des articles 1386-1 et suivants. Art. 2 - L'obligation de sécurité du vendeur professionnel à la lumière de la loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux 748. L'étude de la responsabilité civile du fait des produits défectueux organisée par les articles 1386-1 et suivants du code civil déborde le domaine de la vente. Elle ne saurait, pour cette raison, être entreprise ici de manière détaillée (V. Responsabilité du fait des produits défectueux). Du moins, il est permis d'en présenter les traits marquants au seul regard du droit de la vente, sous les angles successifs du champ d'application et du régime de la responsabilité considérée. § 1 - Champ d'application de la responsabilité du fait des produits défectueux 749. Sur ce point, une première remarque d'importance doit être faite : c'est que le vendeur professionnel n'a vocation à être concerné que de manière subsidiaire par la responsabilité du fait des produits défectueux. En effet, alors que dans sa version originaire, issue de la loi du 19 mai 1998, l'article 1386-7, alinéa 1 er , du code civil rendait le vendeur ou le fournisseur responsable du défaut du produit au même titre que le producteur, il n'en est plus ainsi depuis la modification apportée à ce texte par la loi n o 2004-1343 du 9 décembre 2004, dite « de simplification du droit » (art. 29, JO 10 déc.) : le texte modifié ne rend le vendeur responsable du défaut de sécurité du produit, « dans les mêmes conditions que le producteur que si ce dernier demeure inconnu ». Cette modification a été imposée au législateur français, à la suite d'un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes en date du 25 avril 2002 (aff. C-5200, D. 2002. 2462, 1 re esp., note C. Larroumet , D. 2002, AJ 1670, note C. Rondey , D. 2002, somm. 2935, obs. J.-P. Pizzio ), qui avait sanctionné la France pour ne pas avoir respecté la règle de subsidiarité imposée par la directive et destinée à éviter aux victimes d'avoir à multiplier leurs recours. Elle a été, depuis, suivie d'une autre, issue de la loi n o 2006-406 du 5 avril 2006 et de nature à accentuer le caractère subsidiaire de la garantie du vendeur, puisque selon le libellé le plus récent de l'article 1386-7 du code civil, si le producteur ne peut être identifié, le vendeur échappe à la responsabilité du fait du défaut du produit, pourvu qu'il « désigne son propre fournisseur ou le producteur, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande de la victime lui a été notifiée ». 750. S'agissant des personnes protégées, ce sont toutes les victimes, que celles-ci soient ou non liées par un contrat avec le producteur (C. civ., art. 1386-1). L'acheteur est, évidemment, concerné au premier chef, et ce, qu'il soit consommateur ou professionnel. 751. S'agissant, enfin, des produits, l'article 1386-3 dispose :« Est un produit tout bien meuble, même s'il est incorporé dans un immeuble, y compris les produits du sol, de l'élevage, de la chasse et de la pêche » ; et il ajoute : « L'électricité est considérée comme un produit ». Les dommages liés aux défectuosités des immeubles par nature ne relèvent donc pas du régime de responsabilité étudié. 752. Le produit ainsi défini doit avoir été mis en circulation, c'est-à-dire que le producteur doit s'en être volontairement dessaisi (C. civ., art. 1386-5), pour que les textes relatifs à la responsabilité du fait des produits défectueux s'appliquent. L'article 1386-5 précise, à l'alinéa 2, que « le produit ne fait l'objet que d'une seule mise en circulation ». § 2 - Régime de la responsabilité civile du fait des produits défectueux A. - Conditions 753. La victime doit d'abord prouver qu'elle a subi un dommage (C. civ., art. 1386-9). Ce dommage peut consister dans une atteinte à sa personne - décès ou lésion corporelle -, ou dans un dommage à un bien autre que le produit défectueux lui- même, dès lors que ce dommage est supérieur à 500 € (C. civ., art. 1386-2, combiné avec Décr. n o 2005-113 du 11 févr. 2005, art. 1 er , JO 12 févr.). La réparation des autres dommages aux biens ne relève pas de la responsabilité du fait des produits défectueux, mais des garanties de la vente ou, éventuellement, de la responsabilité du vendeur professionnel pour manquement au devoir de conseil (V. supra, n o 747). 754. La victime doit également rapporter la preuve que le dommage découle d'un défaut du produit ; il ne lui est pas nécessaire, en revanche, d'établir une faute du vendeur. Le produit est défectueux « lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre » (C. civ., art. 1386-4, al. 1 er ). La formule est analogue à celle utilisée à l'actuel article L. 221- 1 du code de la consommation (V. supra, n o 742). L'alinéa 2 de l'article 1386-4 du code civil précise : « Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation ». L'alinéa 3 du même article ajoute : « Un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un autre, plus perfectionné, a été mis postérieurement en circulation ». Il est notable que, pour l'appréciation du caractère défectueux ou non d'un produit de santé, les mentions informatives figurant sur la notice de présentation jouent un rôle déterminant (Cass. 1 re civ. 5 avr. 2005, n o 03-19.534, JCP 2005. II. 10085, note L. Grynbaum et J.-M. Job ; 24 janv. 2006, D. 2006. 1273, note L. Neyret , JCP 2006. II. 10082, 1 re esp., note L. Grynbaum). 755. La charge de la preuve du lien de causalité entre le dommage et le défaut de sécurité de la chose incombe aussi à la victime (C. civ., art. 1386-9). L'établissement de cette preuve est parfois difficile à rapporter, spécialement lorsque la défectuosité affecte un produit de santé ou un aliment (V. Cass. 1 re civ. 23 sept. 2003, 2 arrêts, Bull. civ. I, n o 188, D. 2004. 898, note Y.-M. Sérinet et R. Mislawski , D. 2004, somm. 1344, obs. D. Mazeaud , JCP 2003. II. 10179, note Jonquet, Maillols, Mainguy et Térier, à propos de l'action en responsabilité de la victime d'une sclérose en plaques contre le fabricant d'un vaccin contre l'hépatite B). Pour la faciliter, la Cour de cassation admet le recours à des « présomptions graves, précises et concordantes » (Cass. 1 re civ. 24 janv. 2006, JCP 2006. II. 10082, 2 e esp., note L. Grynbaum, à propos de l'action en responsabilité civile de la victime de l'hormone de croissance). 756. Enfin, l'action de la victime tendant à établir la responsabilité du vendeur - puisqu'on raisonne sur la seule hypothèse où le producteur est demeuré inconnu (V. supra, n o 749) - est soumise à une double règle de délai, dont l'application n'est écartée qu'au cas de faute du même vendeur. D'une part, il n'est plus possible d'agir en responsabilité du fait des produits défectueux, après le délai de dix ans qui suit la mise en circulation du produit (C. civ., art. 1386-16), c'est-à-dire après la sortie des chaînes de fabrication en vue de la vente ou de la distribution (Cass. 1 re civ. 24 janv. 2006, D. 2006. 1273, note L. Neyret , JCP 2006. II. 10082, 1 re esp., note L. Grynbaum) ; le délai de forclusion ainsi posé procède du souci de limiter la durée de la responsabilité en présence de produits qui s'usent avec le temps. Cependant, le texte réservant les droits de la victime qui a engagé une action dans le délai décennal, la durée de la responsabilité peut, dans cette mesure, être prolongée au-delà des dix ans. 757. D'autre part, à l'intérieur du délai de dix ans ci-dessus évoqué, l'article 1386-17 énonce que la victime est tenue d'agir en réparation « dans le délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l'identité du producteur ». En vérité, s'agissant de l'action en réparation contre le vendeur, le point de départ du délai de prescription de trois ans se calcule à partir de la seule date à laquelle l'acquéreur aurait dû avoir connaissance du dommage et du défaut, puisque, par hypothèse, l'identité du producteur est alors inconnue. B. - Cas d'exonération 758. Les articles 1386-11 et suivants du code civil prévoient divers cas d'exonération, qu'ils encadrent d'ailleurs strictement. Les clauses visant à écarter ou à limiter la responsabilité sont, en principe, interdites. 1° - Cas d'exonération prévus par la loi 759. Le vendeur, dont la responsabilité est recherchée en raison de l'impossibilité d'identifier le producteur, peut dégager sa responsabilité en établissant que les circonstances constitutives des différents cas d'exonération prévus par la loi sont réunies. Spécialement, il est fondé à invoquer en ce sens le fait que « le défaut est dû à la conformité du produit avec des règles impératives d'ordre législatif ou réglementaire » (C. civ., art. 1386-11, al. 1 er , 5 o ). Mais cette cause d'exonération doit être comprise strictement : l'article 1386-10 dispose que la responsabilité du producteur peut être engagée « alors même que le produit a été fabriqué dans le respect des règles de l'art ou de normes existantes ou qu'il a fait l'objet d'une autorisation administrative ». 760. Le vendeur peut invoquer aussi le fait que le défaut du produit n'existait pas lors de la mise en circulation du produit (C. civ., art. 1386-11, al. 1 er , 2 o ) ; la loi ajoute à ce cas, dans un esprit voisin, celui où « l'état des connaissances scientifiques et techniques [lors de la mise en circulation du produit] n'a pas permis de déceler l'existence du défaut » (C. civ., art. art. 1386-11, al. 1 er , 4 o ). Le « risque de développement » constitue donc une cause d'exonération du vendeur, mais sous réserve du cas particulier où le dommage a été causé par un élément du corps humain ou par les produits issus de celui-ci (C. civ., art. 1386-12), ce qui se justifie par le fait qu'est alors en cause l'intégrité du corps humain. 761. L'exonération, totale ou partielle, du vendeur peut tenir, en troisième lieu, à ce que le dommage n'a pas été causé, ou n'a été causé qu'en partie,par un défaut du produit : l'article 1386-13 énonce en ce sens : « La responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d'une personne dont la victime est responsable ». Il est permis de penser que constitue une faute de la victime l'utilisation du produit dans des conditions anormales qui n'étaient pas raisonnablement prévisibles par le producteur. 2° - Prohibition des clauses exclusives ou limitatives de responsabilité 762. Aux termes de l'article 1386-15 du code civil : « Les clauses qui visent à écarter ou à limiter la responsabilité du fait des produits défectueux sont interdites et réputées non écrites ». La portée de l'interdiction est absolue pour les dommages aux personnes. 763. Pour les dommages aux biens, le texte assortit la prohibition qu'il édicte d'une dérogation strictement encadrée : pour que la clause limitative ou exclusive de responsabilité soit valable, il faut, d'une part, que cette clause ait été stipulée entre professionnels, et, d'autre part, que les biens auxquels elle se rapporte ne soient pas utilisés par la victime principalement pour son usage ou pour sa consommation privée, ce qui revient à dire que la clause ne peut valablement concerner que les biens à usage principalement professionnel. Chapitre 3 - Obligations de l'acheteur Bibliographie. - J.-F. ASTRUC, La clause de non-concurrence accessoire au contrat de cession d'un bien immobilier, D. 2002, chron. 908 . 764. La vente revêt un caractère synallagmatique en ce qu'elle met à la charge de l'acquéreur diverses obligations qui entretiennent avec les obligations du vendeur un rapport de réciprocité. Au premier rang d'entre elles figure celle de payer le prix, que l'article 1650 du code civil qualifie de « principale obligation de l'acheteur ». 765. À l'obligation de payer le prix la loi ajoute l'obligation d'« enlever » la chose vendue. Cette obligation - à laquelle l'article 1657 du code civil donne le nom de « retirement » - joue un rôle important dans les ventes mobilières. 766. Bien que ces deux obligations soient les seules mentionnées par le code civil au chapitre « Des obligations de l'acheteur », elles n'épuisent pas les engagements dont l'acquéreur est susceptible d'être tenu. En effet, les parties sont libres, en vertu des principes de l'autonomie de la volonté et de la liberté des conventions, de convenir que l'acheteur sera tenu d'obligations supplémentaires. De telles stipulations sont fréquentes dans les ventes immobilières, où l'acheteur s'engage, par exemple, à signer un acte authentique, ou à édifier une construction dans un certain délai ; le même acheteur peut prendre aussi un engagement personnel négatif, ayant la nature d'une obligation de ne pas faire, tel celui de s'interdire d'exercer une activité, pendant un certain temps, dans un immeuble déterminé (V., par ex., à propos de l'activité de boulangerie, Cass. 3 e civ. 4 juill. 2001, Bull. civ. III, n o 94, D. 2002. 433, note R. Libchaber ). On rencontre aussi des clauses extensives des obligations de l'acquéreur dans les ventes commerciales entre professionnels, l'acheteur acceptant parfois que des restrictions soient apportées à sa liberté de revendre (spécialement quant aux prix de la revente ou quant aux personnes auxquelles les produits achetés pourront être revendus), ou contractant des engagements relatifs à la présentation des produits à la clientèle, ou encore s'engageant à offrir à celle-ci certaines prestations complémentaires… 767. Les obligations supplémentaires qui intéressent les seules ventes commerciales ne ressortissent pas à la présente rubrique (V. Rép. com., V o Ventes réglementées). Quant aux autres, elles relèvent du droit commun des obligations (V. Obligations). L'inexécution des premières comme des secondes autorise le vendeur à mettre en oeuvre les sanctions prévues par le droit commun au cas d'inexécution des contrats synallagmatiques. Par exemple, il a été jugé que l'inexécution de l'obligation par l'acheteur de signer un acte authentique dans un délai déterminé (Cass. 3 e civ. 13 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 125), ou de l'obligation de construire sur le terrain acquis (Cass. 3 e civ. 27 mai 1971, Bull. civ. III, n o 339 ; 12 janv. 1994, Bull. civ. III, n o 5), peut être sanctionnée par la résolution du contrat. 768. Ces solutions ne valent, naturellement, qu'autant que les deux parties sont expressément convenues de l'extension des obligations de l'acheteur. À défaut de stipulation expresse ou de disposition légale particulière, l'acquéreur ne saurait être tenu de plein droit par les engagements de nature personnelle pris par le vendeur antérieurement à la vente : le principe de la relativité des conventions, énoncé par l'article 1165 du code civil, s'y oppose. Il a été jugé en ce sens, par exemple, que l'engagement souscrit par une société civile immobilière de réserver aux adhérents d'une association d'aide au logement la location des appartements construits à l'aide du prêt qu'elle a consenti, ne peut pas avoir été transmis de plein droit à l'acquéreur des logements (Cass. 1 re civ. 16 nov. 1988, D. 1989. 157, 1 e esp., note P. Malaurie). Une solution identique a été posée à propos de la charge de l'indemnité d'éviction due au locataire d'un immeuble à usage commercial, par suite du congé donné par le vendeur antérieurement à la vente (Cass. 3 e civ. 10 déc. 1997, Bull. civ. III, n o 218 ; adde : Cass. 3 e civ. 30 mai 2001, Dalloz Affaires 2001. 2516, note Y. Rouquet). Elle serait évidemment différente dans l'éventualité où une stipulation de l'acte de vente mettrait expressément le paiement de l'indemnité évoquée à la charge de l'acquéreur (V. Cass. 3 e civ. 2 déc. 1998, Loyers et copr. 1999, n o 71, obs. P.H.B ; adde : supra, n o 766). 769. Compte tenu des observations précédentes, l'étude des obligations de l'acheteur sera centrée, d'une part, sur l'obligation de payer le prix et, d'autre part, sur l'obligation d'enlever la chose vendue. Section 1 - Obligation de payer le prix Bibliographie. - B. GELOT, La charge des frais de la vente d'immeuble, Defrénois 1999. 961. 770. L'article 1650 du code civil dispose : « La principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente ». Il est remarquable que les textes inclus dans le chapitre consacré par le code civil aux obligations de l'acheteur - à savoir les articles 1650 à 1657 - traitent, à l'exception du dernier d'entre eux, de cette seule obligation. L'étude de l'obligation de payer le prix commande d'examiner, dans un premier temps, le paiement du prix, puis, dans un second temps, les sanctions du défaut de paiement du prix. Art. 1 - Paiement du prix 771. Il ne suffit pas de poser que l'acheteur doit payer le prix ; il convient de déterminer ce qu'englobe exactement le prix qui est dû, et comment le paiement doit être effectué. Il importe aussi de prévenir, au cas de contestation, les difficultés relatives à la preuve du paiement. L'attention doit donc être portée, outre sur l'objet du paiement, sur les modalités du paiement et, enfin, sur la preuve du paiement. § 1 - Objet du paiement 772. L'acheteur doit payer au vendeur le prix convenu par les parties. Ce prix - dont, au cas de contestation, il incombe au vendeur de rapporter la preuve (Cass. 1 re civ. 25 janv. 1989, Bull. civ. I, n o 42) - a été nécessairement déterminé lors de la vente ; s'il ne l'a pas été, les éléments de sa détermination ont dû être définis au même moment (V. Vente [2 o formation]). Par exemple, si la vente a été faite en bloc, le pesage, le mesurage ou le comptage de la chose vont permettre de chiffrer précisément le prix. De même, dans le cas particulier du contrat d'abonnement à la fourniture de gaz ou d'électricité, l'évaluation du prix se fait à partir du relevé de consommation. Au cas de défectuosité prouvée du compteur, la jurisprudence admet le fournisseur à facturer suivant une évaluation faite par comparaison avec la facturation antérieure ou probable (Cass. 1 re civ. 4 juin 1991, Bull. civ. I, n o 181, RTD civ. 1992. 403, obs. P.-Y. Gautier ), sauf si l'acheteur parvient à rapporter la preuve d'une consommation différente (Cass. com. 24 mars 1992, Bull. civ. IV, n o 131). De façon générale, il revient à l'acheteur d'établir que la facturation ne correspond pas à la véritable consommation (Cass. 1 re civ. 30 mars 1999, Bull. civ. I, n o 113, Contrats, conc., consom. 1999, comm. 108, obs. L. Leveneur ; 7 mars 2000, Bull. civ. I, n o 81). 773. Il est possible que le prix convenu doive donner lieu à révision : tel est le cas lorsqu'une clause d'indexation a été stipulée par les parties. Pourvu que celle-ci soit licite, il y a lieu d'appliquer le mécanisme prévu conventionnellement. Mais, si aucune stipulation en ce sens n'a été insérée dans le contrat, le juge n'a pas le pouvoir d'imposer une telle révision (Cass. com. 9 oct. 1990, RTD civ. 1991. 113, obs. J. Mestre ). 774. Deux questions appellent des développements particuliers : celle des frais de la vente et celle des intérêts du prix. A. - Frais de la vente 775. La charge des frais de la vente est déterminée par l'article 1593 du code civil. Mais la solution énoncée par l'article 1593 doit être nuancée au regard de la portée très relative de ce texte. 1° - Solution énoncée par l'article 1593 du code civil 776. Selon l'article 1593 : « Les frais d'actes et autres accessoires à la vente sont à la charge de l'acheteur ». La formule légale vise tant les frais éventuellement nécessités par l'établissement de l'acte de vente que ceux qui doivent être exposés pour donner audit acte sa pleine efficacité, ainsi que les frais afférents à la vente (V. Vente [2 o formation]) et les frais liés au paiement lui-même (frais de change, frais de commission bancaire…). En revanche, les frais liés à l'exécution des obligations du vendeur - qu'ils se rapportent à l'obligation de délivrance, tels les frais de division du sol, les frais de mesurage, à la garantie d'éviction, tels les frais d'apurement de la situation hypothécaire (Cass. civ. 22 avr. 1856, DP 1856. 1. 210 ; Cass. req. 10 juin 1907, DP 1907. 1. 319), ou à toute autre obligation du vendeur - doivent demeurer, sauf convention contraire, à la charge de celui-ci (rappr. C. civ., art. 1608 ; adde : B. GELOT, La charge des frais de l'immeuble, Defrénois 1999. 961, spéc. n os 13 et s.). Il en va, à plus forte raison ainsi des frais inutiles et des pénalités ou des amendes encourues par le vendeur pour une faute qu'il a commise (V., à propos d'une pénalité fiscale, Cass. 1 re civ. 22 sept. 1982, Gaz. Pal. 1983. 1, panor. 60, obs. J. Dupichot). 777. Dès lors que des frais relèvent de l'article 1593 du code civil, puisqu'ils sont à la charge de l'acheteur, si le vendeur les a acquittés, il a le droit de se les faire rembourser par ledit acheteur (Cass. civ. 9 mars 1898, DP 1898. 1. 349) ; il a même droit aux intérêts du montant de ces frais à compter du jour où il en a fait l'avance (CA Lyon, 23 mars 1865, DP 1866. 5. 489) ; et sa créance de remboursement est garantie par le privilège du vendeur (Cass. civ. 7 nov. 1882, DP 1882. 1. 473). 2° - Portée de l'article 1593 du code civil 778. La règle qui fait peser sur l'acquéreur les frais accessoires à la vente doit être nuancée à trois points de vue. En premier lieu, l'article 1593 n'est pas un texte d'ordre public (Cass. civ. 23 déc. 1931, Gaz. Pal. 1932. 1. 433) ; les contractants peuvent donc convenir d'y déroger en mettant tous les frais, ou partie d'entre eux, à la charge du vendeur. On dit alors, en matière de vente immobilière, que l'acquéreur achète « actes en mains », c'est-à-dire sans rien avoir à payer en plus de la somme qu'il doit verser au vendeur (Cass. civ. 31 juill. 1913, DP 1915. 1. 65, note P. de Loynes). Au point de vue fiscal, les frais supportés par le vendeur de l'immeuble, alors que, normalement, ils devraient être à la charge de l'acquéreur, viennent en diminution du prix de la vente pour la liquidation du droit proportionnel (Dict. Enreg., n o 4470). 779. En deuxième lieu, l'article 1593 ne concerne que les rapports des parties entre elles ; ses dispositions ne sont pas opposables aux tiers créanciers des sommes en cause. Par exemple, le notaire qui a établi l'acte authentique constatant une vente immobilière peut réclamer indifféremment aux deux parties le paiement de ses honoraires et le remboursement des droits et frais exposés par lui (Cass. civ. 30 janv. 1889, DP 1889. 1. 400 ; 23 et 29 oct. 1889, DP 1890. 1. 390). 780. En troisième lieu, la règle de l'article 1593 s'efface devant les textes spéciaux posant des solutions particulières. Spécialement, en matière de vente immobilière, le législateur fiscal désigne le débiteur de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'elle est due, en la mettant à la charge en principe du vendeur lorsque celui-ci détient les droits à déduction, et à la charge de l'acheteur dans le cas contraire (CGI, art. 285, 2 o et 285, 3 o ; adde : B. GELOT,article préc. [ supra, no 776], spéc. no 12). Au demeurant, pour la jurisprudence, la taxe sur la valeur ajoutée n'est pas un accessoire du prix (V. Vente [2o formation]), et il est notable que, pour le recouvrement des droits fiscaux, une solidarité est le plus souvent instituée entre le vendeur et l'acheteur (V., par ex. en matière de TVA, CGI, art. 283, 2 et s.). L'article 1593 n'intervient alors que pour fonder l'éventuel recours d'un contractant contre l'autre. B. - Intérêts du prix 781. L'acheteur n'est, en principe, pas tenu de payer les intérêts du prix pour la période qui court du jour de la vente au jour du paiement. Cependant, l'article 1652 du code civil déroge à cette règle dans trois cas : « s'il a été ainsi convenu lors de la vente ; si la chose vendue et livrée produit des fruits ou autres revenus ; si l'acheteur a été sommé de payer ». Avant de les examiner de manière plus détaillée, il convient de souligner que l'article 1652 est un texte supplétif de volonté, et que, par conséquent, le vendeur peut renoncer à son application, pourvu que ce soit de manière certaine (CA Aix-en-Provence, 26 oct. 1970, D. 1971. 370). 1° - Convention 782. L'article 1652 autorise les parties à convenir, lors de la vente, que l'acheteur devra les intérêts du prix jusqu'au paiement. La solution se recommande de la liberté des conventions. Il est donc loisible aux contractants de prévoir que les intérêts seront dus par l'acheteur à compter de la date du contrat ou de tout autre moment antérieur au paiement du capital (par ex., à compter du jour de la délivrance). Ce genre de stipulation se rencontre fréquemment dans les ventes dont le prix est, en tout ou en partie, payable à terme. 783. À défaut de précision quant au moment à partir duquel les intérêts commencent à courir,il y a lieu de retenir la date du contrat, sauf si la délivrance ne doit intervenir qu'après un certain temps ; dans ce dernier cas, en effet, on doit présumer que les intérêts ne sont dus qu'à partir de la mise de la chose à la disposition de l'acheteur. 784. À défaut de précision quant au taux de l'intérêt, c'est le taux légal qu'il faut appliquer. Si un intérêt conventionnel a été stipulé, et si la vente est une vente à tempérament consentie à une personne physique n'agissant pas pour ses besoins professionnels, le taux pratiqué ne doit pas être un taux usuraire (C. consom., art. L. 313-3 ; V. Intérêts des capitaux). 2° - Bien frugifère 785. L'article 1652 énonce que l'intérêt du prix est dû, alors même qu'aucune convention n'a été prévue en ce sens, « si la chose vendue et livrée produit des fruits ou autres revenus ». Il serait injuste, dans ce cas, que l'acheteur puisse jouir de la chose avant d'en avoir payé le prix, sans que le vendeur reçoive aucune contrepartie (rappr. CA Aix-en-Provence, 26 oct. 1970, préc. supra, n o 781, à propos d'une propriété horticole). 786. La jurisprudence a posé, relativement aux biens visés par cette disposition légale, qu'un bien doit être regardé comme frugifère même s'il ne produit pas effectivement des fruits, dès lors que, par sa nature, il est susceptible d'en produire : ainsi en est-il, par exemple, de l'immeuble susceptible d'être loué ; l'acheteur d'un tel immeuble doit, par conséquent, payer les intérêts du prix de vente à compter de son entrée en possession (Cass. req. 19 juin 1928, DP 1928. 1. 144). 787. Puisque les intérêts sont dus à partir de l'entrée en possession de l'acheteur (même arrêt), ce qui suppose, conformément à la lettre du texte, que la chose ait été livrée, la Cour de cassation a rappelé à cet égard que, « l'intérêt du prix représentant l'équivalent de la jouissance du bien, les intérêts légaux du prix de vente d'un immeuble sont dus pour la période séparant la prise de possession du jour de la signature de l'acte notarié » (Cass. 3 e civ. 30 juin 1992, Bull. civ. III, n o 237). Si la livraison n'a été que partielle, l'acheteur ne doit les intérêts qu'au prorata de la portion de la chose dont il a joui (Cass. civ. 26 nov. 1924, DP 1926. 1. 103). 788. Il est remarquable que la nature de bien frugifère des titres sociaux est acquise au regard de l'article 1652 : la Cour de cassation a censuré, au visa de ce texte et de l'article 586 du code civil, un arrêt qui, pour rejeter la demande formée par les cédants d'actions, en paiement des intérêts légaux sur le solde du prix de ces actions, avait retenu que les actions ne sont pas frugifères, dès lors que les dividendes, qui ne présentent pas le double caractère de périodicité et de fixité, ne peuvent être assimilés à des fruits civils, puisque leur perception suppose l'existence de bénéfices aléatoires et au montant indéterminé et nécessite une délibération de l'assemblée générale décidant de leur distribution ; selon la Cour de cassation, au contraire, les sommes qui, faisant partie du bénéfice distribuable sont, soit en vertu des statuts, soit après décision de l'assemblée générale, réparties entre les actionnaires « participent de la nature de fruits » (Cass. com. 5 oct. 1999, Bull. civ. IV, n o 163, D. 1999, AJ 69, obs. M. B ., D. 2000. 552, note G. Morris-Becquet , Defrénois 2000. 40, obs. P. Le Cannu, rendu à propos des actions de société ; adde, à propos de parts sociales : Cass. com. 5 déc. 2000, JCP 2001. I. 126, n o 3, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain, Contrats, conc., consom. 2001, comm. 57, obs. L. Leveneur). 3° - Sommation de payer 789. L'article 1652 dispose que, si l'acheteur a été sommé de payer, l'intérêt court depuis la sommation. La solution ainsi énoncée, qui est conforme au droit commun (C. civ., art. 1153, al. 3), suppose, bien sûr, que le prix soit exigible. À la sommation de payer il convient d'assimiler, toujours conformément au droit commun, tout « autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante » (art. 1153, al. 3). § 2 - Modalités du paiement 790. Quatre ordres de précisions doivent être apportés ici : quant à l'auteur du paiement ; quant au destinataire du paiement ; quant au moment du paiement ; enfin, quant au lieu du paiement. A. - Auteur du paiement 791. C'est l'acheteur qui, en vertu de l'article 1650 du code civil, doit payer le prix. L'obligation se transmet aux héritiers de l'intéressé, mais pas aux ayants cause à titre particulier : spécialement, le sous-acquéreur ne saurait être poursuivi, en vertu de cette seule qualité, par le vendeur, car il est demeuré étranger au contrat de vente originaire. 792. Lorsque le sous-acquéreur s'engage, auprès du vendeur intermédiaire, à payer directement le vendeur originaire, il est évidemment lié par son engagement ; mais le premier acquéreur n'est pas pour autant libéré de sa propre obligation : pour qu'il en soit ainsi, il faut que, conformément aux règles de la délégation (C. civ., art. 1275 et s.), le premier vendeur ait consenti à une telle libération (Cass. 3 e civ. 5 juin 1970, D. 1970. 727). 793. Au cas d'acquisition du bien par plusieurs personnes, de manière conjointe et pour un prix unique, celles-ci deviennent propriétaires indivis. À défaut de clause contraire dans le contrat de vente, chacune est alors tenue pour le tout, car le prix est indivisible (C. civ., art. 1244). La solution est la même si l'acquéreur décède sans avoir payé, en laissant plusieurs héritiers : les dettes de la succession ne se divisent pas à l'égard du créancier (C. civ., art. 870 et s.). B. - Destinataire du paiement 794. Le vendeur étant le bénéficiaire du paiement, c'est entre ses mains, ou entre celles de son mandataire, que le paiement doit être effectué. S'il y a plusieurs vendeurs, le versement de l'intégralité du prix entre les mains d'un seul n'est libératoire, aux termes de l'article 1197 du code civil, que si le titre donne expressément à chacun d'eux le droit de demander le paiement total de la créance, autrement dit si est explicitement stipulée une clause de solidarité active (Cass. 1 re civ. 27 avr. 2004, Bull. civ. I, n o 121, Defrénois 2004. 1731, obs. L. Aubert, Contrats, conc., consom. 2004, comm. 107, obs. L. Leveneur). 795. Dans la vente immobilière, les fonds transitent généralement par la comptabilité du notaire. Cette pratique permet, en effet, de concilier les intérêts de l'acquéreur, non seulement avec ceux du vendeur, mais aussi avec les intérêts des éventuels créanciers hypothécaires ou privilégiés de celui-ci, lesquels entendent être désintéressés sur le prix de la vente. Un paiement au vendeur qui interviendrait avant la publication de la vente et la purge des hypothèques ne serait pas libératoire pour l'acheteur, qui s'exposerait à payer deux fois. 796. La remise du prix entre les mains du notaire qui a établi l'acte permet de couper court à toute difficulté : dès cette remise, le vendeur donne quittance à l'acquéreur qui est ainsi libéré. Le notaire, dépositaire des fonds pour le compte du vendeur, procède alors aux formalités de la purge, et il ne remettra à son mandant le reliquat du prix provenant de la vente qu'après avoir désintéressé les créanciers titulaires de droits sur l'immeuble. 797. Une difficulté particulière se présente si, en plus des créanciers hypothécaires ou titulaires d'un privilège sur l'immeuble, interviennent des créanciers chirographaires par voie de saisie-attribution. La jurisprudence a décidé que, dans une telle éventualité, les créanciers hypothécaires doivent être payés par priorité sur les créanciers saisissants (Cass. 3 e civ. 17 janv. 1978, D. 1978. 605, note H. Souleau ; 27 févr. 1979, Defrénois 1979. 1421, 2 e esp., note G. Morin ; Cass. 2 e civ. 15 janv. 1992, Bull. civ. II, n o 18). C. - Moment du paiement 798. Selon l'article 1650 du code civil, le paiement doit intervenir au moment « réglé par la vente ». Ce texte doit cependant être concilié avec les dispositions d'ordre public gouvernant la protection des consommateurs, ainsi qu'avec la réglementation de la concurrence. 799. S'agissant des premières, plusieurs textes suscitent une attention particulière, qui concernent la vente mobilière à crédit au consommateur. L'article L. 311-23 du code de la consommation, tout d'abord, prévoit que, chaque fois que le paiement du prix sera acquitté, en tout ou en partie, à l'aide d'un crédit, aussi longtemps que l'acheteur n'a pas accepté l'offre préalable du prêteur, « le vendeur ne peut recevoir aucun paiement, sous quelque forme que ce soit… ». Dans le même esprit, l'article L. 311-27, ensuite, interdit au vendeur de « recevoir, de la part de l'acheteur, aucun paiement sous quelque forme que ce soit […], en sus de la partie du prix que l'acheteur a accepté de payer au comptant, tant que le contrat relatif à l'opération de crédit n'est pas définitivement conclu ». L'article L. 122-3 de ce code, enfin, dispose, à propos des ventes sans commande préalable : « La fourniture de biens… sans commande préalable du consommateur est interdite lorsqu'elle fait l'objet d'une demande de paiement. Aucune obligation ne peut être mise à la charge du consommateur qui reçoit un bien… en violation de cette interdiction ». Afin de garantir le respect effectif de l'interdiction, le même texte ajoute : « Le professionnel doit restituer les sommes qu'il aurait indûment perçues sans engagement exprès et préalable du consommateur. Ces sommes sont productives d'intérêts au taux légal calculé à compter de la date du paiement indu et d'intérêts au taux légal majoré de moitié à compter de la demande de remboursement faite par le consommateur ». 800. Ces différents textes tendent à encadrer strictement la pratique du paiement de l'acompte, ou du paiement à la commande, dans les ventes entre professionnels et consommateurs. Il convient d'en rapprocher, dans l'esprit, la disposition de l'article L. 131-1, alinéa 1 er , du code de la consommation, suivant laquelle, au cas de vente mobilière entre les mêmes parties, « … toute somme versée d'avance sur le prix, quels que soient la nature de ce versement et le nom qui est donné dans l'acte, est productive, au taux légal en matière civile, d'intérêts qui courront à l'expiration d'un délai de trois mois à compter du versement jusqu'à réalisation ou restitution des sommes versées d'avance, sans préjudice de l'obligation de livrer qui reste entière ». 801. S'agissant de la seconde, elle limite, entre commerçants, au titre des « pratiques prohibées » les paiements différés, comme l'atteste l'article L. 443-1 du code de commerce, en conformité avec la préoccupation de la directive n o 2000/35/CE du 29 juin 2000 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales (V. Rép. com., V o Transparence tarifaire et pratiques restrictives). 802. Sous les réserves précédemment mentionnées, les parties peuvent donc convenir librement du moment auquel doit intervenir le paiement. Elles sont en droit de stipuler un paiement immédiat, c'est-à-dire dès la conclusion de la vente : à propos d'une vente immobilière, il a été jugé qu'alors l'acheteur doit s'exécuter dès la conclusion de la vente, avant même que le bien lui ait été délivré, et sans pouvoir exciper, pour justifier un retard éventuel, des délais nécessaires à l'accomplissement de formalités, telles que, par exemple, la purge d'un droit de préemption (Cass. 3 e civ. 11 mars 1975, Bull. civ. III, n o 97, D. 1975, IR 136). De la même manière, et sous la même réserve, les parties peuvent convenir d'un paiement différé, susceptible d'être effectué en une échéance, ou en plusieurs échéances successives, par fractions. 803. À défaut de prévision contractuelle, l'article 1651 du code civil énonce que « l'acheteur doit payer […] dans le temps où doit se faire la délivrance ». De ce texte on déduit que le paiement doit alors intervenir au comptant et lors de la mise du bien à la disposition de l'acheteur. La solution s'explique par le fait que l'obligation de payer le prix et la délivrance se servent mutuellement de cause. Encore faut-il, pour que l'acquéreur soit tenu de payer, que le vendeur ait exécuté complètement la délivrance. Tel n'est pas le cas lorsque, la vente portant sur un ensemble de matériel informatique, destiné à l'équipement de plusieurs bureaux situés en France métropolitaine, en Guadeloupe et en Guyane, le vendeur s'est abstenu de livrer un élément faisant partie de cet ensemble, dont il était indissociable « tant il [était] nécessaire pour assumer l'une des fonctions principales du système, à savoir la communication entre les différents sites » (Cass. 1 re civ. 19 nov. 1996, Bull. civ. I, n o 411, JCP 1997. II. 22862, note J. Huet, Contrats, conc., consom. 1997, comm. 45, obs. L. Leveneur). En revanche, lorsqu'est établie la matérialité des livraisons d'aliments pour le bétail, ainsi que la conservation et l'utilisation de la marchandise par l'acheteur, l'exécution de la délivrance est acquise, et celui-ci doit payer le prix, sauf à prouver un défaut de la chose la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée (Cass. com. 5 oct. 1961, D. 1962. 290, note J. Bigot). 804. L'application de l'article 1651 du code civil ou des stipulations contractuelles peut être, au demeurant, contrariée dans deux cas : d'une part, lorsque l'acheteur, contestant l'exécution des obligations du vendeur, refuse de payer en opposant l'exception d'inexécution (V. spéc., à propos de l'inexécution de l'obligation de délivrance, supra, n os 328 et s., et, à propos de l'inexécution de l'obligation de garantie contre l'éviction, supra, n os 490 et s.) ; d'autre part, lorsque l'acheteur obtient du juge un délai de grâce, en vertu des articles 1244-1 et suivants ou de l'article 1655 du même code. D. - Lieu du paiement 805. Quant au lieu du paiement, les articles 1650 et 1651 du code civil posent les mêmes règles que relativement au moment du paiement. Sa détermination est donc laissée à l'initiative des parties. En matière immobilière, le lieu du paiement est généralement l'étude du notaire qui reçoit l'acte de vente (V. supra, n o 795). Si les parties n'ont rien prévu, le paiement doit intervenir au lieu de la délivrance, c'est-à-dire, en principe, au lieu où se trouve le bien au moment de la vente (V. supra, n os 301 et s.). 806. Cette dernière règle est cependant écartée lorsque le paiement se fait à terme et est échelonné sur plusieurs échéances : ledit paiement est alors portable au domicile du vendeur (Cass. com. 22 mai 1984, Bull. civ. IV, n o 173) ; la solution a vocation à intéresser, spécialement, le cas où le prix est payable sous la forme d'une rente viagère, étant précisé qu'alors il est généralement prévu que le paiement aura lieu soit au domicile du crédirentier, soit à l'étude du notaire qui a instrumenté. Le paiement au domicile du vendeur a également été décidé au cas de condamnation judiciaire de l'acheteur à payer le prix dans un délai déterminé (Cass. req. 3 janv. 1927, DH 1927. 33). § 3 - Preuve du paiement 807. Quant à la charge de la preuve du paiement, elle incombe à l'acheteur, en vertu de l'article 1315, alinéa 2, du code civil qui énonce : « … celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ». 808. Le mode de preuve du paiement consiste, au cas de vente immobilière, généralement dans la quittance du prix donnée dans l'acte. La force probante d'une telle quittance dépend des mentions de l'acte relatives à la façon dont le paiement a été effectué : s'il est indiqué que le prix a été payé hors la vue ou hors la comptabilité du notaire, la quittance fait la preuve de la libération de l'acheteur, à l'égard du vendeur comme des ayants cause de celui-ci ; mais il est possible de rapporter la preuve contraire, conformément aux articles 1341 et suivants du code civil (Cass. 3 e civ. 10 mars 1993, Bull. civ. III, n o 33, JCP, éd. N, 1994. II. 25, note L. Leveneur). Si, en revanche, l'acte indique que le paiement a eu lieu à la vue du notaire, ou par le moyen de la comptabilité de celui-ci, cette indication fait foi jusqu'à inscription de faux. 809. Au cas de vente mobilière, la pratique de la quittance est peu usitée. La remise de la chose par le vendeur à l'acheteur vaut présomption de paiement ; mais il s'agit là d'une présomption de fait, dont l'appréciation est abandonnée à la souveraineté du juge (Cass. com. 17 nov. 1987, Bull. civ. IV, n o 243, D. 1987, IR 246). Il a été jugé, dans le cadre d'une vente de véhicule automobile, que la remise du véhicule, du certificat de vente et de la carte grise peuvent constituer une présomption de fait du paiement (Cass. 1 re civ. 7 févr. 1989, Bull. civ. I, n o 74). Art. 2 - Sanctions du défaut de paiement du prix 810. Lorsque l'acheteur ne paie pas le prix à l'échéance et que le défaut de paiement ne tient pas à un motif légitime l'autorisant à invoquer l'exception d'inexécution, le vendeur se voit offrir plusieurs possibilités. 811. Il peut, d'abord, au cas où la créance de prix est exigible et où l'acheteur n'est pas encore entré en possession de la chose, refuser de délivrer celle-ci : l'article 1612 du code civil dispose en ce sens : « Le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose, si l'acheteur n'en paie pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le paiement » ; le vendeur se voit ainsi reconnaître, dès lors que la double condition posée par le texte est satisfaite, un droit de rétention sur le bien objet de la vente, ainsi que sur les accessoires de celle-ci. Il a été jugé, par exemple, que, dans l'éventualité examinée, le vendeur est fondé à retenir les documents administratifs du véhicule vendu (Cass. 1 re civ. 19 mars 2002, Contrats, conc., consom. 2002, comm. 108, obs. L. Leveneur ; adde : supra, n o 363). 812. Mais le droit de rétention n'est qu'une solution d'attente. Au cas où l'acheteur résiste, de manière illégitime, à la demande en paiement qui lui est faite par le vendeur, celui-ci, parce qu'il tient sa créance d'un contrat synallagmatique, se voit offrir une option entre l'exécution forcée et la résolution de la vente. § 1 - Exécution forcée 813. Le vendeur désireux de contraindre l'acheteur à exécuter l'obligation de payer le prix est en droit d'exercer une action en paiement du prix. S'il obtient une décision en sa faveur, il pourra mettre en oeuvre les moyens de contrainte du droit commun. Sa situation, en regard de celle des autres créanciers de l'acquéreur, est, à première vue, très favorable, du fait des privilèges dont la loi assortit sa créance ; cependant, à cet égard, il convient de se montrer nuancé, et de distinguer suivant que la vente porte sur un meuble ou sur un immeuble. A. - Vente mobilière 814. Au cas de vente mobilière, l'article 2332-4 o (anc. art. 2102-4 o ) du code civil accorde un privilège au vendeur sur le meuble vendu, dès lors que celui-ci est « encore en la possession du débiteur ». Il s'ensuit que, si tel n'est plus le cas, le privilège est éteint. La sûreté apparaît d'autant plus fragile que, selon la jurisprudence, elle n'emporte pas de droit de suite au profit du vendeur lorsque la chose a été aliénée. Si l'on ajoute à cela que de nombreux privilèges priment le privilège du vendeur de meuble, et qu'au cas où l'acheteur est soumis à la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, l'exercice du privilège évoqué est très strictement encadré (C. com., art. L. 624-11 à L. 624-18 ; adde : Privilèges mobiliers ; Rép. com., V o Entreprises en difficulté - Redressement judiciaire [Phase de traitement - Les créanciers]), force est de considérer qu'il s'agit là d'une sûreté sans grande portée pratique. 815. Il est vrai que l'article 2332-4 o complète le privilège du vendeur de meuble par une revendication ; mais celle-ci est enfermée par le même texte dans des conditions très étroites : la vente doit, d'abord, avoir été faite au comptant ; il faut, ensuite, que le ou les biens vendus soient demeurés en la possession de l'acheteur ; la revendication doit être faite dans la huitaine de la livraison ; et les effets mobiliers doivent se trouver « dans le même état dans lequel cette livraison a été faite ». 816. Au surplus, lorsqu'une procédure collective de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte contre l'acheteur, la revendication n'est autorisée que dans trois cas : En premier lieu, s'il y a résolution de la vente ; mais il faut que cette sanction ait été prononcée ou acquise par le jeu d'une clause résolutoire avant le jugement d'ouverture, car, à compter de celui-ci, la résolution ne peut intervenir en raison du défaut de paiement du prix (C. com., art. L. 622-21), et la revendication est, de ce fait, exclue (C. com., art. L. 624-12, al. 2, in fine). En deuxième lieu, lorsque les marchandises sont en cours d'expédition, pourvu que les marchandises n'aient pas été revendues régulièrement entre-temps par l'acheteur (C. com., art. L. 624-13). En troisième lieu, lorsqu'une clause de réserve de propriété a été stipulée, qui subordonne le transfert de propriété au paiement du prix (C. com., art. L. 624-16 ; adde, sur la réserve de propriété : supra, n os 129 et s.). 817. Dans la mesure où la revendication permet au vendeur d'obtenir non le paiement du prix, mais la restitution de la chose, elle ne participe pas à l'exécution forcée de la vente ; ses effets sont à rapprocher, à cet égard, de ceux de l'action résolutoire, même si, selon la jurisprudence, telle n'est pas sa nature (Cass. com. 23 janv. 2001, Dalloz Affaires 2001. 702, note A. Lienhard). B. - Vente immobilière 818. U n privilège spécial sur l'immeuble vendu est accordé au vendeur impayé par l'article 2374-1 o (anc. art. 2103-1 o , dénuméroté par l'ordonnance n o 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés) du code civil. Ce privilège doit être inscrit dans les deux mois de l'acte de vente, moyennant quoi il rétroagit à la date dudit acte. Passé ce délai, le privilège dégénère en hypothèque et ne prendra rang qu'à la date de son inscription (C. civ., art. 2379, al. 1 er , ayant remplacé, depuis la même ordonnance, l'anc. art. 2108, al. 1 er ) ; de surcroît, le vendeur perdra alors l'action en résolution de la vente pour non-paiement du prix (V. infra, n os 846 et s.). 819. L'intérêt du privilège est de permettre au vendeur de se faire payer sur le prix de l'immeuble, par préférence aux autres créanciers, et en quelques mains que celui-ci se trouve (V. Privilèges immobiliers). Le privilège garantit, outre le paiement du prix indiqué dans l'acte, les accessoires du prix, c'est-à-dire les « loyaux coûts du contrat », dès lors que le vendeur en a fait l'avance, ainsi que les intérêts légaux et conventionnels de la somme due. 820. L'efficacité du privilège du vendeur d'immeuble est garantie par l'article L. 641-13, II, du code de commerce, qui a reconduit la solution consacrée depuis 1994 et suivant laquelle, au cas où un jugement de liquidation judiciaire est pris contre l'acheteur, les créances postérieures au jugement d'ouverture seront primées par les créances antérieures « qui sont garanties par des sûretés immobilières… ». § 2 - Résolution 821. L'article 1654 du code civil, qui enferme une application particulière de l'article 1184 dudit code, dispose : « Si l'acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente ». Cependant, la faculté ouverte par ce texte au vendeur n'est que de principe. C'est pourquoi il convient de délimiter, en l'espèce, le domaine de la résolution, avant d'en présenter les conditions, les modalités et les effets. A. - Domaine de la résolution 822. Dans deux cas, le vendeur ne peut normalement pas prétendre à la résolution. Il en est ainsi, d'abord, lorsque la vente s'est déroulée en justice ; car alors, le défaut de paiement du prix par l'adjudicataire a pour effet d'entraîner une nouvelle vente aux enchères, dénommée « adjudication sur folle enchère » (V. Rép. pr. civ., V o Ventes publiques d'immeubles). 823. Il en est ainsi, ensuite, lorsque le prix de vente est constitué par une rente viagère. Dans ce cas, en effet, l'article 1978 du code civil dispose : « Le seul défaut de paiement des arrérages de la rente n'autorise point celui en faveur de qui elle est constituée, à demander le remboursement du capital, ou à rentrer dans le fonds par lui aliéné : il n'a que le droit de saisir et de faire vendre les biens de son débiteur et de faire ordonner ou consentir, sur le produit de la vente, l'emploi d'une somme suffisante pour le service des arrérages ». 824. De ce texte il ressort que, si le prix de la vente consiste dans une rente viagère, le vendeur impayé n'a pas le droit de demander en justice la résolution de la vente ; il peut seulement demander l'exécution forcée en faisant vendre en justice le bien, le produit de la vente étant affecté au service des arrérages. Cette solution, qu'on justifie tantôt par le caractère aléatoire du contrat, tantôt par les difficultés pratiquement insurmontables auxquelles donnerait lieu le rétablissement de l'état antérieur lorsque le contrat a été correctement exécuté pendant très longtemps (comp. P. RÉMY, obs. RTD civ. 1987. 363), revêt, en vérité, une portée limitée. En effet, la jurisprudence voit dans l'article 1978 une disposition exceptionnelle, qui doit donc donner lieu à une interprétation stricte. Ce texte ne saurait être étendu au-delà du cas particulier qu'il prévoit. 825. Ainsi, tout d'abord, parce qu'il ne vise que la vente dont le prix consiste en une rente viagère, il n'est pas applicable au cas où le prix est une rente constituée en perpétuel. Pour autant, la résolution de la vente ne peut être librement demandée dans cette hypothèse, au regard de la disposition de l'article 1912 du code civil qui exige, pour contraindre le débiteur au rachat, que ce débiteur « cesse de remplir ses obligations pendant deux années » (V. Rentes). 826. Le libellé du texte explique, ensuite, que, si l'acheteur d'une nue-propriété qui s'est engagé à fournir au vendeur le logement et l'entretien de sa personne n'a pas exécuté cette obligation, le vendeur soit en droit de demander la résolution (Cass. 1 re civ. 8 févr. 1960, D. 1960. 417) : c'est qu'alors la convention ne s'analyse pas vraiment comme une vente, mais comme un bail à nourriture ; elle ne ressortit donc pas à la sphère de l'article 1978 du code civil. 827. De même, dans une vente dont le prix est constitué pour partie par un capital payable à terme, et, pour le surplus, par une rente viagère, l'article 1978 n'est pas applicable au cas de non-paiement de la seule partie du prix fixée en capital, puisqu'il ne vise que le défaut de paiement des arrérages (Cass. 3 e civ. 28 mai 1986, Bull. civ. III, n o 84, RTD civ. 1987. 363, obs. P. Rémy). 828. Toujours au regard de la lettre du texte, l'article 1978 supposant le défaut de paiement des arrérages, son application est écartée au cas de retards réitérés dans le paiement des arrérages ; les juges peuvent donc prononcer la résolution au motif que de tels retards constituent une violation grave et renouvelée des obligations contractuelles de l'acheteur (Cass. 3 e civ. 27 nov. 1991, D. 1992. 440, note Y. Dagorne-Labbe ). 829. Enfin, l'article 1978 du code civil, s'il interdit au crédirentier de « demander [en justice] le remboursement du capital », n'interdit pas aux contractants de stipuler une clause résolutoire dans le cas qu'il prévoit ; la jurisprudence a posé depuis longtemps que les clauses résolutoires dérogeant à l'article 1978 sont valables (Cass. civ. 24 juin 1913, DP 1917. 1. 38 ; Cass. 3 e civ. 9 mars 1982, Bull. civ. III, n o 64 ; Cass. 1 re civ. 6 janv. 1987, Bull. civ. I, n o 6 ; Cass. 3 e civ. 10 nov. 1992, Bull. civ. III, n o 294). Lire la mise à jour 829 s. Résolution pour défaut de paiement. - Résolution d'une vente immobilière pour défaut de paiement de la rente en application de la clause résolutoire. Dès lors que le prix de la vente a été converti en rente viagère, la rente n'est qu'une modalité de paiement du prix. Les acquéreurs ne justifiant pas du paiement des arrérages impayés dans le délai imparti, la clause résolutoire pour défaut de paiement du prix doit s'appliquer (Cass., ass. plén., 4 avr. 2008, n o 07-14.523 , D. 2008. AJ 1143 ). 830. Pour qu'une telle clause soit pleinement efficace, elle doit d'abord être dépourvue d'ambiguïté et exprimer ainsi la volonté commune des parties de mettre fin de plein droit au contrat (Cass. 3 e civ. 7 déc. 1988, Bull. civ. III, n o 176) ; dans le cas contraire, le vendeur devra s'adresser au juge qui vérifiera la réalité de l'inexécution avant de prononcer la sanction (Cass. 1 re civ. 10 oct. 1995, Bull. civ. I, n o 357). La clause doit, de surcroît être invoquée de bonne foi (Cass. 3 e civ. 8 avr. 1987, Bull. civ. III, n o 88, Defrénois 1988. 375, obs. J.-L. Aubert, RTD civ. 1988. 146, obs. P. Rémy ; Cass. 1 re civ. 16 févr. 1999, D. 1999, IR 75 ), la bonne foi de l'acquéreur étant, quant à elle, indifférente (Cass. 3 e civ. 24 sept. 2003, Defrénois 2004. 139, obs. Y. Dagorne-Labbe). Enfin, à défaut de stipulation contraire permettant à la résolution de jouer automatiquement (V., par ex., Cass. 3 e civ. 7 oct. 1998, Bull. civ. III, n o 191, RD imm. 1999. 115, obs. J.-C. Groslière ; 24 févr. 1999, Bull. civ. III, n o 54, RD imm. 1999. 272, obs. J.-C. Groslière ), la mise en oeuvre de la clause résolutoire doit être précédée d'une mise en demeure. 831. À ce dernier point de vue, la jurisprudence se montre assez souple : dans une affaire où la vente avait été conclue avec une clause de résolution « de plein droit, à défaut de paiement d'un seul terme des arrérages de la rente, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux, contenant déclaration par le vendeur de sa volonté d'user du bénéfice de cette clause », la Cour de cassation a approuvé les juges du fond d'avoir admis le vendeur à agir en résolution de la vente pour défaut du paiement des arrérages de la rente, bien que l'intéressé eût délivré un commandement de payer dans lequel il avait omis d'indiquer qu'il entendait user de la clause résolutoire (Cass. 1 re civ. 6 janv. 1987, Bull. civ. I, n o 6, RTD civ. 1988. 148, obs. P. Rémy). 832. La question s'est posée de savoir si les héritiers du crédirentier peuvent demander la résolution de la vente pour non- paiement des arrérages échus avant le décès du crédirentier. La réponse à lui apporter dépend du tour donné à la clause résolutoire : si celle-ci porte que la résolution aura lieu de plein droit, par le seul fait du non-paiement des arrérages, les héritiers du crédirentier sont en droit de s'en prévaloir, car la résolution est déjà acquise au profit de leur auteur (CA Lyon, 1 er juin 1972, Gaz. Pal. 1972. 2. 873). Si la clause stipule simplement que le crédirentier pourra demander la résolution, les héritiers ne peuvent l'invoquer, au motif qu'il s'agit là d'un droit d'option, purement personnel à son titulaire, et donc intransmissible (Cass. 1 re civ. 13 déc. 1988, Bull. civ. I, n o 353, RTD civ. 1989. 576, obs. P. Rémy). B. - Conditions de la résolution 833. Pour que le vendeur puisse prétendre à la résolution, le prix convenu doit être exigible et non payé. Le prix est considéré comme non payé dès lors qu'il n'est pas intervenu de manière strictement conforme aux prévisions du contrat. Peu importe, dès lors, qu'une partie seulement du prix, même faible, soit due (Cass. req. 23 déc. 1912, DP 1913. 1. 47) ; le fait que le capital ait été payé et que l'acheteur reste devoir uniquement les intérêts n'importe pas davantage (Cass. req. 27 mai 1895, DP 1895. 1. 508) ; et il est tout aussi indifférent que le non-paiement soit dépourvu du caractère fautif (Cass. 3 e civ. 9 oct. 1979, Bull. civ. III, n o 169). 834. Le paiement effectué avec retard est assimilable, à ce point de vue, au défaut de paiement : il en est ainsi, spécialement, lorsque le paiement a eu lieu au moyen de deux chèques sans provision, dont l'un a été rejeté à plusieurs reprises (Cass. 3 e civ. 27 nov. 1991, JCP 1992. IV. 410), ou encore, au cas de vente dont le prix consiste dans une rente viagère, lorsque le montant du terme de la rente a été inscrit tardivement au compte du crédirentier (Cass. 1 re civ. 23 juin 1993, Bull. civ. I, n o 229). 835. En revanche, le vendeur ne peut prétendre à la résolution de la vente si le prix a été détourné par un séquestre qu'il avait lui-même choisi (Cass. com. 11 janv. 1971, Bull. civ. IV, n o 7 ; rappr. Cass. 3 e civ. 14 nov. 1978, D. 1979, IR 136). 836. Le vendeur ne saurait, au reste, prétendre légitimement au paiement du prix si, de son côté, lui-même n'a pas satisfait aux obligations mises à sa charge par le contrat. Mais, pour que l'acheteur soit fondé à retenir le prix en opposant l'exception d'inexécution, il faut que celle-ci repose sur des raisons sérieuses. Tel n'est pas le cas lorsque l'acquéreur d'un immeuble se maintient depuis plusieurs années dans les lieux sans avoir effectué le moindre versement, et refuse de consigner une partie des sommes dues en invoquant des malfaçons dont l'existence n'est pas établie (Cass. 3 e civ. 18 déc. 1991, Bull. civ. III, n o 331). C. - Modalités de la résolution 837. L'article 1654 du code civil, en énonçant : « Si l'acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente », souligne le caractère judiciaire de la résolution. Cependant, les parties sont libres de déroger à ce texte en insérant dans la vente une clause résolutoire. Il y a donc lieu d'étudier successivement la résolution judiciaire et la clause résolutoire. 1° - Résolution judiciaire 838. Le caractère judiciaire de la résolution implique, d'une part, que celle-ci doit être demandée en justice, et, d'autre part, que le tribunal saisi d'une telle demande n'est pas tenu d'y accéder : le juge peut, comme dans le cadre de l'article 1184 du code civil, ordonner l'exécution forcée ; il peut aussi, suivant l'article 1655 de ce code, accorder un délai de grâce pour le paiement du prix sauf « si le vendeur est en danger de perdre la chose et le prix ». L'opportunité de prononcer la résolution est donc laissée à son appréciation (Cass. 3 e civ. 20 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 147 ; Cass. 1 re civ. 4 janv. 1995, JCP 1995. IV. 536). Mais, dès lors qu'il a été saisi par le vendeur d'une action en résolution pour non-paiement du prix, le juge n'est pas fondé à modifier l'objet du litige en condamnant l'acquéreur à payer le solde du prix (Cass. 3 e civ. 29 oct. 2003, Bull. civ. III, n o 186). 839. En outre, deux facteurs sont de nature à paralyser le jeu de l'action en résolution, bien que celle-ci ait été régulièrement engagée : le premier tient au comportement du vendeur ; le droit d'option ouvert à celui-ci par le droit commun des contrats synallagmatiques (C. civ. art. 1184, al. 2) entre l'exécution forcée et l'action en résolution peut être exercé aussi longtemps qu'une décision n'est pas intervenue de manière définitive ; le vendeur peut donc, alors qu'il a engagé une action en résolution, opter dans le cours de la procédure pour une demande en paiement, et inversement. Le second tient au comportement de l'acheteur qui peut empêcher la résolution en offrant de payer le prix : l'offre tardive de paiement, même en cours d'instance, peut faire obstacle à la résolution si le juge, qui dispose en la matière d'un pouvoir souverain d'appréciation, le décide (Cass. 1 re civ. 13 févr. 1963, D. 1963. 316, note P. Voirin ; Cass. 3 e civ. 27 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 155). 840. L'action résolutoire obéit aux conditions de recevabilité du droit commun : c'est ainsi que la recevabilité de la demande qui l'appuie ne requiert pas qu'une sommation ou une mise en demeure ait été faite à l'acheteur, puisque l'assignation vaut mise en demeure (Cass. com. 28 févr. 1972, Bull. civ. IV, n o 75, D. 1972, somm. 140 ; Cass. 3 e civ. 6 févr. 1973, Bull. civ. III, n o 95). Il est notable, cependant, que la survenance du jugement ouvrant une procédure collective contre l'acheteur interdit au vendeur d'exercer l'action en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix (C. com., art. L. 622-21). 841. Surtout, l'action résolutoire est soumise à trois conditions appelant des développements particuliers : l'une, qui intéresse aussi bien la vente mobilière que la vente immobilière, a trait à l'absence de renonciation du vendeur ; les deux autres concernent uniquement la vente immobilière, et sont relatives à la conservation du privilège du vendeur d'immeuble ainsi qu'à la publication de la demande en résolution. a. - Absence de renonciation du vendeur 842. Une fois consommée l'inexécution par l'acheteur de l'obligation de payer le prix, le vendeur est en droit de renoncer à exécuter l'action résolutoire : la solution a été consacrée il y a longtemps par la jurisprudence (Cass. req. 24 mars 1931, JCP 1931. II. 784) ; elle se recommande du droit d'option ouvert au vendeur qui, s'il a le droit de demander l'exécution forcée, peut donc renoncer à demander la résolution. La renonciation du vendeur est une fin de non-recevoir que l'acheteur peut opposer à l'action résolutoire pour défaut de paiement du prix. 843. La renonciation peut pareillement intervenir de manière anticipée, c'est-à-dire dès la conclusion de la vente, et ce aussi bien en faveur d'un tiers, tel qu'un créancier hypothécaire qui a concouru au paiement d'une partie du prix, qu'au profit de l'acquéreur lui-même : dans ce dernier cas, elle n'a pas pour effet de conférer à l'engagement dudit acquéreur un caractère purement potestatif, puisque le vendeur dispose d'autres recours (l'exécution forcée ; une action en responsabilité civile contractuelle) s'il n'est pas payé à l'échéance (M. DAGOT, La renonciation anticipée à l'action résolutoire de la vente d'immeuble, JCP, éd. N, 1986. I. 361). Lire la mise à jour 843 s. Licéité de la clause de renonciation anticipée à la résolution du contrat pour défaut de paiement du prix. - L'article 1184 du code civil n'étant pas d'ordre public, un contractant peut renoncer par avance au droit de demander la résolution judiciaire du contrat, dès lors que la clause, rédigée de manière claire, précise, non ambiguë et compréhensible pour un profane, était non équivoque (Civ. 3 e , 3 nov. 2011, n o 10-26.203 , Dalloz actualité, 25 nov. 2011, obs. Kebir). 844. Qu'elle intervienne lors de la conclusion de la vente ou au moment où le paiement est exigible, la renonciation du vendeur doit être certaine. Il peut y avoir une difficulté de preuve. Si la renonciation a lieu lors de la vente, ce qui est souvent le cas dans la vente immobilière, elle emprunte la forme écrite. Dans l'autre éventualité, la jurisprudence admet que la renonciation peut être aussi bien expresse que tacite, pourvu qu'elle ne soit pas douteuse. Il s'agit là d'une question de fait laissée à l'appréciation souveraine des juges du fond (Cass. civ. 25 oct. 1948, Bull. civ. I, n o 272). 845. Il a été jugé à ce propos que le fait d'exercer l'action en paiement n'implique pas, à lui seul, la renonciation du vendeur à la résolution (Cass. com. 27 oct. 1953, D. 1954. 201), mais que, en revanche, le fait que le vendeur se soit abstenu de réclamer le paiement d'une rente qui n'avait pas été payée pendant une longue période peut s'analyser en une telle renonciation (Cass. 3 e civ. 8 avr. 1987, RD imm. 1987. 465, obs. J.-C. Groslière et C. Saint-Alary Houin). De même, il y aurait renonciation tacite si le vendeur avait concouru ou donné son approbation à la revente que l'acheteur a faite de l'immeuble vendu (Cass. req. 7 nov. 1832, S. 1833. 1. 310 ; 9 juill. 1834, S. 1834. 1. 806). b. - Conservation du privilège du vendeur d'immeuble 846. Aux termes de l'article 2379, alinéa 2, du code civil (anc. art. 2108, al. 2, déclassé par l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés) : « L'action résolutoire établie par l'article 1654 ne peut être exercée après l'extinction du privilège du vendeur, ou à défaut d'inscription […] dans le délai [de deux mois à compter de l'acte de vente], au préjudice des tiers qui ont acquis des droits sur l'immeuble du chef de l'acquéreur et qui les ont publiés ». Ce texte établit un lien entre le privilège du vendeur d'immeuble et l'action résolutoire pour défaut de paiement du prix. Ce lien est logique, car il ne servirait à rien de mettre les tiers à l'abri du privilège du vendeur, si ces tiers, notamment le sous-acquéreur, étaient exposés à l'éviction par la résolution de la vente pour non-paiement du prix. 847. La perte de l'action résolutoire, découlant de l'extinction ou de l'inscription tardive du privilège, ne peut être invoquée, suivant la lettre même du texte, que par les tiers qui ont acquis sur l'immeuble, du même auteur, un droit soumis à publicité et qui l'ont publié les premiers, car seuls ceux-là ont un droit sur l'immeuble opposable au vendeur demandeur à l'action en résolution. Tel est le cas, par exemple, du sous-acquéreur qui a acquis du chef de l'acquéreur, dès lors que son titre a été publié avant l'introduction de l'action résolutoire (Cass. 3 e civ. 26 nov. 1970, Bull. civ. III, n o 647 ; adde : Cass. 3 e civ. 6 févr. 1974, Bull. civ. III, n o 67, refusant le bénéfice de l'anc. art. 2108, al. 2, au sous-acquéreur qui n'avait pas publié son titre à la date de l'assignation en résolution). 848. L'acquéreur et ses héritiers, parce qu'ils ne sont pas des tiers, ne peuvent pas, en revanche, se prévaloir de la fin de non-recevoir établie par l'article 2379. Par conséquent, le vendeur non payé de l'immeuble, bien qu'il soit déchu du privilège qu'il n'a pas publié, n'en conserve pas moins le droit de demander contre eux la résolution (Cass. civ. 27 mars 1861, DP 1861. 1. 102). 849. Les créanciers chirographaires de l'acheteur, pour leur part, sont, par définition, dépourvus de tout droit soumis à publicité sur l'immeuble. Aussi, ils ne peuvent davantage invoquer en justice la résolution de la vente (même arrêt). 850. Il en est de même des tiers titulaires de droits sur l'immeuble, et qui n'ont pas publié leur titre lors de l'introduction de l'action résolutoire (Cass. 3 e civ. 4 juin 1973, D. 1973. 695, note E. Franck), ou qui l'ont publié après. c. - Publication de la demande en résolution 851. Le décret du 4 janvier 1955 (art. 28-4 o -c ; pour ce décret, V. C. civ. Dalloz) soumet à la publicité foncière « les demandes en justice tendant à obtenir […] la résolution […] d'une convention » portant mutation de droits réels immobiliers ; et l'article 30, 5, du même décret sanctionne le manquement à cette disposition par l'irrecevabilité des demandes. Il s'ensuit que, pour être recevable, la demande en résolution d'une vente immobilière doit être transcrite à la conservation des hypothèques. 2° - Clause résolutoire 852. Afin d'éviter les difficultés de la résolution judiciaire, les parties peuvent insérer dans le contrat une clause résolutoire, dite encore « pacte commissoire exprès », et aux termes de laquelle la vente sera résolue de plein droit si le prix n'est pas payé à l'époque convenue : l'article 1656 du code civil valide expressément cette clause en matière de vente immobilière ; et aucun motif n'autorise à raisonner différemment en matière de vente mobilière. Cependant, l'efficacité de la clause suppose que soient réunies certaines conditions, et sa portée peut varier. a. - Conditions d'efficacité 853. Dans les rapports entre les parties, le pacte commissoire doit, pour être efficace, être rédigé en des termes qui manifestent clairement la volonté commune des contractants de faire échapper la résolution à l'arbitrage du juge. Tel n'est pas le cas d'une clause stipulant qu'à défaut de paiement à l'échéance et après un commandement resté infructueux, le vendeur pourra exercer l'action résolutoire (CA Aix, 17 janv. 1949, D. 1949. 256). 854. Il faut, en outre, que le vendeur n'ait pas manifesté son intention de renoncer au bénéfice de la clause ; ainsi, peuvent valoir renonciation : l'acceptation de paiements tardifs (Cass. 3 e civ. 18 mars 1970, Bull. civ. III, n o 221), l'acceptation d'acomptes et du règlement de copropriété établi postérieurement au terme (Cass. 1 re civ. 29 juin 1964, Bull. civ. I, n o 352). En revanche, le fait que le notaire ait accepté un paiement tardif ne suffit pas à constituer une renonciation du vendeur, car le mandat conféré au notaire de recevoir le paiement ne lui donne pas la faculté de renoncer à une clause résolutoire (Cass. 1 re civ. 10 avr. 1962, Bull. civ. I, n o 208 ; Cass. 3 e civ. 29 nov. 1972, 2 arrêts, Bull. civ. III, n os 645 et 646). 855. À l'égard des tiers, lorsque la vente porte sur un immeuble, l'opposabilité du pacte commissoire requiert la publication de celui-ci à la conservation des hypothèques (Décr. 4 janv. 1955, art. 28, 2 o , préc.). Pratiquement, l'inscription est accomplie par la publication de l'acte de vente qui stipule la clause. 856. Pendant longtemps, la jurisprudence a paru subordonner l'opposabilité aux tiers du pacte commissoire à une condition supplémentaire, savoir l'inscription du privilège du vendeur d'immeuble (Cass. 1 re civ. 12 juill. 1978, Bull. civ. I, n o 273). La solution, qui ne prenait appui sur aucun texte, reposait sur une assimilation contestable de la clause résolutoire à l'action en résolution. Aussi, elle a été, semble-t-il, abandonnée à la faveur d'un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation (8 juill. 1992, Bull. civ. III, n o 247). b. - Portée 857. Il convient d'abord de rappeler que, la clause résolutoire étant stipulée au profit exclusif du vendeur, celui-ci est en droit, plutôt que de la mettre en oeuvre, d'exiger l'exécution forcée du contrat (Cass. com. 27 oct. 1953, D. 1954. 201, note H.L.) ; en revanche, l'exercice de l'action résolutoire en exécution du pacte commissoire, dans la mesure où il n'a pour objet que de faire constater une résolution consommée, interdit au même vendeur de demander l'exécution de la vente (Cass. req. 5 févr. 1935, S. 1935. 1. 147). Mais, seul l'acheteur ou ses héritiers peuvent se prévaloir de cette cause d'irrecevabilité de l'action en paiement, en vertu de la relativité des conventions (Cass. req. 24 juill. 1871, DP 1871. 1. 499). 858. Cela posé, il ressort de l'article 1656 du code civil qu'en principe, la mise en oeuvre du pacte commissoire dans le cadre d'une vente immobilière ne dispense pas le vendeur de mettre l'acheteur en demeure de payer ; ce texte dispose, en effet, que « … l'acquéreur peut néanmoins payer après l'expiration du délai, tant qu'il n'a pas été mis en demeure de payer par une sommation » à fin d'exécution ; la jurisprudence pose régulièrement à ce propos que le commandement visant la clause résolutoire qui figure dans une vente à terme, s'il est délivré pour un montant supérieur au montant réel de la créance, n'en est pas moins valable pour la partie non contestable de la dette (Cass. 1 re civ. 2 juill. 1996, Bull. civ. I, n o 283 ; 13 nov. 1997, Bull. civ. I, n o 306 ; 4 mai 1999, Bull. civ. I, n o 145 ; 18 mars 2003, Bull. civ. I, n o 84). L'effet de la clause résolutoire régulièrement mise en oeuvre est de contraindre le juge, une fois la sommation intervenue, à constater la résolution sans pouvoir accorder de délai à l'acheteur (Cass. civ. 26 nov. 1951, Bull. civ. I, n o 325 ; Cass. 3 e civ. 13 mai 1969, Bull. civ. III, n o 377). 859. Cette dernière solution n'a pas été remise en cause par l'article 1244-3 du code civil, issu de la loi du 9 juillet 1991 réformant les procédures d'exécution, et réputant non écrites les stipulations qui méconnaissent le pouvoir reconnu au juge d'accorder des délais de grâce : l'article 1656 est un texte spécial, qui déroge au texte général de l'article 1244-3 ; à ce titre, la disposition qu'il contient doit recevoir application (Cass. 3 e civ. 15 juin 1994, Contrats, conc., consom., janv. 1995, p. 3, obs. L. Leveneur). 860. Il y a même plus : parce que l'article 1656 n'est pas d'ordre public, les parties peuvent, dérogeant à ce texte, stipuler qu'à défaut de paiement dans le délai convenu, la vente sera résolue par la seule échéance du terme,sans qu'il soit besoin d'une sommation, ni d'une mise en demeure quelconque (Cass. 1 re civ. 27 janv. 1960, Bull. civ. I, n o 61, D. 1960, somm. 50 ; Cass. 3 e civ. 25 févr. 1971, Bull. civ. III, n o 138). La solution est, d'ailleurs, conforme à l'article 1139 du code civil, qui dispose que la mise en demeure du débiteur peut résulter de la seule échéance du terme. Cependant, pour que le défaut de paiement soit alors établi, il faut, en pratique, que le prix soit payable au domicile du vendeur. D. - Effets de la résolution 861. La résolution, qu'elle ait été prononcée en justice ou qu'elle résulte d'un pacte commissoire, emporte l'anéantissement rétroactif de la vente, laquelle doit être considérée comme n'ayant jamais existé. La portée de cette destruction du contrat doit être mesurée tant à l'égard des parties qu'à l'égard des tiers. 1° - Effets de la résolution à l'égard des parties a. - Obligations de l'acheteur 862. La résolution de la vente oblige l'acheteur à restituer la chose, ainsi que tous les accessoires de celle-ci. Par exemple, il a été jugé, au cas de résolution de la « cession d'un cabinet dentaire », que le cessionnaire devait restituer également le droit au bail (T. civ. Seine, 18 juin 1955, D. 1955. 500). Si la chose est frugifère, on est enclin à poser que l'acheteur est tenu de rendre les fruits du jour où il est apparu comme un possesseur de mauvaise foi, c'est-à-dire du jour de la demande en résolution. 863. Il convient de souligner que la restitution de la chose peut se trouver affectée par la procédure collective à laquelle l'acheteur est soumis. Pour que la résolution puisse jouer dans un tel cas, il faut qu'elle ait été prononcée, ou acquise par le jeu d'une clause résolutoire, avant le jugement ouvrant ladite procédure (V. supra, n o 840). Alors, le vendeur est en droit de revendiquer la chose, à la double condition, d'une part, de le faire dans le délai de trois mois à compter de la publication dudit jugement (C. com., art. L. 624-9), et, d'autre part, que la chose n'ait pas été revendue, entre-temps, sans fraude (C. com., art. L. 624-13). 864. Pour le reste, les difficultés suscitées par la restitution, c'est-à-dire par la nécessité de rétablir l'état antérieur, doivent être vidées en recourant aux règles du droit commun. À cet égard, les solutions applicables au cas de nullité sont transposables au cas de résolution, et inversement. 865. Si le vendeur établit que la chose a été détériorée, ou qu'elle a été dépréciée par suite de l'usure liée à l'usage que l'acheteur en a fait, celui-ci doit indemniser le vendeur, même s'il n'a pas commis de faute ; car il est obligé de restituer en considération de la valeur de la chose au jour de la vente, et compte tenu de l'état où cette chose se trouvait à la même date (Cass. 1 re civ. 21 mars 2006, JCP 2006. IV. 1883). Il a été jugé en ce sens que lorsque, par l'effet de la résolution, l'acheteur doit restituer une voiture plus de deux ans après la vente, la dépréciation due à l'usage de cette voiture lui incombe (Cass. 1 re civ. 4 oct. 1988, Bull. civ. I, n o 274, D. 1989, somm. 235, obs. J.-L. Aubert). 866. Le souci d'assurer le strict rétablissement de l'état antérieur a conduit également la jurisprudence, au cas où la chose n'était pas frugifère, à dénier au vendeur le droit d'exiger de l'acheteur qu'au titre des restitutions, celui-ci l'indemnise pour la jouissance dont il a profité avant la résolution (Cass. 1 re civ. 11 mars 2003, Bull. civ. I, n o 74, D. 2003. 2522, note Y.- M. Sérinet ; rappr. Cass. ch. mixte 9 juill. 2004, D. 2004. 2175, note C. Tuaillon , JCP 2004. II. 10190, note G. François). 867. En revanche, il est permis au vendeur de prétendre à des dommages et intérêts pour le préjudice que lui cause la résolution de la vente, lorsque le défaut de paiement est fautif. La jurisprudence fait une application notable de la solution, au cas de résolution de la vente dont le prix consiste dans une rente viagère : normalement, l'anéantissement rétroactif du contrat interdit au crédirentier de prétendre au paiement des arrérages échus avant la résolution (Cass. 3 e civ. 7 juin 1989, Bull. civ. III, n o 134, RTD civ. 1990. 100, obs. P. Rémy ). Cependant, si le demandeur à la résolution se voit reconnaître, en outre, le droit à des dommages et intérêts, les juges ont le pouvoir de décider que les arrérages versés de la rente demeureront acquis au vendeur à titre de réparation du préjudice dont ils ont constaté l'existence (Cass. 3 e civ. 11 avr. 1973, Bull. civ. III, n o 280). 868. La mise en oeuvre de la responsabilité civile de l'acheteur a conduit également la jurisprudence à décider, dans un cas de résolution d'une vente immobilière, que, si l'immeuble s'est déprécié depuis la vente, l'acheteur fautif doit au vendeur la différence entre le prix convenu et le prix de revente, ainsi que l'intégralité des fermages perçus depuis la conclusion de la vente résolue (V. Cass. 3 e civ. 22 juill. 1992, Bull. civ. III, n o 263, à propos de la résolution d'une vente de parcelles de terre pour défaut de paiement du prix). b. - Obligations du vendeur 869. De même que l'acheteur doit rendre la chose, le vendeur doit restituer le prix. Si des acomptes ont été versés par un tiers à la décharge de l'acheteur, c'est à ce tiers que le vendeur est tenu de les restituer (Cass. civ. 26 avr. 1899, S. 1903. 1. 475). 870. Sur les acomptes éventuellement versés, le vendeur est tenu des intérêts, au taux légal. Quant à la date à laquelle ceux- ci commencent à courir, la jurisprudence est incertaine : certaines décisions la fixent au jour du paiement (Cass. req. 8 juill. 1925, Gaz. Pal. 1925. 2. 606) ; d'autres, au jour de la demande en résolution, car l'acheteur est le seul responsable de la résolution (Cass. 3 e civ. 7 nov. 1968, Bull. civ. III, n o 448). 871. Lorsque des améliorations ont été apportées par l'acheteur à la chose, il y a lieu d'appliquer la théorie des impenses : seules les dépenses nécessaires et les dépenses utiles peuvent donner lieu à indemnisation au profit de l'acheteur : les premières ouvrent droit à une indemnité égale au montant de la dépense ; les secondes permettent à l'acheteur de prétendre être remboursé par le vendeur à hauteur du montant de la plus-value apportée au bien. Les dépenses somptuaires n'ouvrent droit à aucun remboursement pour l'acheteur. Conformément à ces principes, la Cour de cassation a censuré une cour d'appel pour avoir décidé que le vendeur d'un immeuble était tenu d'indemniser l'acquéreur qui avait effectué des travaux sur ce bien avant la résolution de la vente, sans préciser la mesure dans laquelle les dépenses afférentes aux travaux avaient été utiles (Cass. 3 e civ. 15 avr. 1992, Bull. civ. III, n o 133 ; rappr. Cass. 3 e civ. 18 mars 1981, D. 1981, IR 378). 872. Les constructions édifiées sur l'immeuble par l'acheteur ne relèvent pas, en principe, de la théorie des impenses, mais de l'article 555 du code civil (comp. Cass. 1 re civ. 28 mai 1962, Bull. civ. I, n o 270). 2° - Effets de la résolution à l'égard des tiers 873. La résolution de la vente, puisqu'elle emporte la destruction rétroactive du contrat, emporte l'anéantissement des droits accordés sur la chose par l'acheteur ; ces droits sont censés n'avoir jamais été consentis. Il s'ensuit, par exemple, que le sous-acquéreur se trouve évincé. En vérité, la portée de cette solution n'est pas la même suivant que la vente résolue portait sur un meuble ou sur un immeuble. 874. Dans le premier cas, le tiers acquéreur de bonne foi qui est en possession d'un meuble corporel peut mettre en échec la résolution, en opposant la règle de l'article 2279, alinéa 1 er , du code civil, suivant laquelle : « En fait de meubles, la possession vaut titre » (V. Revendication). Lire la mise à jour 189 s., 874. Réforme de la prescription en matière civile. - La loi n o 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (D. 2008. Actu. Lég. 1614 ; RDI 2008. 368, obs. Malinvaud ; AJ fam. 2008. 291, obs. Bardout ) a modifié la numérotation de l'article 2279 du code civil qui est devenu l'article 2276. Une nouvelle section intitulée « De la prescription acquisitive en matière mobilière » fait son entrée dans le code civil, comprenant les seuls articles 2279 et 2280 (auparavant intégrés dans la section « De quelques prescriptions particulières »), qui deviennent respectivement les articles 2276 et 2277. 875. Dans le second cas, l'appréciation des effets de la résolution oblige à distinguer les actes de disposition et les actes d'administration consentis par l'acheteur : Les premiers sont anéantis ; ainsi en est-il des aliénations, des constitutions de sûretés réelles ou autres droits réels, et aussi du bail commercial, lequel tend à être analysé comme un acte de disposition (rappr. Cass. 3 e civ. 14 mai 1974, Bull. civ. III, n o 194). Les seconds sont considérés comme valables, dès lors qu'ils ont été conclus sans fraude avec un tiers de bonne foi avant la résolution : il en a été jugé ainsi, spécialement, à propos d'un simple renouvellement de bail commercial (Cass. com. 29 mars 1966, Bull. civ. III, n o 177). 876. De façon générale, les solutions dégagées à propos des ventes sous condition résolutoire ont ici vocation à s'appliquer (V. supra, n os 119 et s.). Section 2 - Obligation d'enlever la chose vendue 877. S'il revient au vendeur de délivrer la chose vendue, autrement dit de mettre celle-ci à la disposition de l'acquéreur (V. supra, n os 202 et s.), il appartient à celui-ci, réciproquement, d'en prendre livraison. Du fait que l'acheteur est devenu propriétaire, en principe, dès l'échange des consentements, l'obligation de prendre livraison consiste simplement, pour lui, à accomplir les actes matériels lui permettant d'entrer en possession de la chose. 878. Lorsque la vente porte sur un immeuble, l'exécution de cette obligation ne suscite généralement pas de difficulté ; l'entrée en jouissance, dont la date est précisée dans l'acte de vente, et la prise de possession des lieux s'effectuent par la remise des clés, par la libre disposition des lieux ou par la perception des loyers ou indemnités d'occupation au cas où l'immeuble est loué ou occupé (J.-L. BERGEL, op. cit. [supra, n o 299], n o 535). 879. Lorsque la vente porte sur un bien meuble, la situation est différente ; l'obligation de prendre livraison, qui est alors appelée « obligation de retirement »,doit retenir une attention particulière, qu'on la considère sous l'angle de ses modalités d'exécution ou au point de vue de ses sanctions. Art. 1 - Modalités d'exécution § 1 - Délai 880. Il convient de préciser, tout d'abord, à quel moment l'acheteur doit prendre livraison. Si ce moment a été défini lors de la vente, il y a évidemment lieu d'appliquer le contrat : il a été jugé, par exemple, que, lorsque la marchandise a été vendue « courant tel mois, à la faculté de l'acheteur », celui-ci a toute la durée du mois fixé pour la retirer (Cass. req. 8 mars 1909, S. 1911. 1. 579) ; de même, la clause « livrable à la demande de l'acheteur » signifie que l'acheteur a un délai raisonnable pour retirer la chose (CA Rouen, 5 avr. 1905, Gaz. Pal. 1905. 1. 683). 881. Le délai convenu peut avoir été fixé implicitement, pourvu que la volonté commune des parties soit certaine : par exemple, il a été jugé que le délai de retirement avait pu être déduit du délai fixé pour le paiement du prix (Cass. com. 21 avr. 1950, S. 1951. 1. 47, D. 1951, somm. 36). 882. Au cas particulier où la vente comporte des livraisons échelonnées, qui doivent être effectuées suivant un calendrier fixé à l'avance, l'obligation de prendre livraison n'est exécutée qu'après que toutes les tranches du marché ont donné lieu à enlèvement (Cass. com. 27 mai 1983, Bull. civ. IV, n o 155). 883. Si aucun délai n'a été convenu, l'acheteur doit, normalement, prendre livraison immédiatement après la vente (CA Paris, 5 févr. 1874, DP 1877. 2. 11 ; CA Poitiers, 30 mars 1925, Gaz. Pal. 1925. 2. 207), à moins qu'un usage local ne lui accorde un délai pour ce faire, l'acheteur étant alors tenu d'exécuter son obligation dans ledit délai (CA Paris, 26 déc. 1918, DP 1920. 2. 40 ; T. com. Cambrai, 19 janv. 1926, S. 1926. 2. 79). Au demeurant, les usages généraux du commerce imposent à l'acheteur de retirer la marchandise dans un laps de temps tel qu'un vieillissement excessif ne puisse en empêcher la commercialisation (CA Amiens, 26 févr. 1974, Gaz. Pal. 1974. 1. 360, D. 1974, somm. 128). 884. Pendant le délai accordé à l'acheteur pour prendre livraison, le vendeur doit conserver la chose avec les soins d'un bon père de famille (C. civ., art. 1136 et 1137). § 2 - Lieu et frais 885. Le lieu où la chose doit être enlevée est celui où la délivrance doit se faire (V. supra, n os 301 et s.). Les frais de l'enlèvement sont, au contraire des frais de la délivrance, à la charge de l'acheteur en vertu de l'article 1608 du code civil (sur la distinction entre les uns et les autres, V. supra, n os 317 et s.). Le texte réserve expressément, toutefois, la possibilité d'en convenir autrement. Art. 2 - Sanctions 886. L'inexécution du retirement ouvre au vendeur le droit d'invoquer les sanctions classiques de l'inexécution du contrat synallagmatique : exception d'inexécution ; exécution forcée ; résolution ; dommages et intérêts. Par exemple, il a été jugé que le vendeur de titres était fondé à invoquer l'exception d'inexécution pour s'opposer à l'action en exécution de la vente exercée par l'acheteur (en l'occurrence, une banque), dès lors que le contrat stipulait un terme pour la livraison, et que l'acheteur avait, pendant plus de dix ans après l'arrivée du terme, refusé de retirer les titres qu'il avait acquis (Cass. com. 11 janv. 1950, Bull. civ. II, n o 15). Spécialement, s'agissant de l'exécution forcée, l'article 1264 du code civil prévoit que, au cas de résistance de l'acheteur, le vendeur peut se faire autoriser à mettre les marchandises en dépôt auprès d'un tiers, aux frais du même acheteur. 887. Évidemment, pour que le vendeur puisse prétendre légitimement à de telles mesures, il faut que lui-même ait satisfait à son obligation de délivrance : par exemple, il n'est pas admis à solliciter la résolution de la vente pour défaut de retirement lorsque la chose vendue (une camionnette d'occasion) est atteinte d'un défaut (une fuite d'huile) couvert par la garantie des vices cachés, et dont la révélation autorise l'acheteur à refuser la délivrance (Cass. 1 re civ. 25 mai 1992, Bull. civ. I, n o 166, D. 1992, IR 216 ) ; de même, si lui-même a exécuté avec retard son obligation de délivrance, le vendeur est mal fondé à reprocher à l'acheteur de ne pas avoir satisfait à son obligation de retirement de la marchandise dans le terme convenu (Cass. 1 re civ. 24 oct. 2000, Bull. civ. I, n o 272, D. 2002, somm. 997, obs. G. Pignarre ). 888. À supposer l'obligation de délivrance convenablement exécutée, la mise en oeuvre par le vendeur des différentes sanctions de la carence de l'acheteur suppose, en principe, que, au préalable, le premier ait mis en demeure le second de prendre livraison de la chose, et qu'une condamnation judiciaire ait été prononcée. Il y a là une source de complications pour le vendeur qui, au cas où celui-ci entend obtenir la résolution du contrat, peuvent être évitées. 889. D'abord, la jurisprudence admet la stipulation suivant laquelle la résolution aura lieu de plein droit faute de retirement à une date fixée ; elle admet aussi la clause aux termes de laquelle tout retard donnera au vendeur le droit de revendre la marchandise (Cass. req. 6 janv. 1869, DP 1869. 1. 207 ; 13 déc. 1926, S. 1927. 1. 91). Le vendeur qui revend les marchandises est alors considéré comme le gérant d'affaires de l'acheteur ; et, en cette qualité, il est tenu de répondre de la faute commise dans l'exercice de son droit de revendre (CA Paris, 22 janv. 1884, DP 1885. 2. 161). 890. Ensuite et surtout, l'article 1657 du code civil dispose : « En matière de vente de denrées et effets mobiliers, la résolution de la vente aura lieu de plein droit et sans sommation, au profit du vendeur, après l'expiration du terme convenu pour le retirement ». Ce texte instaure un cas de résolution de plein droit de la vente au profit du vendeur. Il convient d'examiner le domaine et les conditions de la résolution de plein droit ainsi prévue. § 1 - Domaine de la résolution de plein droit 891. L'article 1657 ne concerne que « la vente de denrées et effets mobiliers ». Il vise par là les seules ventes mobilières. Mais il intéresse toutes les ventes mobilières, qu'elles soient commerciales ou qu'elles soient civiles (Cass. civ. 27 févr. 1828, Jur. gén., V o Vente, n o 1401 ; 11 juill. 1882, DP 1883. 1. 304), qu'elles portent sur un corps certain ou sur une chose de genre (Cass. civ. 3 avr. 1922, DP 1924. 1. 12), qu'il s'agisse de ventes à terme ou de ventes au comptant (CA Bordeaux, 12 avr. 1948, D. 1948. 446, RTD com. 1949. 157, obs. J. Hémard)… 892. De même, il a été jugé que l'article 1657 est applicable aux ventes de meubles par anticipation, tels que les coupes de bois sur pied (Cass. req. 12 juill. 1922, DP 1923. 1. 61 ; Cass. com. 9 mars 1949, JCP 1949. II. 5075, note F. Becqué, RTD civ. 1949. 536, obs. J. Carbonnier ; CA Reims, 8 oct. 1979, D. 1981, IR 40), ainsi qu'aux ventes de valeurs mobilières (Cass. com. 21 avr. 1950, S. 1951. 1. 47, D. 1951, somm. 36, RTD civ. 1951. 262, obs. J. Carbonnier). § 2 - Conditions de la résolution de plein droit 893. Il ressort de l'article 1657 que, pour que la résolution puisse intervenir de plein droit, il faut qu'un terme ait été convenu, que le défaut de retirement ait été constaté, enfin, que le défaut de retirement soit dû au fait de l'acheteur. 894. La nécessité d'un « terme convenu » s'explique, d'une part, par la lettre du texte, lequel, en raison du caractère exceptionnel de la résolution de plein droit prévue par lui, doit être interprété strictement ; mais elle tient aussi, d'autre part, à ce que « seule une telle stipulation présume la volonté des parties d'accepter l'anéantissement de plein droit de la vente après l'époque prévue pour l'enlèvement de la chose » (B. GROSS et P. BIHR, op. cit., p. 285). Encore ne s'agit-il là que d'une présomption simple : un arrêt de la Cour de cassation a posé que le défaut de retirement ne peut entraîner la résolution de plein droit de la vente que si la date de la livraison a été une des conditions essentielles et déterminantes de la vente (Cass. com. 13 avr. 1964, Bull. civ. III, n o 180). Au demeurant, il y a lieu de rappeler que le terme peut avoir été implicitement convenu, notamment par la référence à un usage (V. supra, n os 883 et s.). 895. Le défaut de retirement doit, en outre, être caractérisé : il en est ainsi chaque fois que, bien que la chose ait été mise à la disposition de l'acheteur, celui-ci ne l'a pas appréhendée matériellement dans son intégralité. Par exemple, au cas de vente de coupe de bois, le retirement suppose l'évacuation matérielle de l'ensemble des produits de la coupe ; un simple commencement d'évacuation caractérise le défaut de retirement (Cass. com. 9 mars 1949, préc. supra, n o 892 ; adde : F. GÉNY, De l'application de l'article 1657 du code civil aux ventes de coupes de bois sur pied entre particuliers, notes sous CA Bourges, 13 juill. 1943, JCP 1944. II. 2543, sous T. civ. Vouziers, 10 juill. 1946, JCP 1946. II. 3303, et sous CA Nancy, 11 mars 1947, JCP 1947. II. 3869). 896. Le défaut de retirement doit, enfin, être imputable au fait de l'acheteur, sans qu'il y ait lieu de rechercher si ce fait est fautif ou non (Cass. civ. 5 mai 1926, Gaz. trib. 18 janv. 1926 ; CA Paris, 27 nov. 1926, DH 1927. 89). Le point de savoir si le défaut de retirement est imputable ou non à l'acheteur est laissé à l'appréciation souveraine des juges du fond (Cass. req. 1 er mai 1928, S. 1928. 1. 259). Cette condition a été jugée satisfaite, par exemple, dans le cas où l'acheteur, qui s'était engagé à acquérir des machines à des dates échelonnées, s'est abstenu de payer les machines livrées et n'a pas fait effectuer l'enlèvement des autres machines ; la résolution de la vente est alors intervenue de plein droit (Cass. com. 27 mai 1983, Bull. civ. IV, n o 155, D. 1983, IR 392). 897. Lorsque le défaut d'enlèvement est dû à un cas de force majeure ou au fait du vendeur, la résolution ne peut avoir lieu de plein droit (Cass. req. 19 oct. 1920, DP 1921. 1. 37 ; Cass. civ. 13 avr. 1929, DH 1929. 265 ; Cass. com. 8 juill. 1965, Bull. civ. III, n o 435). 898. Dans tous les cas où la chose devait être livrée au domicile de l'acheteur, c'est au vendeur qu'il incombe de prouver le défaut de retirement, en établissant qu'il a exécuté ses obligations. Cependant, s'il prouve qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de livrer en raison de l'inexécution des obligations de l'acheteur, le vendeur conserve la faculté de se prévaloir de la résolution de plein droit : il en a été ainsi jugé à propos d'une vente de 500 000 huîtres livrables pendant une période déterminée par des lots de 5 000, et dont l'acheteur avait demandé la livraison de la presque totalité le dernier jour du délai, rendant, du même coup, impossible la livraison par le vendeur en une journée (Cass. req. 19 févr. 1873, DP 1873. 1. 301 ; rappr. Cass. civ. 10 juill. 1918, Gaz. Pal. 1918. 1. 471). Index alphabétique Accessoires de la chose vendue (vente immobilière) 260 s. actions en justice 264 s. limites 266 s. assurances 272 s. avantages fiscaux 270 bail 274 s. compris de plein droit dans la vente 261 s. contrats liés à l'immeuble 271 s. documents administratifs 269 historiques 276 droits et actions de nature personnelle 277 s. éléments non compris de plein droit dans la vente 276 s. fruits 262 juridiques 263 s. matériels 261 servitudes 263 Accessoires de la chose vendue (vente mobilière) 279 s. action en justice 283 dérogation conventionnelle 258 documents administratifs 282 emballage 281 juridiques 282 s. matériels 280 s. Acheteur (obligations) 764 s. convention des parties, obligations supplémentaires aux obligations légales 766 s. légales 764 s. V. Enlèvement de la chose (obligation de l'acheteur), Obligation de retirement, Paiement du prix (obligation de l'acheteur) ventes commerciales 766 s. Acompte 854 condition suspensive défaillie, restitution 110 s. résolution pour défaut de paiement du prix, restitution 869 s. intérêts 870 Actes en mains 778 Action estimatoire 627 s. animaux 702 définition 611, 627 effets 629 s. frais de la vente 630 gravité insuffisante du vice pour action rédhibitoire 618 impossibilité de restituer la chose 616 irrecevabilité 628 Action en garantie des vices cachés 585 s. appel 615 consommateur 610 délai 597 s. aide juridictionnelle 609 durée 597, 605 s. interruption 605 s. point de départ 598, 600 s. report du point de départ 602 s. fin de non-recevoir 599 du maître de l'ouvrage contre le vendeur ou le fabricant 595 s. option de l'acheteur entre action rédhibitoire et action estimatoire 611, 614 s. libre choix 614 s. restrictions au libre choix 616 s. référé 606 s. sous-acquéreur 589 s. V. Sous-acquéreur transmission 588 s. contrat d'entreprise 595 s. ventes successives 589 s. V. Action estimatoire, Action en garantie des vices cachés (animaux), Action rédhibitoire Action en garantie des vices cachés (animaux) 689 s. action estimatoire 702 action rédhibitoire 698 s. mort de l'animal 698 s. vendeur professionnel 701 compétence 696 délai 690 s. durée 690 interruption ou suspension 693 point de départ 692 renonciation du vendeur à s'en prévaloir 693 expertise 694 s. maladies transmissibles des espèces canine et féline, diagnostic de suspicion 691 modalités d'exercice 694 s. option entre action rédhibitoire et action estimatoire 697 Action rédhibitoire 619 s. définition 611, 619 dommages-intérêts, non-remboursement 624 s. frais de la vente, remboursement 624 s. restitution de la chose 621 intérêts du prix 622 du prix 622 s. ventes successives 623 V. Action en garantie des vices cachés (animaux) Action en réduction du prix V. Action estimatoire Action en résolution pour inexécution de la délivrance 339 s. délivrance non conforme 343 partielle 344 tardive 342 demandeur 339 dommages-intérêts 346, 350 s. livraisons échelonnées 345 réfaction 346 s. renonciation de l'acheteur à demander la résolution 366 s. sous-acquéreur contre vendeur originaire 339 vente immobilière, publicité foncière 340 Alarme 216, 282, 639 obligation d'information et de conseil du vendeur 709, 717, 726, 735 Animaux destinés à la boucherie 676, 700 garantie de conformité 376, 663 s. V. Animaux (garantie des vices cachés), Maladies contagieuses (animaux) Animaux (garantie des vices cachés) 662 s. animaux domestiques 668 exclus 671 s. sauvages, exclusion de la garantie spécifique 671 caractère exclusif 673 conventionnelle 674 s., 685 s. clauses limitatives ou exclusives de garantie 688 droit commun de la garantie des vices cachés, application 686 domaine 663 s. droit de la consommation 663 s., 687 effets 697 s. exclusions 671 s. conventionnelles 685 s. légales 671 s. légale 667 s. législation 662 maladies concernées 669 contagieuses, exclusion de la garantie 677 s. V. Maladies contagieuses (animaux) mise en oeuvre 688 s. option de l'acheteur entre action en garantie et autre action 688 s. régime particulier 534 vendeur professionnel 684, 687 V. Action en garantie des vices cachés (animaux) Arrhes 110 s. Assurances 135, 272 s. Automobile V. Véhicule Bail 768 accessoire de la chose vendue 274 s. garantie du fait des tiers 455, 458 Bail à nourriture 826 Biens vendus V. Chose Brevet d'invention 198, 300 Cautionnement 275, 490, 494 Cession de créance 199 (renvoi) Cession de terrain contre remise d'un local à construire 234 Charges non déclarées V. Garantie du fait des tiers, Garantie du fait des tiers (sanctions) Cheval 124 accessoires de la vente 280, 282 vice caché 560, 668 s., 687, 690 Chose d'autrui 181 complexe, obligation de conseil du vendeur professionnel 716 s. dangereuse obligation de conseil du vendeur professionnel 721 s., 730 obligation d'information du vendeur 576 de genre, délivrance 304 s., 335 s., 360 de genre, transfert de propriété et des risques meuble à fabriquer 51 vente en bloc, vente au poids, au compte ou à la mesure 27 s. V. Vente en bloc, Vente au poids, au compte ou à la mesure nouvelle, obligation de conseil du vendeur professionnel 720 d'occasion 577 s. V. Délivrance, Perte de la chose, Produits, Vente de chose future (transfert de propriété) Clause abusive V. Droit de la consommation Clause de réserve de propriété 127, 129 s., 816 définition 129 vente immobilière 130 vente de meubles corporels 131 s. garantie de la propriété 131 s. V. Clause de réserve de propriété (garantie de la propriété) législation 131 procédure collective 131, 133 transfert de propriété, opposabilité aux tiers 192, 194 Clause de réserve de propriété (garantie de la propriété) 131 s. consentement de l'acquéreur, nécessité 137 écrit 137 effet suspensif du transfert de propriété jusqu'au paiement intégral 132 s. indemnité d'assurance 135 restitution 137 s. bien fongible 138 chose détériorée 135 incorporation du bien objet d'une réserve de propriété à autre bien 138 régime 139 revente 136 risques 134 s. usage de la chose 136 Clause résolutoire défaut de paiement du prix 852 s. V. Résolution pour défaut de paiement du prix délivrance, inexécution 348 V. Rente viagère Condition morale, possible et licite 77 s. sanction 78 potestative 79 suspensive 79 s. transfert de propriété 74 s. validité 77 s. V. Condition résolutoire, Condition suspensive Condition résolutoire 67, 74, 114 s. accomplie 114, 119 s. actes accomplis sur le bien, sort 120 anéantissement rétroactif de la vente 119 s. défaillie 118 définition 114 distinction de la condition suspensive 86 pendante 117 publicité foncière 176 s. réméré 116, 144. V. Réméré (Vente à) résolution de la vente 119 s. rétroactivité 119 s. risques 121 transfert de propriété 122 transfert de la propriété et des risques, dissociation 121 s., 123 vente avec faculté de restitution 116 s., 121 immobilière 115 s., 122 mobilière 116 Condition suspensive 74, 85 s. distinction de condition résolutoire 86 du terme suspensif 64 s., 86 événement arrivé mais encore inconnu des parties 85 futur et incertain 86 morale, possible et licite 78 notion 85 pendante 90 s. droits sur la chose 93 obligations des parties 92 risques 90 potestative 79 s. publicité foncière 174 s., 178 s. renonciation 112 s. transfert de la propriété et des risques, dissociation 104, 123 vente immobilière 87 s., 96 s. mobilière 89 V. Condition suspensive accomplie, Condition suspensive défaillie Condition suspensive accomplie 94 s. constatation de l'accomplissement 95 s. commune intention des parties 95 faute du débiteur, condition réputée accomplie 98 vente immobilière à crédit, obtention d'un prêt 96 s. V. Prêt effets 101 s. fruits 105 réputée accomplie, faute du débiteur 98 rétroactivité 101 s. dérogation conventionnelle 103 effets 102 tempéraments 104 s. risques 104 Condition suspensive défaillie 106 s. arrhes et acompte, restitution 110 s. vente immobilière à crédit 110 s. caducité de la vente 109 s. exceptions 112 conséquences 109 s. constatation de la défaillance 106 s. certitude de la non-arrivée de l'événement 107 délai tacite convenu 108 expiration du délai 106 non-stipulation d'un délai 107 s. Conformité fonctionnelle de la chose délivrée 224 s., 226, 585 défaut de conformité cumul avec vice caché 228 distinction du vice caché 224 s., 229 Conformité qualitative de la chose délivrée 214, 215 s. distinction du défaut de conformité et du vice caché 224 s. normes administratives, respect 216 qualités convenues 217 s. chose de genre 221 présumées entrées dans le champ contractuel 220 stipulations contractuelles, prise en compte 217 s. stipulations contractuelles obscures ou imprécises 219 vente immobilière 217 vente mobilière 218 usage recherché 222 s. non prévu au contrat 223 s. V. Conformité fonctionnelle de la chose délivrée prévu au contrat 222 vice caché, cumul avec défaut de conformité 585 Conformité quantitative de la chose délivrée 214, 230 s. vente immobilière 232 s. V. Contenance des immeubles vente de marchandises, clauses 231 Conseil (obligation du vendeur professionnel) 704, 711 s. acheteur 729 s. consommateur 729 s. devoir de coopération 733 diligence dans l'utilisation de la chose 734 professionnel d'une autre spécialité que le vendeur 731 s. action en cas de manquement 740 caractère contractuel 736 s. chose complexe 716 s. opportunité ou non d'acheter 718 s. utilisation de la chose 717 chose dangereuse 721 s., 730 limites de l'obligation de conseil 723 chose nouvelle 720 contenu 714 s. fabricant 727 s., 730 s. fondement 712 s. droit de la consommation 712 prolongement de l'obligation de délivrance 713 limites 735 notion 704 obligation de moyens 737 s. preuve de l'exécution 738 s. régime 736 s. sanctions 740 vendeur 725 s. profane, non 725 professionnel 726, 729 Conservation de la chose (Obligation de) 211 Consommateur V. Droit de la consommation Contenance des immeubles 232 s. actions pour erreur de contenance, délai 246 s. domaine 247 s. durée 246 interruption 251 nature 250 point de départ 252 clauses de non-garantie 253 s., 429 clauses abusives, incompatibilité 254 dérogation conventionnelle 253 efficacité 256 interprétation stricte 255 défaut de contenance, distinction de l'éviction 426 s. critère 427 erreur actions pour erreur de contenance 246 s. lot de copropriété 257 législation 233 s. vente pour un prix global 236 s. contenance moindre d'au moins 1/20 e 237 contenance supérieure d'au moins 1/20 e 238 insuffisance ou excès de contenance, mode d'évaluation 239 pluralité de fonds ou immeuble divisé, assiette de l'évaluation de la contenance 240 s. vente « à raison de tant la mesure » 243 s., 248 contenance inférieure 244 contenance supérieure 245 notion 243 Contrat d'entreprise 595 s. Copropriété 449 documents administratifs, délivrance 269 erreur de contenance dans vente d'un lot 257 obligation d'information du vendeur 708 Coupe de bois 234, 296, 892, 895 Créance professionnelle 200 (renvoi) Créanciers 795 s. Crédit immobilier, condition suspensive de l'obtention d'un prêt 96 s. V. Prêt mobilier 799 s. Défaut de conformité vice caché cumul 228, 585 distinction 224 s., 229 droit de la consommation 378 Délivrance accessoires de la chose vendue 258 s. V. Accessoires de la chose vendue (vente immobilière), Accessoires de la chose vendue (vente mobilière) chose vendue 207 s. neuve 210 conformité de la chose 214 s. V. Conformité qualitative de la chose délivrée, Conformité quantitative de la chose délivrée définition 202 délai 309 s. contestation, charge de la preuve 316 convenu entre les parties 311 s. droit de la consommation 370 s. indicatif 313 liberté contractuelle 309 non prévu par le contrat 310 période stipulée 314 s. raisonnable 310 de rigueur 311 s. droit commun 204, 205 s. de la consommation 204, 369 s. V. Droit de la consommation état de la chose au moment de la vente 210 s. dérogation conventionnelle 212 droit de la consommation 212 s. forme 285 s. frais 317 s. charge 317 notion 318 identité de la chose délivrée à la chose vendue 207 s. chose de genre 209 corps certain 208 immeubles 286 s. consentement des parties 299 privilèges ou hypothèques, radiation des inscriptions 291 qualités convenues 217 remise des clés 286 s. remise de l'immeuble libre d'occupation 290 remise des titres de propriété 286 s., 289 législation 204 lieu 301 s. chose de genre 304 s. corps certain 302 s. stipulations conventionnelles 306 s. vente à distance 306, 308 livraison, distinction 203 meubles corporels 292 s. consentement des parties 298 s. tradition 293 s., 295 s. V. Tradition meubles incorporels 300 modalités 284 s. objet 206 s. option du consommateur entre droit commun et droit de la consommation 204 preuve 321 s. charge 321 modes 322 s. retard 326, 332 s., 342 transfert de propriété, distinction 12, 203 vendeur, obligation 202 s. vente à distance 294, 306, 308 V. Délivrance (droit de la consommation), Délivrance (inexécution) Délivrance (droit de la consommation) 204, 369 s. conforme accessoires et suites naturelles du contrat 381 contrat d'adhésion 379 contrat négocié 380 délai 370 sanction du non-respect, résolution 371 s. modification de l'état de la chose 212 s. non conforme 374 s. V. Garantie de conformité (droit de la consommation) option du consommateur entre droit commun et droit de la consommation 204 vente à crédit 368, 371 Délivrance (inexécution) 325 s. acquéreur, droits 326 s. exception d'inexécution 328 s. option entre exécution forcée et résolution 331 s. préalable aux droits 326 action en délivrance 334 s. clause résolutoire de plein droit 348 constatation de l'inexécution 326 exécution forcée 334 s. délivrance non conforme 336 frais 337 force majeure 355 s. immeuble 352, 363 superficie délivrée différente de celle promise 232 s. V. Contenance des immeubles renonciation de l'acheteur à demander la résolution 366 s. résolution 338 s. V. Résolution vendeur dispense légale pendant une période donnée de délivrer 368 exception d'inexécution 363 s. force majeure 355 s. moyens de défense 354 s. responsabilité contractuelle 350 s. V. Responsabilité Détérioration de la chose 21 s., 865, 868 Dommages-intérêts 391, 665 délivrance, manquement à l'obligation 346, 350 s. éviction partielle 518 totale 508 s. vice caché, action indemnitaire 634 s. causalité entre vice caché et dommage 638 mauvaise foi du vendeur, preuve 636 s. réparation intégrale 639 vendeur professionnel, présomption de mauvaise foi 637 Droit de la consommation 661 animaux, vice caché 663 s., 687 clauses abusives clauses de non-garantie de contenance, incompatibilité 254 délivrance, limitation ou suppression de responsabilité 353, 373 garantie de conformité, conventions limitatives ou exclusives de garantie antérieures à réclamation de l'acheteur 392 s. garantie du fait des tiers, clauses restrictives ou exclusives 526 vices cachés, clauses exclusives ou limitatives de garantie 654 consommateur, définition 377 garantie commerciale 395 s. obligation de conseil du vendeur professionnel 712, 729 prix, date de paiement 799 s. vente à crédit, condition suspensive de l'obtention d'un prêt 96 s. V. Prêt vice caché 535, 610 V. Délivrance (droit de la consommation), Garantie de conformité (droit de la consommation) Eau 376 Électricité 376, 651, 751, 772 Emballage 281, 381 Emphythéose (Droit d') 445 Enlèvement de la chose (obligation de l'acheteur) 765, 877 s. frais 317, 319 s., 885 immeuble 878 meuble 879 s. V. Obligation de retirement Erreur de contenance V. Contenance des immeubles Éviction (Garantie d') V. Garantie d'éviction, Garantie du fait personnel, Garantie du fait des tiers Exception d'inexécution par acquéreur 804, 836 délivrance 328 s. garantie du fait des tiers 490 s. par vendeur 363 s. retirement de la chose, défaut 886 vente au comptant 363 s. vente à terme 365 Fabricant (obligation d'information et de conseil) 727 s., 730 s. Fonds de commerce 198, 351, 404 Frais de délivrance 317 s. charge 317 exécution forcée 337 notion 318 d'enlèvement 319 s. charge 317 notion 319 éviction partielle, remboursement 518 éviction totale, remboursement 504 s. acheteur de bonne foi, nécessité 507 d'instance 505 de la vente 506 garantie de conformité, exonération de l'acheteur 391 V. Frais de la vente Frais de la vente 775 s. acheteur, remboursement au vendeur 777 charge 776 dérogation conventionnelle 778 vente immobilière, TVA 780 frais concernés 776 tiers, situation 779 Fruits accessoires de la chose vendue 262 condition suspensive accomplie 105 restitution éviction partielle 518 éviction totale 501 s. résolution pour défaut de paiement 862 Gage 193 s., 436 Garantie commerciale 395 s., 644 Garantie de conformité (droit de la consommation) 374 s. action 385 s. délai de prescription 383 s. option principale de l'acheteur entre réparation et remplacement du bien 386 s. option subsidiaire de l'acheteur entre restitution du bien contre restitution du prix et conservation du bien contre restitution partielle du prix 388 s. animaux 663 s. biens concernés 376 conformité de la chose au contrat 378, 398 contenu 378 s. contrats concernés 375 conventions limitatives ou exclusives de garantie 392 s. antérieures à réclamation de l'acheteur, caractère abusif 392 s. postérieures à réclamation de l'acheteur, validité 394 défaut de conformité, notion 378 délai de mise en oeuvre 383 s. délivrance non conforme, preuve 382 domaine 375 s. dommages-intérêts 391 exclusion 397 extension, garantie commerciale 395 s. frais, exonération de l'acheteur 391 garanties du droit commun, rapports 398 ordre public 392 s. personnes concernées 377 portée 392 s. présomption d'antériorité du défaut de conformité 382 sanctions 385 s. vice caché 378, 384, 535 antériorité du vice 584 Garantie d'éviction 399 s. définition 399 ventes concernées 399 V. Garantie du fait personnel, Garantie du fait des tiers Garantie du fait personnel 400, 401 s. caractères 410 s. clauses exclusives ou limitatives, prohibition 413 extensives 416 contestations par le vendeur portant sur la vente elle-même, exclusion 408 conventionnelle 413 s. date du trouble 402 décès du vendeur 411 étendue 402 s. exception de garantie 417 fonds de commerce, obligation de non-concurrence 404 impérative 413 indivisibilité 411 perpétuelle 410 sanctions 417 s. transmissibilité 412 troubles de droit 405 s., 417 s. directs 406 s., 417 indirects 409 s., 418 troubles de fait 403 s., 419 Garantie du fait des tiers 400, 420 s. action en justice par les tiers 432 s. par créanciers du vendeur munis d'une hypothèque ou d'un gage 436 en nullité 434 en rescision pour lésion du 1 er vendeur d'un immeuble contre le 2 e vendeur 434 résolutoire 435 en revendication 433 bail ou prorogation de bail 455, 458 bonne foi de l'acheteur 457 s. charges non déclarées 458 s. éviction 460 s. notion 457 caractères 422 charges non déclarées 441 s., 512 s. antérieures à la vente 465 bonne foi de l'acheteur 458 s. connaissance de la charge, preuve 459 droits personnels 454 s. réelles 445 s. vice caché, distinction 443 clauses extensives 522 s. clauses restrictives ou exclusives 525 s. clauses de style ou abusives, prohibition 526 portée 527 s. validité 525 conditions 423 s. conventionnelle 521 s. engagement propter rem du vendeur 456 éviction 186, 424 s. bonne foi de l'acheteur 460 s. défaut de contenance, distinction 426 s. notion 424, 425 origine antérieure à la vente 466 partielle 438, 440, 512 s. totale 438 s., 495 s. fait de l'acheteur, exclusion de la garantie 472 s. contribution par ses agissements à la réalisation de l'éviction 475 défense insuffisante à une instance 476, 483 s. imprudence ou négligence 472 s. fait du prince, exclusion de la garantie 466, 469 s. exceptions 470 s. fin de non-recevoir à l'action en garantie, défense insuffisante de l'acheteur à l'instance l'opposant au tiers 476, 483 s. condamnation définitive de l'acheteur 484 existence de moyens suffisants pour faire rejeter la demande 485, 487 s. impossibilité du vendeur de faire valoir lui-même les moyens de défense 486 hypothèque 430, 436, 446, 467, 473 incidente 478, 479 mise en oeuvre 477 s. principale, action 478, 480 s. fin de non-recevoir, défense insuffisante de l'acheteur à l'instance 476, 483 s. prescription 481 renonciation 482 procédure 478 s. risque d'éviction 437 servitudes 441, 447 s. V. Servitudes trouble de droit actuel 430 s. importance 438 s. nature 430 s. notion 421 origine 463 s. trouble de droit, origine 463 s. antérieure à la vente 464 s., 468 fait de l'acheteur 472 s. fait du prince 466, 469 s. imputabilité au vendeur 463, 467, 470 trouble de fait 420, 523 V. Garantie du fait des tiers (sanctions) Garantie du fait des tiers (sanctions) 489 s. éviction partielle ou charges non déclarées 512 s. dommages-intérêts 518 s. fruits et frais, remboursement 518 indemnité 513 s. calcul, charges non déclarées 520 calcul, éviction partielle 517 option de l'acheteur entre résolution et indemnité 513 résolution 513, 515 s. éviction totale 495 s. dommages-intérêts 508 s. frais, remboursement 504 s. fruits, restitution 501 s. impenses, remboursement 510 s. indemnité d'occupation, remboursement 503 plus ou moins-value entre vente et éviction, restitution du prix 499 s. prix, restitution 496 s. rente viagère, restitution du prix 498 sous-acquéreur, restitution du prix 497 exception d'inexécution 490 s. domaine 492 s. portée 491 Garantie des vices cachés V. Vices cachés (Garantie contre les) Gaz 376, 651, 772 Grève 357 Héritiers 791, 793, 832, 857 Hôtel 546, 550 Hypothèque délivrance, radiation des inscriptions 291 garantie du fait des tiers 430, 436, 446, 467, 473 conventionnelle 525 Immeuble clause de réserve de propriété 130 défaut de la chose 546 enlèvement de la chose 878 obligation d'information du vendeur 708 paiement du prix exécution forcée 818 s. preuve 808 remise entre les mains du notaire 795 s. résolution pour défaut de paiement, effets envers tiers 875 par destination 261 transfert de propriété condition résolutoire 122 condition suspensive 87 s. opposabilité aux tiers 169 s. V. Publicité foncière terme suspensif 62, 71 vente actes en mains 778 vente à crédit, condition suspensive de l'obtention d'un prêt 96 s., 110 s. V. Prêt V. Accessoires de la chose vendue (vente immobilière), Contenance des immeubles, Délivrance, Vente d'immeuble à construire Incendie 17, 21, 38, 90, 104, 545 Indemnité d'occupation 503 Indivision 793 Information (obligation du vendeur) 703 s., 705 s. chose dangereuse 576 fondement 705 s. droit commun des contrats 707 droit commun de la vente 706 manquement 651, 705 sanctions 710 notion 704 vendeur professionnel 710 extension au conseil 704. V. Conseil (obligation du vendeur professionnel) vente immobilière 708 mobilière 709 Informatique acheteur, devoir de coopération 733 délivrance 803 non conforme, résolution 343 vendeur, obligations d'information et de conseil 706, 716 s., 731 vice 548, 551 Intérêts du prix 781 s. bien frugifère 785 s. livraison partielle 787 notion de bien frugifère 786 point de départ 787 titres sociaux 788 convention des parties 782 s. point de départ 783 taux 784 sommation de payer 789 Laissé-pour-compte 330, 349 Lésion 364, 434 Libre service (Vente en) code-barre 57 transfert de la propriété et des risques 54 s. vol 55 tentative 56 Livraison délivrance, distinction 203 échelonnée 345, 882 mise en demeure 22 partielle, bien frugifère 787 transfert de propriété, distinction 12 V. Enlèvement de la chose (obligation de l'acheteur) Livre 18 Lotissement 216, 289, 449 Maladies contagieuses (animaux) 677 s. abattage 680 s., 683, 699 s. cumul avec vice rédhibitoire 678, 688 s. garantie des vices cachés, exclusion 677 nullité de la vente 677 s. délai de l'action 680 s. mauvaise foi du vendeur 684 ordre public 682 restitutions 682 vendeur professionnel 684 option de l'acheteur entre action en nullité et action en garantie 688 s. preuve, charge 680 Médicaments 723 Meuble corporel clause de réserve de propriété 131 s. V. Clause de réserve de propriété délivrance, forme 292 s. V. Délivrance défaut de la chose 547 délivrance droit de la consommation 369 s. V. Consommation (Droit de la) forme 292 s. V. Délivrance qualités convenues 218 incorporel, forme de la délivrance 300 meublant 261 obligation d'information du vendeur 709 paiement du prix exécution forcée 814 s. preuve 809 résolution pour défaut de paiement, effets envers tiers 874 (renvoi) vice 547 V. Accessoires de la chose vendue (vente mobilière), Obligation de retirement, Transfert de propriété (opposabilité aux tiers), Vente de chose future (transfert de propriété) Mitoyenneté (Cession de) 533 Notaire 779, 795 s., 854 Nullité garantie du fait des tiers, action en nullité 434 vice caché, cumul avec vice du consentement 585 V. Maladies contagieuses (animaux) Obligations des parties 2 de l'acheteur 764 s. V. Acheteur (obligations) réciproques 2 du vendeur 201 s. Obligation de retirement 765, 879 s. délai 880 s. absence de clause du contrat 883 clause du contrat 880 fixation implicite 881 livraisons échelonnées 882 usages commerciaux 883 exception d'inexécution 886 lieu 885 mise en demeure 888 résolution conventionnelle de plein droit pour inexécution 889 résolution légale de plein droit pour inexécution 890 s. conditions 893 s. défaut de retirement caractérisé 895 exclusion, force majeure ou fait du vendeur 897 imputabilité à l'acheteur du défaut de retirement 896 preuve 898 terme convenu, nécessité 894 ventes concernées 891 s. retard, revente 889 sanctions 886 s. oeuvre d'art 282 Pacte commissoire 141 s. défaut de paiement du prix 852. V. Résolution pour défaut de paiement du prix Paiement du prix (obligation de l'acheteur) 764, 770 s. auteur 791 s. date 798 s. absence de convention des parties 803 convention des parties, liberté 802 vente entre commerçants 801 (renvoi) vente mobilière à crédit au consommateur 799 s. défaut 810 s. droit de rétention du vendeur 811 exécution forcée 813 s. rente constituée en perpétuel 825 rente viagère 823 s. V. Rente viagère résolution 821 s. V. Résolution pour défaut de paiement du prix délai de grâce 804, 838 destinataire 794 s. différé 802 entre commerçants 801 (renvoi) exception d'inexécution des obligations du vendeur 804, 810, 836 exécution forcée 813 s. prix en rente viagère 823 s. vente immobilière 818 s. vente mobilière 814 s. héritiers de l'acheteur 791, 793 immédiat 802 indivision 793 lieu 805 s. paiement échelonné 806 modalités 790 s. notaire (remise au notaire) 795 s. objet 772 s. preuve 807 s. charge 807 vente immobilière 808 vente mobilière 809 retard, assimilation à défaut de paiement 834 sous-acquéreur 791 s. V. Acompte, Frais de la vente, Intérêts du prix, Prix Perte de la chose 18, 21 s., 90, 617 Préemption (Droit de) 102 Prêt 368 vente immobilière, condition suspensive de l'obtention 96 s. accomplie 96 défaillie 110 s. non réalisée 97 réputée accomplie, faute du débiteur 98 s. vente mobilière 799 Preuve délivrance 316, 321 s. charge 321 modes 322 s. garantie du fait des tiers, connaissance de la charge non déclarée 459 obligation de conseil du vendeur professionnel, inexécution 738 s. prix, paiement 807 s. V. Paiement du prix (obligation de l'acheteur) Privilège 856 délivrance, radiation des inscriptions 291 exécution forcée en cas de défaut de paiement du prix vente immobilière 818 s. vente mobilière 814 résolution judiciaire pour défaut de paiement du prix, conservation du privilège du vendeur d'immeuble 846 s. Prix gaz-électricité 772 preuve 772 révision 773 vente en bloc 772 V. Contenance des immeubles, Intérêts du prix, Paiement du prix (obligation de l'acheteur) Procédure collective 365 défaut de paiement du prix résolution 840, 863 vente immobilière 820 vente mobilière, revendication 816 V. Clause de réserve de propriété Produits défectueux 741 s. V. Responsabilité du fait des produits défectueux, Sécurité (obligation du vendeur professionnel) de luxe 644 naturels à venir 52 s. surgelés 601 Propriété littéraire et artistique 409 Publicité foncière 419 acquéreurs successifs d'un même immeuble 171 s. acquéreur devenu ayant cause universel ou à titre universel du vendeur 186 aucun n'a publié son titre 181 connaissance par le 2 e acquéreur de la 1 re aliénation 182 s. le 1 er n'a pas publié son titre 171 les deux ont publié leur titre 172 s. action en résolution pour inexécution de la délivrance 340 défaut 179, 185 défaut de paiement du prix clause résolutoire, opposabilité aux tiers 855 demande en résolution 851 obligatoire 170 s. exceptions 180 s. réméré 177 sous-acquéreur 184 transfert de propriété d'immeuble, opposabilité aux tiers 169 s. vente sous condition résolutoire 176 s. sous condition suspensive 174 s., 178 s. pure et simple 170 s. à terme 176 Réception de la chose 322 s. avec réserves 323 sans réserve 322, 324, 366 Récolte 29, 32, 234 Réfaction délivrance, inexécution 346 s. Référé 334, 606 s. Réméré (Vente à) 140 s. anéantissement rétroactif de la vente 167 décès de l'acquéreur 150 du vendeur 147 s. définition 140 délai d'exercice 151 s. durée 151 non-respect 154 s. point de départ 153 préfix 152 prolongation, impossibilité 154 exercice du réméré 145 s. déclaration d'intention du vendeur 156 s. délai 151 s. effets 160 s. modalité de la vente sous condition résolutoire 144 nature juridique 140 pluralité de vendeurs 146 s. vente conjointe 147 s. vente non conjointe 149 promesse de revente, distinction 163 publicité foncière 177 remboursement de l'acheteur 156 s., 160 s. assiette 161 s. constructions nouvelles, exclusion 166 frais de la vente 165 intérêts du prix 164 prix principal 162 s. réparations 166 valeurs mobilières 116, 143 vente immobilière 143 Renonciation de l'acheteur à résolution pour inexécution de la délivrance 366 s. à clause résolutoire pour défaut de paiement du prix 854 condition suspensive 112 s. du vendeur à action résolutoire pour défaut de paiement du prix 842 s. anticipée 843 caractère certain 844 tacite 844 s. Renseignement V. Information (obligation du vendeur) Rente constituée en perpétuel (défaut de paiement) 825 Rente viagère 806, 834, 845, 847 clause résolutoire 829 s. héritiers du crédirentier 832 mise en demeure 830 s. défaut de paiement des arrérages clause résolutoire 829 s. exclusion de la résolution de la vente 823 s. exécution forcée 824 inexécution de la garantie du fait des tiers, restitution du prix 498 prix payable pour partie en capital à terme et pour partie en rente viagère 827 retards réitérés du paiement des arrérages 828 Réserve de propriété V. Clause de réserve de propriété Résolution condition résolutoire accomplie 119 s. délivrance, inexécution 338 s. clause résolutoire de plein droit 348 droit de la consommation 371 s. effets de la résolution 338 résolution judiciaire 339 s. V. Action en résolution pour inexécution de la délivrance résolution unilatérale par l'acheteur 349 éviction partielle ou charges non déclarées 513, 515 s. totale 495 s. meubles, inexécution de l'obligation de retirement 889 s. V. Obligation de retirement vices cachés 619 s. V. Action rédhibitoire V. Résolution pour défaut de paiement du prix Résolution pour défaut de paiement du prix 821 s. anéantissement rétroactif de la vente 861 s. clause résolutoire 837, 852 s. conditions d'efficacité 853 s. délai de grâce, non 859 échéance du terme 860 efficacité entre les parties 853 s. mise en demeure de payer 858 portée 857 s. renonciation 854 tiers, opposabilité 855 s. validité 852 conditions 833 s. domaine 822 s. effets entre les parties 862 s. V. Résolution pour défaut de paiement du prix (effets entre les parties) effets envers tiers 873 s. vente immobilière 875 vente mobilière 874 exclusion 822 s. judiciaire 837, 838 s. action, conditions 840 s. appréciation du juge 838 demande, publicité foncière 851 demande en exécution forcée au cours de la procédure, incidence 839 offre de paiement par l'acheteur au cours de la procédure, incidence 839 ouverture d'une procédure collective contre l'acheteur, interdiction de l'action en résolution 840 privilège du vendeur d'immeuble, conservation 846 s. renonciation du vendeur, fin de non-recevoir 842 s. V. Renonciation modalités 837 s. prix exigible et non payé, nécessité 833 s. prix payable pour partie en capital à terme et pour partie en rente viagère 827 rente constituée en perpétuel 825 rente viagère 823 s. V. Rente viagère retard du paiement, assimilation à défaut de paiement 834 vente en justice, exclusion 822 Résolution pour défaut de paiement du prix (effets entre les parties) 862 s. acheteur, obligations 862 s. acompte, restitution 869 s. améliorations, indemnisation 871 s. chose détériorée ou dépréciée, indemnisation 865, 868 dommages-intérêts pour défaut de paiement fautif 867 fruits, restitution 862 indemnité de jouissance, non 866 procédure collective 863 restitution de la chose et des accessoires par l'acheteur 862 s. du prix par le vendeur 869 s. vendeur, obligations 869 s. Responsabilité contractuelle du vendeur pour inexécution de la délivrance 350 s. cas 350 clauses limitatives ou exclusives de responsabilité 353 préjudice 350 vente immobilière 352 vices cachés, action indemnitaire 634 s. V. Dommages-intérêts V. Responsabilité du fait des produits défectueux Responsabilité du fait des produits défectueux 748 s. action de la victime, délais 756 s. champ d'application 749 s. clauses exclusives ou limitatives de responsabilité, prohibition 762 s. dommages aux biens 763 dommages aux personnes 762 conditions 753 s. conformité du produit avec des règles impératives législatives ou réglementaires 759 dommages concernés 753 exclus, immeuble par nature 751 non causés par un défaut du produit, exonération 761 exonérations 758 s. conventionnelles, prohibition 762 s. légales 759 s. faute de la victime 761 législation directive européenne 741 L. 19 mai 1998 742, 746 s. personnes protégées 750 responsables 749 preuve causalité entre le dommage et le défaut du produit 754 s. du dommage 753 produit défectueux, notion 754 mise en circulation, nécessité 752 notion 751 régime 753 s. risque de développement 760 vendeur professionnel, responsabilité subsidiaire 749 Rétention (Droit de) 811 Retirement (Obligation de) V. Obligation de retirement Revendication défaut de paiement du prix, vente mobilière 815 s., 874 (renvoi) garantie du fait des tiers 433 procédure collective 816, 863 Risques clause de réserve de propriété 134 s. condition résolutoire 121 suspensive 104 incendie 17, 21 mise en demeure de livrer 22 vente à distance 20 vol 19 V. Transfert des risques Sécurité (obligation du vendeur professionnel) 741 s. avant loi du 19 mai 1998 sur la responsabilité des produits défectueux, autonomie par rapport aux obligations de garantie et d'information 744 s. législation directives européennes 741 interne 742 s. loi du 19 mai 1998 748 s. obligation de sécurité absorbée par la responsabilité du fait des produits défectueux 746 s. V. Responsabilité des produits défectueux Servitudes 708 accessoires de la chose vendue 263 garantie du fait des tiers 441, 447 s., 459 conventionnelle 523, 525 servitudes apparentes, exclusion 447 servitudes non apparentes conventionnelle 448 s. servitudes non apparentes légales ou administratives 450 s. servitudes non ædificandi 451 s. Société cession de parts, publicité 199 parts, vice caché 550 titres sociaux, nature de bien frugifère 788 Sous-acquéreur action en garantie des vices cachés contre son vendeur 589 action récursoire du vendeur intermédiaire 589 s. action en garantie des vices cachés contre un vendeur antérieur, le fabricant ou l'importateur 591 s., 623 clause de non-garantie 594 délai 594 exceptions opposables au sous-acquéreur 594 nature 593 régime 594 action en résolution contre vendeur originaire pour inexécution de la délivrance 339 garantie d'éviction 412 inexécution de la garantie du fait des tiers, restitution du prix 497 prix, paiement 791 s. publicité foncière 184 transfert de propriété, opposabilité aux tiers 184, 192 Taxe sur la valeur ajoutée 780 Terme (Vente à) 365 accomplissement de la formalité prévue pour le transfert de propriété dans le délai convenu défaut 73 refus 72 échéance incertaine 68 effets 69 s. publicité foncière 176 qualification 64 s. revente par vendeur avant l'échéance du terme 71 terme suspensif, distinction de condition suspensive 64 s., 86 transfert de propriété et des risques 62 s., 69 s. ventes concernées 62 Termites 546, 562, 582, 590, 646, 651 Terrain 77, 474 à bâtir 552, 708 cession contre remise d'un local à construire 234 contigu 403 obligation d'information du vendeur 708, 710 Tradition meubles corporels, tradition réelle 293 s. vente à distance 294 vente sur place 293 meubles corporels, tradition symbolique 295 s. marquage 296 remise d'un titre 297 meubles incorporels 300 Transfert de propriété 1, 4 s. chose de genre 27 s. V. Vente en bloc, Vente au poids, au compte ou à la mesure conventionnel 58 s. applications 128 s. techniques 61 s. délivrance, distinction 12, 203 dissociation du transfert des risques 123 s. clause particulière 124 s. condition résolutoire 121 s., 123 condition suspensive 104, 123 effets 13 s. immédiat 6 s., 9 s. aménagements conventionnels 58 s. corps certain 10 exceptions légales 25 s. ordre public, non 58 vente en bloc 10 livraison, distinction 12 produits naturels à venir 52 s. vente en libre service 54 s. V . Clause de réserve de propriété, Condition, Réméré (Vente à), Terme (Vente à), Transfert de propriété (opposabilité aux tiers), Vente de chose future (transfert de propriété), Vente d'immeuble à construire Transfert de propriété (opposabilité aux tiers) 168 s. vente immobilière 169 s. V. Publicité foncière vente de meuble corporel, conflit entre acquéreur a non domino et véritable propriétaire 189 s. clause de réserve de propriété 192, 194 gage 193 s. possession de bonne foi 189 s. vente de meuble corporel, conflit entre les deux acquéreurs d'un même bien 195 s. vente de meuble incorporel 197 s. Transfert des risques 1 chose de genre 27 s. V. Vente en bloc, Vente au poids, au compte ou à la mesure dissociation du transfert de propriété 123 s. V. Transfert de propriété immédiat 6 s., 15 s. aménagements conventionnels 58 s. exceptions légales 25 s. ordre public, non 58 tempéraments 21 s. vente à terme 70 V. Risques Troubles V. Garantie du fait personnel, Garantie du fait des tiers Usage (Droit d') 445 Usufruit 445 Valeurs mobilières 892 Véhicule accessoires de la vente 282 délivrance 293, 343 identité du véhicule délivré à celui vendu 208 s. normes administratives 216 qualités convenues 218, 220 usage recherché 222 à fabriquer, transfert de propriété 51 garantie du fait des tiers 470, 474 s. d'occasion, garantie des vices cachés conventionnelle 642 s. légale 577 s. paiement défaut, droit de rétention du vendeur 811 preuve 809 résolution pour défaut de paiement, indemnisation de la dépréciation liée à l'usage 865 ventes successives, garantie des vices cachés 577, 590, 592 vice 551 s., 560, 564, 566 Vendeur (obligations) 201 s. Vendeur professionnel animaux 687 action rédhibitoire 701 assimilation à vendeur de mauvaise foi 684, 687 atteints de maladies contagieuses 684 vice caché action indemnitaire de l'acheteur 637 s. clauses restrictives ou exclusives de garantie 652 s. V. Conseil (obligation du vendeur professionnel), Délivrance (Droit de la consommation), Information (obligation du vendeur), Sécurité (obligation du vendeur professionnel) Vente aléatoire, exclusion de la garantie des vices cachés 532 par autorité de justice, exclusion de la garantie des vices cachés 531 sans commande préalable 799 commerciale 766 s. avec faculté de restitution 116 s., 121 de meuble à fabriquer, transfert de propriété 48 s. V. Vente en bloc, Vente à distance, Vente au poids, au compte ou à la mesure Vente en bloc 10, 28 s. définition 28 s. prix 772 régime 30 s. transfert de propriété 30 s. des risques 32 Vente de chose future (transfert de propriété) 44 s. immeuble à construire 45 s. meuble à fabriquer 48 s. chose de genre 51 convention des parties 49 corps certain 50 produits naturels à venir 52 s. Vente à distance délivrance 294, 306, 308 risques 20 vente au poids, au compte ou à la mesure, individualisation de la chose 42 Vente d'immeuble à construire transfert de propriété 45 s. vente en l'état futur d'achèvement 47 vente à terme 46 vices cachés, régime particulier 534 (renvoi) Vente au poids, au compte ou à la mesure 33 s. définition 33 s. individualisation de la chose 37, 40 s. contradictoire 40 forme 43 unilatérale du vendeur 41 mesurage 40 s. perte fortuite avant individualisation, risques 38 régime 35 s. transfert de propriété et des risques 36 s. convention des parties 39 vente à distance 42 Ventes successives V. Sous-acquéreur Vice apparent 322, 324, 555 s., 561 s. Vice caché 555, 557 s. action en garantie des vices cachés 585 s. V. Action en garantie des vices cachés indemnitaire 634 s. V. Dommages-intérêts en réparation ou en remplacement de la chose 631 s. charge non déclarée, distinction 443 défaut de conformité cumul 228, 585 distinction 224 s., 229 droit de la consommation 378 définition 557 V. Vices cachés (Garantie contre les) Vices cachés (Garantie contre les) 529 s. droit de la consommation, option entre garantie des vices cachés et garantie de conformité 535 ventes exclues 531 s. ventes soumises à un régime particulier 534 s. V. Animaux (garantie des vices cachés), Vices cachés (garantie conventionnelle), Vices cachés (garantie légale) Vices cachés (garantie conventionnelle) 536, 640 s. clauses contrevenant à une obligation de police administrative 657 s. clauses exclusives ou limitatives 645 s. acceptation par l'acquéreur 647 exceptions à la validité 648 s. objet 645 validité de principe 646 s. vendeur méconnaissant ses obligations d'information 651 vendeur profane de mauvaise foi 649 s. vendeur professionnel 652 s. vente immobilière 646, 650 s. vente par vendeur professionnel à acheteur professionnel 655 s. clauses extensives 641 s. produits de luxe 644 validité 641 véhicules d'occasion 642 s. clauses mixtes 640, 658 s. Vices cachés (garantie légale) 538 s. accessoires de la chose vendue 548 acheteur profane 559, 560 s. vice apparent, exclusion 562 acheteur professionnel 559, 563 s. compétences techniques, présomption 564 s. définition 563 dol du vendeur 568 même spécialité que le vendeur 564 s. vice indécelable 569 s. antériorité du vice 580 s. appréciation 582 preuve de l'antériorité 581 s. transfert de propriété différé 580 vente commerciale 580 bonne foi de l'acheteur 571 s. preuve contraire 572 bonne foi du vendeur, indifférence 574 chose dangereuse 576 nature 575 s. d'occasion 577 s. conditions 539 s. défaut de la chose 545 s. affectant l'usage de la chose 550 antériorité 580 s. appréciation de la gravité 552 s. caractère occulte 555, 557 s. gravité 551 s. preuve 545 vente immobilière 546 vente mobilière 547 défaut de conformité, cumul avec vice caché 585 dol du vendeur 568 effets 611 s. élément d'équipement 548 exclusion 531 s. convention des parties 536. V. Vices cachés (garantie conventionnelle) régimes particuliers 534 s. tenant à l'usage de la chose 541 s. ventes exclues 531 s. historique 530 législation 529 mise en oeuvre 585 s. usage de la chose, incidence 541 s. défaut affectant l'usage 550 mauvaise utilisation, exclusion 543 s. usage particulier donné à la chose 554 usure normale ou utilisation prolongée, exclusion 542 vice caché 555, 557 s. définition 557 preuve 558 vice du consentement, cumul avec vice caché 585 V. Action en garantie des vices cachés Vice du consentement cumul avec vice caché 585 délivrance, inexécution 327 garantie des vices cachés, dol du vendeur 568 Vin 34 Mise à jour 79, 128, 140 s., 177 s. Simplification du droit. Réméré. - Le terme de « réméré » a été supprimé par la loi n o 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit : à l'article 1659, les mots : « ou de réméré » sont supprimés ; à l'article 1662, les mots : « de réméré » sont remplacés par les mots : « en rachat »; aux articles 1664, 1667 et 1668, au premier alinéa de l'article 1671 et aux premier et deuxième alinéas de l'article 1672, le mot : « réméré » est remplacé par le mot : « rachat ». 98. Illustration d'une condition suspensive dont l'accomplissement est empêché par le débiteur. - Cession d'un office notarial conclue sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt et d'une garantie : le cessionnaire avait commis l'erreur d'adresser lui-même une copie de la lettre destinée au cédant faisant part de ses inquiétudes à la chambre départementale des notaires, et il n'avait ni signé ni communiqué aux instances professionnelles la convention que le cédant était prêt à signer pour faire face à ses inquiétudes (Civ. 1 re , 6 mai 2010, n o 09-14.690 , Dalloz actualité, 25 mai 2010, obs. Guiomard). Demande de prêt non conforme au contrat : condition réputée accomplie. - Les particuliers qui s'engagent à acquérir un bien immobilier sous condition suspensive d'obtention d'un prêt et effectuent une demande au nom d'une société civile immobilière en cours de constitution, sans avoir exercé la faculté de substitution prévue à l'acte, ne justifient pas d'une demande de prêt conforme aux caractéristiques stipulées dans l'acte sous seing privé. Dès lors, en application de l'article 1178 du code civil, la condition est réputée accomplie (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 12-13.796 , Dalloz actualité, 2 avr. 2013, obs. Garcia). 129 s. Clause de réserve de propriété et procédures collectives. - Bibliographie. – SOUWEINE, Revendication du prix de revente par le bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété : à la recherche d'une cohérence en droit des entreprises en difficulté, D. 2011. 2617 . Clause de réserve de propriété : action en paiement contre le sous-acquéreur. - L'action en paiement exercée par le vendeur initial à l'encontre d'un sous-acquéreur de biens vendus avec clause de réserve de propriété s'analyse en une action personnelle et non en une action réelle. Viole, dès lors, les articles L. 622-7, L. 622-21, L. 624-18, L. 631-14 et L. 631-18 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, la cour d'appel qui accueille la demande en paiement du prix impayé formée par le vendeur initial à l'encontre du sous-acquéreur en liquidation judiciaire, alors que l'action tendait au paiement d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de ce dernier (Com. 6 oct. 2009, n o 08-15.048 , D. 2009. 2482, obs. Lienhard ; D. 2009. Chron. 2580 ; JCP 2009. 566, note Dallemagne). 135. Vente sous réserve de propriété : obligation de conservation de la chose est une obligation de moyens. - Il est admis, en cas de vente sous réserve de propriété, que c'est le vendeur qui doit supporter les risques de perte de la chose vendue, tant que le prix n'a pas été intégralement payé par l'acheteur, car ils sont liés à la propriété de la chose, en application de l'adage res perit domino. Cela ne signifie pas pour autant que l'acheteur auquel la chose vendue a été livrée et qui se trouve désormais physiquement dans ses locaux est dédouané de toute responsabilité. Tout comme le locataire et le dépositaire, il est tenu d'une obligation de conservation, que la jurisprudence qualifie logiquement d'obligation de moyens, puisqu'elle la fonde sur l'article 1137, alinéa 1 er , du code civil, texte qui exige simplement de l'acheteur qu'il apporte à la chose acquise « tous les soins d'un bon père de famille ». Cette solution a d'abord été posée par la jurisprudence, dans la célèbre (en son temps) affaire Mécarex, à propos de l'hypothèse d'un matériel péri par incendie dans les locaux de l'acquéreur (Com. 19 oct. 1982, Bull. civ. IV, n o 321 ; D. 1983. IR 482, obs. Audit ; RTD civ. 1984. 515, obs. Huet). Elle l'étend aujourd'hui, sans surprise, à celle de la chose volée. L'enjeu de cette qualification d'obligation de moyens se situe, comme souvent, sur le terrain de la preuve : le vendeur, qui tente d'obtenir le complet paiement du prix – ce à quoi tente de s'opposer l'acheteur – devra établir, outre que la chose commandée a été effectivement livrée, ce qui est aisé, que l'acquéreur a manqué à son obligation de conservation, ce qui l'est moins (Com. 26 mai 2010, n o 09-66.344 , Dalloz actualité, 4 juin 2010, obs. Delpech). 189 s., 874. Réforme de la prescription en matière civile. - La loi n o 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (D. 2008. Actu. Lég. 1614 ; RDI 2008. 368, obs. Malinvaud ; AJ fam. 2008. 291, obs. Bardout ) a modifié la numérotation de l'article 2279 du code civil qui est devenu l'article 2276. Une nouvelle section intitulée « De la prescription acquisitive en matière mobilière » fait son entrée dans le code civil, comprenant les seuls articles 2279 et 2280 (auparavant intégrés dans la section « De quelques prescriptions particulières »), qui deviennent respectivement les articles 2276 et 2277. 202 s. Inexécution de l'obligation de délivrance. Délivrance à un tiers. - Le vendeur manque à son obligation de délivrance en délivrant la chose vendue non à l'acquéreur, mais à un tiers (Civ. 1 re , 12 mai 2008, n o 10-18.045, Dalloz actualité, 24 mai 2011, obs. Guiomard). 217 s. Obligation de délivrance conforme aux stipulations contractuelles. Dépollution des biens cédés. - Le bien vendu étant présenté dans l'acte de vente comme dépollué, les vendeurs sont tenus de livrer un bien conforme à cette caractéristique (Civ. 3 e , 29 févr. 2012, n o 11-10.318 , Dalloz actualité, 23 mars 2012, obs. Kebir). 222, 254. Appréciation de la gravité du vice au regard de l'usage convenu. - Le vice dont la cour relève l'existence doit suffire à rendre la chose vendue impropre à l'usage auquel l'acquéreur peut sérieusement s'attendre (vente de deux véhicules Volkswagen Iltis, anciens véhicules militaires légers réformés de l'armée allemande : Civ. 1 re , 19 mars 2009, n o 08-12.657 ). 228. Délivrance non conforme et vice caché. Cumul de qualifications. - Cassation pour défaut de motifs de l'arrêt qui, pour débouter un acquéreur de sa demande, se contente d'affirmer que l'action fondée sur l'obligation de délivrance conforme se confond avec celle fondée sur l'existence d'un vice caché, et qu'elle est partant soumise au bref délai de l'article 1648 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n o 2005-136 du 17 févr. 2005, sans constater que la garantie des vices cachés constituait l'unique fondement possible de l'action de l'acquéreur (Civ. 3 e , 25 janv. 2012, n o 10-27.357 , Dalloz actualité, 13 févr. 2012, obs. Forest). 262. Naissance du droit aux fruits et obligation de délivrance de la chose. - Sauf convention contraire, tous les fruits de l'immeuble appartiennent à l'acquéreur depuis le jour de la vente, peu important que celle-ci ait fait l'objet d'une régularisation postérieure (Civ. 3 e , 26 mars 2014, n o 13-10.984 , Dalloz actualité, 10 avr. 2014, obs. Le Rudulier). 310. Silence des parties sur la date de la délivrance. Délai raisonnable. - À défaut de délai convenu, il appartient aux juges du fond, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation, de déterminer le délai raisonnable dans lequel le vendeur doit délivrer la chose vendue (Civ. 1 re , 26 janv. 2012, n o 10-27.338 , Dalloz actualité, 9 févr. 2012, obs. Guiomard. – Com. 12 nov. 2008, n o 07-19.676 ). 339. Chaîne de contrats : exercice de l'action résolutoire du sous-acquéreur contre le vendeur initial. - L'action résolutoire résultant d'un même défaut de conformité se transmet avec la chose livrée, de sorte qu'elle peut être exercée par le sous- acquéreur à la fois contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire, à l'égard duquel le sous-acquéreur dispose d'une action directe contractuelle (Civ. 1 re , 20 mai 2010, n o 09-10.086 , Dalloz actualité, 28 mai 2010, obs. Delpech ; JCP 2010. Actu. 595). Cet arrêt a trait à une hypothèse bien connue en jurisprudence : celle des chaînes de contrats homogènes translatifs de propriété ou, pour faire simple, celle des ventes successives. Il est admis de longue date que les différentes actions offertes au premier acheteur contre le vendeur originaire (notamment lorsque cet acheteur a à se plaindre d'une défectuosité de la chose achetée) sont transmises aux acheteurs successifs de la chose, en tant qu'elles constituent un accessoire de celle-ci. Il s'agit d'actions contractuelles, alors même qu'il n'existe aucun lien de droit entre l'auteur (le sous- acquéreur de la chose) et le destinataire (le vendeur originaire) de celles-ci. La Cour de cassation a d'abord admis cette « action contractuelle directe », selon la terminologie employée, à propos de l'action en garantie de l'acheteur, garantie des vices cachés (Civ. 1 re , 9 oct. 1979, Bull. civ. I, n o 241 ; D. 1980. IR 222, note Larroumet. – Civ. 1 re , 20 juin 1995, Bull. civ. I, n o 275 ; D. 1995. IR 188 ), voire garantie d'éviction (Civ. 3 e , 28 mars 1990, Bull. civ. III, n o 93 ; D. 1990. IR 96 ). Puis elle l'a étendue à l'action fondée sur le manquement du vendeur initial à son obligation de délivrance, notamment pour défaut de conformité de la chose livrée (Civ. 1 re , 22 févr. 2000, CCC 2000, n o 91, note Leveneur. – V. égal. Civ. 1 re , 6 févr. 2001, Bull. civ. I, n o 22 ; D. 2001. Somm. 1135, obs. Delebecque ; RTD com. 2001. 413, obs. Loquin ; Rev. crit. DIP 2001. 522, obs. Jault-Seseke ; JCP 2001. II. 10567, note Legros ; JCP E 2001. 1238, note Mainguy et Seube ; Defrénois 2001. 708, obs. Libchaber ; CCC 2001, n o 82, note Leveneur, à propos de la transmission de la clause compromissoire insérée dans le contrat de vente initial, jugée opposable au sous-acquéreur). Le présent arrêt se situe dans la même veine et réaffirme avec une particulière netteté la transmission d'une telle action au sous-acquéreur (encore faut-il que le défaut de conformité dont se prévaut ce dernier contre le vendeur initial soit le même que celui qu'aurait pu invoquer le vendeur intermédiaire contre ce même vendeur, ce qui suppose que ledit défaut soit contemporain de la première vente), à propos de l'action résolutoire, sanction possible d'un tel manquement expressément prévue par l'article 1610 du code civil. 343 s. Vente : relaxe du délit de délaissement et résolution du contrat pour inexécution. - Le délit de délaissement supposant la volonté d'abandonner définitivement la victime, la relaxe n'empêche pas que les manquements contractuels puissent être constatés au plan civil (Civ. 3 e , 10 avr. 2010, n o 08-21.346, Dalloz actualité, 10 mai 2010, obs. Chenu). Si la question de la distinction entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale a nourri les discussions notamment autour de la dualité des fautes civiles et pénales (V., sur ce point, le TOURNEAU, Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz Action, 2008/2009, n os 564 s.), il faut avouer que la distinction entre l'infraction pénale et l'inexécution contractuelle a plus modestement retenu l'attention de la doctrine. L'arrêt rapporté vient rappeler que l'autorité sur le civil de la chose jugée au criminel peut aussi être invoquée en matière contractuelle lorsque les circonstances sont favorables. Une vente avec charge avait été conclue moyennant l'obligation pour l'acquéreur de s'occuper du vendeur, c'est-à-dire de lui fournir tous les soins et services nécessaires à son confort. Venant aux droits de son auteur, la fille du vendeur assigna l'acheteur en résolution de la vente, en raison de diverses inexécutions, alors même que l'acquéreur avait été relaxé du délit de délaissement prévu aux articles 223-3 et 223-4 du code pénal. La cour d'appel avait pourtant prononcé la résolution du contrat aux torts de l'acquéreur, qui forma un pourvoi en cassation. Au soutien de son pourvoi, l'acquéreur arguait de sa relaxe et de l'autorité de la chose jugée au criminel. Cette règle « oblige le juge civil à ne pas méconnaître ce que le juge criminel aura décidé quant à l'existence du fait, sa qualification légale, la participation matérielle du défendeur » (Civ. 30 déc. 1929, DP 1930. 41, note Savatier. – V. TERRÉ, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, 10 e éd., 2009, Dalloz, n o 879). Pourtant, les fautes pénales et civiles sont différentes, ce qui permet donc une condamnation au civil après une relaxe au pénal. En l'occurrence, la Cour de cassation relève que le délit de délaissement est volontaire (sur ce point, V. Rép. pén., v o Abandon d'enfant ou de personne hors d'état de se protéger, spéc. n os 13-14), contrairement à ce que pourrait laisser entendre son classement parmi les infractions de mise en danger. Le délit de délaissement doit donc être entendu comme une action délibérée commise en connaissance de cause. Là repose, en l'espèce, la distinction entre l'infraction pénale et l'inexécution contractuelle. En effet, que l'obligation contractée par le débiteur soit qualifiée de moyens ou de résultat, son intention n'est jamais exigée pour obtenir la résolution du contrat (le TOURNEAU, op. cit., n os 6026 s.). Dès lors, la relaxe du débiteur du chef de délaissement ne présuppose pas du sort de l'action civile en résolution. La Cour de cassation approuve dès lors les juges du fond d'avoir prononcé la résolution au regard des inexécutions du débiteur, et nonobstant sa relaxe. 361 s. Remise en état de la chose par le vendeur. Exclusion de l'action en garantie. - L'acheteur d'une chose comportant un vice caché qui accepte que le vendeur procède à la remise en état de ce bien ne peut plus invoquer l'action en garantie dès lors que le vice originaire a disparu mais peut solliciter l'indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait de ce vice (Com. 1 er févr. 2011, n o 10-11.269 , Dalloz actualité, 17 févr. 2011, obs. Delpech). 374 s. Loi Hamon. Information relative à la garantie. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) introduit dans le code de la consommation un article L. 133-3 ainsi rédigé : « Les conditions générales de vente applicables aux contrats de consommation mentionnent : 1 o Selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie, l'existence, les conditions de mise en œuvre et le contenu de la garantie légale de conformité et de la garantie relative aux défauts de la chose vendue, dues par le vendeur ; 2 o Le cas échéant, l'existence d'une garantie commerciale et d'un service après-vente ». Garantie légale de conformité. Prise en charge par le vendeur des frais d'enlèvement du bien non conforme. - Lorsqu'un bien de consommation non conforme, qui a été installé, de bonne foi, par le consommateur conformément à sa nature et à l'usage recherché, est mis dans un état conforme par remplacement, le vendeur est tenu soit de procéder lui-même à l'enlèvement de ce bien du lieu où il a été installé et d'y installer le bien de remplacement, soit de supporter les frais nécessaires à cet enlèvementt (CJUE 16 juin 2011, aff. C-65/09 et C-87/09, Dalloz actualité, 4 juill. 2011, obs. Delpech). 377. Loi Hamon. Définition du consommateur. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) marque l'introduction dans la loi française d'une définition du consommateur, transposition de celle retenue par la directive n o 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs (art. 2). Le code de la consommation s'ouvre désormais sur un article préliminaire selon lequel « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » (V. PAISANT, Vers une définition générale du consommateur dans le code de la consommation, JCP 2013, n o 589). 382, 584. Loi Hamon. Allongement du délai d'apparition des défauts de conformité. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) a allongé le délai de la présomption d'antériorité du défaut qui passe de six à vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, sauf pour les biens vendus d'occasion (C. consom., art. L. 211-7 ; l'entrée en vigueur de cette modification étant repoussée au 18 mars 2016). 395 s. Loi Hamon. Garantie commerciale. - La loi n o 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JO 18 mars) a apporté quelques modifications à la garantie commerciale. L'article L. 211-15 est désormais rédigé ainsi : « La garantie commerciale s'entend de tout engagement contractuel d'un professionnel à l'égard du consommateur en vue du remboursement du prix d'achat, du remplacement ou de la réparation du bien, en sus de ses obligations légales visant à garantir la conformité du bien. – La garantie commerciale fait l'objet d'un contrat écrit, dont un exemplaire est remis à l'acheteur. – Le contrat précise le contenu de la garantie, les modalités de sa mise en œuvre, son prix, sa durée, son étendue territoriale ainsi que le nom et l'adresse du garant et reproduit l'article L. 211-16. – En outre, il mentionne de façon claire et précise que, indépendamment de la garantie commerciale, le vendeur reste tenu de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 211-4 à L. 211-13 du présent code et de celle relative aux défauts de la chose vendue, dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil. Les articles L. 211-4, L. 211-5 et L. 211-12 du présent code ainsi que l'article 1641 et le premier alinéa de l'article 1648 du code civil sont intégralement reproduits. – En cas de non- respect de ces dispositions, la garantie demeure valable. L'acheteur est en droit de s'en prévaloir ». 409 s. Bonne foi. Garantie d'éviction due par le cédant d'un produit contrefait. - La garantie d'éviction est due par tout cédant d'un droit de propriété, corporel ou incorporel, sauf à établir que le cessionnaire a participé aux actes de contrefaçon en mettant en vente un produit qu'il savait contrefait (Civ. 1 re , 13 mars 2008, n o 06-20.152 ). 443, 448 et 546. Vente immobilière. Servitude non apparente et vice caché. - Une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , D. 2013. 705 ; Dalloz actualité, 12 mars 2013, obs. Le Rudulier). 546. Vente immobilière : déclaration de servitude non apparente. - L'absence de référence lors de la vente d'un bien immobilier à l'existence d'une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché mais relève des dispositions de l'article 1638 du code civil (Civ. 3 e , 27 févr. 2013, n o 11-28.783 , Dalloz actualité, obs. Le Rudulier). 551 s. Garantie contre les vices cachés. Conditions. Atteinte à l'usage du bien. - MONACHON-DUCHÊNE, Le vice extrinsèque de la chose n'est pas un vice caché, JCP 2007. I. 199. - Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui retient que le défaut de raccordement d'un immeuble au réseau d'assainissement collectif constitue, en raison de sa non-conformité aux règlements d'urbanisme, un vice caché de la chose vendue, sans caractériser une atteinte à l'usage du bien (Civ. 3 e , 28 mars 2007, n o 06-12.461 , Bull. civ. III, n o 50). 560 s. Garantie contre les vices cachés. Caractère occulte du défaut. Acheteur profane. - Il ne peut être exigé d'un acheteur profane qu'il recoure aux services d'un homme de l'art pour se convaincre de l'absence de vice de l'immeuble (Civ. 3 e , 9 nov. 2011, n o 10-21.052, Dalloz actualité, 28 nov. 2011, obs. Forest. – V., déjà, Cass., ass. plén., 27 oct. 2006, D. 2006. AJ 2812, obs. Gallmeister ; RDI 2007. 256, obs. Trébulle ; JCP N 2007. II. 1101, note Leveneur. 563 s. Acquéreur titulaire d'un droit de préemption. Vice caché (non). - Ayant relevé que l'acquéreur initial avait été informé de la pollution du terrain par un rapport annexé à l'acte sous seing privé de vente et qu'aucune obligation n'imposait aux venderesses d'annexer ce « compromis » à la déclaration d'intention d'aliéner et que la commune disposait de services spécialisés et de l'assistance des services de l'État, une cour d'appel a pu retenir que la commune qui s'était contentée des documents transmis ne pouvait se prévaloir d'une réticence dolosive ni de l'existence d'un vice caché (Civ. 3 e , 7 nov. 2012, n o 11-22.907 ). 572 s. Garantie contre les vices cachés. Connaissance du vice par l'acquéreur. Présence de termites. - Les acheteurs informés de la présence de termites ne peuvent invoquer la garantie des vices cachés (Civ. 3 e , 30 janv. 2008, n o 07-10.133 , Defrénois 2008. Actu. 485). 574. Vice caché : la clause de non-garantie est réservée au vendeur de bonne foi. - Au visa de l'article 1643 du code civil, la Cour de cassation rappelle que le vendeur qui, ayant connaissance d'un vice lors de la conclusion du contrat, stipule qu'il ne le garantira pas, est tenu à garantie nonobstant cette clause (Civ. 3 e , 16 déc. 2009, n o 09-10.540 , Dalloz actualité, 13 janv. 2010, obs. Forest). La solution, bien établie, se déduit d'une interprétation a contrario de cette disposition (Civ. 3 e , 28 mars 2007, Bull. civ. III, n o 49 ; D. 2007. AJ 1139 ; RDI 2007. 330, obs. Trébulle . – Civ. 3 e , 19 nov. 2008, D. 2009. AJ 297, obs. Prigent . – Civ. 3 e , 8 avr. 2009, D. 2009. AJ 1206 ; CCC 2009, n o 186, obs. Leveneur ; RLDC 2009/61, n o 3452, obs. Maugéri) : la clause élusive des vices cachés ne joue que si le vendeur est de bonne foi. En l'espèce, le fait que le vendeur ait transmis l'état mentionnant la présence de parasites à son notaire n'était pas de nature à remettre en cause sa mauvaise foi, dès lors que cette simple transmission prouvait sa connaissance du vice. 579. Exigence de diligence accrue de l'acquéreur. Navire d'occasion. Condition non prévue par la loi. - Cassation, pour violation des article 1641 et 1642 du code civil, de l'arrêt d'appel qui ajoute à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas en énonçant, pour débouter l'acquéreur de ses demandes, qu'il appartenait à ce dernier, quel que soit son niveau de qualification, de faire procéder aux essais nécessaires et de prendre toute initiative utile pour s'assurer de l'absence de vice affectant les moteurs, seule une sortie en mer, en présence de techniciens, étant de nature à établir ces vices, ce qui, compte tenu du prix du navire, constituait une précaution élémentaire ; que les vendeurs étaient donc fondés à prétendre que les vices affectant le moteur babord n'étaient pas cachés, mais apparents, dès lors qu'il appartenait à l'acquéreur d'essayer le navire acheté (Civ. 1 re , 26 sept. 2012, n o 11-22.399 , Dalloz actualité, 17 oct. 2012, obs. Kilgus). 629. Action estimatoire et préjudice indemnisable. - La restitution consécutive à l'action estimatoire ne constitue pas par elle- même un préjudice indemnisable ouvrant droit à réparation contre le notaire rédacteur de l'acte (Civ. 3 e , 8 avr. 2009, n o 07- 19.690 , D. 2009. 1356, obs. Forest ). 635. Autonomie de l'action en réparation du préjudice. - La recevabilité de l'action en réparation du préjudice éventuellement subi du fait d'un vice caché n'est pas subordonnée à l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire de sorte que cette action peut être engagée de manière autonome (Com. 19 juin 2012, n o 11-13.176 , Dalloz actualité, 10 juill. 2012, obs. Fleuriot). 637 s. Qualification de professionnel. - Celui qui se livre de façon habituelle à des opérations d'achat et de revente de véhicules d'occasion dont il tire profit acquiert la qualité de vendeur professionnel (Civ. 1 re , 30 sept. 2008, n o 07-16.876 ). 642 s. Vente de véhicule : recherche du vice apparent dans le contrôle technique. - Une voiture tombe en panne le lendemain de son acquisition, bien que les essais réalisés la veille se soient correctement déroulés. L'acheteur sollicite « l'annulation » de la vente pour vices cachés, demande accueillie par la juridiction de proximité, mais rejetée pas le Cour de cassation, pour qui « le rapport établi à la suite d'un tel contrôle [technique] peut révéler, par des énonciations claires et compréhensibles pour tout acquéreur, l'existence de vices rendus de la sorte apparents » (Civ. 1 re , 19 nov. 2009, n o 08-14.460 , Dalloz actualité, 27 nov. 2009, obs. Guiomard). Il en résulte que le vendeur n'a pas à garantir les vices qui sont déjà relevés dans le contrôle technique. Il convient alors de rechercher si les vices relevés dans le rapport d'expertise réalisé après la panne, et établissant que le véhicule était impropre à sa destination, n'étaient pas également révélés par les défauts mentionnés par le contrôle technique (et alors non pris en charge par le vendeur ainsi dédouané par le caractère apparent du vice). 648 s. Mérule : la mauvaise foi du vendeur n'est pas divisible. - La connaissance de la présence de mérule dans l'immeuble oblige le vendeur de mauvaise foi à réparer tous les désordres imputables à ce vice. La mauvaise foi est donc indivisible… L'acheteur doit savoir qu'il achète un bien touché par le mérule, à défaut il doit être garanti de tous les désordres qui procèdent du mérule dissimulé en un endroit. Sur ce point, au vu des articles 1643 et 1645 du code civil, l'arrêt de la cour de Douai qui limitait la condamnation du vendeur est cassé (Civ. 3 e , 19 nov. 2008, n o 07-16.746 , D. 2009. 297, obs. Prigent ). Insecte xylophage : la mauvaise foi du vendeur n'est pas divisible. - La connaissance de la présence d'insectes xylophages dans l'immeuble oblige le vendeur de mauvaise foi à réparer tous les désordres imputables à ce vice (Civ. 3 e , 14 avr. 2010, n o 09- 14.455 , Dalloz actualité, 7 mai 2010, obs. Prigent). 652. Vente d'immeuble : notion de « vendeur professionnel ». - Doit être assimilé à un professionnel, présumé connaître les vices de construction affectant le bien, le vendeur profane ayant lui-même conçu et installé l'objet affecté du vice. Par conséquent, il ne peut bénéficier de l'application d'une clause d'exclusion de garantie des vices cachés contenue dans l'acte de vente (Civ. 3 e , 10 juill. 2013, n o 12-17.149 , Dalloz actualité, 6 sept. 2013, obs. Kebir). 663. Vente d'animaux domestiques. Option du consommateur entre les règles du code rural et celles du code de la consommation. - Il résulte de l'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime que les dispositions qui régissent la garantie légale de conformité sont applicables aux ventes d'animaux conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur, sans préjudice de l'application des articles L. 211-1 à L. 211-15, L. 211-17 et L. 211-18 du code de la consommation (Civ. 1 re , 12 juin 2012, n o 11-19.104 , Dalloz actualité, 10 juill. 2012, obs. Fleuriot). 705 s. Obligation d'information du vendeur. Installation classée. - L'acquéreur qui sollicite la restitution d'une partie du prix sur le fondement de l'article L. 514-20 du code de l'environnement doit rapporter la preuve que les installations qui se trouvent sur son terrain étaient bien soumises à autorisation et non seulement à déclaration (Civ. 3 e , 20 juin 2007, n o 06-15.663 ). 711 s. Obligation de conseil du vendeur professionnel. Obligation de se renseigner pour informer. - Il incombe à la société commerciale Citroën, vendeur professionnel, de prouver qu'elle s'est acquittée de son obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de l'acquéreur du véhicule afin d'être en mesure de l'informer, au regard de la nature et de l'importance des réparations effectuées sur ce véhicule, de l'adéquation de celui-ci à l'utilisation qu'il projetait et aux qualités qu'il en attendait (Civ. 1 re , 11 déc. 2013, n o 12-23.372 ). 829 s. Résolution pour défaut de paiement. - Résolution d'une vente immobilière pour défaut de paiement de la rente en application de la clause résolutoire. Dès lors que le prix de la vente a été converti en rente viagère, la rente n'est qu'une modalité de paiement du prix. Les acquéreurs ne justifiant pas du paiement des arrérages impayés dans le délai imparti, la clause résolutoire pour défaut de paiement du prix doit s'appliquer (Cass., ass. plén., 4 avr. 2008, n o 07-14.523 , D. 2008. AJ 1143 ). 843 s. Licéité de la clause de renonciation anticipée à la résolution du contrat pour défaut de paiement du prix. - L'article 1184 du code civil n'étant pas d'ordre public, un contractant peut renoncer par avance au droit de demander la résolution judiciaire du contrat, dès lors que la clause, rédigée de manière claire, précise, non ambiguë et compréhensible pour un profane, était non équivoque (Civ. 3 e , 3 nov. 2011, n o 10-26.203 , Dalloz actualité, 25 nov. 2011, obs. Kebir). Copyright 2014 - Dalloz - Tous droits réservés. 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